CA Montpellier, 4e ch. civ., 16 octobre 2025, n° 24/03388
MONTPELLIER
Autre
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 16 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/03388 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJLS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 30 MAI 2024
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 14]
N° RG 21/04897
APPELANT :
Monsieur [U] [R]
né le [Date naissance 3] 1939 à [Localité 16] ( ALGÉRIE )
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Estelle TEMPLET TEISSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ayant pour avocat plaidant, Maitre Durand-Pirotte Elisabeth, avocate au barreau de Nimes.
INTIMES :
Monsieur [E] [R]
né le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 15]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Mandine CORTEY LOTZ de la SELARL CORTEY LOTZ & MARCHAL AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Maitre Pouget Jérémy, avocat au barreau de Montpellier.
Madame [D] [R] [J]
née le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Mandine CORTEY LOTZ de la SELARL CORTEY LOTZ & MARCHAL AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué à l'audience par Maitre Pouget Jérémy, avocat au barreau de Montpellier.
Ordonnance de clôture du 13 Août 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2025,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Philippe BRUEY, Conseiller
Mme Marie-José FRANCO, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Maryne BONGIRAUD
ARRET :
- Contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Maryne BONGIRAUD, Greffière placée
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
1- Mme [N] [R] est décédée le [Date décès 8] 2014, laissant pour lui succéder son époux M. [U] [R], et quatre de leurs enfants, dont M. [E] [R].
Les ayants droit ont vendu la maison familiale au prix de 320 000 €, réparti entre M. [U] [R] à hauteur de 236 150, 33 € et les quatre enfants qui ont reçu la somme de 20 094 € chacun.
2- Par acte du 27 juillet 2017, M. [E] [R] et son épouse Mme [D] [J] ont acquis un appartement à [Localité 13], ainsi qu'un garage et une place de parking au prix total de 275 000 €. Cette somme a été payée à concurrence de 150 000 € au moyen d'un prêt consenti par M. [U] [R] suivant reconnaissance de dette du 16 juillet 2017.
3- M. [U] [R] aurait appris que contrairement à sa croyance, il n'était pas propriétaire de cet appartement, c'est dans ce contexte que, par acte d'huissier du 17 novembre 2021, il a assigné M. [E] [R] et Mme [J] devant le tribunal judiciaire de Montpellier en nullité de la reconnaissance de dettes pour vices du consentement et remboursement de la somme de 111 000 € au titre de prélèvements et détournements de fonds opérés sur sa carte bleue.
4- Par jugement contradictoire du 30 mai 2024, le tribunal judiciaire de Montpellier a :
- Débouté M. [U] [R] de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de M. [E] [R] et Mme [J],
- Condamné M. [U] [R] à payer à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 3 000 € au titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné M. [U] [R] aux dépens.
5- M. [U] [R] a relevé appel de ce jugement le 1er juillet 2024.
PRÉTENTIONS
6- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 31 juillet 2025, M. [U] [R] demande en substance à la cour, au visa des articles 1100, 1100-1, 1101, 1128, 1112-1, 1137, 1140, 1143, 1178, 1240 et 1353 du code civil, de :
- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par M. [U] [R],
- Rejeter toute demande d'irrecevabilité présentée par les intimés
- Accueillir toutes les demandes de l'appelant
- Infirmer la décision du 30 mai 2024 en ce qu'elle a débouté M. [U] [R] de toutes ses demandes de condamnation de M. [E] [R] et Mme [J] et l'a condamné à payer à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts et 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Statuant à nouveau,
- Prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019,
- Prononcer la nullité du contrat de prêt pour violation de l'information prévue par les dispositions de l'article 1112-1 du code civil,
- A défaut, prononcer la nullité du contrat de prêt pour défaut de consentement pour violation les dispositions de l'article 1128 du code civil,
- A défaut, prononcer la nullité du contrat de prêt pour vices du consentement et en application des dispositions des articles 1137, 1140 et 1143 du Code civil,
- En tout état de cause, confirmer que la créance de M. [U] [R] d'un montant de 150 000 € est justifiée et non contestée.
- Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toute demande de compensation infondée en droit et en fait,
- Ordonner la restitution des fonds dans les conditions prévues aux dispositions de l'article 1352-6 et 1352-7 du code civil,
- Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] des sommes suivantes, outre intérêts majorés et capitalisés conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1343-2 du Code civil et L313-3 du code monétaire et financier jusqu'à parfait paiement :
- 150 000 € à compter du 18 juillet 2017 jour du versement
- à titre de réparation du préjudice subi pour abus de faiblesse et détournement et utilisation abusive de la carte bleue de M. [U] [R], la somme de 110 000 €,
- 40 000 € au titre des fonds détenus dans le coffre qu'ils n'ont pas restitués
- 30 000 € en réparation des préjudices infligés à M. [U] [R]
- 6 013€ en remboursement de la somme reçue en exécution du jugement rendu
- 6 117,11 € à parfaire
- Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toutes demandes, fins et conclusions contraires,
- Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] d'une somme de 7 000 € au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraint de supporter en première instance et en appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 juillet 2025, M. [E] [R] et Mme [J] demandent en substance à la cour, au visa des articles 9 et 564 du Code de procédure civile, 1128, 1137, 1140, 1143, et 1240 du Code civil, de :
' A titre liminaire :
- Prononcer l'irrecevabilité des demandes nouvelles de M. [U] [R], formulées pour la première fois devant la cour d'appel, lesquelles sont les suivantes :
' Prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour violation de l'information prévue par les dispositions de l'article 1112-1 du code civil
A défaut
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour défaut de consentement pour violation les dispositions de l'article 1128 du code civil
A défaut
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour vices du consentement 1128, du code civil et en application des dispositions des articles 1137,1140, 1143
' Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toute demande de compensation infondée en droit et en fait
' Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] d'une somme de 6 117, 11€ à parfaire outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation en date du 17 novembre 2021, majorés et capitalisés conformément aux dispositions des articles 1231-6 du Code civil 1343-2 du Code civil et L313-3 du code monétaire et financier jusqu'à parfait paiement
' Au fond :
- Confirmer le jugement du 30 mai 2024 en toutes ses dispositions,
- Débouter M. [U] [R] de l'intégralité de ses demandes, plus amples ou contraires,
- Condamner M. [U] [R] à verser à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner M. [U] [R] aux entiers dépens d'appel.
7- Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 août 2025.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
8- Selon l'article 564 du code de procédure civile,
"A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait."
Selon l'article 565 du même code,
"Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent."
Selon l'article 566 du même code,
"Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire."
9- Au visa de l'article 564 précité, les intimés opposent l'irrecevabilité d'un ensemble de prétentions nouvellement présentées à hauteur d'appel par M. [U] [R] qui poursuit désormais la nullité non d'une reconnaissance de dette mais celle d'un prêt et qui ajoute une demande indemnitaire à hauteur de 6117,11€.
10- M. [U] [R] s'oppose à la fin de non-recevoir en soulignant que les moyens développés devant la cour ne sont que des moyens de droit développés à l'appui de la demande en restitution des fonds, ce qu'il lui est possible de faire par application des dispositions de l'article 563 du même code. Il soutient donc que la prétention tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge.
Quant à la demande indemnitaire en paiement des charges et taxes foncières, elle constitue un moyen destiné à opposer compensation à la condamnation prononcée à son encontre au profit des intimés au titre d'une indemnité d'occupation.
11- De la comparaison entre les dernières conclusions récapitulatives de première instance notifiées le 24 février 2023 et les premières conclusions d'appelant notifiées le 30 septembre 2024, il résulte qu'en première instance, M. [U] [R] demandait à ce que soit prononcée la nullité de la reconnaissance de dette signée le 16 juillet 2017 alors qu'à hauteur d'appel, il demande que soit prononcée la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modification du 13 mai 2019.
12- L'énoncé de ces prétentions démontre la nouveauté de
celles présentées en appel qui portent non plus sur la nullité d'une reconnaissance de dette unique mais sur celle d'un prêt constitué de plusieurs actes juridiques. Les prétentions nouvelles en appel ne tendent donc pas aux mêmes fins que celles de première instance dès lors qu'elles attaquent des actes juridiques distincts.
Quand bien même la prétention en condamnation à hauteur de 150000€ des époux [T] aurait été présentée en première instance, elle n'est que subséquente à la demande de nullité présentée à titre principal.
La cour fera donc droit à la fin de non-recevoir présentée en relevant que la prétention nouvelle en nullité du contrat de prêt ne tend pas à opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La cour n'est donc pas saisie quelconque critique contre le jugement qui déboute M. [R] de sa demande en nullité de la reconnaissance de dette du 16 juillet 2017.
14- Il en va différemment de la prétention à condamnation des époux [T] au paiement de la somme de 6117,11€ au titre de charges de copropriété et de taxes foncières qui ne tend qu'à opposer compensation à la demande de condamnation en paiement d'une indemnité d'occupation en contrepartie de la jouissance de l'appartement.
14- Cette demande s'inscrit dans un ensemble de demandes
indemnitaires dont la principale tient dans son quantum à des détournements fautifs de fonds lui appartenant par utilisations abusives de sa carte bancaire.
15- La cour n'entend pas prendre partie dans le conflit familial
opposant [U] [R] à son fils [E] et sa belle fille [K].
Il convient toutefois de retenir quelques éléments objectifs de contexte, tels la perception par [U] [R] le 12 juillet 2017 de la somme de 236000€ portant le solde créditeur de son compte à 254311,37€, les importantes difficultés de santé qu'il a rencontrées et la présence assidue de [E] et de [K] aux côtés de [U], lesquels se targuent d'avoir été présents à tous les instants pour prendre soin de lui.
16- Par application de l'article 9 du code de procédure civile et de l'article 1240 du code civil, il appartient à [U] [R] de rapporter la preuve, laquelle est libre s'agissant de faits juridiques, des utilisations abusives de sa carte bancaire par des retraits d'espèces non autorisés effectués par son fils ou sa belle fille.
17- [U] [R] fait valoir que c'est à partir du moment où la vente de la maison familiale a été réalisée, que des retraits d'espèces de 1500€ ont été effectués régulièrement aux DAB de banques situés à proximité du domicile de son fils [E] et de sa belle-fille qui avaient sa carte bancaire en leur possession.
18- Un faisceau d'indices, non utilement combattu par les intimés, permet de caractériser les détournements de fonds allégués :
- la comparaison des retraits opérés sur les comptes bancaires de 2014 à 2016 puis de 2017 à 2020 permet de constater l'apparition des retraits dans des formes et proportions inédites, excédant en tout les besoins quotidiens de [U] [R].
En 2014, 2015 et 2016, il était en règle générale pratiqué un retrait DAB de 500€ par mois, le surplus des besoins en espèce étant retiré au guichet de la BNP à [Localité 10].
En 2017, apparaissent des retraits DAB sur diverses autres communes d'un montant systématique de 1500€, pour des cumuls de :
en 2017, 50000€
en 2018 14900€
en 2019, 14500€
en 2020, 27200€
en 2021, deux retraits pour 2500€ cumulés
Les retraits cessent à partir de février 2021, date à laquelle interviennent les autres enfants [P] et [I].
Il est établi que la pratique de M. [U] [R] consistait donc à opérer des retraits d'espèces en guichet, l'utilisation de DAB ne restant limitée qu'à une fois en début de mois et que les retraits sont apparus après l'encaissement du prix de la vente.
- M. [U] [R] aurait toutefois pu se faire plaisir et chercher à faire plaisir à son entourage en distribuant largement les espèces par lui retirées. Il l'a fait, mais uniquement par le paiement de restaurants et l'achat de paniers de fruits de mer. Aucune dépense somptuaire n'est caractérisée.
- Alors que si tel avait été le cas, la logique et la cohérence du dossier voulaient qu'il procède alors aux retraits en question, même partiellement, au DAB le plus proche de son domicile. Pourtant, aucun retrait n'a été effectué au DAB situé en pied de l'immeuble à [Localité 9].
- Bien que contestée, la détention de la carte bancaire et de ses identifiants par [E] et/ou [K] ne fait aucun doute, des retraits réguliers de 1500€ étant opérés dans des communes voisines de [Localité 9], y compris pendant des périodes d'hospitalisation de [U] mais proches de leur domicile.
La tentative de preuve contraire par la production de relevés Google Maps Timeline est inopérante à établir que l'un ou l'autre était ailleurs au moment des retraits, de telles traces GPS étant modifiables.
Les attestations produites en défense sont insuffisamment circonstanciées et pour certaines manifestement partisanes et en tout état de cause insuffisantes à démontrer que M. [U] [R], hors les paiements de restaurants et paniers de fruits de mer, détenait en continu sa carte bancaire.
- L'attestation de [P] [R] ne saurait être de facto écartée au prétexte qu'il est intéressé en tant que potentiel héritier à voir réintégrer des fonds dans le patrimoine de son père. Il a assisté à divers faits circonstanciés dont il est apte à témoigner comme la possession de la carte bancaire de son père par son frère [E] durant l'été 2020.
- De la deuxième attestation de [Y] [X], voisin de M. [U] [R], il ressort des manoeuvres de [E] et [K] pour lui faire initialement affirmer des éléments qu'il démentira ou nuancera ultérieurement et qui mettront alors en exergue la possession de la carte bancaire par ceux-ci.
- Alors qu'ils se targuent d'avoir été constamment présents aux côtés de [U], [E] et [K] qui imputent à [U] la multiplicité et l'importance des retraits et affirment qu'il n'avait aucune notion de l'argent, n'ont jamais signalé à quiconque cette faiblesse récurrente.
- Plusieurs retraits ont été effectués alors que M. [U] [R] était hospitalisé et dans la période antérieure à février 2021 où les intimés étaient seuls à prendre soin de lui.
De ces éléments concordants, il ressort suffisamment pour que la conviction de la cour soit emportée que les retraits cumulés à hauteur de 110000€ ont été effectués par M. [E] [R] et son épouse et n'ont pas bénéficié à M. [U] [R]. Les intimés se sont appropriés frauduleusement le moyen de paiement de leur père et beau-père et ont dissipé le patrimoine dont celui-ci disposait suite à la vente du bien immobilier.
Le jugement sera donc infirmé, [E] [R] et son épouse étant condamnés in solidum à payer à [U] [R] la somme de 110000€ avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 17 novembre 2021 et capitalisation conformément à la demande.
19- M. [U] [R] poursuit la condamnation de ses fils et belle fille en paiement d'une somme de 40000€ qui aurait été anciennement contenue dans le coffre de la maison du [Localité 11].
La cour ne pourra à l'instar du premier juge, que confirmer le rejet de cette prétention, seule l'assertion de l'appelant permettant de considérer qu'a pu s'y trouver une somme de 40000€, M. [P] [R] ne faisant que rapporter les propos de son père quant à l'existence d'une telle somme et son appropriation par [E].
20- M. [U] [R] a été condamné en première instance au paiement de la somme de 3000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral pour avoir laissé entendre dans ses écritures que son fils [E] et son épouse auraient pu le laisser décéder lors de son hospitalisation en juin 2021.
Ce chef du jugement sera nécessairement infirmé dès lors que les propos de l'appelant, victime de détournements de fonds dans un contexte familial délétère, perdent tout caractère fautif.
21- C'est en revanche M. [U] [R], dépouillé de partie de son patrimoine par ceux en qui il avait placé sa confiance, qui a subi un préjudice moral du fait de leurs agissements, de telle sorte que les intimés seront condamnés à lui payer la somme de 5000€ en réparation. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il rejette l'ensemble des prétentions indemnitaires de M. [U] [R].
22- L'obligation de restituer les sommes versées en vertu d'une décision de première instance résulte de plein droit de l'infirmation de cette décision.
23- La pièce 47 de l'appelant, conglomérat de talons de chèques avec inscriptions manuscrites et de relevés bancaires commentés n'établit en rien que les paiements réalisés par chèques aient eu pour objet de payer des sommes dont les intimés étaient seuls redevables, de telle sorte que la prétention indemnitaire à hauteur de 6117,11€ sera rejetée.
24- Parties principalement perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [E] [R] et son épouse supporteront les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement
DÉCLARE irrecevables la demande nouvelle en appel tendant à prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019.
DÉCLARE recevable la demande nouvelle en appel tendant à condamner M. [E] [R] et Mme [K] [J] épouse [R] à payer la somme de 6117,11€.
INFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. [U] [R] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires, l'a condamné au paiement d'une indemnité pour préjudice moral et l'a condamné aux dépens de première instance ainsi qu'à payer une indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
statuant à nouveau sur les chefs déférés et y ajoutant
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 110000€ au titre des détournements et utilisation abusive de la carte bancaire, avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2021.
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes indemnitaires
RAPPELLE que l'obligation de restituer les sommes versées en exécution du jugement résulte de plein droit de son infirmation.
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] aux dépens de première instance et d'appel.
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 5000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 16 OCTOBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/03388 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJLS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 30 MAI 2024
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 14]
N° RG 21/04897
APPELANT :
Monsieur [U] [R]
né le [Date naissance 3] 1939 à [Localité 16] ( ALGÉRIE )
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Estelle TEMPLET TEISSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ayant pour avocat plaidant, Maitre Durand-Pirotte Elisabeth, avocate au barreau de Nimes.
INTIMES :
Monsieur [E] [R]
né le [Date naissance 5] 1964 à [Localité 15]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Mandine CORTEY LOTZ de la SELARL CORTEY LOTZ & MARCHAL AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Maitre Pouget Jérémy, avocat au barreau de Montpellier.
Madame [D] [R] [J]
née le [Date naissance 4] 1965 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Mandine CORTEY LOTZ de la SELARL CORTEY LOTZ & MARCHAL AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué à l'audience par Maitre Pouget Jérémy, avocat au barreau de Montpellier.
Ordonnance de clôture du 13 Août 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2025,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Philippe BRUEY, Conseiller
Mme Marie-José FRANCO, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Maryne BONGIRAUD
ARRET :
- Contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Maryne BONGIRAUD, Greffière placée
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FAITS ET PROCÉDURE
1- Mme [N] [R] est décédée le [Date décès 8] 2014, laissant pour lui succéder son époux M. [U] [R], et quatre de leurs enfants, dont M. [E] [R].
Les ayants droit ont vendu la maison familiale au prix de 320 000 €, réparti entre M. [U] [R] à hauteur de 236 150, 33 € et les quatre enfants qui ont reçu la somme de 20 094 € chacun.
2- Par acte du 27 juillet 2017, M. [E] [R] et son épouse Mme [D] [J] ont acquis un appartement à [Localité 13], ainsi qu'un garage et une place de parking au prix total de 275 000 €. Cette somme a été payée à concurrence de 150 000 € au moyen d'un prêt consenti par M. [U] [R] suivant reconnaissance de dette du 16 juillet 2017.
3- M. [U] [R] aurait appris que contrairement à sa croyance, il n'était pas propriétaire de cet appartement, c'est dans ce contexte que, par acte d'huissier du 17 novembre 2021, il a assigné M. [E] [R] et Mme [J] devant le tribunal judiciaire de Montpellier en nullité de la reconnaissance de dettes pour vices du consentement et remboursement de la somme de 111 000 € au titre de prélèvements et détournements de fonds opérés sur sa carte bleue.
4- Par jugement contradictoire du 30 mai 2024, le tribunal judiciaire de Montpellier a :
- Débouté M. [U] [R] de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de M. [E] [R] et Mme [J],
- Condamné M. [U] [R] à payer à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 3 000 € au titre de dommages et intérêts et celle de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamné M. [U] [R] aux dépens.
5- M. [U] [R] a relevé appel de ce jugement le 1er juillet 2024.
PRÉTENTIONS
6- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 31 juillet 2025, M. [U] [R] demande en substance à la cour, au visa des articles 1100, 1100-1, 1101, 1128, 1112-1, 1137, 1140, 1143, 1178, 1240 et 1353 du code civil, de :
- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par M. [U] [R],
- Rejeter toute demande d'irrecevabilité présentée par les intimés
- Accueillir toutes les demandes de l'appelant
- Infirmer la décision du 30 mai 2024 en ce qu'elle a débouté M. [U] [R] de toutes ses demandes de condamnation de M. [E] [R] et Mme [J] et l'a condamné à payer à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts et 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Statuant à nouveau,
- Prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019,
- Prononcer la nullité du contrat de prêt pour violation de l'information prévue par les dispositions de l'article 1112-1 du code civil,
- A défaut, prononcer la nullité du contrat de prêt pour défaut de consentement pour violation les dispositions de l'article 1128 du code civil,
- A défaut, prononcer la nullité du contrat de prêt pour vices du consentement et en application des dispositions des articles 1137, 1140 et 1143 du Code civil,
- En tout état de cause, confirmer que la créance de M. [U] [R] d'un montant de 150 000 € est justifiée et non contestée.
- Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toute demande de compensation infondée en droit et en fait,
- Ordonner la restitution des fonds dans les conditions prévues aux dispositions de l'article 1352-6 et 1352-7 du code civil,
- Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] des sommes suivantes, outre intérêts majorés et capitalisés conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1343-2 du Code civil et L313-3 du code monétaire et financier jusqu'à parfait paiement :
- 150 000 € à compter du 18 juillet 2017 jour du versement
- à titre de réparation du préjudice subi pour abus de faiblesse et détournement et utilisation abusive de la carte bleue de M. [U] [R], la somme de 110 000 €,
- 40 000 € au titre des fonds détenus dans le coffre qu'ils n'ont pas restitués
- 30 000 € en réparation des préjudices infligés à M. [U] [R]
- 6 013€ en remboursement de la somme reçue en exécution du jugement rendu
- 6 117,11 € à parfaire
- Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toutes demandes, fins et conclusions contraires,
- Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] d'une somme de 7 000 € au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraint de supporter en première instance et en appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 juillet 2025, M. [E] [R] et Mme [J] demandent en substance à la cour, au visa des articles 9 et 564 du Code de procédure civile, 1128, 1137, 1140, 1143, et 1240 du Code civil, de :
' A titre liminaire :
- Prononcer l'irrecevabilité des demandes nouvelles de M. [U] [R], formulées pour la première fois devant la cour d'appel, lesquelles sont les suivantes :
' Prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour violation de l'information prévue par les dispositions de l'article 1112-1 du code civil
A défaut
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour défaut de consentement pour violation les dispositions de l'article 1128 du code civil
A défaut
' Prononcer la nullité du contrat de prêt pour vices du consentement 1128, du code civil et en application des dispositions des articles 1137,1140, 1143
' Débouter M. [E] [R] et Mme [J] de toute demande de compensation infondée en droit et en fait
' Condamner M. [E] [R] et Mme [J] au paiement à M. [U] [R] d'une somme de 6 117, 11€ à parfaire outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation en date du 17 novembre 2021, majorés et capitalisés conformément aux dispositions des articles 1231-6 du Code civil 1343-2 du Code civil et L313-3 du code monétaire et financier jusqu'à parfait paiement
' Au fond :
- Confirmer le jugement du 30 mai 2024 en toutes ses dispositions,
- Débouter M. [U] [R] de l'intégralité de ses demandes, plus amples ou contraires,
- Condamner M. [U] [R] à verser à M. [E] [R] et Mme [J] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner M. [U] [R] aux entiers dépens d'appel.
7- Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 août 2025.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
8- Selon l'article 564 du code de procédure civile,
"A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait."
Selon l'article 565 du même code,
"Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent."
Selon l'article 566 du même code,
"Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire."
9- Au visa de l'article 564 précité, les intimés opposent l'irrecevabilité d'un ensemble de prétentions nouvellement présentées à hauteur d'appel par M. [U] [R] qui poursuit désormais la nullité non d'une reconnaissance de dette mais celle d'un prêt et qui ajoute une demande indemnitaire à hauteur de 6117,11€.
10- M. [U] [R] s'oppose à la fin de non-recevoir en soulignant que les moyens développés devant la cour ne sont que des moyens de droit développés à l'appui de la demande en restitution des fonds, ce qu'il lui est possible de faire par application des dispositions de l'article 563 du même code. Il soutient donc que la prétention tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge.
Quant à la demande indemnitaire en paiement des charges et taxes foncières, elle constitue un moyen destiné à opposer compensation à la condamnation prononcée à son encontre au profit des intimés au titre d'une indemnité d'occupation.
11- De la comparaison entre les dernières conclusions récapitulatives de première instance notifiées le 24 février 2023 et les premières conclusions d'appelant notifiées le 30 septembre 2024, il résulte qu'en première instance, M. [U] [R] demandait à ce que soit prononcée la nullité de la reconnaissance de dette signée le 16 juillet 2017 alors qu'à hauteur d'appel, il demande que soit prononcée la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modification du 13 mai 2019.
12- L'énoncé de ces prétentions démontre la nouveauté de
celles présentées en appel qui portent non plus sur la nullité d'une reconnaissance de dette unique mais sur celle d'un prêt constitué de plusieurs actes juridiques. Les prétentions nouvelles en appel ne tendent donc pas aux mêmes fins que celles de première instance dès lors qu'elles attaquent des actes juridiques distincts.
Quand bien même la prétention en condamnation à hauteur de 150000€ des époux [T] aurait été présentée en première instance, elle n'est que subséquente à la demande de nullité présentée à titre principal.
La cour fera donc droit à la fin de non-recevoir présentée en relevant que la prétention nouvelle en nullité du contrat de prêt ne tend pas à opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La cour n'est donc pas saisie quelconque critique contre le jugement qui déboute M. [R] de sa demande en nullité de la reconnaissance de dette du 16 juillet 2017.
14- Il en va différemment de la prétention à condamnation des époux [T] au paiement de la somme de 6117,11€ au titre de charges de copropriété et de taxes foncières qui ne tend qu'à opposer compensation à la demande de condamnation en paiement d'une indemnité d'occupation en contrepartie de la jouissance de l'appartement.
14- Cette demande s'inscrit dans un ensemble de demandes
indemnitaires dont la principale tient dans son quantum à des détournements fautifs de fonds lui appartenant par utilisations abusives de sa carte bancaire.
15- La cour n'entend pas prendre partie dans le conflit familial
opposant [U] [R] à son fils [E] et sa belle fille [K].
Il convient toutefois de retenir quelques éléments objectifs de contexte, tels la perception par [U] [R] le 12 juillet 2017 de la somme de 236000€ portant le solde créditeur de son compte à 254311,37€, les importantes difficultés de santé qu'il a rencontrées et la présence assidue de [E] et de [K] aux côtés de [U], lesquels se targuent d'avoir été présents à tous les instants pour prendre soin de lui.
16- Par application de l'article 9 du code de procédure civile et de l'article 1240 du code civil, il appartient à [U] [R] de rapporter la preuve, laquelle est libre s'agissant de faits juridiques, des utilisations abusives de sa carte bancaire par des retraits d'espèces non autorisés effectués par son fils ou sa belle fille.
17- [U] [R] fait valoir que c'est à partir du moment où la vente de la maison familiale a été réalisée, que des retraits d'espèces de 1500€ ont été effectués régulièrement aux DAB de banques situés à proximité du domicile de son fils [E] et de sa belle-fille qui avaient sa carte bancaire en leur possession.
18- Un faisceau d'indices, non utilement combattu par les intimés, permet de caractériser les détournements de fonds allégués :
- la comparaison des retraits opérés sur les comptes bancaires de 2014 à 2016 puis de 2017 à 2020 permet de constater l'apparition des retraits dans des formes et proportions inédites, excédant en tout les besoins quotidiens de [U] [R].
En 2014, 2015 et 2016, il était en règle générale pratiqué un retrait DAB de 500€ par mois, le surplus des besoins en espèce étant retiré au guichet de la BNP à [Localité 10].
En 2017, apparaissent des retraits DAB sur diverses autres communes d'un montant systématique de 1500€, pour des cumuls de :
en 2017, 50000€
en 2018 14900€
en 2019, 14500€
en 2020, 27200€
en 2021, deux retraits pour 2500€ cumulés
Les retraits cessent à partir de février 2021, date à laquelle interviennent les autres enfants [P] et [I].
Il est établi que la pratique de M. [U] [R] consistait donc à opérer des retraits d'espèces en guichet, l'utilisation de DAB ne restant limitée qu'à une fois en début de mois et que les retraits sont apparus après l'encaissement du prix de la vente.
- M. [U] [R] aurait toutefois pu se faire plaisir et chercher à faire plaisir à son entourage en distribuant largement les espèces par lui retirées. Il l'a fait, mais uniquement par le paiement de restaurants et l'achat de paniers de fruits de mer. Aucune dépense somptuaire n'est caractérisée.
- Alors que si tel avait été le cas, la logique et la cohérence du dossier voulaient qu'il procède alors aux retraits en question, même partiellement, au DAB le plus proche de son domicile. Pourtant, aucun retrait n'a été effectué au DAB situé en pied de l'immeuble à [Localité 9].
- Bien que contestée, la détention de la carte bancaire et de ses identifiants par [E] et/ou [K] ne fait aucun doute, des retraits réguliers de 1500€ étant opérés dans des communes voisines de [Localité 9], y compris pendant des périodes d'hospitalisation de [U] mais proches de leur domicile.
La tentative de preuve contraire par la production de relevés Google Maps Timeline est inopérante à établir que l'un ou l'autre était ailleurs au moment des retraits, de telles traces GPS étant modifiables.
Les attestations produites en défense sont insuffisamment circonstanciées et pour certaines manifestement partisanes et en tout état de cause insuffisantes à démontrer que M. [U] [R], hors les paiements de restaurants et paniers de fruits de mer, détenait en continu sa carte bancaire.
- L'attestation de [P] [R] ne saurait être de facto écartée au prétexte qu'il est intéressé en tant que potentiel héritier à voir réintégrer des fonds dans le patrimoine de son père. Il a assisté à divers faits circonstanciés dont il est apte à témoigner comme la possession de la carte bancaire de son père par son frère [E] durant l'été 2020.
- De la deuxième attestation de [Y] [X], voisin de M. [U] [R], il ressort des manoeuvres de [E] et [K] pour lui faire initialement affirmer des éléments qu'il démentira ou nuancera ultérieurement et qui mettront alors en exergue la possession de la carte bancaire par ceux-ci.
- Alors qu'ils se targuent d'avoir été constamment présents aux côtés de [U], [E] et [K] qui imputent à [U] la multiplicité et l'importance des retraits et affirment qu'il n'avait aucune notion de l'argent, n'ont jamais signalé à quiconque cette faiblesse récurrente.
- Plusieurs retraits ont été effectués alors que M. [U] [R] était hospitalisé et dans la période antérieure à février 2021 où les intimés étaient seuls à prendre soin de lui.
De ces éléments concordants, il ressort suffisamment pour que la conviction de la cour soit emportée que les retraits cumulés à hauteur de 110000€ ont été effectués par M. [E] [R] et son épouse et n'ont pas bénéficié à M. [U] [R]. Les intimés se sont appropriés frauduleusement le moyen de paiement de leur père et beau-père et ont dissipé le patrimoine dont celui-ci disposait suite à la vente du bien immobilier.
Le jugement sera donc infirmé, [E] [R] et son épouse étant condamnés in solidum à payer à [U] [R] la somme de 110000€ avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 17 novembre 2021 et capitalisation conformément à la demande.
19- M. [U] [R] poursuit la condamnation de ses fils et belle fille en paiement d'une somme de 40000€ qui aurait été anciennement contenue dans le coffre de la maison du [Localité 11].
La cour ne pourra à l'instar du premier juge, que confirmer le rejet de cette prétention, seule l'assertion de l'appelant permettant de considérer qu'a pu s'y trouver une somme de 40000€, M. [P] [R] ne faisant que rapporter les propos de son père quant à l'existence d'une telle somme et son appropriation par [E].
20- M. [U] [R] a été condamné en première instance au paiement de la somme de 3000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral pour avoir laissé entendre dans ses écritures que son fils [E] et son épouse auraient pu le laisser décéder lors de son hospitalisation en juin 2021.
Ce chef du jugement sera nécessairement infirmé dès lors que les propos de l'appelant, victime de détournements de fonds dans un contexte familial délétère, perdent tout caractère fautif.
21- C'est en revanche M. [U] [R], dépouillé de partie de son patrimoine par ceux en qui il avait placé sa confiance, qui a subi un préjudice moral du fait de leurs agissements, de telle sorte que les intimés seront condamnés à lui payer la somme de 5000€ en réparation. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il rejette l'ensemble des prétentions indemnitaires de M. [U] [R].
22- L'obligation de restituer les sommes versées en vertu d'une décision de première instance résulte de plein droit de l'infirmation de cette décision.
23- La pièce 47 de l'appelant, conglomérat de talons de chèques avec inscriptions manuscrites et de relevés bancaires commentés n'établit en rien que les paiements réalisés par chèques aient eu pour objet de payer des sommes dont les intimés étaient seuls redevables, de telle sorte que la prétention indemnitaire à hauteur de 6117,11€ sera rejetée.
24- Parties principalement perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [E] [R] et son épouse supporteront les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement
DÉCLARE irrecevables la demande nouvelle en appel tendant à prononcer la nullité du contrat de prêt constitué par les actes juridiques des 16 et 18 et 27 juillet 2017 et modifications du 13 mai 2019.
DÉCLARE recevable la demande nouvelle en appel tendant à condamner M. [E] [R] et Mme [K] [J] épouse [R] à payer la somme de 6117,11€.
INFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. [U] [R] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires, l'a condamné au paiement d'une indemnité pour préjudice moral et l'a condamné aux dépens de première instance ainsi qu'à payer une indemnité en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
statuant à nouveau sur les chefs déférés et y ajoutant
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 110000€ au titre des détournements et utilisation abusive de la carte bancaire, avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2021.
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes indemnitaires
RAPPELLE que l'obligation de restituer les sommes versées en exécution du jugement résulte de plein droit de son infirmation.
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] aux dépens de première instance et d'appel.
CONDAMNE in solidum M. [E] [R] et Mme [K] [R] [J] à payer à M. [U] [R] la somme de 5000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président