CA Paris, Pôle 5 - ch. 6, 24 février 2017, n° 15/09976
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
LE CREDIT LYONNAIS (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme CHANDELON
Conseillers :
Mme GONAND, M. BAILLY
Avocats :
Me Frédéric LEVADE, Me Djaafar BENSAOULA
Le 16 mars 2005, Monsieur Bachir B. a souscrit auprès du Crédit Lyonnais (LCL) un prêt personnel d'un montant de 130 000 € remboursable en 60 échéances mensuelles de 2 484,25 €. En garantie de ce prêt, il a délégué à la banque le contrat d'assurance vie dénommé «LionVie Rouge Corinthe» souscrit auprès de la société Assurances Fédérales Vie auquel il avait adhéré la veille en effectuant un versement de 100 000 €.
Expliquant avoir fait apport de la somme empruntée à la société La Boite dont il était l'associé majoritaire, admise au bénéfice du règlement judiciaire par jugement du tribunal de commence de Perpignan en date du 7 décembre 2005, converti, le 26 juillet 2006, en liquidation judiciaire, Monsieur B. a engagé la présente procédure par exploit du 25 octobre 2012 pour demander, outre la production de certaines pièces, l'annulation du prêt, analysant la garantie donnée en cautionnement, se prévalant également de différents manquements par la banque à ses devoirs de conseil, d'information et de mise en garde ainsi que de l'irrégularité du taux effectif global (TEG)
Par jugement du 20 mars 2015, le tribunal de grande instance de Paris l'a débouté de ses prétentions et l'a condamné au paiement d'une indemnité de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 18 mai 2015, Monsieur B. a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 21 juin 2015, il sollicite l'infirmation du jugement déféré et qu'il soit fait injonction à LCL de produire :
l'état comptable des sommes encaissées et des sommes restant dues qui ont provoqué(e) la mise en 'uvre de la garantie autonome, les justificatifs des 21 mensualités encaissées au titre du remboursement du prêt représentant (l ) a ( l) somme de 52 169,25 €, toutes les opérations comptables et financières concernant le compte du demandeur, l'éventuelle autorisation de rachat dont il fait état, l'ensemble des comptes ayant servi à la liquidation et au rachat du contrat d'assurance son contrat d'assurance vie « Lion Vie Rouge Corinthe », et d'apporter la preuve qu'il s'agit d'une garantie autonome puisqu'il ne produit aucune pièce à ce sujet ;
Monsieur B. souhaite encore :
voir constater la mise en place et le rattachement le 16 mars 2005 d'une somme de
100 000 € à titre d'engagement personnel de Mr B. Bachir dans l'intérêt de la société La Boîte au profit de la banque, dire et juger que la lettre d'apport en garantie constitue un acte de cautionnement, dire et juger que l'abus dont a été auteur la Banque a consisté manifestement dans l'intention de nuire à celui ci et de lui causer un grave préjudice,
En conséquence :
annuler le prêt de 100 000 € (en réalité 130 000 €), condamner LCL à payer à rembourser la somme de 100 000 € dont il a disposé sans droit ni titre... assortie du taux d'intérêt légal du 16 mars 2005 au prononcé de l'arrêt, dire et juger que le TEG stipulé est erroné, constater que l'enjeu financier sur la durée intégrale du prêt s'établi (t) à 12 104,49 €, voir ordonner la restitution de la dite somme, voir condamner LCL à payer une somme de 10 000 € pour le préjudice financier, matériel et moral, outre 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières écritures du 27 juillet 2015, LCL conclut à la confirmation du jugement et sollicite une indemnité de 4 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 mai 2016.
CELA ETANT EXPOSE,
LA COUR
Sur la demande de communication de pièces
Considérant que les termes de cette demande permettent de supposer que LCL a mis en 'uvre la garantie qui lui avait été accordée en raison de la défaillance de l'emprunteur ;
Considérant par ailleurs qu'il résulte des relevés de compte produits par la banque, que les virements d'une société tierce, dont il est précisé qu'elle serait dirigée par Monsieur B. lui ont permis de régler les échéances mensuelles jusqu'au 16 novembre 2006 ;
Considérant enfin qu'un décompte de mise en demeure en date du 21 mai 2007 communiqué par l'intimé permet de constater qu'à cette date 4 mensualités échues restaient impayées et que le capital restant dû s'élevait à 93 965,15 ;
Considérant que le juge ne pouvant, selon l'article 12 du code de procédure civile être saisi que pour trancher un litige, toute injonction de communication de pièces ne pouvant intervenir qu'à cette fin, c'est à bon droit que le tribunal a constaté que Monsieur B. ne sollicitait pas la restitution d'un trop perçu à l'occasion de la réalisation de la garantie souscrite et l'a débouté de cette demande ;
Considérant que Monsieur B. ne formulant devant la cour aucune prétention au titre des sommes versées à la suite de la déchéance du terme et ne précisant toujours pas la valeur de rachat de l'assurance, il convient de confirmer la décision et de le débouter ;
Sur la requalification de la lettre d'apport en garantie d'un contrat d'assurance vie en cautionnement
Considérant, outre que le juge n'a pas à interpréter ou à requalifier une convention claire, ce qui est le cas en l'espèce, Monsieur B. désignant LCL comme bénéficiaire du contrat en garantie du prêt souscrit, qu'il est juridiquement impossible de cumuler pour un même prêt les qualités d'emprunteur et de caution ;
Considérant que c'est en conséquence à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de requalification ;
Sur la nullité du prêt
Considérant qu'au soutien de cette demande, Monsieur B. rappelle les étapes de la procédure collective ouverte contre la société La Boîte, clôturée, le 30 janvier 2008 pour insuffisance d'actif ;
Mais considérant que ces événements ne peuvent permettre d'annuler un prêt personnel consenti à un tiers, peu important que ce dernier ait employé les fonds à renforcer sa trésorerie ;
Considérant que c'est encore à bon droit que le tribunal a considéré que les développements de Monsieur B. concernant l'obligation de mise en garde de l'emprunteur et de la caution profane imposant à la banque de s'assurer d'une part de leur capacité financière, d'autre part de la viabilité du projet était sans objet, la société La Boite n' étant pas l'emprunteur ni Monsieur B. sa caution ;
Et considérant que la seule circonstance que Monsieur B. ait pu affecter en garantie de l'emprunt qu'il a souscrit un contrat d'assurance vie d'une valeur de 100 000 €, suffit à démontrer qu'il n'était pas de nature à entraîner son endettement, dispensant ainsi la banque de toute obligation de mise en garde ;
Sur la demande de restitution des 100 000 €
Considérant que Monsieur B. n'apportant aucun élément susceptible de critiquer la mise en 'uvre de la garantie, ne soutenant pas, notamment que le solde restant dû sur le prêt aurait été inférieur aux sommes encaissées par la banque en vertu de sa délégation de créance, il ne peut qu'être débouté de cette prétention ;
Sur l'irrégularité alléguée du TEG
Considérant qu'aux termes de l'article L312-8 du code de la consommation, seuls les frais conditionnant l'octroi du prêt doivent être pris en compte dans le calcul du TEG ;
Considérant que pour conclure à l'irrégularité du taux annoncé dans le cadre du prêt litigieux, Monsieur B. expose qu'il ne comporte ni le coût de l'assurance décès invalidité souscrite, ni les frais liés à la souscription du contrat d'assurance vie ;
Mais considérant que l'offre de prêt mentionnant que la souscription d'une assurance décès invalidité est facultative, son coût ne rentre pas dans les prévisions du texte précité ;
Qu'il en est de même pour les frais d'adhésion à un contrat d'assurance vie qui ne constituent pas des frais de garantie ;
Sur la demande de dommages intérêts
Considérant qu'en l'absence de faute démontrée de la banque cette demande ne peut prospérer ;
Sur la demande du LCL
Considérant que l'équité commande d'allouer à la banque une indemnité de 2 500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Condamne Monsieur Bachir B. à verser à la société Crédit Lyonnais une indemnité de 2 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,
Condamne Monsieur Bachir B. aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.