TUE, 7e ch., 15 octobre 2025, n° T-290/23
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
MeSoFa Vermögensverwaltungs AG
Défendeur :
Conseil de résolution unique
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
K. Kowalik‑Bańczyk
Juges :
E. Buttigieg, G. Hesse
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, MeSoFa Vermögensverwaltungs AG, anciennement Sber Vermögensverwaltungs AG, demande l’annulation de la décision du Conseil de résolution unique (CRU) du 28 juillet 2022 concernant sa demande d’accès à des documents se rapportant à l’adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Sberbank d.d. (ci-après « Sberbank Croatie ») par le CRU (ci-après la « première décision confirmative »), de la décision du comité d’appel du CRU (ci-après le « comité d’appel ») du 8 mars 2023, relative à l’affaire 4/2022 (ci-après la « première décision du comité d’appel »), de la réponse négative du CRU au sens de l’article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43) (ci-après la « décision implicite »), de la décision du CRU du 21 décembre 2023 concernant la même demande d’accès (ci-après la « seconde décision confirmative ») et de la décision du comité d’appel du 22 mai 2024 relative à l’affaire 2/2024 (ci-après la « seconde décision du comité d’appel »).
Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours
2 Avant l’adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Sberbank Croatie et de Sberbank banka d.d., la requérante détenait 100 % des actions de la première et 99,99 % des actions de la seconde. Ces trois établissements de crédit étaient des établissements importants au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous a), du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1).
3 Par demande présentée initialement, le 10 mars 2022, à la Hrvatska Narodna Banka (Banque nationale de Croatie), puis enregistrée par le CRU le 22 avril 2022, la requérante a demandé l’accès aux documents relatifs à la résolution de Sberbank Croatie. La demande d’accès transférée au CRU concernait, en particulier, l’accès à la décision SRB/EES/2022/17, par laquelle il avait ordonné la suspension des obligations de paiement et de livraison à l’égard de Sberbank Croatie (ci-après la « décision SRB/EES/2022/17 ») et à la décision SRB/EES/2022/21 (ci-après la « décision SRB/EES/2022/21 »), par laquelle il avait décidé de soumettre Sberbank Croatie à une procédure de résolution.
4 Par sa décision initiale du 9 juin 2022, le CRU a accordé à la requérante un accès partiel à la décision SRB/EES/2022/17 ainsi qu’à la décision SRB/EES/2022/21, y compris à ses annexes, à savoir les valorisations 1 et 2. Le CRU a alors fourni à la requérante une version non confidentielle de ces décisions.
5 En application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, le 30 juin 2022, la requérante a adressé au CRU une demande confirmative. Par cette demande, la requérante a notamment demandé au CRU, s’agissant de la décision SRB/EES/2022/17, de lui fournir « en particulier l’information relative à l’évaluation de la situation de défaillance prévisible ou avérée de Sberbank Croatie ; la justification concernant l’absence de possibilité d’utiliser des méthodes alternatives ; et la justification relative à l’intérêt public en Croatie » et, s’agissant de la décision SRB/EES/2022/21, « en particulier l’information relative aux valorisations de Sberbank Croatie ».
6 Par la première décision confirmative, le 28 juillet 2022, le CRU a confirmé la décision initiale.
7 En application de l’article 85, paragraphe 3, du règlement no 806/2004, le 7 septembre 2022, la requérante a formé un recours contre la première décision confirmative auprès du comité d’appel.
8 Le 8 mars 2023, le comité d’appel a adopté sa première décision, sous le numéro d’affaire 4/2022. Dans cette décision, le comité d’appel a notamment considéré que la motivation de la première décision confirmative était insuffisante en ce que le CRU n’avait pas dûment et spécifiquement justifié le refus d’accès du public à plusieurs parties de la décision SRB/EES/2022/17 et de la décision SRB/EES/2022/21, y compris aux valorisations 1 et 2. Pour autant, le comité d’appel a indiqué qu’il pouvait accepter que l’occultation de certaines informations de la décision SRB/EES/2022/21 et de la valorisation 2 était justifiée afin de protéger les intérêts commerciaux de tiers. Il a également indiqué que, si le CRU avait eu raison d’occulter certaines informations, il en avait erronément occulté d’autres dans les versions non confidentielles des décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21, y compris dans les valorisations 1 et 2, sous couvert de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001. Par conséquent, le comité d’appel a renvoyé l’affaire au CRU, conformément à l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014.
9 Par la seconde décision confirmative, le 21 décembre 2023, le CRU a considéré que, compte tenu des orientations du comité d’appel et au regard des réponses reçues lors de la consultation des parties prenantes ainsi que du temps écoulé depuis la résolution, l’accès à d’autres parties des documents demandés pouvait être accordé. Toutefois, selon cette décision, le reste des informations occultées restait couvert soit par les exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, et à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, soit par ces deux exceptions ainsi que par celle prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du même règlement, relative à la protection des objectifs des activités d’enquête.
10 En application de l’article 85, paragraphe 3, du règlement no 806/2014, le 1er février 2024, la requérante a formé un recours contre la seconde décision confirmative auprès du comité d’appel.
11 Le 22 mai 2024, le comité d’appel a adopté sa seconde décision, sous le numéro d’affaire 1/2024, par laquelle il a confirmé la seconde décision confirmative. En particulier, le comité d’appel a d’abord déclaré les arguments de la requérante recevables. Ensuite, bien que le comité d’appel ait été d’accord avec la requérante sur le fait que le CRU avait appliqué à tort l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001, pour justifier l’occultation de certaines informations concernant, notamment, la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie, il a reconnu que, pour que le refus d’accès soit fondé, il suffisait que les nouveaux motifs avancés par le CRU au soutien de sa décision ne soient pas erronés. À cet égard, le comité d’appel a estimé, en ce qui concerne l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, que, conformément à ses orientations, le CRU avait renforcé la motivation du refus qu’il avait opposé sur ce fondement. Compte tenu de cette nouvelle motivation, le comité d’appel a considéré qu’il n’y avait pas lieu de faire droit aux arguments de la requérante. En ce qui concerne l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’enquête prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, le comité d’appel a accepté les motifs présentés par le CRU. Il n’a donc pas fait droit aux arguments de la requérante sur ce point.
Conclusions des parties
12 La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la première décision confirmative, la première décision du comité d’appel, la décision implicite, la seconde décision confirmative et la seconde décision du comité d’appel ;
– condamner le CRU aux dépens.
13 Le CRU conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer le recours comme étant irrecevable dans son intégralité ;
– à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur la première décision confirmative et la première décision du comité d’appel
14 Il convient de rappeler que les conditions de recevabilité du recours s’apprécient, sous réserve de la question différente de la perte de l’intérêt à agir, au moment de l’introduction du recours. Dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, cette considération, relative au moment de l’appréciation de la recevabilité du recours, n’empêche pas le Tribunal de constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours dans l’hypothèse où un requérant qui avait initialement intérêt à agir a perdu tout intérêt personnel à l’annulation de la décision attaquée en raison d’un événement intervenu postérieurement à l’introduction dudit recours. En effet, pour qu’un requérant puisse poursuivre un recours tendant à l’annulation d’une décision, il faut qu’il conserve un intérêt personnel à l’annulation de celle-ci jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle, car, autrement, si l’intérêt à agir du requérant disparaît au cours de la procédure, une décision du Tribunal sur le fond ne peut lui procurer aucun bénéfice (voir ordonnance du 24 mars 2011, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑36/10, EU:T:2011:124, point 46 et jurisprudence citée).
15 En l’espèce, il convient de rappeler que la requérante a demandé l’accès complet aux documents mentionnés au point 3 ci-dessus. Par la première décision confirmative, la requérante a d’abord obtenu l’accès à certaines informations. Le comité d’appel, saisi du recours de la requérante contre cette décision, a ensuite renvoyé l’affaire au CRU sans faire droit toutefois à toutes les prétentions de la requérante. Puis, par la seconde décision confirmative, le CRU a divulgué des informations supplémentaires, mais n’a pas donné un accès complet aux documents demandés. Enfin, le comité d’appel, saisi du recours de la requérante contre cette seconde décision, a examiné chacun de ses arguments, y compris ceux relatifs aux expurgations pour lesquelles il ne s’était pas prononcé en sa faveur dans la première décision, comme il était appelé à le faire, et a confirmé la seconde décision confirmative.
16 Ainsi, la requérante n’a, certes, toujours pas eu accès à l’ensemble des informations auxquelles elle avait demandé l’accès.
17 Toutefois, après le réexamen complet auquel il a été procédé, la seconde décision confirmative et la seconde décision du comité d’appel expriment la dernière position du CRU et du comité d’appel. Elles ont le même objet que, respectivement, la première décision confirmative et la première décision du comité d’appel et ont, en pratique, remplacé dans l’intégralité ces dernières dans leurs effets à l’égard de la requérante.
18 Dans ces circonstances, l’éventuelle annulation de la première décision confirmative et de la première décision du comité d’appel n’est pas susceptible de procurer à la requérante un bénéfice supplémentaire par rapport à celui que lui procurerait l’annulation de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel (ordonnance du 21 septembre 2011, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑141/05 RENV, EU:T:2011:503, points 26 à 31).
19 Il s’ensuit qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la première décision confirmative et la première décision du comité d’appel.
Sur la décision implicite
20 La requérante estime que, compte tenu du silence du CRU après la première décision du comité d’appel, adoptée le 8 mars 2023 et lui renvoyant l’affaire, il existait, au moment de l’introduction du recours, le 24 mai 2023, une décision implicite, au sens de l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. La requérante a précisé à l’audience que l’adoption de la seconde décision confirmative, le 21 décembre 2023, ne modifiait pas l’existence d’une telle décision, dans la mesure où ces décisions étaient contradictoires.
21 Le CRU conteste cette argumentation.
22 En l’espèce, il est constant que le CRU a adopté la seconde décision confirmative postérieurement à l’introduction du présent recours. Par cette décision, il a accordé un accès partiel plus large aux décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21 et, pour le reste, a rejeté explicitement la demande confirmative de la requérante.
23 Dès lors, à supposer même que, en raison du silence gardé par le CRU à la suite de la première décision du comité d’appel, une décision implicite de rejet de la demande confirmative d’accès ait pu naître, il y aurait alors lieu de considérer que, en adoptant une décision explicite de rejet de cette demande, le CRU a, implicitement, mais nécessairement, procédé au retrait de ladite décision implicite (voir, en ce sens, arrêts du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, points 88 et 89, et du 26 mars 2020, ViaSat/Commission, T‑734/17, non publié, EU:T:2020:123, points 16 et 17).
24 Ce retrait de l’acte contesté, compte tenu de son caractère rétroactif (voir, en ce sens, arrêt du 17 avril 1997, de Compte/Parlement, C‑90/95 P, EU:C:1997:198, point 35), a entraîné la disparition de l’objet du litige en ce qui concerne la décision implicite.
25 Dans cette situation, l’examen des conclusions dirigées contre l’éventuelle décision implicite intervenue ne peut se justifier ni par l’objectif d’éviter que se reproduise l’illégalité reprochée ni par celui de faciliter d’éventuels recours en indemnité, lesdits objectifs pouvant être atteints par l’examen d’un recours contre la décision explicite (voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2010, Ryanair/Commission, T‑494/08 à T‑500/08 et T‑509/08, EU:T:2010:511, point 46 et jurisprudence citée), c’est-à-dire la seconde décision confirmative.
26 En l’espèce, l’adoption d’une décision explicite, à savoir la seconde décision confirmative, en tant qu’elle rejette la demande de la requérante, a eu pour effet de retirer l’éventuelle décision implicite intervenue et a donc fait disparaître, à cet égard, l’objet des conclusions en annulation dirigées contre cette décision ainsi que l’intérêt de la requérante à agir à l’égard de cette dernière.
27 Par conséquent, il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions en annulation dirigées contre l’éventuelle décision implicite intervenue.
Sur la seconde décision confirmative et la seconde décision du comité d’appel
28 À titre liminaire, dans la mesure où le CRU conteste la recevabilité des deux mémoires en adaptation déposés par la requérante afin de demander l’annulation de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel, il convient de rappeler, d’une part, que la conformité d’une demande d’adaptation de la requête à l’article 86, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal participe à la recevabilité d’un recours (arrêt du 18 octobre 2023, Belaz-upravljajusaja kompanija holdinga Belaz Holding/Conseil, T‑533/21, non publié, EU:T:2023:657, point 85) et, d’autre part, que les juridictions de l’Union européenne sont en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque cas d’espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter le recours quant au fond, sans statuer préalablement sur sa recevabilité (voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, EU:C:2002:118, points 51 et 52).
29 En l’espèce, le Tribunal considère qu’il y a lieu, dans un souci d’économie de la procédure, d’examiner d’emblée les exceptions d’illégalité et les moyens invoqués par la requérante, sans statuer préalablement sur la recevabilité des conclusions tendant à l’annulation de la seconde décision confirmative ainsi que de la seconde décision du comité d’appel.
30 À l’appui du recours, la requérante soulève trois exceptions d’illégalité. Premièrement, la requérante soutient que l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel est contraire à l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014. Deuxièmement, elle fait valoir que l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel va au-delà de ce que prévoit l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014. Cette disposition serait également illégale au regard de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, de l’article 263, cinquième alinéa, TFUE et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). Troisièmement, la requérante met en exergue le fait que l’interprétation de l’article 85, paragraphe 8, et de l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 retenue par le comité d’appel est contraire à l’article 263, cinquième alinéa, TFUE et à l’article 47 de la Charte.
31 La requérante soulève également d’autres moyens à l’égard de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel, tirés :
– le premier, de l’écoulement d’une période de neuf mois et demi entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative et d’une période de deux ans et deux mois entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel ;
– le deuxième, de la violation de l’obligation alléguée d’adopter une décision modifiée ;
– le troisième, du défaut d’identification et de divulgation des autres documents pertinents ;
– le quatrième, d’un défaut de motivation de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel ;
– le cinquième, d’une application erronée de l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre ;
– le sixième, d’une application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux ;
– le septième, d’une application erronée de l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit ;
– le huitième, de l’application implicite erronée d’autres motifs de refus et de la dissimulation du véritable motif de refus ;
– le neuvième, des conditions de la consultation des tiers ;
– le dixième, de l’approche erronée en ce qui concerne les expurgations de chaque document spécifique auquel elle a eu partiellement accès ainsi que les débats spécifiques relatifs à ces expurgations ;
– le onzième, de la violation de ses droits procéduraux ;
– le douzième, de la violation de ses droits en raison de la non‑application de règles en matière de divulgation autres que celles prévues par le règlement no 1049/2001.
32 Il importe de préciser, en ce qui concerne les exceptions d’illégalité visant les dispositions du règlement de procédure du comité d’appel, que, conformément à l’article 85, paragraphe 10, du règlement no 806/2014, le comité d’appel a adopté son règlement de procédure et l’a publié le 23 juin 2017. Il a publié une nouvelle version de ce règlement le 5 septembre 2020, puis une dernière version le 20 février 2024. Le second recours devant le comité d’appel a été introduit le 1er février 2024 et a abouti à l’adoption de la seconde décision de ce comité le 22 mai 2024. Toutefois, la teneur de l’article 20 et de l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel n’a pas changé entre la version applicable à la date d’introduction du recours et celle applicable à la date d’adoption de la seconde décision du comité d’appel.
Sur l’illégalité de l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel
33 En vertu de l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel dans ses versions applicables, lorsque le président de ce comité considère que tous les éléments de preuve sont présents, il notifie l’introduction du recours aux parties, conformément à l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014.
34 À cet égard, l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 dispose que « [l]e comité d’appel statue sur le recours dans un délai d’un mois à compter de son introduction ».
35 En l’espèce, il ressort des points 8 à 19 de la seconde décision du comité d’appel que, à la suite du dépôt du recours le 1er février 2024, ce comité a d’abord, en application de l’article 85, paragraphe 7, du règlement no 806/2014, désigné les corapporteurs, organisé l’échange de deux tours de mémoires, demandé aux parties si elles souhaitaient être entendues lors d’une audience et tenu une audience à la demande de la requérante. Ensuite, le 7 mai 2024, il a informé les parties que, tous les éléments de preuve étant présents, il notifiait l’introduction du recours aux parties, conformément à l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014. Enfin, le 22 mai 2024, en application de l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, le comité a adopté sa seconde décision.
36 La requérante soutient que l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 doit être interprété littéralement. Selon elle, le recours est introduit au moment où il a été effectivement présenté, à savoir le 1er février 2024. L’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel serait donc contraire à cette disposition, en ce qu’il définirait autrement la notion d’introduction du recours.
37 Le CRU conteste cette argumentation.
38 Les parties sont donc en désaccord quant au point de départ du délai prévu à l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014.
39 Les termes de cette disposition ne permettent pas à eux seuls une interprétation claire de ce point de départ.
40 Conformément à la jurisprudence, aux fins de l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, doivent être pris en considération non seulement les termes de celle-ci, mais aussi le contexte dans lequel elle s’insère et l’objectif qu’elle poursuit (arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International, C‑255/18, EU:C:2019:967, point 34).
41 S’agissant du contexte dans lequel s’inscrit l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, il y a lieu de faire observer que, conformément à l’article 85, paragraphe 7 de ce règlement, si le recours, formé en application de l’article 85, paragraphe 3, du même règlement, est recevable, comme en l’espèce, le comité d’appel examine s’il est fondé. S’ensuivent, conformément à l’article 85, paragraphe 7, du règlement no 806/2014, différentes étapes assurant une procédure équitable. En effet, le comité d’appel invite les parties à la procédure d’appel à présenter, dans un délai qu’il leur est imparti, leurs observations sur les communications qu’il leur a adressées ou sur celles qui émanent des autres parties à la procédure d’appel. Ces parties sont également autorisées à présenter oralement leurs observations.
42 S’agissant de l’objectif poursuivi par le règlement no 806/2014, il résulte de l’article 85 de ce règlement que le comité d’appel a été mis en place pour qu’un organe interne au CRU, composé d’experts, doté d’une certaine indépendance et exerçant des fonctions quasi judiciaires au moyen de procédures contradictoires, révise certaines décisions de cette agence. Le législateur de l’Union a entendu doter les destinataires et les personnes concernées par ces décisions du CRU d’un mécanisme administratif pour protéger leurs droits (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 9 mars 2023, ACER/Aquind, C‑46/21 P, EU:C:2023:182, point 59).
43 Pour permettre au comité d’appel d’exercer ses fonctions quasi judiciaires au moyen de procédures contradictoires et donc d’atteindre l’objectif poursuivi par le règlement no 806/2014, l’article 85, paragraphe 4, de ce règlement doit être interprété en prenant en compte l’article 85, paragraphe 7, du même règlement.
44 En fixant le point de départ prévu à l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 au moment où tous les éléments de preuve sont présents, l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel garantit en réalité que la procédure devant lui se déroule de manière contradictoire de sorte que les destinataires et les personnes concernées par ces décisions du CRU bénéficient d’un mécanisme quasi judiciaire pour protéger leurs droits.
45 Dès lors, l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel ne méconnaît pas l’article 85, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, mais met en œuvre cette disposition d’une manière cohérente avec l’article 85, paragraphe 7, du même règlement.
46 L’exception d’illégalité de l’article 20 du règlement de procédure du comité d’appel soulevée par la requérante doit donc, en tout état de cause, être rejetée comme étant non fondée sans qu’il soit besoin d’examiner si elle est recevable.
Sur l’illégalité de l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel
47 En vertu de l’article 21, paragraphe 4 du règlement de procédure du comité d’appel dans ses versions applicables, ce comité peut confirmer la décision prise par le CRU ou lui renvoyer l’affaire, conduisant ainsi, conformément à l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014, à l’adoption d’une décision modifiée par le CRU dès que raisonnablement possible compte tenu de la complexité de l’affaire et des modifications à y apporter, ainsi que dans le respect des bonnes pratiques administratives.
48 À cet égard, l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014 dispose que « [l]e comité d’appel peut confirmer la décision prise par le CRU ou lui renvoyer l’affaire » et que « [l]e CRU est lié par la décision du comité d’appel et adopte une décision modifiée pour l’affaire en cause ».
49 Selon la requérante, d’abord, l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel va au-delà de ce que prévoit l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014, ce comité n’étant pas compétent pour fixer le délai dans lequel une décision modifiée devrait être adoptée. Ensuite, cette disposition serait contraire à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, selon lequel les demandes confirmatives sont traitées avec promptitude, à savoir, sauf exceptionnellement, dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande. Enfin, cette disposition reporterait indûment l’accès au juge en violation de l’article 263, cinquième alinéa, TFUE et de l’article 47 de la Charte.
50 Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante, l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel ne fixe aucun délai. Cette disposition n’est que l’expression du principe de bonne administration. En effet, le principe du délai raisonnable, repris, en tant que composante du principe de bonne administration, dans l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, s’impose dans toute procédure administrative de l’Union (arrêts du 1er juillet 2008, Compagnie maritime belge/Commission, T‑276/04, EU:T:2008:237, point 39, et du 21 mai 2014, Catinis/Commission, T‑447/11, EU:T:2014:267, point 34).
51 Par ailleurs, le respect d’un délai raisonnable n’est nécessaire que dans les cas autres que ceux pour lesquels le législateur a défini un délai ou l’a explicitement exclu (arrêt du 5 octobre 2004, Sanders e.a./Commission, T‑45/01, EU:T:2004:289, point 59). Ainsi, en l’absence d’un délai légal, le CRU ne peut pas adopter une décision sans respecter le principe du délai raisonnable. Dans la mesure où, comme le soutient la requérante, le législateur a défini des délais à l’article 8 du règlement no 1049/2001 pour le traitement des demandes confirmatives, l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel ne peut être appliqué, dans le domaine de l’accès aux documents, que de manière cohérente avec cette disposition du règlement no 1049/2001.
52 Aussi longtemps que l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel est appliqué de manière à ne pas compromettre l’effet utile des délais et le mécanisme prévu par l’article 8 du règlement no 1049/2001, cette disposition ne méconnaît pas, contrairement à ce que soutient la requérante, l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001.
53 Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la requérante, l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel ne reporte pas indûment l’accès au juge en violation de l’article 263, cinquième alinéa, TFUE et de l’article 47 de la Charte.
54 Par conséquent, l’exception d’illégalité de l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel doit, en tout état de cause, être rejetée comme étant non fondé sans qu’il soit besoin d’examiner si elle est recevable.
Sur l’illégalité de l’interprétation donnée par le comité d’appel de l’article 85, paragraphe 8, et de l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 806/2014
55 La requérante soutient que le comité d’appel a pour pratique de considérer que, lorsqu’il a pour partie rejeté un recours et pour partie donné raison à la partie requérante en renvoyant l’affaire au CRU, il n’a pas, à l’occasion d’un recours contre la nouvelle décision du CRU, à apprécier de nouveau les parties de la première décision du CRU pour lesquelles il avait jugé qu’aucune modification n’était nécessaire. Le comité d’appel déclarerait ainsi irrecevable tout argument qui concernerait les parties de la première décision du CRU pour lesquelles aucune modification n’était nécessaire, sauf si, par ces arguments, la partie requérante soutiendrait que le CRU aurait incorrectement mis en œuvre la décision de ce comité. Selon la requérante, cette pratique du comité d’appel constitue une interprétation illégale de l’article 85, paragraphe 8, et de l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 806/2014.
56 En l’espèce, au point 63 de sa seconde décision, le comité d’appel a considéré que les arguments de la requérante devaient tous être déclarés recevables et examinés au fond.
57 Cette conclusion étant favorable à la requérante, ses arguments tirés de l’illégalité de l’interprétation donnée par le comité d’appel à l’article 85, paragraphe 8, et à l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 sont inopérants.
58 Par conséquent, l’exception d’illégalité de l’interprétation donnée par le comité d’appel de l’article 85, paragraphe 8, et de l’article 86, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 doit être rejetée comme étant inopérante.
Sur les moyens tirés de l’écoulement d’une période de neuf mois et demi entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative et d’une période de deux ans et deux mois entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel
59 La requérante fait valoir que la durée de la période s’étant écoulée entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel, mais également entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative, équivaut à un refus d’accès et qu’un tel refus est illégal.
60 Le CRU conteste cette argumentation.
61 En l’espèce, la demande d’accès a été initialement présentée le 10 mars 2022 à la Banque nationale de Croatie, mais a été enregistrée le 22 avril 2022 par le CRU. La seconde décision du comité d’appel a été adoptée le 22 mai 2024, ce qui signifie qu’un peu plus de deux ans séparent cette décision de l’enregistrement de la demande d’accès par le CRU. La première décision du comité d’appel a été adoptée le 8 mars 2023 et la seconde décision confirmative a été prise le 21 décembre 2023. Neuf mois et demi se sont donc écoulés entre ces deux décisions.
62 Dans la seconde décision du comité d’appel, ce dernier a observé que l’adoption de la seconde décision confirmative avait nécessité des consultations avec plus de dix parties prenantes différentes sur des aspects susceptibles d’avoir des répercussions importantes sur la stabilité financière, la politique de résolution et les intérêts commerciaux de l’entité concernée. Le comité d’appel a estimé que le délai entre sa première décision et la seconde décision confirmative pouvait avoir été causé par les retards pris par les parties prenantes consultées. Toutefois, il a indiqué ne pas être convaincu qu’une période de plus de neuf mois à compter de l’adoption de sa première décision constituait un délai raisonnable. À cet égard, il a relevé, d’une part, qu’il s’agissait d’une décision confirmative au titre du règlement no 1049/2001 et, d’autre part, qu’il avait donné des orientations précises au CRU dans sa première décision. Pour autant, le comité d’appel a estimé que renvoyer l’affaire au CRU pour ce motif serait sans objet, voire contre-productif, dans la mesure où un tel renvoi ne remédierait pas au retard constaté, mais risquerait de retarder l’accès de la requérante au juge.
63 En l’espèce, c’est parce que les informations demandées seraient couvertes par les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 que leur accès a été refusé. Ni le délai entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel, ni celui entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative, quand bien même seraient-ils d’une longue durée, ne peuvent modifier le refus d’accès.
64 En outre, il ne ressort pas du règlement no 1049/2001 que la conséquence d’un retard pris dans l’adoption d’une décision confirmative entraînerait automatiquement l’illégalité de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, non publié, EU:C:2016:557, points 78, 79 et 84).
65 Il n’y a donc pas lieu de constater l’illégalité du refus d’accès au motif que la période entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel et celle entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative ont été longues. En effet, l’annulation de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel pour ce seul motif aurait pour seul effet de rouvrir la procédure administrative d’accès aux documents sans pour autant fournir de raisons à l’administration de modifier le sens de son refus d’accès. Au demeurant, cette conclusion ne prive pas la requérante de l’opportunité de demander, par l’intermédiaire d’un recours en indemnité, l’indemnisation d’un préjudice éventuel résultant du retard dans la réponse apportée à sa demande d’accès (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, EU:T:2010:15, point 71).
66 Eu égard à ce qui précède, les moyens tirés de l’écoulement d’une période de neuf mois et demi entre la première décision du comité d’appel et la seconde décision confirmative et d’une période de deux ans et un mois entre la demande d’accès et la seconde décision du comité d’appel doivent être écartés comme inopérants.
Sur les moyens tirés de la violation de l’obligation alléguée d’adopter une décision modifiée
67 La requérante reproche à la seconde décision confirmative de se limiter à modifier la première décision confirmative, ainsi qu’il ressort de son libellé. Toutefois, elle estime avoir droit à une nouvelle décision intégrant les modifications et remplaçant la première décision confirmative, sous peine de voir l’annulation de cette seconde décision être interprétée comme rétablissant la décision antérieure. Ce faisant, le CRU aurait violé l’article 8 du règlement no 1049/2001, les articles 8 et 9 de sa décision SRB/ES/2017/01, du 9 février 2017, sur l’accès du public à ses documents, l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel, l’article 41 de la Charte et la première phrase de l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014, qui prévoirait expressément une décision modifiée.
68 Le CRU conteste cette argumentation.
69 Il y a lieu de constater, à l’instar du comité d’appel, que le CRU a adopté la seconde décision confirmative, dans laquelle il a indiqué, d’une part, que, conformément à la première décision du comité d’appel, il modifiait la première décision confirmative et, d’autre part, qu’il ajoutait une nouvelle section dans laquelle il fournissait une appréciation détaillée des raisons pour lesquelles le contenu des documents en cause ne pouvait pas être divulgué.
70 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que semble soutenir la requérante, il ressort du libellé de la seconde décision confirmative que celle-ci est effectivement une « décision modifiée » au sens de l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014. En outre, contrairement à ce que semble craindre la requérante, en cas d’annulation de la seconde décision confirmative et de la seconde décision du comité d’appel, le CRU ou le comité d’appel exécuteraient l’arrêt du Tribunal, le refus par une institution ou une agence d’exécuter un arrêt du Tribunal entraînant, à lui seul, un préjudice moral pour la partie qui a obtenu un arrêt favorable (arrêt du 15 octobre 2008, Camar/Commission, T‑457/04 et T‑223/05, non publié, EU:T:2008:439, point 60).
71 Partant, aucune violation de l’article 8 du règlement no 1049/2001, des articles 8 et 9 de la décision SRB/ES/2017/01, de l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du comité d’appel, de l’article 41 de la Charte et de la première phrase de l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014 ne doit être relevée.
72 Par conséquent, il convient d’écarter les moyens tirés de la violation de l’obligation alléguée d’adopter une décision modifiée.
Sur les moyens tirés du défaut d’identification et de divulgation des autres documents pertinents
73 D’une part, la requérante soutient que, initialement, la demande d’accès avait pour objet non seulement les décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21, mais également tous les autres documents pertinents liés aux actions de la BCE et du CRU à l’égard de Sberbank Croatie. Il en serait de même pour la demande confirmative. Ainsi, le CRU aurait omis d’identifier, dans la seconde décision confirmative, les autres documents entrant dans le champ de la demande d’accès. Selon la requérante, il est invraisemblable qu’aucun autre document que ceux identifiés par le CRU dans la seconde décision confirmative n’existe, puisqu’il est évident que les actions de ce dernier ainsi que celles de la BCE à l’égard de Sberbank Croatie ont généré un grand nombre de documents tels que des courriels, des procès-verbaux de réunions ainsi que des enregistrements d’appels et de vidéoconférences. En outre, le CRU aurait violé l’article 296 TFUE et l’article 41 de la Charte en ne fournissant aucune raison pour expliquer l’inexistence d’autres documents pertinents, ni aucun motif justifiant le refus de divulguer ces documents.
74 D’autre part, la requérante reproche au comité d’appel d’avoir considéré qu’elle avait limité la portée de la demande d’accès lors de sa demande confirmative.
75 Le CRU conteste cette argumentation.
76 En l’espèce, force est de constater, à l’instar du comité d’appel, que, dans la demande confirmative, la requérante a précisé, sous le titre C, intitulé « Informations demandées », ce qui suit :
« Sans préjudice de toute demande future, [la requérante] demande à ce stade au CRU de réexaminer sa position et de lui fournir les documents suivants dans leur version non expurgée :
– la décision [SRB/EES/2022/17], notamment en ce qui concerne les informations permettant de déterminer que la défaillance [de Sberbank Croatie] est avérée ou prévisible ; la justification de l’absence de possibilité d’utiliser d’autres méthodes ; et la justification relative à l’intérêt public en République de Croatie ; et
– la décision [SRB/EES/2022/21], notamment en ce qui concerne les informations relatives aux valorisations [de Sberbank Croatie]. »
77 Étant donné qu’il ressort sans ambiguïté de la partie de la demande confirmative consacrée à l’identification des informations demandées que la demande d’accès visait, dès ce moment, uniquement les décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21, il n’est pas établi que le CRU aurait omis d’identifier d’autres documents pertinents, ni que le comité d’appel aurait eu tort de considérer que cette demande d’accès se limitait à ces deux documents.
78 Dans ces circonstances, la requérante ne peut reprocher au CRU de ne pas avoir explicitement donné les raisons pour lesquelles il n’existait pas d’autres documents relevant du champ de sa demande d’accès, ni alléguer qu’il aurait violé l’article 296 TFUE et l’article 41 de la Charte.
79 Les autres arguments de la requérante ne sont pas de nature à modifier ce constat.
80 Bien que, dans la demande confirmative, sous le titre A, intitulé « Base juridique », la requérante ait affirmé qu’elle demandait à ce que le CRU revoie sa position et lui fournisse des informations complètes et non expurgées relatives à la procédure de résolution ouverte à l’égard, entre autres, de Sberbank Croatie, cette affirmation ne peut être considérée comme étant suffisamment précise pour permettre au CRU d’identifier les informations demandées. Il en est d’autant plus ainsi que, contrairement à ce que soutient la requérante, la partie de la demande confirmative, sous le titre C, intitulée « Informations demandées », est, à l’inverse, expresse et non équivoque.
81 Par conséquent, les moyens tirés du défaut d’identification et de divulgation des autres documents pertinents doivent être écartés.
Sur les moyens tirés d’un défaut de motivation et de l’invocation illégale de nouveaux motifs à l’appui du refus d’accès
– Seconde décision confirmative
82 En substance, la requérante fait valoir que le CRU a violé l’obligation de motivation, l’article 296 TFUE, l’article 41 de la Charte ainsi que le droit d’accès aux documents qu’elle tire de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, en ce que la seconde décision confirmative n’est pas suffisamment motivée. Selon la requérante, le raisonnement du CRU est vague et général et n’expose pas, pour chaque document ou chaque expurgation, les raisons pour lesquelles ils seraient couverts par les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001.
83 Le CRU conteste cette argumentation.
84 Il convient de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir arrêts du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, point 544 et jurisprudence citée, et du 1er juin 2022, Algebris (UK) et Anchorage Capital Group/Commission, T‑570/17, EU:T:2022:314, point 146 et jurisprudence citée].
85 En l’espèce, il doit également être tenu compte de la nécessité pour le CRU de s’abstenir de faire état d’éléments qui porteraient indirectement atteinte aux intérêts que les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ont spécifiquement pour objet de protéger, ainsi que le soulignent l’article 9, paragraphe 4, et l’article 11, paragraphe 2, de ce règlement (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 83).
86 Dans la seconde décision confirmative, la première section concerne le champ de la demande d’accès. Dans cette section, le CRU rappelle, notamment, le libellé de la demande d’accès que la Banque nationale de Croatie lui a transférée. Il précise que les documents relevant du champ de cette demande sont la décision SRB/EES/2022/17 et la décision SRB/EES/2022/21.
87 Dans une deuxième section, le CRU fait état de remarques préliminaires. Le CRU précise que, aux fins de son appréciation, il prend en compte tant les arguments de la requérante que les considérations du comité d’appel. Il décide donc d’accorder un accès plus étendu à ces documents. Le CRU indique également que, pour les documents qui contiennent des informations concernant ou provenant de tiers, il a consulté les personnes concernées. Par ailleurs, le CRU rappelle que le droit d’accéder à des documents ne dépend pas de l’intérêt de la personne qui les demande et que, en vertu de l’article 88, paragraphe 5, du règlement no 806/2014, il est tenu de s’assurer que des informations ne soient pas confidentielles avant de les divulguer.
88 Dans une troisième section, le CRU mentionne les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 qu’il estime pertinentes dans le cas d’espèce.
89 La quatrième section de la seconde décision confirmative contient des explications plus détaillées au sujet des expurgations présentes dans les deux documents en cause. Le CRU explique comment la divulgation des informations en cause pourrait porter atteinte à l’intérêt protégé par l’exception invoquée.
90 Dans une cinquième section, le CRU explique qu’il n’a trouvé aucun argument permettant de justifier un intérêt public supérieur à la divulgation et que la requérante n’en a pas présenté de pertinents.
91 Eu égard à ce qui précède, la requérante est à même de comprendre les raisons spécifiques pour lesquelles le CRU a considéré que la divulgation des informations demandées tombait sous le coup des exceptions invoquées et le Tribunal est à même d’exercer son contrôle.
92 Dès lors, les arguments de la requérante tirés d’une violation de l’obligation de motivation, de l’article 296 TFUE, de l’article 41 de la Charte ainsi que du droit d’accès aux documents qu’elle tire de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 doivent être écartés.
– Seconde décision du comité d’appel
93 D’abord, la requérante fait valoir que la seconde décision du comité d’appel n’est pas suffisamment motivée afin de déterminer si la motivation de la seconde décision confirmative était elle-même suffisante. Le comité d’appel se serait contenté de mentionner que le CRU avait fourni des explications supplémentaires dans la seconde décision confirmative. Ensuite, la requérante rappelle que le comité d’appel avait estimé, dans sa première décision, que la motivation du CRU n’était pas plausible. Elle estime que la préoccupation du CRU réside dans la circonstance que l’entité concernée était dans une bonne situation financière et que, par voie de conséquence, d’autres banques se trouvant dans une situation financière tout aussi bonne auraient pu craindre un traitement tout aussi sévère. Toutefois, la divulgation d’informations positives ne peut pas, selon la requérante, avoir d’incidence négative sur l’entité concernée. La motivation présentée par le CRU ne serait donc qu’un prétexte. Enfin, la requérante estime que le comité d’appel a manqué de constater que le CRU avait illégalement invoqué de nouveaux motifs à l’appui du refus d’accès.
94 Le CRU conteste cette argumentation.
95 Premièrement, l’article 85, paragraphe 9, du règlement no 806/2014 prévoit que « [l]es décisions du comité d’appel sont motivées ».
96 Dans sa première décision, le comité d’appel avait constaté que la motivation de la première décision confirmative était insuffisante, le CRU n’ayant pas suffisamment expliqué pourquoi certaines parties des documents demandés devaient être occultées. En revanche, dans sa seconde décision, le comité d’appel a constaté que la seconde décision confirmative incluait une nouvelle section qui renforçait les motifs de refus d’accès pour chaque document concret et chaque partie de ces documents. Le comité d’appel a notamment constaté, au point 83 de sa seconde décision, que cette nouvelle section faisait référence aux expurgations spécifiques et à leur justification au titre des exceptions pertinentes prévues par le règlement no 1049/2001.
97 Il résulte de ce qui précède que le comité d’appel a suffisamment donné les raisons pour lesquelles il a considéré que la seconde décision confirmative était motivée. Partant, la requérante ne saurait soutenir qu’elle n’était pas en mesure de les comprendre et que ce comité avait violé son obligation de motivation.
98 Deuxièmement, il convient d’observer que l’argumentation de la requérante selon laquelle le comité d’appel aurait dû douter de la plausibilité des motifs exposés par le CRU dans la seconde décision confirmative questionne le bien-fondé de ces motifs et, partant, est dénuée de pertinence dans le cadre du présent moyen, tiré d’un défaut de motivation de la seconde décision du comité d’appel (voir, en ce sens, arrêts du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil, C‑535/14 P, EU:C:2015:407, point 37, et du 30 mai 2017, Safa Nicu Sepahan/Conseil, C‑45/15 P, EU:C:2017:402, point 85).
99 Troisièmement, au point 122 de sa seconde décision, le comité d’appel a constaté que les juridictions de l’Union avaient déjà admis que, au stade de la réponse confirmative à une demande d’accès, une institution pouvait modifier les exceptions invoquées au stade de la réponse initiale à cette demande, ainsi qu’il ressortait des points 82 à 84 de l’arrêt du 28 mars 2017, Deutsche Telekom/Commission (T‑210/15, EU:T:2017:224). Selon le comité d’appel, le même principe s’applique lorsqu’une décision confirmative est renvoyée par ce comité au CRU en vue de l’adoption d’une décision confirmative modifiée.
100 En l’espèce, le comité d’appel a correctement relevé qu’il avait invité le CRU à modifier la motivation de sa décision confirmative afin de la renforcer et que, ce faisant, il avait dû procéder à une nouvelle appréciation des informations à divulguer à la lumière des orientations de ce comité et des motifs à exposer pour justifier les expurgations restantes. Comme l’a observé le comité d’appel, cette réappréciation pouvait légitimement le conduire à la conclusion que certaines expurgations qui, dans la première décision confirmative, étaient fondées sur une exception que ce comité avait jugée inapplicable ou insuffisamment justifiée pouvaient être également fondées sur la base d’une exception différente, que le CRU n’avait pas prise en considération auparavant, pensant que l’exception sur laquelle il s’était initialement fondé était suffisante.
101 À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que, aux fins d’apprécier une demande d’accès à des documents détenus par elle, une institution ou une agence peut prendre en compte plusieurs motifs de refus visés à l’article 4 du règlement no 1049/2001 (arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 113, et du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 55).
102 Il s’ensuit que le CRU, dans la décision modifiée qu’il adopte à la suite d’un renvoi du comité d’appel, ne saurait être tenu de se limiter au fondement juridique retenu à l’appui de sa première décision confirmative s’il existe un autre motif de refus (arrêts du 28 mars 2017, Deutsche Telekom/Commission, T‑210/15, EU:T:2017:224, point 83, et du 29 septembre 2021, AlzChem Group/Commission, T‑569/19, EU:T:2021:628, point 111).
103 Par conséquent, la requérante ne peut reprocher au comité d’appel d’avoir considéré que le CRU pouvait fonder le refus d’accès sur de nouveaux motifs.
104 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’écarter ces arguments soulevés par la requérante à l’égard de la seconde décision du comité d’appel.
105 Par conséquent, les moyens tirés d’un défaut de motivation et de l’invocation illégale de nouveaux motifs doivent être écartés.
Sur les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre
106 Selon l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001, un refus est opposé lorsque la divulgation porterait atteinte à la protection de la politique financière, monétaire et économique de l’Union ou d’un État membre.
107 D’une part, la requérante soutient que le CRU, en tant qu’agence, n’est pas compétent en matière de politique financière, économique et monétaire. Il ne lui serait donc pas permis d’invoquer l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001.
108 D’autre part, la requérante fait valoir que le CRU a repris, dans la seconde décision confirmative, un raisonnement que le comité d’appel avait déjà écarté dans sa première décision. Bien que ce comité ait également fait ce constat, dans sa seconde décision, il aurait commis une erreur en s’abstenant de constater que, en ne respectant pas ses orientations, le CRU avait violé l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014. En outre, elle reproche à ce comité d’avoir accepté que le CRU présente de nouveaux motifs pour justifier le refus d’accès. Le comité d’appel aurait commis une autre erreur en acceptant que le CRU invoque l’article 4, paragraphe 1, sous c), de la décision 2004/258/CE de la BCE, du 4 mars 2004, relative à l’accès du public aux documents de la BCE (JO 2004, L 80, p. 42), afin de justifier les expurgations effectuées.
109 Le CRU conteste cette argumentation.
110 En premier lieu, il y a lieu de relever, comme l’a souligné le comité d’appel, que, pour refuser l’accès à un document, l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001 exige non pas que l’institution ou l’agence détentrice du document ait des compétences en matière de politique financière, monétaire ou économique, mais que la divulgation de ce document porte atteinte à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre. Dès lors, quand bien même le CRU n’aurait pas de compétence en ces matières, cela ne pourrait pas l’empêcher de constater que des informations sont couvertes par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001 et d’en refuser l’accès.
111 En second lieu, il convient, d’abord, de relever, à l’instar du comité d’appel, que, quand bien même il aurait été erroné ou contraire aux orientations de ce comité de justifier l’occultation des informations, telles que celles portant sur les pourcentages de sorties de dépôts, sur la couverture de liquidité et sur la capacité de rééquilibrage, sur le fondement de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001, il se trouve que le CRU a également justifié l’occultation desdites informations sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du même règlement. Le comité d’appel a donc conclu à juste titre que les arguments de la requérante à cet égard étaient inopérants. Il ne saurait donc être reproché à ce comité de ne pas avoir examiné ou constaté une éventuelle violation de l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014.
112 Ensuite, pour les raisons exposées aux points 99 à 103 ci-dessus, la requérante ne saurait reprocher au comité d’appel d’avoir pris en compte les nouveaux motifs présentés par le CRU et fondés sur l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.
113 Enfin, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort de la seconde décision confirmative que le CRU s’est exclusivement fondé sur les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 pour justifier le refus d’accès. En effet, la seconde décision confirmative indique que, consultée à ce sujet, la BCE a expliqué que certaines informations relatives à la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie relevaient, selon elle, du champ d’application de l’article 4, paragraphe 1, sous c), de la décision 2004/258, qui prévoit que la BCE refuse l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection « de la confidentialité des informations qui sont protégées en tant que tel[les] en vertu du droit de l’Union », lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, de la même décision, qui prévoit le refus d’accès pour la protection « des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle ». La lecture de la seconde décision confirmative permet de constater que, après avoir résumé ces commentaires de la BCE, le CRU s’est limité à expliquer qu’il les avait pris en considération et qu’il estimait, lui aussi, que ces informations devaient rester confidentielles. Il ne ressort pas, en revanche, du libellé de cette décision que le CRU aurait fondé le refus d’accès sur les dispositions de la décision 2004/258.
114 Dès lors, le comité d’appel ne peut être regardé comme ayant accepté que le CRU se fonde sur les dispositions de la décision 2004/258.
115 Par conséquent, les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre doivent, en tout état de cause, être écartés.
Sur les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux
116 Selon l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.
117 À titre liminaire, il importe de rappeler que, dans sa première décision, le comité d’appel a considéré que l’occultation de certaines informations, notamment les raisons à l’origine des difficultés de Sberbank Croatie, les principaux pourcentages concernant la situation de liquidité de cet établissement, certaines évaluations faites par la BCE ou le CRU, les difficultés de cet établissement et les tentatives d’y remédier, le nombre d’offres reçues, les informations sur les effets de la défaillance de l’établissement sur la stabilité financière en Croatie, sous couvert de l’application de l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement no 1049/2001, n’était pas justifiée.
118 À la suite de cette décision, le CRU a donné un accès plus large aux documents en cause. Toutefois, il a estimé que les informations concernant la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie et les mesures connexes étaient notamment couvertes par l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et ne pouvaient donc pas être divulguées.
119 La requérante fait valoir, d’une part, que le CRU a erronément appliqué l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Le raisonnement du CRU dans la seconde décision confirmative serait à cet égard imprécis, vague et hypothétique. Par ailleurs, la requérante estime, en substance, qu’il n’est pas plausible qu’aucun intérêt public supérieur à la divulgation des informations demandées n’ait pu être identifié.
120 D’autre part, la requérante fait valoir que le comité d’appel a commis une erreur en acceptant les motifs du CRU fondés sur l’exception relative aux intérêts commerciaux prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Selon la requérante, dans sa première décision, le comité d’appel a affirmé que l’intérêt public exigeait plus de transparence et, dans sa seconde décision, il a admis que la référence faite par le CRU à l’intérêt public supérieur était succincte. Elle en déduit que la motivation de la seconde décision confirmative n’est pas adéquate.
121 Le CRU conteste cette argumentation.
122 À titre liminaire, il importe de rappeler que, dans la mesure où elles dérogent au principe d’un accès le plus large possible aux documents en restreignant cet accès, les exceptions à ce principe, notamment celles prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, doivent, selon une jurisprudence constante, être interprétées et appliquées strictement (voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 73, et du 17 octobre 2013, Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:671, point 30).
123 Il s’ensuit que lorsqu’une institution ou une agence refuse l’accès à un document dont la communication lui a été demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par l’exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 qu’elle invoque. En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 76 et jurisprudence citée).
124 Il importe également de préciser que toutes les informations relatives à une société et à ses relations d’affaires ne sauraient être considérées comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions ou les agences. Afin d’appliquer cette exception, il est nécessaire de démontrer que les documents litigieux contiennent des éléments susceptibles, du fait de leur divulgation, de porter atteinte aux intérêts commerciaux d’une personne morale. Il en est ainsi lorsque, notamment, les documents demandés contiennent des informations commerciales sensibles relatives, en particulier, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales ou lorsque ceux-ci contiennent des données propres à l’entreprise qui mettent en avant son expertise (arrêts du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, points 82 à 84, et du 11 juillet 2018, Rogesa/Commission, T‑643/13, non publié, EU:T:2018:423, points 69 et 70).
125 S’agissant de l’intérêt public supérieur au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, il est le seul susceptible de primer la nécessité de protéger les intérêts commerciaux visés à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, de ce règlement (arrêt du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 145).
126 Il incombe à celui qui fait valoir l’existence d’un intérêt public supérieur d’invoquer de manière concrète les circonstances justifiant la divulgation des documents concernés (voir arrêt du 29 septembre 2021, AlzChem Group/Commission, T‑569/19, EU:T:2021:628, point 124 et jurisprudence citée).
127 Ainsi, le régime de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 est fondé sur une mise en balance des intérêts qui s’opposent dans une situation donnée, à savoir, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par cette divulgation. La décision prise à propos d’une demande d’accès à des documents dépend de la question de savoir quel est l’intérêt qui doit prévaloir dans le cas d’espèce (arrêt du 29 septembre 2021, AlzChem Group/Commission, T‑569/19, EU:T:2021:628, point 125).
128 En premier lieu, s’agissant de la seconde décision confirmative, il convient de relever, premièrement, que, ainsi qu’il ressort de cette décision, les informations occultées par le CRU en application de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 sont des informations sur la situation de Sberbank Croatie, comme les pourcentages de sorties de dépôts, la couverture des besoins de liquidité, la capacité de rééquilibrage et ses capitaux propres, des informations sur les mesures examinées ou prises pour remédier à la détérioration de cette situation ainsi que les évaluations faites à ce sujet.
129 Dans cette décision, le CRU a constaté que la nécessité de protéger les intérêts commerciaux de Sberbank Croatie continuait d’exister, étant donné qu’elle demeurait un établissement de crédit actif. Compte tenu de la nature des informations occultées, exposée au point 125 ci-dessus, le CRU a considéré à juste titre que leur divulgation aurait pu atteindre les intérêts de Sberbank Croatie, alors même que le dispositif de résolution à son égard avait pour but de lui permettre de poursuivre ses activités. En outre, comme le CRU l’a énoncé dans la seconde décision confirmative, la divulgation d’informations commerciales sensibles, que les établissements partagent dans le cadre de la planification d’une résolution, risquait de porter atteinte à leur volonté de coopérer pleinement avec les autorités de résolution à l’avenir. Le CRU a indiqué que ces informations allaient au-delà de ce qui était public et qu’il avait recueilli les commentaires des personnes impliquées, en particulier de Sberbank Croatie.
130 Ainsi, dans la seconde décision confirmative, le CRU a défini les informations occultées concernées par l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, a expliqué avoir consulté les personnes concernées et a donné les raisons spécifiques pour lesquelles l’accès à ces informations pouvait porter concrètement et effectivement atteinte aux intérêts commerciaux desdites personnes. Dès lors, la requérante ne saurait soutenir que la seconde décision confirmative est imprécise, vague et hypothétique à cet égard.
131 Deuxièmement, le CRU a estimé dans la seconde décision confirmative qu’un intérêt public supérieur à la divulgation faisait défaut.
132 À cet égard, la requérante estime qu’il doit exister un intérêt supérieur à la divulgation, étant donné que le CRU a publié des éléments sur la situation de Sberbank Croatie au moment même où cette situation prévalait. Toutefois, quand bien même le CRU a vu un intérêt à informer le public en publiant, à l’époque, certaines informations au sujet de la situation de cette banque, il ne ressort pas du dossier qu’il aurait, à cette occasion, divulgué des informations confidentielles affectant les intérêts commerciaux des personnes impliquées. Cet intérêt ne primait donc pas sur la nécessité de protéger les informations dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux des établissements concernés.
133 Contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort du point 129 ci-dessus que le CRU a correctement mis en balance les intérêts divergents en jeu. De manière succincte, mais claire, le CRU a constaté qu’il n’avait pas été en mesure d’identifier un quelconque intérêt public supérieur justifiant la divulgation. Il a relevé que la requérante n’avait avancé aucun argument de nature à démontrer l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant une telle divulgation. Il a ajouté qu’un éventuel intérêt à obtenir des documents aux fins d’une procédure juridictionnelle constituait un intérêt privé.
134 Dans ces circonstances, faute d’argument de nature à démontrer l’existence d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des informations en cause, il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation du CRU à cet égard.
135 En second lieu, s’agissant du comité d’appel, ce dernier a estimé que ce n’était pas pour nier le régime de transparence que le CRU avait utilisé l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, mais pour refuser la divulgation de certaines parties des documents en cause. Le comité d’appel a noté, s’agissant des expurgations justifiées sur le fondement de cette exception, que le CRU avait précisé que les intérêts protégés étaient ceux de Sberbank Croatie, qui continuait d’exercer des activités bancaires indépendamment de son ancien actionnaire. Le comité d’appel a ensuite examiné la question de savoir si le CRU avait respecté les orientations qu’il avait dégagées dans sa première décision. À cet égard, il a constaté que le CRU avait revu sa position et avait divulgué des parties supplémentaires des documents en cause. Le CRU aurait aussi confirmé l’occultation d’autres parties de ces documents, en fournissant une justification supplémentaire quant aux raisons pour lesquelles ces parties spécifiques ne pouvaient pas être divulguées au titre de cette exception. En substance, le comité d’appel a indiqué que, pour cette exception, les orientations qu’il avait dégagées dans sa première décision étaient générales, puisqu’il avait invité le CRU à expliquer, de manière claire et non équivoque, quelles expurgations étaient justifiées par quelle exception spécifique. Finalement, le comité d’appel a considéré que, dans la mesure où le CRU avait renforcé la motivation relative à cette exception, il s’était conformé auxdites orientations.
136 À cet égard, bien que la requérante conteste que le CRU se soit dûment conformé aux orientations dégagées par le comité d’appel dans sa première décision, il y a lieu de relever que, d’une part, le comité d’appel a affirmé à juste titre que, dans sa première décision, il avait reproché au CRU de ne pas avoir dûment justifié plusieurs expurgations de manière claire et non équivoque. D’autre part, il est vrai que les orientations qu’il a dégagées, dans sa première décision, à l’égard de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 étaient générales.
137 Dans ces circonstances, force est de constater, à l’instar du comité d’appel, que la seconde décision confirmative contient pour chaque information concernée, les raisons spécifiques pour lesquelles le CRU a considéré que leur divulgation tombait sous le coup de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 et que, dès lors, le CRU a respecté les orientations dégagées par ce comité dans sa première décision. Il ne saurait donc être soutenu que le CRU ne s’est pas conformé à la première décision du comité d’appel. Cet argument de la requérante doit être écarté.
138 Par ailleurs, ainsi qu’il ressort des points 133 et 134 ci-dessus, la motivation présentée dans la seconde décision confirmative au sujet de l’intérêt public supérieur à la divulgation, quoique succincte, était, comme l’a considéré en substance le comité d’appel, suffisante. Au demeurant, la requérante n’a pas identifié d’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des informations concernées ni devant le comité d’appel ni devant le Tribunal.
139 Par conséquent, les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux doivent être écartés.
Sur les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit
140 L’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 dispose que « [l]es institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection […] des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit […] à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé ».
141 D’une part, la requérante fait valoir, en substance, que le CRU n’avait pas initialement invoqué l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 et qu’il ne pouvait ni rectifier ni compléter la motivation de sa décision à la suite du renvoi de l’affaire devant lui, et ce d’autant plus qu’il n’avait pas entendu la requérante à ce sujet. La requérante estime que cette exception n’est pas pertinente s’agissant de la procédure de valorisation, puisqu’un évaluateur n’est chargé d’aucune inspection ou enquête. En outre, garder l’identité de l’évaluateur confidentielle serait incompatible avec l’article 20 du règlement no 806/2014, qui prévoit que la valorisation est effectuée par une personne indépendante. Selon la requérante, le libellé de la seconde décision confirmative suggère que l’identité de l’évaluateur doive toujours rester confidentielle. Par ailleurs, la requérante soutient qu’il existe un intérêt public supérieur à la divulgation, dans la mesure où il s’agit du deuxième dispositif de résolution adopté par le CRU et où le recours à un évaluateur indépendant et les tâches qui lui incombent sont un élément central de la manière dont le CRU s’acquitte de ses responsabilités en matière de résolution.
142 D’autre part, la requérante fait valoir que, dans sa seconde décision, le comité d’appel a commis une erreur en acceptant que le CRU invoque l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 en tant que motif supplémentaire. Cela ressortirait notamment de la jurisprudence invoquée par la requérante devant le comité d’appel, mais ce dernier aurait omis de l’examiner. Selon la requérante, le comité d’appel a d’ailleurs commis une erreur en se fondant sur une jurisprudence qui n’était pas applicable à la situation dans laquelle une affaire est renvoyée au CRU avec des orientations à suivre. Il aurait également omis de donner les raisons pour lesquelles il a considéré que la divulgation de l’identité et du rôle de l’évaluateur pouvait avoir une incidence négative sur l’accomplissement du processus d’évaluation.
143 Le CRU conteste cette argumentation.
144 En premier lieu, il convient, d’abord, de préciser que, ainsi qu’il ressort des points 99 à 103 ci-dessus, la requérante ne saurait reprocher au CRU d’avoir fondé le refus d’accès aux informations concernant l’évaluateur sur une autre exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001, ni au comité d’appel de l’avoir accepté.
145 Par ailleurs, si la requérante soutient qu’elle n’a pas été entendue avant l’adoption de la seconde décision confirmative, elle a présenté, au titre de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, une demande de décision confirmative. À cette occasion, elle a eu la possibilité de transmettre ses observations en ce qui concerne le refus d’accès opposé par le CRU. La seconde décision confirmative, bien qu’elle ait été adoptée à la suite du renvoi de l’affaire par le comité d’appel, est une réponse à cette demande confirmative, au sens de l’article 8 du règlement no 1049/2001. Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer qu’elle a eu la possibilité de contester le refus d’accès opposé par le CRU. De plus, en l’espèce, même si la requérante n’a pas fait connaître son point de vue quant à l’application de l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 par le CRU auprès de ce dernier, elle l’a fait connaître auprès du comité d’appel, dans le cadre de recours introduit en vertu de l’article 85, paragraphe 3, du règlement no 806/2014, avant que celui-ci n’adopte sa seconde décision.
146 Ensuite, il y a lieu de rappeler que l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, qui, comme toute exception au droit d’accès aux documents, doit être interprétée et appliquée strictement, ne vise pas à protéger les activités d’enquête en tant que telles, mais les objectifs poursuivis par ces activités (arrêt du 5 avril 2017, France/Commission, T‑344/15, EU:T:2017:250, point 83). L’exception n’est donc applicable que si la divulgation des documents en cause risque de mettre en péril l’achèvement de telles activités (arrêts du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 109, et du 12 décembre 2019, Montanari/SEAE, T‑692/18, non publié, EU:T:2019:850, point 59).
147 Cette exception est également applicable à un rapport d’enquête ou d’inspection dont la divulgation mettrait en péril des activités d’inspection ou d’enquête qui se poursuivraient, dans un délai raisonnable, sur la base de son contenu (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 2011, Toland/Parlement, T‑471/08, EU:T:2011:252, point 47), même si l’enquête ou l’inspection ayant donné lieu audit rapport, auquel l’accès est demandé, est close. Dans cette hypothèse, il convient alors de vérifier si, à la date de la décision refusant l’accès aux documents demandés, étaient encore en cours des activités d’inspection ou d’enquête qui auraient pu être mises en péril par la divulgation de tels documents, et si ces activités se sont poursuivies dans un délai raisonnable (voir, en ce sens, arrêts du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 113, et du 12 décembre 2019, Montanari/SEAE, T‑692/18, non publié, EU:T:2019:850, point 60).
148 En l’espèce, dans la seconde décision confirmative, le CRU a expliqué que la procédure de valorisation, conformément à l’article 20 du règlement no 806/2014, était une étape préparatoire nécessaire aux fins de l’adoption de la mesure de résolution et visait notamment à permettre une valorisation juste, prudente et réaliste de l’actif et du passif de l’entité soumise à une procédure de résolution. À la suite de la mesure de résolution, l’activité d’enquête se poursuivrait sous la forme d’une procédure de valorisation, prévue à l’article 20, paragraphe 16, du règlement no 806/2014, qui viserait à préserver les droits fondamentaux des actionnaires et des créanciers affectés. Au moment de l’adoption de cette décision, cette procédure de valorisation, effectuée par l’évaluateur indépendant, était en cours. Dans ce contexte, le CRU a considéré que l’identité et le rôle de l’évaluateur indépendant étaient couverts par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001. Selon le CRU, la divulgation de ces informations alors que la procédure de valorisation au titre de l’article 20, paragraphe 16, du règlement no 806/2014 était en cours pouvait avoir une incidence négative sur l’achèvement de la procédure de valorisation en compromettant la capacité de l’évaluateur indépendant à finaliser la valorisation de manière indépendante à l’abri de pressions extérieures. Le CRU a donc considéré que la divulgation de l’identité et du rôle de l’évaluateur indépendant pourrait porter atteinte à l’objectif de la procédure de valorisation. Par ailleurs, le CRU a indiqué ne pas avoir identifié d’intérêt public supérieur à divulguer ces informations.
149 À cet égard, il y a lieu de constater, à l’instar du comité d’appel, que la Cour a précisé que la notion d’enquête, figurant à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, était une notion autonome du droit de l’Union, qui devait être interprétée en tenant compte, notamment, de son sens habituel ainsi que du contexte dans lequel elle s’insérait (voir arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 45 et jurisprudence citée).
150 La Cour a estimé que, sans qu’il soit besoin de dégager une définition exhaustive des « activités d’enquête », au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, une telle activité était une procédure structurée et formalisée dont l’objectif était la collecte et l’analyse d’informations afin que l’institution concernée puisse adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. Par exemple, la notion d’« enquête » était susceptible de couvrir une activité visant à constater des faits afin d’évaluer une situation donnée. De même, il n’était pas indispensable, pour qu’une procédure soit qualifiée d’« enquête », que la position adoptée par l’institution concernée pour accomplir ses fonctions soit revêtue de la forme d’une décision au sens de l’article 288, quatrième alinéa, TFUE. Une telle position pouvait prendre la forme, notamment, d’un rapport ou d’une recommandation (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, points 46 à 48).
151 Comme le fait valoir le CRU, la procédure de valorisation est une procédure structurée et formalisée par l’article 20, paragraphe 16, du règlement no 806/2014, qui vise à lui permettre de décider s’il y a lieu d’indemniser les actionnaires et les créanciers affectés par la résolution. Contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que la procédure de valorisation est effectuée par un évaluateur indépendant n’est pas pertinent aux fins de déterminer s’il y a lieu de la qualifier d’« activité d’enquête ».
152 Dans ces conditions, il n’y pas lieu de remettre en cause l’appréciation du CRU, confirmée par le comité d’appel, selon laquelle les informations concernant l’évaluateur indépendant relevaient d’une activité d’enquête au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.
153 Dans la mesure où la procédure de valorisation était encore en cours au moment de l’adoption de la seconde décision confirmative, le CRU ainsi que le comité d’appel ont constaté à juste titre que la divulgation des informations concernant l’évaluateur indépendant pouvait porter atteinte à l’objectif de cette procédure. Contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas du libellé de la seconde décision confirmative que le CRU aurait considéré que l’identité de l’évaluateur devait toujours rester confidentielle. En effet, le CRU s’est fondé sur les circonstances évoquées au point 148 ci-dessus. En outre, il n’existe aucun indice que l’évaluateur chargé par le CRU de cette procédure de valorisation ne serait pas indépendant. Contrairement à ce que soutient la requérante, le seul fait que les informations concernant l’évaluateur étaient, au moment de l’adoption de la seconde décision confirmative, couvertes par l’exception prévue de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 n’est donc pas contraire à l’article 20 du règlement no 806/2014.
154 Enfin, seul un intérêt public supérieur au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 est susceptible de primer la nécessité de protéger les objectifs des activités d’enquête visés à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, de ce règlement (voir point 125 ci-dessus).
155 Alors qu’il incombe à l’institution concernée de mettre en balance des intérêts divergents, il appartient à la requérante d’invoquer de manière concrète des circonstances fondant un tel intérêt public supérieur. L’exposé de considérations d’ordre purement général ne saurait suffire aux fins d’établir qu’un intérêt public supérieur prime les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en cause (voir, en ce sens, arrêts du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 158, et du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 131 et jurisprudence citée).
156 En l’espèce, ainsi qu’il ressort de la seconde décision confirmative, résumée au point 148 ci-dessus, le CRU a estimé qu’un intérêt public supérieur faisait défaut.
157 Devant le Tribunal, la requérante a avancé qu’il existait un intérêt à la divulgation, dans la mesure où il s’agissait du deuxième dispositif de résolution adopté par le CRU et où le recours à un évaluateur indépendant était un élément central de la manière dont le CRU s’acquittait de ses responsabilités. Toutefois, il y a lieu de considérer que, eu égard à la jurisprudence citée au point 155 ci-dessus, des considérations aussi générales ne sont pas de nature à établir qu’un intérêt public supérieur primait les motifs justifiant le refus d’accès aux informations concernant l’évaluateur indépendant.
158 En second lieu, dans la seconde décision du comité d’appel, ce dernier a relevé que le CRU avait identifié les informations spécifiques couvertes par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 et avait expliqué que, la procédure de valorisation prévue à l’article 20 du règlement no 806/2014 étant toujours en cours, la divulgation de l’identité et du rôle de l’évaluateur indépendant pouvait avoir une incidence négative sur l’achèvement de cette procédure en compromettant la capacité de cet évaluateur à finaliser le processus de manière indépendante et à l’abri des pressions extérieures. Le comité d’appel a considéré que le champ d’application de cette exception couvrait tous les processus dont l’objectif était de recueillir et d’analyser des informations afin de permettre à l’institution ou à l’agence de prendre position, ce qui englobait également l’activité d’un évaluateur indépendant.
159 Il s’ensuit que le comité d’appel a exposé les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de cette décision, de sorte qu’il ne lui était pas nécessaire d’écarter expressément la jurisprudence invoquée par la requérante et qu’il a donc respecté son devoir de motivation conformément à la jurisprudence exposée au point 84 ci-dessus.
160 Au demeurant, la jurisprudence citée par la requérante dans le second mémoire en adaptation, à savoir les points 73 et 74 de l’arrêt du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479), le point 131 de l’arrêt du 8 juillet 2020, Crédit agricole/BCE (T‑576/18, EU:T:2020:304), et les points 630 à 635 de l’arrêt du 20 décembre 2023, JPMorgan Chase e.a./Commission (T‑106/17, sous pourvoi, EU:T:2023:832), que le comité d’appel aurait prétendument omis de prendre en compte, concerne l’obligation de l’administration de communiquer la motivation à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief. Toutefois, l’adoption par le CRU d’une seconde décision confirmative à la suite d’une première décision du comité d’appel ne saurait être confondue avec la situation où une institution complète sa motivation au cours de la procédure devant les instances de l’Union.
161 Par conséquent, les moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit doivent être écartés.
Sur les moyens tirés de l’application implicite erronée d’autres motifs de refus et de la dissimulation du véritable motif de refus
162 En substance, la requérante soutient, d’une part, que la seconde décision confirmative s’appuie implicitement sur divers motifs de refus supplémentaires justifiant la non-divulgation des informations demandées, à savoir l’article 88 du règlement no 806/2014 et l’article 41 de la Charte, en violation du règlement no 1049/2001.
163 D’autre part, devant le comité d’appel, la requérante aurait allégué, d’une part, que le CRU s’était fondé à tort sur des motifs ne relevant pas du règlement no 1049/2001, en particulier de l’article 88 du règlement no 806/2014, pour refuser l’accès à certaines informations et, d’autre part, qu’il confondait intentionnellement les motifs de refus afin d’éviter de s’appuyer sur l’exception relative à la protection du processus décisionnel prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. Dans ce contexte, la requérante fait valoir que le comité d’appel a rejeté ces arguments sans fournir une motivation suffisante. En outre, la requérante soutient que le comité d’appel n’a pas respecté les orientations qu’il a lui-même dégagées dans sa première décision selon lesquelles l’article 88 du règlement no 806/2014 n’était pas un fondement que le CRU pouvait invoquer dans ce contexte. Le comité d’appel se serait abstenu à tort de reprocher au CRU de ne pas s’être conformé à sa première décision à cet égard. Selon la requérante, le comité d’appel a commis également une erreur en n’examinant pas la circonstance que le CRU s’appuyait sur des aspects de confidentialité en lien avec les demandes d’accès au dossier conformément à l’article 41 de la Charte et à l’article 90, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 en tant que motif supplémentaire non écrit de ne pas divulguer des documents. Par ailleurs, la requérante estime que le comité d’appel a commis une autre erreur en n’abordant pas ses arguments selon lesquels le CRU aurait cherché à éviter un examen critique de son processus décisionnel.
164 Le CRU conteste cette argumentation.
165 En premier lieu, il ressort de la seconde décision confirmative que le CRU a rappelé ses obligations au titre de l’article 88 du règlement no 806/2014 et de l’article 41 de la Charte. À cet égard, à supposer même que, comme le prétend la requérante, le CRU ait implicitement et erronément appliqué ces deux dispositions, il s’avère, en l’espèce, que le refus d’accès aux informations en cause est légalement fondé en application de l’article 4 du règlement no 1049/2001. L’argument de la requérante à cet égard est donc inopérant, puisque, même s’il était fondé, il ne pourrait pas entraîner l’annulation de la seconde décision confirmative.
166 En second lieu, d’abord, comme le souligne à juste titre le CRU, le comité d’appel a indiqué, au point 137 de sa seconde décision, que le CRU avait fait référence à l’article 88 du règlement no 806/2014 dans le cadre de la consultation de tiers et comme facteur de modulation lors de l’appréciation de l’exception relative à la protection de la politique financière, monétaire ou économique de l’Union ou d’un État membre concernant la divulgation d’informations émanant de l’autorité de surveillance, mais pas comme un motif indépendant de refus d’accès. Contrairement à ce que soutient la requérante, cette motivation est suffisante pour lui permettre de la comprendre et d’en contester le bien-fondé.
167 Au point 138 de sa seconde décision, le comité d’appel a constaté que l’allégation de la requérante selon laquelle le CRU aurait cherché à éviter d’invoquer l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 n’était pas étayée. À cet égard, le comité d’appel a observé à juste titre que rien ne démontrait que le CRU invoquait certaines exceptions pour éviter de se fonder sur une exception différente. Contrairement à ce que soutient la requérante, cette motivation est suffisante pour lui permettre de la comprendre et d’en contester le bien-fondé.
168 Ensuite, étant donné que le CRU ne s’est pas fondé sur l’article 88 du règlement no 806/2014 comme un motif indépendant de refus d’accès, la requérante ne peut reprocher au comité d’appel de ne pas avoir considéré que le CRU ne s’était pas conformé à sa première décision.
169 En outre, si le comité d’appel n’a pas répondu expressément aux arguments de la requérante selon lesquels le CRU se serait appuyé sur des aspects de confidentialité liés aux demandes d’accès au dossier conformément à l’article 41 de la Charte et à l’article 90, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 comme motif supplémentaire pour refuser la divulgation sollicitée, il y a lieu de constater que le comité d’appel a fourni une motivation suffisante qui exposait les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision, respectant ainsi son obligation de motivation.
170 Enfin, force est de constater que le comité d’appel a considéré à juste titre, au point 138 de sa seconde décision, que rien ne démontrait que le CRU aurait cherché à éviter un examen critique de son processus décisionnel.
171 Par conséquent, les moyens tirés de l’application implicite erronée d’autres motifs de refus et de la dissimulation du véritable motif de refus doivent être écartés.
Sur les moyens tirés des conditions de la consultation des tiers
172 La requérante fait valoir que le CRU s’est appuyé à tort sur des consultations de tiers pour s’opposer à la divulgation d’informations reçues par ces tiers ou les concernant. En outre, le CRU aurait invoqué à tort des exceptions contenues dans d’autres régimes juridiques, à savoir la décision 2004/258. Ainsi, contrairement à ce que suggèrerait le comité d’appel, le CRU n’aurait pas procédé à sa propre évaluation.
173 Le CRU conteste cette argumentation.
174 En premier lieu, c’est à tort que la requérante fait valoir que, afin de s’opposer à la divulgation d’informations provenant de tiers ou les concernant, le CRU se serait contenté de s’appuyer sur les objections soulevées par ces tiers, plutôt que d’examiner lui-même si l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 était applicable.
175 À cet égard, la seconde décision confirmative indique que les décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21 contiennent des informations provenant de tiers ou les concernant et que, dès lors, le CRU a consulté ces tiers, dont la BCE, Sberbank Croatie et l’évaluateur indépendant, sur l’application des exceptions à l’accès aux documents prévues par le règlement no 1049/2001.
176 La seconde décision du comité d’appel a écarté le moyen tiré de ce que le CRU aurait tenté de faire de la consultation des tiers un motif supplémentaire de non-divulgation. Selon le comité d’appel, le CRU n’a pas considéré que toute objection de tiers à la divulgation d’informations provenant d’eux ou les concernant constituait en soi un motif de refus d’accès et devait donc être acceptée. Au contraire, le CRU aurait souligné que c’était à lui seul qu’incombait la décision de ne pas accorder l’accès intégral à un document.
177 L’appréciation du comité d’appel résumée au point 176 ci-dessus est exempte d’erreurs.
178 En effet, dans sa seconde décision confirmative, le CRU ne mentionne les objections soulevées par les personnes consultées à la divulgation des informations en cause qu’après avoir constaté que celles-ci étaient notamment couvertes par l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, et par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, s’agissant, par exemple, des informations relatives à la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie, ou par l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, et par l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001, s’agissant des informations relatives à l’identité et au rôle de l’évaluateur.
179 En particulier, le CRU prend soin d’indiquer que c’est « également à la lumière des commentaires de la BCE », donc non uniquement à la lumière de ceux-ci, qu’il a décidé de ne pas divulguer certaines informations, ou qu’il « a dûment pris en considération les commentaires de la BCE et [qu’il] est d’accord avec l’appréciation de [cette institution] », donc qu’il ne s’estime pas lié par l’appréciation de la BCE, mais juge nécessaire de préciser qu’il partage ses conclusions. S’agissant de l’occultation des informations relatives à l’identité et au rôle de l’évaluateur, le CRU se contente de mentionner que l’évaluateur a été consulté sur la divulgation de ces informations, sans mentionner si celui-ci s’est ou non opposé à la divulgation de celles-ci, ni, à plus forte raison, résumer le contenu de ses commentaires.
180 Partant, le CRU ne s’est donc pas contenté de s’appuyer exclusivement sur les objections de tiers ou de faire de ces objections un motif de non-divulgation en soi, qui s’ajouterait à ceux prévus à l’article 4 du règlement no 1049/2001, mais a examiné lui-même si, au regard dudit article, les informations provenant de tiers ou les concernant devaient ou non être occultées dans les décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21.
181 En second lieu, c’est à tort que la requérante soutient que le CRU se serait appuyé sur des motifs de refus d’accès prévus non par le règlement no 1049/2001, mais par la décision 2004/258.
182 À cet égard, comme exposé au point 113 ci-dessus, la seconde décision confirmative indique que le CRU a consulté la BCE, qui, elle, a estimé que la divulgation d’informations sur la position de liquidité de Sberbank Croatie porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux garantie par l’article 4, paragraphe 2, de la décision 2004/258 ainsi qu’à la confidentialité des informations protégées en tant que telles en vertu du droit de l’Union, garantie par l’article 4, paragraphe 1, sous c), de la décision 2004/258. Toutefois, le CRU ne s’est pas fondé sur les dispositions de la décision 2004/258 afin d’occulter les informations en cause. Dès lors, le comité d’appel n’a pas pu, dans sa seconde décision, accepter que le CRU se fonde sur lesdites dispositions, ainsi qu’il a été constaté au point 114 ci-dessus.
183 Par conséquent, les moyens tirés de la consultation des tiers doivent être écartés.
Sur les moyens tirés de l’approche erronée en ce qui concerne les expurgations de chaque document spécifique auquel la requérante a eu partiellement accès ainsi que les débats spécifiques relatifs à ces expurgations
184 D’une part, la requérante soutient, en substance, que, le CRU n’ayant toujours pas divulgué les informations clés des décisions SRB/EES/2022/17 et SRB/EES/2022/21, ces documents sont dépourvus de sens. Le CRU agirait ainsi pour éviter tout examen critique. En outre, la seconde décision confirmative n’expliquerait pas la relation entre chaque motif de refus d’accès et chaque expurgation. Elle ne fournirait donc pas une motivation adéquate au regard de l’article 296 TFUE et de l’article 41 de la Charte. Par ailleurs, en gardant occultées les informations relatives à la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie et aux mesures connexes, le CRU aurait méconnu la première décision du comité d’appel et, partant, aurait violé l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014.
185 D’autre part, la requérante fait valoir que le comité d’appel a traité son argument selon lequel les documents demandés avaient été expurgés de telle sorte que les parties divulguées avaient été privées de tout contenu significatif sous l’angle de la motivation au lieu de le traiter au fond. En outre, le comité d’appel aurait omis de constater que, en ne respectant pas ses orientations, le CRU avait violé l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014.
186 Le CRU conteste cette argumentation.
187 En premier lieu, en ce qui concerne la seconde décision confirmative, il convient, d’abord, de relever que, en l’espèce, il s’est avéré que les informations occultées dans les documents en cause étaient couvertes par les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001. Toutefois, comme l’a souligné le CRU dans la seconde décision confirmative, les informations publiées dans la version non confidentielle des documents en cause expliquent suffisamment que Sberbank Croatie était confrontée à des difficultés en raison de la gravité des sorties de liquidités effectuées et du fait qu’aucune mesure prise n’avait permis de remédier à la situation et qu’il n’y avait pas de perspective raisonnable que d’autres mesures prises par le secteur privé puissent empêcher la défaillance de cet établissement dans un délai raisonnable. En particulier, la version non confidentielle de la décision SRB/EES/2022/21 permettait de comprendre la procédure et l’enchainement des événements qui avaient conduit à l’adoption d’un dispositif de résolution pour Sberbank Croatie.
188 En outre, la requérante se limite à affirmer que le CRU tente d’échapper à un contrôle critique de ses actions, sans fournir aucun élément concret ou indice susceptible d’étayer cet argument.
189 Ces arguments de la requérante doivent donc être écartés.
190 Ensuite, pour les raisons exposées aux points 82 à 92 ci-dessus, la requérante ne convainc pas lorsqu’elle affirme que la motivation de la seconde décision confirmative n’est pas adéquate au regard de l’article 296 TFUE et de l’article 41 de la Charte.
191 Enfin, ainsi qu’il ressort de l’examen des moyens tirés d’une application erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux exposé aux points 116 à 139 ci-dessus, les informations relatives à la détérioration de la position de liquidité de Sberbank Croatie et aux mesures connexes sont, en tout état de cause, couvertes par cette exception, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, et ce sans aucune contradiction avec la première décision du comité d’appel.
192 En second lieu, en ce qui concerne la seconde décision du comité d’appel, quand bien même il serait avéré que, dans cette décision, le comité d’appel n’aurait pas traité au fond, sous le titre « Onzième moyen » (points 134 à 138 de ladite décision), l’argument de la requérante selon lequel les documents demandés avaient été expurgés de telle sorte que les parties divulguées avaient été privées de contenu significatif, force est de constater, à l’instar du CRU, que cet argument a bien été traité aux points 85 à 118 de cette décision.
193 Par ailleurs, au point 136 de sa seconde décision, sous le titre « Onzième moyen », le comité d’appel a considéré que le CRU avait fourni les raisons détaillées pour lesquelles il avait refusé de divulguer certaines parties des documents en cause. Le comité d’appel a estimé que, ce faisant, le CRU s’était conformé aux orientations qu’il avait dégagées dans sa première décision. Compte tenu de ce qui a été rappelé aux points 190 et 191 ci-dessus, il ne saurait être reproché au comité d’appel de ne pas avoir constaté une violation de l’article 85, paragraphe 8, du règlement no 806/2014.
194 Par conséquent, les moyens tirés de l’approche erronée en ce qui concerne les expurgations de chaque document spécifique auquel la requérante a eu partiellement accès ainsi que les débats spécifiques relatifs à ces expurgations doivent être écartés.
Sur les moyens tirés de la violation des droits procéduraux de la requérante
195 D’une part, la requérante fait valoir, en substance, que le CRU a violé les droits de la défense qu’elle tire de l’article 41 de la Charte, en ce qu’il ne lui a pas donné accès à son dossier et que, contrairement à d’autres personnes, il ne l’a pas consultée avant de prendre la seconde décision confirmative.
196 D’autre part, la requérante reproche au comité d’appel de se contenter d’indiquer qu’il n’est pas compétent pour statuer sur une demande d’accès au dossier. La requérante réaffirme que le comité d’appel a commis une erreur en acceptant que le CRU modifie sa motivation. En outre, le comité d’appel aurait omis d’examiner la jurisprudence qu’elle aurait fournie pour étayer sa position selon laquelle une motivation ne pouvait être modifiée, changée ou complétée par la suite.
197 Le CRU conteste cette argumentation.
198 En premier lieu, s’agissant de l’accès au dossier de la procédure d’accès aux documents, il y a lieu de relever que des informations qui n’ont pas été divulguées par le CRU au motif qu’elles étaient confidentielles et qui font l’objet d’une telle procédure n’ont pas à être communiquées au demandeur au cours de ladite procédure. Si tel n’était pas le cas, toute procédure d’accès du public aux documents deviendrait sans objet du fait de la communication des informations et documents demandés (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2024, MeSoFa/BCE, T‑790/22, non publié, EU:T:2024:783, point 104).
199 S’agissant du droit d’être entendu, le CRU a, certes, consulté d’autres personnes avant d’adopter la seconde décision confirmative. Ces consultations ont eu lieu conformément à l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001, qui prévoit que, dans le cas de documents de tiers, l’institution concernée consulte ledit tiers afin de déterminer si une exception prévue à l’article 4, paragraphe 1 ou 2, dudit règlement est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doive ou ne doive pas être divulgué. Toutefois, en l’espèce, aucun des documents liés à la demande d’accès n’émane de la requérante.
200 Par ailleurs, il convient de relever que, dans le cadre du règlement no 1049/2001, il est prévu que, à la suite d’une première décision de refus de la part de l’institution ou agence saisie d’une demande d’accès à un document, le demandeur d’accès peut présenter, au titre de l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement, une demande de décision confirmative. À cette occasion, il conserve la possibilité de transmettre ses observations à l’égard, le cas échéant, de la position soutenue par ladite institution ou agence. Dans la mesure où la requérante a accompli ces étapes, il y a lieu de considérer qu’elle a eu la possibilité de contester le refus d’accès opposé par le CRU. Outre ces étapes, la requérante a également, conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement no 806/2014, contesté la première décision confirmative auprès du comité d’appel. Ce comité a décidé de renvoyer l’affaire au CRU, ce qui a conduit le CRU à adopter la seconde décision confirmative. Dans cette décision, le CRU a bien précisé qu’il tenait compte des observations de la requérante présentée dans la demande confirmative et des orientations du comité d’appel. La requérante ne convainc donc pas lorsqu’elle soutient que le CRU a violé son droit d’être entendu en ce qu’il ne l’a pas consultée avant d’adopter la seconde décision confirmative.
201 En second lieu, il convient, d’abord, de relever que le comité d’appel a, dans sa seconde décision, indiqué que, conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement no 806/2014, il n’était pas compétent pour connaître des recours formés contre une décision du CRU visée à l’article 90, paragraphe 4, du même règlement, relatif au droit d’accès au dossier, et ne pouvait donc ni confirmer ni renvoyer un refus d’accès au dossier opposé par le CRU. En outre, le comité d’appel a estimé que, si, au cours de la procédure devant lui, la requérante pouvait obtenir, sur le fondement de l’article 41 de la Charte, l’accès à la version confidentielle des documents auxquels elle avait demandé l’accès au titre du régime d’accès du public aux documents, avant qu’une décision sur la légalité de la décision confirmative ne soit prise par le comité d’appel, la décision du comité d’appel concernant ladite décision confirmative serait privée de pertinence et deviendrait sans objet.
202 À cet égard, le Tribunal a déjà jugé que le comité d’appel n’était pas compétent pour statuer sur un recours contre une décision de refus d’accès au dossier sur le fondement de l’article 90, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 (arrêt du 20 décembre 2023, OCU/CRU, T‑496/18, non publié, EU:T:2023:857, point 34).
203 Pour les raisons présentées par le comité d’appel et reprises au point 201 ci-dessus, la requérante ne saurait reprocher au comité d’appel, dans le cadre d’un recours contre une décision confirmative concernant l’accès du public aux documents sur le fondement du règlement no 1049/2001, de ne pas lui avoir reconnu un droit d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte (voir, en ce sens, arrêt du 20 décembre 2023, OCU/CRU, T‑496/18, non publié, EU:T:2023:857, points 30 à 38).
204 Ensuite, pour les raisons mentionnées aux points 101 et 102 ci-dessus, le CRU, à la suite d’une décision de renvoi du comité d’appel, n’est pas tenu de conserver le fondement juridique retenu à l’appui de sa première décision confirmative.
205 Enfin, quand bien même le comité d’appel n’aurait pas examiné la jurisprudence fournie par la requérante, la lecture de la seconde décision du comité d’appel permet de constater que ce dernier a exposé les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de cette décision et qu’il a donc respecté son devoir de motivation conformément à la jurisprudence exposée au point 84 ci-dessus.
206 Par conséquent, les moyens tirés de la violation des droits procéduraux de la requérante doivent être écartés.
Sur les moyens tirés de la violation des droits de la requérante en raison de la non‑application de règles en matière de divulgation autres que celles prévues par le règlement no 1049/2001
207 D’une part, la requérante fait valoir que la seconde décision confirmative est illégale, étant donné que le CRU n’a pas appliqué d’autres règles que celles prévues par le règlement no 1049/2001, et ce alors que la demande d’accès n’était pas limitée et incluait notamment l’article 41 de la Charte.
208 D’autre part, la requérante reproche au comité d’appel de ne pas avoir abordé cet argument et de s’être contenté d’indiquer que les règles pertinentes n’étaient pas faciles à identifier.
209 Le CRU s’interroge sur la recevabilité de ces moyens, en raison de leur caractère particulièrement vague, et conteste, en tout état de cause, le bien-fondé de cette argumentation.
210 En premier lieu, en ce qui concerne la seconde décision confirmative, la requérante prétend que cette décision est illégale, puisqu’aucune autre règle que les dispositions du règlement no 1049/2001 n’a été appliquée. Toutefois, à l’exception d’une référence à l’article 41 de la Charte, la requérante n’identifie pas les autres règles que le CRU aurait dû examiner selon elle. S’agissant de l’article 41 de la Charte, la requérante ne précise pas si elle invoque la violation de son droit d’accès au dossier, de l’obligation de motivation incombant à l’administration ou d’un autre droit consacré par cette disposition.
211 Dans ces circonstances, il n’est pas établi que la seconde décision confirmative serait illégale au motif que le CRU n’aurait pas appliqué d’autres règles que celles prévues par le règlement no 1049/2001.
212 En second lieu, devant le comité d’appel, la requérante a également prétendu que la seconde décision confirmative était illégale, puisqu’aucune autre règle que les dispositions du règlement no 1049/2001 n’avait été appliquée. Elle a ajouté que, lorsque le comité d’appel est compétent pour contrôler un acte du CRU, il doit appliquer toute règle pertinente.
213 Dans sa seconde décision, le comité d’appel a relevé, en substance, que, faute de précisions de la part de la requérante, il était difficile d’identifier les règles que le CRU aurait dû appliquer. Selon cette décision, les droits fondamentaux, tels que l’article 41 ou l’article 47 de la Charte, ont été dûment pris en considération par le comité d’appel dans ses conclusions, de même que les formes substantielles, telles que l’obligation de motivation.
214 À cet égard, il convient de relever que le respect du droit d’accès au dossier, consacré à l’article 41 de la Charte, fait l’objet des points 140 et 141 de la seconde décision du comité d’appel, où ledit comité indique ne pas avoir compétence à cet égard. Le droit à une protection juridictionnelle effective, consacré à l’article 47 de la Charte, est mentionné au point 61 de ladite décision, dans le cadre de l’analyse de la recevabilité du recours. Enfin, le respect par le CRU de son obligation de motivation est examiné, notamment, aux points 80 à 84 et 134 à 138 de la seconde décision du comité d’appel, où celui-ci écarte deux moyens tirés d’une insuffisance de motivation de la seconde décision confirmative.
215 Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le comité d’appel a non seulement abordé son argument et y a répondu, mais a également appliqué d’autres règles que celles issues du règlement no 1049/2001.
216 Par ailleurs, le reproche de la requérante à l’égard du CRU est, ainsi qu’il ressort des points 210 et 211 ci-dessus, trop général et trop peu étayé pour prospérer, de sorte qu’il ne peut être reproché au comité d’appel d’avoir rejeté cet argument.
217 Par conséquent, les moyens tirés de la violation des droits de la requérante en raison de la non‑application de règles en matière de divulgation autres que celles prévues par le règlement no 1049/2001 doivent être écartés.
218 Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter les conclusions dirigées contre la seconde décision confirmative et la seconde décision du comité d’appel sans qu’il soit besoin d’examiner la fin de non-recevoir opposée en défense par le CRU en ce qui les concerne.
Sur les dépens
219 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du CRU.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du Conseil de résolution unique (CRU) du 28 juillet 2022 concernant une demande d’accès à des documents formée par MeSoFa Vermögensverwaltungs AG, de la décision du comité d’appel du CRU du 8 mars 2023, relative à l’affaire 4/2022, et de la réponse négative du CRU au sens de l’article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) MeSoFa Vermögensverwaltungs est condamnée aux dépens.