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Décisions

CA Montpellier, ch. com., 21 octobre 2025, n° 24/02402

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

CA Montpellier n° 24/02402

21 octobre 2025

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 21 OCTOBRE 2025

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 24/02402 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QHLD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 15 MARS 2024

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 24/001533

APPELANTS :

Monsieur [O] [B] [M]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représenté Me Christine AUCHE-HEDOU substituant Me Jacques-Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants

Représenté par Me Raphaëlle CHALIE, avocate au barreau de MONTPELLIER, avocate plaidante

Madame [K] [C] [S] épouse [M]

née le [Date naissance 6] 1970 à [Localité 12] (30)

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représentée Me Christine AUCHE-HEDOU substituant Me Jacques-Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants

Représentée par Me Raphaëlle CHALIE, avocate au barreau de MONTPELLIER, avocate plaidante

INTIMEE :

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DU LANGUEDOC ROU SSILLON Société anonyme au capital de 370.000.000,00€ immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le numéro 383 451 267

[Adresse 8]

[Adresse 13]

[Localité 10]

Représentée par Me Pascale CALAUDI de la SCP CALAUDI-BEAUREGARD-CALAUDI-BENE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 20 Août 2025

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Septembre 2025,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thibault GRAFFIN, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

M. Fabrice VETU, conseiller

Greffier lors des débats : Mme Elodie CATOIRE

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Elodie CATOIRE, greffière.

FAITS et PROCEDURE

Le 29 août 2012, la SARL TBM a souscrit un prêt n°08227216 auprès de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon d'un montant de 110 000 euros au taux de 3,1% et remboursable en 60 mensualités aux fins d'accroître son fonds de roulement.

Le même jour, M. [O] [M] et Mme [K] [S], épouse [M], se sont portés cautions personnelles et solidaires de ce prêt dans la limite de 35 700 euros chacun pour une durée de 96 mois.

Par jugement du 3 novembre 2014, le tribunal de commerce de Montpellier a placé en sauvegarde la SARL TBM, et désigné M. [I] [F] en qualité de mandataire judiciaire.

Le 17 novembre 2014, les époux [M] se sont également portés cautions personnelles et solidaires de la société TBM auprès de la Caisse d'Epargne dans la limite de 195 000 euros chacun pour une durée de 5 ans.

Le 30 décembre 2014, la Caisse d'Epargne a déclaré sa créance à M. [F], ès qualité.

Par ordonnance du 16 août 2017, le juge-commissaire auprès du tribunal de commerce de Montpellier a admis au passif de la société TBM les créances de la Caisse d'Epargne d'un montant de 72 525,35 euros au titre du prêt n°08227216 et d'un montant de 6 292,87 euros au titre du compte courant n°[XXXXXXXXXX02].

Par jugement du 12 mai 2023, le tribunal de commerce de Montpellier a placé la société TBM en redressement judiciaire.

Le 6 juin 2023, la Caisse d'Epargne a de nouveau déclaré sa créance à M. [F], ès qualité.

Par jugement du 21 juillet 2023, le tribunal de commerce de Montpellier a converti en liquidation judiciaire la procédure ouverte à l'égard de la société TBM.

Le 4 septembre 2023, la Caisse d'Epargne a mis en demeure les époux [M] de lui régler la somme de 16 862,14 euros.

Par exploit du 9 février 2024, la Caisse d'Epargne a assigné les époux [M] en paiement.

Par jugement réputé contradictoire du 15 mars 2024, le tribunal de commerce de Montpellier a

condamné à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon :

Mme [K] [S] épouse [M] la somme de 22 714,51 euros (16 862,14 euros + 5 852,37 euros) avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 septembre 2023 jusqu'à parfait paiement ;

M. [O] [M] la somme de 22 714,51 euros (16 862,14 + 5 852,37) avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 septembre 2023 jusqu'à parfait paiement ;

avec application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil en disant et jugeant que toutes sommes susceptibles d'être versées par la requis sur les sommes susvisées, s'imputeront tout d'abord sur les intérêts dus si le règlement n'est pas intégral ;

avec application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil (anatocisme) ;

rappelé que l'exécution provisoire est de droit ;

et condamné in solidum Mme [K] [S] et M. [O] [M] aux dépens et à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 2 mai 2024, Mme [K] [S] et M. [O] [M] ont relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance du 2 avril 2025, le conseiller de la mise en état a rejeté leur incident de communication des pièces.

Par conclusions du 14 août 2025, ils demandent à la cour, au visa des articles 2288 et suivants du code civil, de :

déclarer leur appel recevable et bien fondé ;

avant dire droit

à titre principal, faire injonction à la Caisse d'Epargne de communiquer les relevés de compte ouverts au nom de la société TBM sous quel qu'intitulé que ce soit à compter du 1er janvier 2016 jusqu'à ce jour, dont les numéros sont les suivants :

compte numéro [XXXXXXXXXX05]

compte numéro [XXXXXXXXXX04]

compte numéro [XXXXXXXXXX03]

à titre subsidiaire, si la Caisse d'Epargne ne défère pas spontanément à cette communication de pièces,

réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau, à titre principal,

déclarer les demandes de la Caisse d'Epargne irrecevables comme prescrites ;

quoi faisant, débouter la Caisse d'Epargne de l'ensemble de ses demandes ;

subsidiairement, déclarer les demandes de la Caisse d'Epargne mal fondées ;

quoi faisant,

débouter la Caisse d'Epargne de ses demandes ;

et condamner la Caisse d'Epargne à leur verser la somme de 3 000 euros de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions du 19 août 2025, la Caisse d'Epargne demande à la cour, au visa de l'ancien article 910-4 du code de procédure civile, de :

déclarer irrecevable la demande principale d'injonction de communication de pièces des appelants ;

à défaut, la déclarer infondée ;

confirmer le jugement entrepris ;

et y ajoutant, condamner in solidum les époux [M] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Il est renvoyé, pour l'exposé exhaustif des moyens des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est datée du 20 août 2025.

MOTIFS :

Sur la recevabilité de la demande de communication de pièces

La Caisse d'Epargne soutient que la prétention des appelants de lui faire injonction de communiquer divers relevés bancaires est irrecevable en application de l'article 910-4 du code de procédure civile et vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 avril 2025 rejetant l'incident de communication desdites pièces.

Bien que n'apparaissant pas dans leurs premières conclusions du 31 juillet 2024, les appelants ont déposé une requête devant le conseiller de la mise en état le 2 décembre 2024 et ont mentionné leur nouvelle prétention d'injonction de communication de pièces au sein de leurs deuxièmes conclusions au fond du 19 août 2025 en réplique aux premières conclusions adverses du 25 septembre 2024 concernant le montant de la créance réclamée.

La demande est recevable au sens de l'alinéa 2 de l'article 910-4 du code de procédure civile.

En application des articles 914 alinéa 3 et 916 du code de procédure civile, les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur une requête d'incident portant une demande d'injonction de communication de pièces n'ont pas autorité de la chose jugée au principal ; elles ne peuvent pas être déférées à la cour par requête, n'étant susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond.

Dès lors, les époux [M] sont recevables à demander à nouveau la communication de certaines pièces, l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 avril 2025 n'ayant pas autorité de la chose jugée.

Par conséquent, il y a lieu de rejeter les fins de non-recevoir soulevées par la Caisse d'Epargne.

Sur son bien fondé

Les époux [M] demandent que la Caisse d'Epargne lui communique les relevés des comptes bancaires n°[XXXXXXXXXX05], n°[XXXXXXXXXX04] et n°[XXXXXXXXXX03] aux fins de vérifier les sommes arrivées au crédit sur les comptes de la société TBM au titre de règlement des factures dues à cette société faisant l'objet d'avances au titre de la loi [H] par la Caisse d'Epargne.

Or, comme déjà retenu, l'ordonnance du juge-commissaire du 16 août 2017 admettant la créance déclarée de la banque concernant le solde débiteur du compte-courant n°[XXXXXXXXXX05] a autorité de la chose jugée et est opposable aux cautions, les époux [M] ne justifiant pas avoir formé un recours contre l'état des créances. Ainsi, les relevés du compte bancaire n°[XXXXXXXXXX05] réclamés par les appelants ne sont pas nécessaires et directement utiles à la résolution du litige.

De même, les comptes bancaires n°[XXXXXXXXXX04] et n°[XXXXXXXXXX03] concernent des comptes précontentieux et contentieux ouverts pendant la procédure de sauvegarde pour isoler les opérations liées au [H]. Ces créances ont fait l'objet de déclarations de créance, réactualisées en raison des encaissements perçus. Par ailleurs, la banque ne réclame aux cautions aucune somme au titre de ces comptes, les époux [M] n'ont pas qualité à agir pour contester les sommes déclarées au titre de ceux-ci, d'autant que l'administrateur judiciaire n'a élevé aucune contestation sur ces opérations d'encaissement des [H]. Dès lors, ces relevés bancaires ne sont pas davantage utiles à la résolution du litige.

Par conséquent, il y a lieu de rejeter la demande tendant à obtenir la communication de documents bancaires.

Sur la prescription de l'action de la banque

Les époux soutiennent qu'ils se réservent le droit d'invoquer la prescription de l'action engagée par la banque sous réserve des documents produits ; ils ajoutent que leurs engagements de caution du 29 août 2012 et du 17 novembre 2014 prenaient fin respectivement le 29 août 2020 et le 17 novembre 2019 de sorte qu'étant assignés seulement le 9 février 2024, ils n'étaient plus tenus par aucun acte de caution.

Or, l'arrivée du terme du cautionnement donné à durée déterminée ne met pas fin à l'obligation de couverture des dettes nées antérieurement à cette date. Les époux [M] pouvaient dont être poursuivis par la banque au-delà du 17 novembre 2019 et du 29 août 2020 dès lors que le solde du compte bancaire était débiteur et la déchéance du prêt garanti en 2012 a été prononcée pendant la durée de l'engagement de la caution.

Il résulte de la combinaison des articles 2241, 2242 et 2246 du code civil et l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa version applicable à l'espèce, que la déclaration de créance au passif du débiteur principal en procédure collective interrompt la prescription à l'égard de la caution et que cet effet se prolonge jusqu'à la clôture de la procédure collective.

Le 30 décembre 2014, la banque a déclaré ses créances au passif de la procédure de sauvegarde de la société TBM, ce qui a eu pour effet d'interrompre le délai de prescription. La banque produit à ce titre la déclaration de ses créances ainsi que l'ordonnance du juge-commissaire du 16 août 2017 admettant lesdites créances.

Les époux [M] ne justifient pas avoir formé un recours contre l'état des créances et l'autorité de la chose jugée par l'admission des créances leur est opposable.

Par la suite, la procédure a été convertie en redressement judiciaire selon jugement du 12 mai 2023 puis en liquidation judiciaire selon jugement du 21 juillet 2023. En outre, la banque a actualisé ses créances dès le 6 juin 2023 et la liquidation judiciaire n'est pas clôturée à ce jour.

Dès lors, l'action de la Caisse d'Epargne engagée le 9 février 2024 est recevable.

Sur la créance de la banque

Concernant le prêt n°08227216, au vu de l'ordonnance d'admission du 1er septembre 2017 ayant autorité de la chose jugée, et de la déclaration de créance actualisée au 15 janvier 2024 prenant en compte deux règlements de dividende en 2019 et 2020, étant rappelé que les époux [M] n'ont pas qualité à agir pour remettre en cause les créances de la banque présentes sur d'autres comptes ouverts par la société débitrice, le montant de la créance de la société TBM s'élève à 67 448,57 euros pour laquelle les cautions sont tenues solidairement à hauteur de 25% soit 16 862,14 euros.

Concernant le solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX05], au vu de l' l'ordonnance d'admission du 1er septembre 2017 ayant autorité de la chose jugée et de la déclaration de créance actualisée au 15 janvier 2024 prenant en compte deux règlements de dividende en 2019 et 2020, étant rappelé que les époux [M] n'ont pas qualité à agir pour remettre en cause les créances de la banque présentes sur d'autres comptes ouverts par la société débitrice, la créance de la société TBM s'élève à 5 852,37 euros.

Par conséquent, il y a lieu de confirmer le jugement déféré.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement,

Rejette toutes les fins de non-recevoir soulevées ;

Rejette la demande de communication de pièces ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant

Condamne in solidum M. [O] [M] et Mme [K] [S] épouse [M] aux dépens d'appel,

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [O] [M] et Mme [K] [S] épouse [M], et les condamne in solidum à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon la somme de 2 500 euros.

Le greffier La présidente

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