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Décisions

Cass. 1re civ., 22 octobre 1996, n° 94-21.090

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

CRCAM de la Haute Vienne et de la Charente (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Cass. 1re civ. n° 94-21.090

21 octobre 1996

Sur le pourvoi formé par :

1°/ la Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) de la Haute Vienne, dont le siège est ...,

2°/ la Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) de la Charente, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 26 septembre 1994 par la cour d'appel de Limoges (1e chambre civile), au profit :

1°/ de la société Compagnie EUROPAGRO, Européenne de production et de commercialisation agricole, société anonyme, dont le siège est ... Armée, 75017 Paris,

2°/ de l'Union nationale des coopératives agricoles d'approvisionnement UNCAA, société à capital variable, dont le siège est ... Armée, 75017 Paris,

3°/ de l'Union des coopératives agricoles d'alimentation du bétail UCAAB, société à capital variable, dont le siège est ... Thierry,

4°/ de la Coopérative des agriculteurs réunis de la Haute-Vienne COPAR, dont le siège est ...,

5°/ de la Coopérative départementale des producteurs de viande de la Charente CODAVI, dont le siège est : 16270 Roumazières,

6°/ de la Coopérative Charente Limousin CCL, dont le siège est :

16360 Chasseneuil,

7°/ de M. X..., demeurant ..., pris en sa qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société EUROBEVI, dont le siège est Le Bois du Paradis, 16440 Rouillet Saint-Etienne,

défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt;

LA COUR, en l'audience publique du 16 juillet 1996, où étaient présents : M. Lemontey, président, Mme Delaroche, conseiller rapporteur, MM. Fouret, Sargos, Mme Marc, MM. Aubert, Cottin, Bouscharain, conseillers, M. Laurent-Atthalin, Mme Catry, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre;

Sur le rapport de Mme Delaroche, conseiller, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de la CRCAM de la Haute Vienne et de la CRCAM de la Charente, de Me Jacoupy, avocat de la société Compagnie Europagro, Européenne de production et de commercialisation agricole, de l'Union nationale des coopératives agricoles d'approvisionnement UNCAA et de l'Union des coopératives agricoles d'alimentation du bétail UCAAB, de la SCP Richard et Mandelkern, avocat de la Coopérative des agriculteurs réunis de la Haute-Vienne COPAR, de la Coopérative départementale des producteurs de viande de la Charente CODAVI et de la Coopérative Charente Limousin CCL, les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Donne acte aux CRCAM de la Haute Vienne et de la Charente de leur désistement à l'égard de M. X... ès qualités de liquidateur de la société EUROBEVI;

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les Caisses régionales de crédit agricole mutuel de la Haute Vienne et de la Charente ont accordé leur concours à l'Union coopérative agricole viande et charcuterie (UCAVIC) sous forme d'octroi de divers prêts et d'ouverture de crédit en compte courant; que ces financements ont été garantis par des engagements de caution de coopératives associées, l'Union Nationale des coopératives agricoles d'approvisionnement (UNCAA), l'Union des coopératives agricoles d'alimentation du bétail (UCAAB), la société EUROPAGRO, la coopérative des agriculteurs réunis de la Haute Vienne (COPAR) la coopérative Charente-Limousine (CCL) la coopérative départementale des producteurs de viande de la Charente (CODAVI), et la société EUROBEVI actuellement en liquidation judiciaire; que l'UCAVIC dont les difficultés s'étaient révélées au début de l'année 1988, a cessé son activité à la suite d'une décision de son assemblée générale du 6 décembre 1988; que sa liquidation judiciaire a été prononcée le 22 février 1989; que les Caisses de crédit, après avoir en vain mis les cautions en demeure d'exécuter leurs engagements, les ont assignées en paiement de diverses sommes; que la COPAR, la CCL et la CODAVI ont opposé la nullité de leurs cautionnements en l'absence de délibération de leurs conseils d'administration respectifs autorisant leurs présidents à souscrire un tel acte; que, de leur côté, l'UNCAA, l'UCAAB et la société EUROPAGRO ont prétendu qu'elles s'étaient engagées pour les crédits à court terme jusqu'au 9 janvier 1988 et que, sollicitées par les Caisses pour s'engager à nouveau au vu de prorogation des concours financiers échus depuis le 31 décembre 1987, elle s'y étaient refusées;

Sur le premier moyen :

Attendu que les Caisses de crédit agricole mutuel font grief à l'arrêt attaqué (Limoges, 26 septembre 1994) d'avoir déclaré nuls les cautionnements souscrits par la COPAR, la CCL, et la CODAVI, alors, selon le moyen, que l'octroi d'un cautionnement par une société coopérative à une autre, sans autorisation préalable du conseil d'administration, n'est sanctionné que par une nullité relative, susceptible d'être couverte en l'absence d'abus de pouvoir du dirigeant social comme d'atteinte indue aux intérêts de l'entreprise; qu'il existait, au-delà des relations juridiques et économiques telles que constatées par l'arrêt, de véritables rapports d'associés au sens de l'article 1832 du Code civil, ce dont il résultait que les coopératives COPAR, CCL, et CODAVI avaient nécessairement connaissance des cautionnements lesquels rentraient, vu leur partenariat avec l'UCAVIC dont elles avaient intérêt à soutenir l'activité répondant à des besoins communs, dans la catégorie des opérations permises à leurs dirigeants, contre lesquels aucun abus de gestion n'a été retenu; qu'ainsi la cour d'appel n'a délié ledites coopératives de leurs engagements qu'en violation des articles 1832, 2011 et 1134 du Code civil;

Mais attendu, qu'après avoir constaté que les présidents des coopératives COPAR, CCL et CODAVI avaient accordé le cautionnement de celles-ci à l'UCAVIC sans avoir obtenu l'autorisation de leurs conseils d'administration respectifs seuls habilités, en vertu des statuts de chacune des sociétés, à les engager à ce titre, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'étroitesse des relations tant juridiques qu'économiques existant entre l'UCAVIC et ses administrateurs et partenaires, les coopératives, ne suffisait pas à établir que le cautionnement entrait dans la catégorie des opérations autorisées par ces dernières à leurs présidents; qu'elle a encore relevé que, les opérations n'étant pas nécessairement liées, l'approbation par les coopératives administrateurs de l'UCAVIC des emprunts souscrits par celle-ci, ne permettait nullement de conclure à une connaissance du cautionnement par lesdites coopératives; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Sur le second moyen :

Attendu que les Caisses de crédit agricole mutuel font aussi grief à l'arrêt de les avoir déboutées de leurs demandes en paiement formées contre les coopératives UNCAA, UCAAB et la société EUROPAGRO au titre de leur cautionnement des crédits à court terme alors, selon le moyen, que la caution est tenue de garantir les obligations convenues avant l'échéance de son engagement, quand bien même leur exécution se prolongerait, en vertu de stipulations contractuelles, après cette date; qu'ayant relevé que les concours du Crédit agricole avaient effectivement été fournis, depuis leur mise en place en octobre 1987 et ce de façon quasi-permanente, l'arrêt, loin de caractériser une extinction par voie de novation avant le 9 janvier 1988, d'ailleurs insusceptible de résulter d'une non-présentation des billets à ordre, n'a libéré les cautions de leurs engagements, sans même procéder à un apurement des dettes nées au cours de la validité de ces cautionnements, qu'en violation des articles 2011, 2034 et 2039 du Code civil, et de la loi des parties;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche de la commune intention des parties, a souverainement retenu que le Crédit agricole ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 2039 du Code civil dès lors qu'à l'occasion de la négociation avec l'UCAVIC en vue de la prorogation des échéances des deux concours financiers à court terme il avait choisi d'inviter les cautions à renouveler leur engagement, ce que certaines avaient refusé de faire; qu'ayant relevé que l'UNCAA, l'UCAAB et EUROPAGRO n'avaient pas renouvelé leur engagement, elle était fondée à considérer que ces coopératives ne pouvaient être tenues au-delà du 9 janvier 1988; que, par ailleurs, elle a retenu que les dettes de l'UCAVIC relatives à l'ouverture de crédit en compte courant et au prêt à court terme n'étaient pas devenues exigibles avant cette date, l'ouverture de crédit n'ayant pas été utilisée du propre aveu de la banque et les deux billets à ordre, qui constituaient le prêt, n'ayant pas été présentés à cette échéance ou antérieurement;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les CRCAM de la Haute Vienne et de la Charente aux dépens;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande formée par la COPAR, la CCL et la CODAVI;

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