CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 21 octobre 2025, n° 25/07743
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2025
(n° / 2025 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/07743 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLIO2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 avril 2025 -Tribunal des activités économiques de PARIS - RG n° 2025022053
APPELANTES
S.A.S. RICHONE LE TSION ' SIGLE R.L.T , prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 813 622 164,
Dont le siège social est situé [Adresse 5],
[Localité 9]
Madame [Y] [J] Nom d'usage [U], en qualité de présidente de la SAS RICHONE LE TSION, SIGLE R.L.T,
Née le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 13]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 2]
[Localité 11]
Représentées par Me Virginie DOMAIN, avocate au barreau de PARIS, toque : C1224,
Assistées de Me Valentine COUDERT de la SELARL OCTAAV, avocate au barreau de PARIS, toque : C1224,
INTIMÉS
S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES, prise en la personne de Maître [O] [C], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société RICHONE LE TSION,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 423 719 178,
Dont le siège social est situé [Adresse 10]
[Localité 9]
S.E.L.A.F.A. MJA , prise en la personne de Maître [P] [K], en qualité de liquidateur judiciaire de la société RICHONE LE TSION, désigné par jugement du tribunal des activités économiques de Paris le 2 avril 2025,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 8]
Représentées par Me Sally DIARRA de l'AARPI KLEBERLAW, avocate au barreau de PARIS, toque : P159,
Assistées de Me Yves CORRE de l'AARPI KLEBERLAW, avocat au barreau de PARIS, toque : P159,
LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS
SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 1]
[Localité 7]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François VARICHON dans le respect des conditions prévues à l'artcile 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE
La société par actions simplifiée Richone le Tsion a été créée en 2015 pour l'exercice d'une activité de restauration, sandwicherie, traiteur et vente à emporter.
Elle exploitait son activité dans un local situé [Adresse 6] à [Localité 12] appartenant à l'établissement [Localité 12] Habitat. En 2019, elle a conclu un contrat de location-gérance portant sur son fonds de commerce.
Par jugement du 25 septembre 2019, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard et désigné, d'une part, la société AJAssociés en la personne de Maître [C] en qualité d'administrateur, d'autre part, la société Axyme en la personne de Maître [Z] en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal a arrêté un plan de redressement de la société Richone le Tsion, la société AJAssociés en la personne de Maître [C] étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le plan adopté par le tribunal prévoyait les modalités suivantes d'apurement du passif, d'un montant de 669.926,92 euros:
' le règlement des créances inférieures à 500 euros dès l'adoption du plan;
' le règlement des créances privilégiées et chirographaires en dix échéances égales de 10 %, la première intervenant le 6 octobre 2022 puis chaque année à la même date;
' le remboursement de la créance en compte courant de la dirigeante de la société, Mme [Y] [U], subordonné à la parfaite exécution du plan.
La société Richone le Tsion a réglé les deux premiers dividendes du plan mais n'a pas réglé la troisième annuité exigible le 6 octobre 2024, d'un montant de 42.694,78 euros. Par ailleurs, la société a constitué un passif postérieur constitué par un impayé de prime d'assurance.
C'est dans ces conditions que par requête du 14 mars 2025, le commissaire à l'exécution du plan a saisi le tribunal des activités économiques de Paris aux fins de résolution du plan de redressement et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.
Par jugement du 2 avril 2025, le tribunal a:
- prononcé la résolution du plan de redressement de la société Richone le Tsion;
- ouvert à son égard une procédure de liquidation judiciaire;
- nommé la société MJA prise en la personne de Maître [K] en qualité de liquidateur;
- fixé la date de la cessation des paiements au 6 octobre 2024, date d'exigibilité de la 3ème annuité du plan.
- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de justice.
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a considéré que la 3ème échéance du plan n'avait pas été réglée par la débitrice et que l'état de cessation des paiements était avéré.
Le 23 avril 2025, la société Richone le Tsion et Mme [U] ont relevé appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 8 septembre 2025, la société Richone le Tsion et Mme [U] demandent à la cour de:
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- débouter la société AJAssociés ès qualités de sa demande de résolution du plan de continuation,
- condamner solidairement les organes de la procédure à payer à la société Richone le Tsion la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens;
- à titre subsidiaire, infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Richone le Tsion,
- renvoyer l'affaire devant le tribunal des activités économiques de Paris pour la désignation des organes de la procédure;
- ordonner l'inscription des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 14 août 2025, la société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités demandent à la cour de:
- débouter de son appel la société Richone le Tsion,
- confirmer le jugement entrepris,
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Aux termes de son avis notifié par voie électronique le 4 juillet 2025, le ministère public invite la cour à confirmer le jugement dont appel.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 23 septembre 2025.
SUR CE,
Sur la résolution du plan de redressement et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire
A l'appui de leur demande d'infirmation, les appelantes expliquent:
- qu'après que [Localité 12] Habitat a refusé d'autoriser la conclusion d'un nouveau contrat de location-gérance portant sur le fonds de commerce exploité dans les lieux loués, la société Richone le Tsion a essayé de mettre en vente son fonds, en ce compris le droit au bail; qu'à cette occasion, elle a découvert que le système d'extraction des fumées du local n'était pas conforme à la réglementation; qu'elle a donc saisi le tribunal judiciaire de Paris aux fins de condamnation de la société [Localité 12] Habitat à l'indemniser; que le liquidateur judiciaire est volontairement intervenu à cette instance, qui est toujours en cours;
- que deux acquéreurs se sont manifestés pour l'achat du fonds de commerce; que toutefois, le liquidateur a décidé de mettre un terme au bail à défaut de trésorerie pour payer le loyer, ce qui est surprenant car l'absence de délivrance conforme du local par [Localité 12] Habitat lui permettait d'opposer à ce dernier l'exception d'inexécution;
- que le passif postérieur invoqué par le liquidateur est composé à 89 % de la créance déclarée par le bailleur, qui, pour les motifs exposés ci-dessus, peut être contestée avec toutes les chances de rejet; qu'il apparaît par conséquent prématuré de prononcer la liquidation judiciaire de la société Richone le Tsion;
- que subsidiairement, il est demandé à la cour d'ouvrir à son égard une procédure de redressement judiciaire.
La société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités répliquent:
- qu'à ce jour, le passif de la société Richone le Tsion s'élève, d'une part, à la somme de 606.714,09 euros résultant de la résolution du plan de redressement, d'autre part, de la somme de 137.191,80 euros au titre du passif déclaré lors de l'ouverture de la liquidation judiciaire, dont 122.191,80 euros déclarés à titre privilégié et échu par le bailleur; que l'actif disponible est quasi-nul puisque le solde du compte de l'entreprise ne s'élève qu'à 17,75 euros; qu'ainsi la société Richone le Tsion se trouve en état de cessation des paiements;
- que la débitrice n'est pas en mesure de s'acquitter de la 3ème échéance du plan et de poursuivre son plan de redressement; que la liquidation judiciaire doit donc être confirmée;
- que la société MJA ès qualités a vainement tenté de trouver un repreneur du fonds de commerce de la société Richone le Tsion; que toutefois, aucune offre de reprise n'a été déposée dans le délai fixé, ce qui n'est pas surprenant car le fonds est totalement inexploitable compte tenu de l'état dégradé des locaux; qu'à la suite de cet appel d'offre infructueux, [Localité 12] Habitat a fait délivrer à la société MJA ès qualités un commandement de payer l'arriéré locatif visant la clause résolutoire du bail par acte du 9 juillet 2025; qu'au regard de l'importance de l'arriéré locatif et de l'absence de trésorerie disponible, elle s'est vue contrainte de procéder à la résiliation du bail par courrier du 29 juillet 2025.
Le ministère public fait sienne l'argumentation des organes de la procédure.
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-19 dudit code, le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan.
Aux termes de l'article L. 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La preuve de l'état de cessation des paiements doit être rapportée par celui qui demande l'ouverture de la procédure alors que la preuve de l'existence de réserves de crédit ou de moratoires lui permettant de faire face à son passif exigible incombe au débiteur. En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.
En l'espèce, la société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités versent aux débats un état du passif déclaré dans le cadre de la liquidation judiciaire, d'un montant total de 137.191.80 euros, constitué, d'une part, d'une créance de [Localité 12] Habitat de 122.191,80 euros, d'autre part, d'une créance de l'URSSAF de 15.000 euros. La créance du bailleur est contestée par la société Richone le Tsion et le liquidateur judiciaire dans le cadre d'une action en justice actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Paris. Elle ne peut de ce fait être regardée comme un élément de passif exigible de l'entreprise. Il en est de même de la créance de l'URSSAF, qui a été déclarée au titre d'une régularisation de cotisations. Enfin, il est constant que la prime d'assurance dont la débitrice était redevable lorsque le commissaire à l'exécution du plan a saisi le tribunal est désormais payée. Au vu de ces éléments, il n'est pas établi que la société Richone le Tsion a constitué un nouveau passif exigible au cours de l'exécution du plan.
Pour autant, il n'est pas contesté que la débitrice n'a pas payé la troisième annuité du plan échue le 6 octobre 2024, d'un montant de 42.694,78 euros. L'inexécution du plan de redressement est ainsi caractérisée et justifie la résolution de celui-ci.
Conformément à l'article L. 626-27 du code de commerce, la résolution du plan fait recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.
En l'espèce, le montant du passif admis de la société Richone le Tsion, déduction faite des règlements effectués par le commissaire à l'exécution du plan, s'élève à la somme de 606.714,09 euros selon les indications non contestées de ce dernier et du mandataire judiciaire.
La société Richone le Tsion ne conteste pas ne disposer que d'une trésorerie de 17,75 euros pour faire face à ce passif exigible. Elle est donc en état de cessation des paiements.
Le redressement de la débitrice apparaît manifestement impossible alors que l'intéressée n'a plus de droit au bail susceptible d'être cédé dans le cadre d'une cession de son fonds de commerce, le local ayant été restitué au bailleur, ni d'activité lui permettant de générer un revenu. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son égard, la date de cessation des paiements étant par ailleurs justement fixée au 6 octobre 2024, date d'exigibilité de la première échéance impayée du plan.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire. La société Richone le Tsion et Mme [U] seront par conséquent déboutées de leur demande au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la société Richone le Tsion et Mme [U] de leur demande de condamnation au titre des frais irrépétibles,
Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2025
(n° / 2025 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/07743 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLIO2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 avril 2025 -Tribunal des activités économiques de PARIS - RG n° 2025022053
APPELANTES
S.A.S. RICHONE LE TSION ' SIGLE R.L.T , prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 813 622 164,
Dont le siège social est situé [Adresse 5],
[Localité 9]
Madame [Y] [J] Nom d'usage [U], en qualité de présidente de la SAS RICHONE LE TSION, SIGLE R.L.T,
Née le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 13]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 2]
[Localité 11]
Représentées par Me Virginie DOMAIN, avocate au barreau de PARIS, toque : C1224,
Assistées de Me Valentine COUDERT de la SELARL OCTAAV, avocate au barreau de PARIS, toque : C1224,
INTIMÉS
S.E.L.A.R.L. AJASSOCIES, prise en la personne de Maître [O] [C], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société RICHONE LE TSION,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 423 719 178,
Dont le siège social est situé [Adresse 10]
[Localité 9]
S.E.L.A.F.A. MJA , prise en la personne de Maître [P] [K], en qualité de liquidateur judiciaire de la société RICHONE LE TSION, désigné par jugement du tribunal des activités économiques de Paris le 2 avril 2025,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 8]
Représentées par Me Sally DIARRA de l'AARPI KLEBERLAW, avocate au barreau de PARIS, toque : P159,
Assistées de Me Yves CORRE de l'AARPI KLEBERLAW, avocat au barreau de PARIS, toque : P159,
LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS
SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL
[Adresse 1]
[Localité 7]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François VARICHON dans le respect des conditions prévues à l'artcile 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE
La société par actions simplifiée Richone le Tsion a été créée en 2015 pour l'exercice d'une activité de restauration, sandwicherie, traiteur et vente à emporter.
Elle exploitait son activité dans un local situé [Adresse 6] à [Localité 12] appartenant à l'établissement [Localité 12] Habitat. En 2019, elle a conclu un contrat de location-gérance portant sur son fonds de commerce.
Par jugement du 25 septembre 2019, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard et désigné, d'une part, la société AJAssociés en la personne de Maître [C] en qualité d'administrateur, d'autre part, la société Axyme en la personne de Maître [Z] en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal a arrêté un plan de redressement de la société Richone le Tsion, la société AJAssociés en la personne de Maître [C] étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le plan adopté par le tribunal prévoyait les modalités suivantes d'apurement du passif, d'un montant de 669.926,92 euros:
' le règlement des créances inférieures à 500 euros dès l'adoption du plan;
' le règlement des créances privilégiées et chirographaires en dix échéances égales de 10 %, la première intervenant le 6 octobre 2022 puis chaque année à la même date;
' le remboursement de la créance en compte courant de la dirigeante de la société, Mme [Y] [U], subordonné à la parfaite exécution du plan.
La société Richone le Tsion a réglé les deux premiers dividendes du plan mais n'a pas réglé la troisième annuité exigible le 6 octobre 2024, d'un montant de 42.694,78 euros. Par ailleurs, la société a constitué un passif postérieur constitué par un impayé de prime d'assurance.
C'est dans ces conditions que par requête du 14 mars 2025, le commissaire à l'exécution du plan a saisi le tribunal des activités économiques de Paris aux fins de résolution du plan de redressement et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.
Par jugement du 2 avril 2025, le tribunal a:
- prononcé la résolution du plan de redressement de la société Richone le Tsion;
- ouvert à son égard une procédure de liquidation judiciaire;
- nommé la société MJA prise en la personne de Maître [K] en qualité de liquidateur;
- fixé la date de la cessation des paiements au 6 octobre 2024, date d'exigibilité de la 3ème annuité du plan.
- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de justice.
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a considéré que la 3ème échéance du plan n'avait pas été réglée par la débitrice et que l'état de cessation des paiements était avéré.
Le 23 avril 2025, la société Richone le Tsion et Mme [U] ont relevé appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 8 septembre 2025, la société Richone le Tsion et Mme [U] demandent à la cour de:
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau,
- débouter la société AJAssociés ès qualités de sa demande de résolution du plan de continuation,
- condamner solidairement les organes de la procédure à payer à la société Richone le Tsion la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens;
- à titre subsidiaire, infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Richone le Tsion,
- renvoyer l'affaire devant le tribunal des activités économiques de Paris pour la désignation des organes de la procédure;
- ordonner l'inscription des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 14 août 2025, la société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités demandent à la cour de:
- débouter de son appel la société Richone le Tsion,
- confirmer le jugement entrepris,
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Aux termes de son avis notifié par voie électronique le 4 juillet 2025, le ministère public invite la cour à confirmer le jugement dont appel.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 23 septembre 2025.
SUR CE,
Sur la résolution du plan de redressement et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire
A l'appui de leur demande d'infirmation, les appelantes expliquent:
- qu'après que [Localité 12] Habitat a refusé d'autoriser la conclusion d'un nouveau contrat de location-gérance portant sur le fonds de commerce exploité dans les lieux loués, la société Richone le Tsion a essayé de mettre en vente son fonds, en ce compris le droit au bail; qu'à cette occasion, elle a découvert que le système d'extraction des fumées du local n'était pas conforme à la réglementation; qu'elle a donc saisi le tribunal judiciaire de Paris aux fins de condamnation de la société [Localité 12] Habitat à l'indemniser; que le liquidateur judiciaire est volontairement intervenu à cette instance, qui est toujours en cours;
- que deux acquéreurs se sont manifestés pour l'achat du fonds de commerce; que toutefois, le liquidateur a décidé de mettre un terme au bail à défaut de trésorerie pour payer le loyer, ce qui est surprenant car l'absence de délivrance conforme du local par [Localité 12] Habitat lui permettait d'opposer à ce dernier l'exception d'inexécution;
- que le passif postérieur invoqué par le liquidateur est composé à 89 % de la créance déclarée par le bailleur, qui, pour les motifs exposés ci-dessus, peut être contestée avec toutes les chances de rejet; qu'il apparaît par conséquent prématuré de prononcer la liquidation judiciaire de la société Richone le Tsion;
- que subsidiairement, il est demandé à la cour d'ouvrir à son égard une procédure de redressement judiciaire.
La société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités répliquent:
- qu'à ce jour, le passif de la société Richone le Tsion s'élève, d'une part, à la somme de 606.714,09 euros résultant de la résolution du plan de redressement, d'autre part, de la somme de 137.191,80 euros au titre du passif déclaré lors de l'ouverture de la liquidation judiciaire, dont 122.191,80 euros déclarés à titre privilégié et échu par le bailleur; que l'actif disponible est quasi-nul puisque le solde du compte de l'entreprise ne s'élève qu'à 17,75 euros; qu'ainsi la société Richone le Tsion se trouve en état de cessation des paiements;
- que la débitrice n'est pas en mesure de s'acquitter de la 3ème échéance du plan et de poursuivre son plan de redressement; que la liquidation judiciaire doit donc être confirmée;
- que la société MJA ès qualités a vainement tenté de trouver un repreneur du fonds de commerce de la société Richone le Tsion; que toutefois, aucune offre de reprise n'a été déposée dans le délai fixé, ce qui n'est pas surprenant car le fonds est totalement inexploitable compte tenu de l'état dégradé des locaux; qu'à la suite de cet appel d'offre infructueux, [Localité 12] Habitat a fait délivrer à la société MJA ès qualités un commandement de payer l'arriéré locatif visant la clause résolutoire du bail par acte du 9 juillet 2025; qu'au regard de l'importance de l'arriéré locatif et de l'absence de trésorerie disponible, elle s'est vue contrainte de procéder à la résiliation du bail par courrier du 29 juillet 2025.
Le ministère public fait sienne l'argumentation des organes de la procédure.
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-19 dudit code, le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan.
Aux termes de l'article L. 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La preuve de l'état de cessation des paiements doit être rapportée par celui qui demande l'ouverture de la procédure alors que la preuve de l'existence de réserves de crédit ou de moratoires lui permettant de faire face à son passif exigible incombe au débiteur. En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.
En l'espèce, la société MJA ès qualités et la société AJAssociés ès qualités versent aux débats un état du passif déclaré dans le cadre de la liquidation judiciaire, d'un montant total de 137.191.80 euros, constitué, d'une part, d'une créance de [Localité 12] Habitat de 122.191,80 euros, d'autre part, d'une créance de l'URSSAF de 15.000 euros. La créance du bailleur est contestée par la société Richone le Tsion et le liquidateur judiciaire dans le cadre d'une action en justice actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Paris. Elle ne peut de ce fait être regardée comme un élément de passif exigible de l'entreprise. Il en est de même de la créance de l'URSSAF, qui a été déclarée au titre d'une régularisation de cotisations. Enfin, il est constant que la prime d'assurance dont la débitrice était redevable lorsque le commissaire à l'exécution du plan a saisi le tribunal est désormais payée. Au vu de ces éléments, il n'est pas établi que la société Richone le Tsion a constitué un nouveau passif exigible au cours de l'exécution du plan.
Pour autant, il n'est pas contesté que la débitrice n'a pas payé la troisième annuité du plan échue le 6 octobre 2024, d'un montant de 42.694,78 euros. L'inexécution du plan de redressement est ainsi caractérisée et justifie la résolution de celui-ci.
Conformément à l'article L. 626-27 du code de commerce, la résolution du plan fait recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.
En l'espèce, le montant du passif admis de la société Richone le Tsion, déduction faite des règlements effectués par le commissaire à l'exécution du plan, s'élève à la somme de 606.714,09 euros selon les indications non contestées de ce dernier et du mandataire judiciaire.
La société Richone le Tsion ne conteste pas ne disposer que d'une trésorerie de 17,75 euros pour faire face à ce passif exigible. Elle est donc en état de cessation des paiements.
Le redressement de la débitrice apparaît manifestement impossible alors que l'intéressée n'a plus de droit au bail susceptible d'être cédé dans le cadre d'une cession de son fonds de commerce, le local ayant été restitué au bailleur, ni d'activité lui permettant de générer un revenu. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son égard, la date de cessation des paiements étant par ailleurs justement fixée au 6 octobre 2024, date d'exigibilité de la première échéance impayée du plan.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire. La société Richone le Tsion et Mme [U] seront par conséquent déboutées de leur demande au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la société Richone le Tsion et Mme [U] de leur demande de condamnation au titre des frais irrépétibles,
Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Présidente