CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 21 octobre 2025, n° 23/11968
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Norprotex Groupe (SAS)
Défendeur :
Beard Dev (SAS), Beard & Co (SAS), CF-Hold (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Hébert-Pageot
Conseillers :
Mme Lacheze, M. Varichon
Avocats :
Me Fromantin, Me Minchella, Me Boccon Gibod, Me Buscail
FAITS ET PROCÉDURE:
La société par actions simplifiée Norprotex Groupe anciennement dénommée Financière Petros est la société holding animatrice d'un groupe de sociétés spécialisées dans le domaine du textile, parmi lesquelles les sociétés Norprotex, Nordis et Ruckfield.
Le 22 février 2019, la société Norprotex Groupe a cédé à la société CF-Hold les sociétés Ruckfield et Nordis sous conditions suspensives. Le protocole de cession de titres prévoyait notamment une clause d'engagement de non-débauchage, selon laquelle la société CF-Hold s'engageait notamment à ne pas embaucher, sous quelque forme que ce soit, des employés d'une des sociétés filiales de la société Norprotex Groupe.
Le 2 juillet 2019, la société Beard Dev., contrôlée par CF-Hold a été constituée à l'effet de substituer cette dernière dans le bénéfice du protocole de cession de titres précité.
Le 11 juillet 2019, les sociétés Norprotex Groupe et Beard Dev représentée par Beard & Co., ont conclu le protocole réitératif de cession d'actions ayant pour objet de constater la levée des conditions suspensives et la substitution par la société Beard Dev de la société CF-Hold, cette dernière demeurant toutefois solidaire de l'exécution des engagements souscrits par la société Beard Dev. Un nouvel engagement de non-débauchage similaire au premier a été souscrit par la société Beard Dev. à cette occasion, et ce pour une durée de 3 ans. Sont intervenus au protocole réitératif de cessions d'actions la société Norprotex, filiale de la société Norprotex Groupe, de même que deux des sociétés du groupe CF-Hold, les sociétés Beard & Co. et [V] image, ainsi que M. [O] [V].
Le 2 août 2019, M. [P] [T], alors employé par la société Norprotex en qualité de « Directeur Supply Chain », a présenté sa démission de la société Norprotex qui par courrier du 9 août 2019 l'a libéré de l'engagement de non-concurrence prévu dans son contrat de travail et à compter du 1er septembre 2020, il a été embauché par la société Beard & Co. en qualité de « directeur de la chaine d'approvisionnement » suivant contrat à durée indéterminée, après avoir effectué des missions d'intérim pour le Groupe [N] entre janvier et août 2020.
Estimant que l'embauche de M. [T] par la société Beard & Co. constituait une violation de l'engagement contractuel souscrit par la société Beard Dev. en présence de la société Beard & Co. et garanti par la société CF-Hold, et après avoir vainement mis en 'uvre la procédure amiable de conciliation prévue au protocole, les sociétés Norprotex et Norprotex Groupe ont assigné le 28 décembre 2021 les sociétés Beard Dev., Beard & Co. et CF-Hold devant le tribunal de commerce de Paris aux fins notamment d'obtenir réparation du préjudice matériel de la société Norprotex Groupe à hauteur de 305 292 euros TTC, de son préjudice moral à hauteur de 100 000 euros et des faits de parasitisme économique à hauteur de 100 000 euros.
Le 17 novembre 2022, la société Norprotex a fait l'objet d'une dissolution sans liquidation avec transfert universel de son patrimoine à la société Norprotex Groupe.
Par jugement du 2 juin 2023, le tribunal de commerce de Paris a débouté la société Norprotex Groupe de toutes ses demandes, débouté les sociétés CF-Hold, Beard Dev. et Beard & Co de leurs demandes de dommages-intérêts et d'article 700 du code de procédure civile, rappelé que l'exécution provisoire est de droit et condamné la société Norprotex Groupe aux dépens.
Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a tout d'abord constaté que M. [T] a démissionné le 2 août 2019 de la société Norprotex et que le 9 août 2019, la société Norprotex a libéré M. [T] de sa clause de non-concurrence en lui rappelant l'existence de la clause de non-débauchage ne lui permettant pas d'être embauché par une société du groupe CF-Hold. Le tribunal a considéré que la clause était disproportionnée en ce qui concerne M. [T] aux motifs que la société Norprotex ne contestait pas que l'équipe à laquelle appartenait M. [T] avait manifestement disparu au moment de sa démission, ne lui laissant pas d'avenir dans l'entreprise et qu'en le libérant de la clause de non-concurrence, Norprotex considérait que le passage à la concurrence ne le concernait pas. Il a ensuite jugé que M. [T] avait été embauché par la société Beard & Co. après une période d'intérim de 8 mois auprès de la société M. [N], dont il n'était pas démontré qu'elle entretenait un lien de connivence autre que de bailleur à locataire avec le groupe CF-Hold, que M. [T] n'était plus salarié de la société Norprotex depuis 9 mois au moment de son embauche et que la clause litigieuse devait s'appliquer strictement.
Par déclaration du 6 juillet 2023, la société Norprotex Groupe a relevé appel de ce jugement, intimant les sociétés Beard Dev., Beard & Co et CF-Hold.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 29 mars 2024, la société Norprotex Groupe demande à la cour :
- de la déclarer recevable et bien fondée en son appel limité du jugement rendu le 2 juin 2023 par le tribunal de commerce de Paris ;
- d'infirmer la décision critiquée en ce qu'elle l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée aux entiers dépens de la procédure ;
- de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a rejeté les prétentions des intimées pour procédure abusive et au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ce faisant, débouter les intimées de leurs demandes reconventionnelles formulées dans le cadre de leur appel incident ;
- statuant à nouveau, de condamner solidairement les sociétés CF-Hold, Beard Dev. et Beard & Co. à lui payer :
la somme de 305 292 euros toutes taxes comprises (254 410 euros hors taxe) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel subi du fait de la violation de l'obligation contractuelle de non-débauchage stipulée dans le protocole de cession de titres sous conditions suspensives du 22 février 2019 et dans le protocole réitératif de cession d'actions du 11 juillet 2019, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2020 (date de la mise en demeure adressée par la société Norprotex Groupe à la société Beard Dev),
la somme de 100 000 euros à titre dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de la violation de l'obligation contractuelle de non-débauchage stipulée dans le protocole de cession de titres sous conditions suspensives du 22 février 2019 et dans le Protocole réitératif de cession d'actions du 11 juillet 2019, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2020,
la somme de 100 000 euros au titre des faits de parasitisme économique,
la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance ;
- d'ordonner la publication de la condamnation à intervenir dans cinq publications au choix de la société Norprotex Groupe sans que chacune de ces publications puisse avoir un cout supérieur à 5 000 euros.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 3 janvier 2024, les sociétés Beard Dev., Beard & Co. et CF-Hold demandent à la cour :
- à titre principal, de déclarer la société Norprotex Groupe infondée en son recours ;
- de confirmer le jugement du 2 juin 2023 rendu par le tribunal de commerce de Paris mais uniquement en ce qu'il a débouté Norprotex Groupe de toutes ses demandes et condamné cette dernière aux dépens ;
- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour d'appel venait à infirmer le jugement en considérant que les sociétés CF-Hold, Beard Dev. et Beard & Co. ont violé la clause de non-débauchage, de juger que la société Norprotex Groupe ne justifie d'aucun préjudice tant dans son fondement que dans son quantum et en conséquence, de débouter la société Norprotex Groupe de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts au titre des prétendus préjudices subis, de sa demande de publication de la décision à intervenir et de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre des intimées ;
- en tout état de cause, de les recevoir en leur appel incident et les en déclarer bien fondées ;
- d'infirmer le jugement rendu le 2 juin 2023 par le tribunal de commerce de Paris pour le surplus, en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes de dommages-intérêts et d'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner la société Norprotex Groupe à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure de première instance, la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code procédure civile pour les frais exposés à hauteur d'appel et aux entiers dépens.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 28 janvier 2025.
SUR CE,
Sur les demandes d'indemnisation de la violation de la clause de non-débauchage
Sur la faute
La société Norprotex Groupe soutient en substance :
- que les premiers juges ont dénaturé les termes de la clause de non-débauchage en confondant son régime avec celui de la clause de non-concurrence alors que les deux clauses ne lient pas les mêmes parties et que l'objet de la première est moins large, qu'en libérant M. [T] de son obligation de non-concurrence, elle entendait maintenir l'obligation de non sollicitation, ce qu'elle a rappelé au salarié et qui contribuait à établir le caractère proportionné de la clause de non-débauchage, que la clause de non-débauchage est parfaitement proportionnée, eu égard à l'objet du contrat, aux intérêts légitimes protégés par celle-ci et aux atteintes portées par la clause à la liberté du travail et à celle d'entreprendre, qu'elle n'a pas à être limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle ne requiert pas le versement au salarié d'une contrepartie, que seul le salarié peut se prévaloir d'une atteinte à sa liberté de travail et d'entreprendre causée par la clause de non-sollicitation sans contrepartie financière -ce que M. [T] n'a jamais fait- et non les sociétés tenues de respecter cette clause, que la clause de non-débauchage présente un caractère réciproque et lui réserve la possibilité de lever l'obligation de non-débauchage au cas par cas, que M. [T] exerçait un rôle prépondérant au sein de Norprotex ce qui aurait immanquablement conduit à un refus de lever l'obligation ; que les intimées ont donc contourné la clause de manière déloyale ;
- que le tribunal a mal interprété la clause quant à son champ d'application aux salariés visés, qu'elle vise les personnes employées par l'une ou l'autre des sociétés du groupe Norprotex (autrement dénommé Financière Petros) à la date du 11 juillet 2019, qu'il est indifférent que M. [T] ait quitté la société Norprotex pour une autre société avant de rejoindre la société Beard & Co., qu'elle continue à s'appliquer même en cas de démission du salarié, que les membres de l'équipe de M. [T] étaient encore en poste au jour de sa démission contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, que M. [T] était l'homme clé de la réorganisation de son activité ;
- qu'en vertu de la clause litigieuse, la société Beard Dev. ne pouvait pas embaucher un salarié qui était employé par la société Norprotex à la date du 11 juillet 2019, que la durée de cette interdiction était de 3 ans et expirait le 11 juillet 2022, que l'embauche d'un salarié avant cette date sans avoir été relevé de l'obligation de non-débauchage caractérise la violation de la clause, que M. [T] a été embauché le 1er septembre 2020, et sans doute avant cette date de manière occulte, que les circonstances de cette embauche ont été particulièrement déloyales, dans un premier temps dissimulées par des contrats d'intérim de trois mois au sein du Groupe [N] qui est le bailleur des sociétés Nordis et Ruckfield, que ces missions d'intérim ne correspondaient pas à l'expérience et aux compétences de M. [T], qu'il n'est pas crédible qu'il ait démissionné pour enchainer des missions d'intérim, que le fait que M. [T] ait perçu un bonus moins de six mois après son embauche par Board & Dev. montre qu'il travaillait depuis plus longtemps pour cette société, qu'il a perçu des prototypes de la société Maui and sons seulement 9 jours après son embauche officielle, ce qui n'est pas concevable au regard de la durée du cycle de création d'une collection textile et que cette violation est d'autant plus grave qu'elle avait pris le soin de rappeler son obligation de non-débauchage à M. [T] et à la société Board & Dev.
En réponse, les sociétés Beard Dev., Beard & Co. et CF-Hold font valoir :
- que la clause de non-débauchage est nulle en raison de son caractère disproportionné, qu'en libérant M. [T] de son obligation de non-concurrence dans le courrier d'accusé de réception de sa démission du 9 août 2019, ce dernier se trouve lié par une clause de non-débauchage à laquelle il n'est pourtant pas partie, que par conséquent, la clause de non-débauchage, qui n'est autre qu'une clause de non-concurrence déguisée, prive son ancien salarié de façon disproportionnée de sa liberté d'entreprendre et de travailler dans une autre entreprise du même secteur sans restriction ni limite, le tout sans avoir à l'indemniser et pour une durée de 3 ans, de sorte qu'elle est disproportionnée et qu'elle encourt la nullité, que M. [T] a rencontré des difficultés pour retrouver un emploi dans sa région à la suite de sa démission, ce qui l'a dans un premier temps contraint à se tourner vers le secteur de l'électricité dans le cadre d'un contrat d'intérim, que contrairement à ce qu'avance Norprotex Groupe, la société Beard & Co. ne sollicite pas d'indemnisation au titre de la disproportion de la clause, dont seul peut se prévaloir le salarié, mais elle est parfaitement en droit de demander la nullité de la clause de non-débauchage prévue au protocole pour atteinte à la liberté du travail de celui-ci, ainsi qu'à leurs libertés d'entreprendre respectives, qu'il en résulte qu'elles n'ont pas violé leurs obligations à ce titre ;
- que la clause n'interdit pas à l'acquéreur, soit à Beard Dev. représentée par Beard & Co., d'embaucher d'anciens salariés des sociétés du Groupe Financière Petros, mais seulement et strictement des « salariés ou un mandataire social des sociétés du Groupe Financière Petros ou une personne ayant ces statuts », que contrairement à l'interprétation donnée par l'appelante, la partie de la clause « à la Date de réalisation pendant une durée de trois ans suivant cette date » est placée après une virgule, ce qui indique clairement que cela fait référence à la durée de l'engagement prévue dans la clause et non au statut des personnes visées par l'interdiction et que l'expression « à la Date » ne qualifie pas les salariés du Groupe Financière Petros, que la clause doit s'appliquer strictement, que pour que la clause de non-débauchage prévue au protocole s'applique aux anciens salariés ou à tout le moins aux salariés ayant quitté la société depuis une courte durée, ladite clause aurait dû le prévoir, que M. [T] en tant qu'ancien salarié de Norprotex (depuis 8 mois au moment de son embauche) n'entrait plus dans le champ d'application de la clause, que la société Norprotex Groupe n'apporte aucune preuve d'un manquement de la société Beard & Co. à ses obligations résultant de la clause de non-débauchage stipulée au protocole ;
- qu'elles réfutent la thèse adverse quant à un prétendu comportement déloyal, qu'elles n'ont pas influencé la démission de M. [T], que la décision de M. [T] de quitter la société s'inscrit dans un mouvement général de démission de l'équipe Supply-Chain de la marque Longboard (11 salariés sur 19 l'ont précédé), avec des départs non immédiatement remplacés, s'expliquant par la situation financière de la société Norprotex et de la marque Longboard qui connaissaient une baisse de leurs chiffres d'affaires depuis plusieurs années, que la concomitance de la démission de M. [T] et de la signature du protocole ne rend pas la démission abusive, qu'il n'existe aucune preuve tangible de la volonté du groupe CH-Hold de recruter M. [T] pendant les négociations, ni de liens qui existeraient entre le groupe [N] et la société Beard & Co., à l'exception d'une mise à disposition de locaux, que M. [T] a été recruté en raison de ses compétences spécifiques et détachables d'un quelconque secteur d'activité particulier, que M. [T] s'est trouvé dans l'obligation étant sans emploi d'accepter des missions d'intérim, que le profil LinkedIn de M. [T] n'est tout simplement pas à jour parce qu'il n'est pas actif sur les réseaux sociaux, que le fournisseur Sunshine qui a envoyé des échantillons à M. [T] à la mauvaise adresse était en contact préalable avec Beard & Co et que leur responsabilité contractuelle ne peut être engagée.
Sur ce,
L'article 1241-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
L'article 1241-2 prévoit que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé ['].
En l'espèce, les parties ont souscrit un engagement réciproque de non-concurrence et de non débauchage suivant un protocole de cession de titres composant le capital social des sociétés Ruckfield et Nordis du 22 février 2019 rédigé en ces termes s'agissant de la société cessionnaire CF-Hold :
« 15.3.8 De son côté, l'Acquéreur, sauf accord préalable écrit, s'engagera à ne pas embaucher ou faire collaborer, sous quelque forme que ce soit, notamment par voie de salariat, d'agence ou de prestations de services, directement ou indirectement, par voie de participation directe ou indirecte, dans des sociétés en participation occulte ou ostensible, d'exploitation, un salarié ou un mandataire social des sociétés du Groupe FINANCIERE PETROS ou une personne ayant ces statuts, à la Date de réalisation pendant une durée de trois (3) ans suivant cette date ».
Suivant le protocole réitératif de cession d'actions conclu le 11 juillet 2019, les sociétés Norprotex Groupe et Beard Dev. ont constaté la réalisation des conditions suspensives et renouvelé leur engagement en ces termes (identiques aux précédents) s'agissant de la société Beard Dev. :
« 17.3.8 De son côté, l'Acquéreur, sauf accord préalable écrit, s'engagera à ne pas embaucher ou faire collaborer, sous quelque forme que ce soit, notamment par voie de salariat, d'agence ou de prestations de services, directement ou indirectement, par voie de participation directe ou indirecte, dans des sociétés en participation occulte ou ostensible, d'exploitation, un salarié ou un mandataire social des sociétés du Groupe FINANCIERE PETROS ou une personne ayant ces statuts, à la Date de ce jour pendant une durée de trois (3) ans suivant cette date. »
Cette clause ne peut être lue que comme imposant une obligation de non-débauchage des salariés ou mandataires sociaux de l'une des sociétés du groupe Norprotex (autrement dénommé Financière Petros) à la date du 11 juillet 2019, sauf à faire perdre sa substance et sa portée à l'obligation de non-débauchage. Exclure les anciens salariés de son champ d'application en favoriserait le contournement car il suffirait que ceux-ci démissionnent pour faire obstacle à l'application de la clause. Quand bien même les mots : « à la Date de ce jour » ne seraient interprétés que comme le point de départ du délai de trois ans comme le prétendent les intimées, les salariés en poste au jour de la signature du protocole réitératif constatant la réalisation de la cession entrent dans le champ d'application de la clause.
Cette clause qui vise uniquement l'embauche d'un salarié d'une société du groupe Norportex par l'une des sociétés membres du groupe acquéreur CF-Hold a un périmètre limité, ne prive pas le salarié de sa liberté de travail et d'entreprendre, celui-ci étant par ailleurs délié de son obligation de non-concurrence. Elle a pour finalité la conservation d'un savoir-faire au sein de la société Norprotex, de sorte qu'elle protège un intérêt légitime de la concurrence que pourrait lui faire le cessionnaire. Elle n'est donc pas disproportionnée par rapport au but poursuivi, et partant, elle n'encourt pas la nullité contrairement à ce que prétendent les intimées.
Par ailleurs, il est constant que M. [T] a présenté sa démission le 2 août 2019, par courrier précisant que celle-ci ne serait effective qu'à l'issue de son préavis.
M. [T] faisait ainsi partie des salariés que la société Beard & Co. ne devait pas embaucher, ce qu'elle a pourtant fait par contrat de travail à effet du 1er septembre 2020 et à durée indéterminée, et ce sans accord écrit préalable de la société Norprotex Groupe.
Le fait que M. [T] ait démissionné sans retrouver dans l'immédiat un emploi stable mais uniquement des missions d'intérim durant neuf mois à l'issue de son préavis accrédite le fait que la société Beard & Co. a cherché à contourner l'interdiction prévue par la clause de non-débauchage, alors que si sa démission était motivée par la situation financière de la société Norprotex et de la marque Longboard comme le soutiennent les intimées, il serait parti pour un autre emploi de même statut et de même niveau de rémunération et n'avait pas intérêt à anticiper un départ à des conditions financières et statutaires moins favorables.
C'est neuf mois plus tard auprès de la société Beard & Co. qu'il a retrouvé, sans période d'essai préalable, un emploi rémunéré à hauteur d'un salaire mensuel forfaitaire brut de 5 681,42 euros, complété d'une prime allouée en fonction de la réalisation d'objectifs pouvant aller jusqu'à 10 000 euros brut par an, et de surcroît d'un bonus de 5 000 euros pour l'année 2020 versé automatiquement et à titre exceptionnel, ce qui est inhabituel après une embauche.
Enfin, telle que la clause de non-débauchage est rédigée, elle n'impose pas de caractériser une volonté de nuire ou une intention déloyale pour être applicable.
Ces éléments permettent de démontrer la violation par les sociétés Beard Dev. et Beard & Co. de l'obligation contractuelle de non-débauchage stipulée dans le protocole de cession de titres sous conditions suspensives du 22 février 2019 et dans le protocole réitératif de cession d'actions du 11 juillet 2019.
Sur le préjudice matériel
La société Norprotex Groupe sollicite le paiement de la somme de 305 292 euros toutes taxes comprises (254 410 euros hors taxe) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2020 (date de la mise en demeure adressée par la société Norprotex Groupe à la société Beard Dev.) du fait de la violation de l'obligation contractuelle de non-débauchage stipulée dans le protocole de cession de titres sous conditions suspensives du 22 février 2019 et dans le protocole réitératif de cession d'actions du 11 juillet 2019, faisant valoir :
- qu'elle avait signé un contrat de prestations de services et d'assistance de trois ans par ses bureaux de Chine (10 personnes) et Bangladesh (4 personnes) avec la société Beard Dev., qu'employé par Norportex, M. [T] avait pour mission en tant que « Chief representative » de ces bureaux, de contrôler à l'occasion de ses multiples déplacements en Asie, les ordres passés par la société Norprotex auprès de ses fournisseurs de tissus et la réalisation des produits par les fabricants, que la société Beard Dev. a résilié le contrat de prestations de services en juillet 2019 juste avant d'embaucher M. [T] et ainsi d'acquérir les compétences de ce dernier, que dès lors, le contrat résilié ne présentait plus aucune utilité pour elle, que la résiliation du contrat de prestations de services est donc abusive et de mauvaise foi et justifie l'indemnisation du préjudice subi ;
- que les intimées ont commis des actes de concurrence déloyale en violant la clause de non-sollicitation, en dissimulant le recrutement de M. [T], en résiliant concomitamment le contrat de prestations de services conclu avec la société Norprotex, en utilisant des démarches marketing et merchandising lui appartenant et en ayant recours à des agents ou sous-traitants de cette dernière ;
- qu'elle chiffre son préjudice par comparaison des revenus qu'elle a tirés de l'exécution du contrat de prestations de services résilié prématurément avec ceux qu'elle aurait perçus si elle l'avait poursuivi jusqu'à son terme, qu'il en résulte un manque à gagner d'un montant de 305 292 euros toutes taxes comprises, que parallèlement, la société Ruckfield a accru son chiffre d'affaires de 80% entre 2019 et 2020 et que le cabinet Axiome a vérifié les pertes constatées et validé les saisons impactées.
Les intimées répondent que la société Norprotex n'a subi aucun préjudice économique direct, que la situation financière du bureau de liaison en Chine est devenue incertaine au cours de l'année 2020, raison pour laquelle les sociétés Ruckfield et Nordis ont d'abord mis fin aux prestations optionnelles relatives au service import à compter du 30 janvier 2020, que de plus, ces difficultés financières ont poussé la société Norprotex à envisager de fermer ce bureau et de proposer aux sociétés Ruckfield et Nordis d'en faire l'acquisition, après quoi Norprotex s'est rétractée de sa proposition, que c'est à ce moment-là que Nordis et Ruckfield ont envisagé de développer un service local autonome et ont décidé de résilier le contrat de prestation de service en août 2020, puis d'embaucher M. [T] pour développer un service local, que l'embauche de M. [T] intervient donc uniquement en solution de secours pour garantir leurs intérêts après la résiliation du contrat et non l'inverse, qu'elles ont continué d'exécuter leurs obligations au titre du contrat de prestations de services jusqu'à l'expiration du délai de préavis, soit jusqu'au mois de février 2021, qu'ainsi le préjudice matériel économique tiré de la résiliation du contrat de prestations de services n'est pas la conséquence directe du recrutement de M. [T], intervenu après la résiliation dudit contrat ;
- qu'en outre, le prétendu préjudice matériel économique invoqué par l'appelante est incertain et non justifié dans son quantum, que le manque à gagner allégué n'est qu'une perte de chance hypothétique, dans la mesure où il n'y a aucune certitude ni garantie sur le fait que le contrat se serait poursuivi dans les mêmes conditions que M. [T] ait été embauché ou non, que le contrat de prestations de services était un accessoire à la relation contractuelle entre Norprotex et elles-mêmes et avait vocation à permettre la transition vers une autonomie globale, raison pour laquelle il stipulait une faculté de résiliation sous réserve d'un préavis de 6 mois, que les difficultés financières du bureau de Chine qui existe encore ne sont pas démontrées, que le bureau du Bangladesh a fermé en 2021, que le montant total est indéterminé, qu'il n'est pas prouvé que les chiffres d'affaires de Nordis et Ruckfield auraient suivi les mêmes évolutions que les années précédentes et que le préjudice devrait être calculé sur la marge brute et non sur le chiffre d'affaires, le bureau n'exerçant pas d'activité commerciale.
Sur ce,
A titre liminaire, la demande de la société Norprotex Groupe tendant à voir ordonner sous astreinte qu'il soit mis fin au contrat de travail de M. [T], soutenu dans le corps de ses écritures, n'est pas formulée dans le dispositif des conclusions, de sorte que la cour n'en est pas saisie, pas davantage que le tribunal ne l'était au vu des demandes soutenues en première instance.
Aux termes de l'article 1241-4 du code civil, dans le cas même où l'inexécution du contrat résulte d'une faute lourde ou dolosive, les dommages et intérêts ne comprennent que ce qui est une suite immédiate et directe de l'inexécution.
En l'espèce, le préjudice économique allégué consisterait selon la société Norprotex Groupe en un manque à gagner d'un montant de 305 292 euros TTC résultant de la résiliation, par lettre du 21 août 2020, du contrat de prestations de services et d'assistance liant la société Norprotex aux sociétés cédées Nordis et Ruckfield, et ce à compter du 21 février 2021 pour tenir compte du délai de préavis de 6 mois.
Le respect des clauses du contrat, notamment celle qui prévoit une faculté de résiliation au bénéfice de [5] et Nordis, n'est pas critiqué, mais la société Norprotex Groupe soutient que la résiliation est fautive car abusive.
Dans ces conditions, et quand bien même le préjudice économique serait établi, il ne constitue pas la suite immédiate et directe de l'embauche de M. [T] par la société Beard Dev., mais résulterait de la résiliation du contrat de prestations de services dont la concomitance avec l'embauche de M. [T] ne suffit pas à démontrer le caractère fautif à défaut d'éléments suffisamment probants, étant rappelé que le groupe CF-Hold avait fait l'acquisition des sociétés Nordis et Ruckfield et détenait par ce biais des compétences en matière de commercialisation d'articles de sport confectionnés à l'étranger, principalement en Chine et au Pakistan.
Il s'ensuit qu'à défaut de lien de causalité entre d'une part la faute reprochée consistant en une violation de la clause de non-débauchage du contrat de cession de titres des sociétés Nordis et Ruckfield et le préjudice allégué résultant de la résiliation du contrat de prestation de services et d'assistance, la demande à ce titre ne peut qu'être rejetée.
Sur la concurrence déloyale et le parasitisme économique
La société Norprortex Groupe sollicite la condamnation des intimées à lui verser la somme de 100 000 euros exposant :
- pour mémoire, que les intimées ont commis des actes de concurrence déloyale en violant la clause de non-sollicitation, en dissimulant le recrutement de M. [T], en résiliant concomitamment le contrat de prestations de services conclu avec la société Norprotex, en utilisant des démarches marketing et merchandising lui appartenant et en ayant recours à des agents ou sous-traitants de cette dernière ;
- que l'appropriation du résultat du travail intellectuel d'autrui, de même que l'appropriation des efforts de recherche d'autrui constitue un acte de parasitisme, que bien que la prise de licence Maui and Sons (bagagerie et sous-vêtements) correspondant à des produits directement concurrents de la société Norprotex (vêtements de marque Longboard) ne soit pas en soi fautive, l'est le fait d'avoir sollicité des agents et fabricants de la société Norprotex pour réaliser des produits correspondants (i) dans un secteur d'activité qui n'est pas originairement celui du groupe CF-Hold (ii) en utilisant un salarié embauché en violation d'une clause de non-débauchage (iii) qui démontre la volonté d'économiser les travaux de recherche, de développement, d'identification de fabricants, de réseaux de distribution par l'acquisition de connaissances que détenait M. [T] depuis 2010 au sein de la société Norprotex (usage de cintres en carton, positionnement eco-responsable des deux marques),
- que M. [T] était la pierre angulaire du développement de la marque Longboard.
Les sociétés Beard Dev., Beard & Co. et CF-Hold répondent :
- que les actes de concurrence déloyale et parasitaire ne sont pas démontrés, que le chiffre d'affaires en lien avec la marque Longboard n'ayant fait que diminuer la société Norportex a fini par la vendre en février 2022, que la société Norprotext Groupe ne démontre pas qu'elle bénéficiait d'un avantage concurrentiel, que le positionnement eco-responsable de la marque Maui and Sons n'est intervenu que sur 12 produits dans le cadre d'une collection capsule, que les cintres en carton sont utilisés couramment par les marques présentes en grande distribution (Ushuaïa, Roxy) ;
- que leur comportement prétendument parasitaire n'est pas démontré, que les fournisseurs et fabricants prétendument obtenus par le biais de M. [T] sont pour leur quasi-totalité des fournisseurs historiques déjà engagés dans des productions pour Ruckfield, et ce même avant le rachat de 2019, que ces fournisseurs ont directement proposé une collaboration à M. [O] [V] qui possède le groupe CH-Hold lors d'un voyage en Chine de ce dernier, et ce bien avant l'arrivée de M. [T], que la marque Maui and Sons existe depuis 1980 et bénéficiait d'une notoriété bien avant le rachat de la licence par Beard & Co, que M. [T] n'était pas la pierre angulaire de la bonne santé de l'activité de la marque Longbard, que la marque a périclité en raison de la décision de ne plus mettre les moyens nécessaires au soutien de celle-ci, qu'elles n'ont jamais eu la volonté de se placer dans le sillage de la marque Longboard, ni de créer un risque de confusion et que l'appelante ne verse aucun élément de preuve des investissements qu'elles auraient réalisés ;
- que la société Norprotex Groupe ne verse aucune preuve d'un quelconque préjudice.
Sur ce,
Vu l'article 1240 du code civil,
La concurrence déloyale est le fait, dans le cadre d'une concurrence autorisée, de faire un usage excessif de sa liberté d'entreprendre, en recourant à des procédés contraires aux règles et usages, occasionnant un préjudice. Trois conditions doivent être réunies pour la caractériser : une faute, qui vise tout procédé contraire aux usages du commerce et à l'honnêteté professionnelle, indépendamment de l'intention de nuire, un préjudice, qui concerne tout dommage subi, générateur d'un trouble commercial et un lien de causalité, généralement induit de la faute et du dommage.
Il y a lieu de s'interroger sur le point de savoir si en l'espèce le fait, précédemment jugé fautif, d'avoir embauché M . [T] en violation d'une clause de non-débauchage est constitutif d'un acte de concurrence déloyale.
Si la première condition est remplie en ce qu'est caractérisée une violation de la clause de non-débauchage d'un salarié du groupe CF-Hold, il n'est pas démontré que la baisse alléguée des ventes d'articles de sport Longboard soit la conséquence directe de cette faute.
En effet, il est avéré que concomitamment au rachat des sociétés Nordis et Ruckfield commercialisant des articles de sport des vêtements de sport en lien avec le rugby, le groupe CF-Hold via sa société Beard & Co, a fait l'acquisition de la licence de la marque Maui and Sons.
Cette dernière commercialise depuis 1980 des vêtements et accessoires autour du surf, d'abord aux Etats-Unis puis en Europe en 1984 et en Asie dans les années 2000, ce qui atteste, compte tenu de la longévité de cette entreprise, une expertise certaine dans le domaine concerné.
En outre, l'usage de cintres en carton pour la commercialisation des vêtements en grande distribution et la démarche eco-responsable, qui sont des pratiques particulièrement répandues dans le milieu du textile (pour preuve : Ushuaïa et Roxy) ne suffisent pas à démontrer le plagiat du modèle économique de commercialisation de la marque Longboard.
Par ailleurs, la société Norprotex n'étaye son récit que de peu d'éléments. Ainsi, l'augmentation du chiffre d'affaires de la société Ruckfield entre 2019 et 2020 n'est pas établie (seuls les résultats des comptes annuels des exercices clos au 31 décembre 2018 et 2019 étant produits).
Il ressort par ailleurs de la pièce 8 de la société Norprotex Groupe que le colis d'échantillons portant la marque Maui and Sons destiné à M. [T] en qualité de directeur des achats chez Norprotex et reçu le 10 septembre 2020 au siège de cette dernière provenait d'un fournisseur pakistanais, ce qui va à l'encontre de ses allégations relatives à des fournisseurs chinois.
A l'inverse, les intimées justifient de ce que la société M Diffusion, dont il n'est pas discuté qu'elle commercialise les produits de la marque Maui and Sons, a entretenu des relations d'affaires entre le 27 mars 2020 et le 31 décembre 2021 avec ce même fournisseur pakistanais la société Sunshine, à raison d'un volume d'achats plus de dix fois inférieur au volume total de ses achats auprès d'autres fournisseurs (4 936,39 euros HT pour Sunshine contre 517 085,04 euros HT pour le volume global des achats sur la même période).
Il s'ensuit que la société Norprotex Groupe manque à établir les faits de concurrence déloyale qu'elle allègue. Sa demande doit être rejetée de ce chef.
Par ailleurs, le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis, indépendamment de tout risque de confusion. A la différence de la concurrence déloyale, qui ne saurait résulter d'un faisceau de présomptions, le parasitisme résulte d'un ensemble d'éléments appréhendés dans leur globalité, indépendamment de tout risque de confusion.
L'existence d'une situation de concurrence directe et effective entre les sociétés considérées n'est pas une condition de l'action en parasitisme qui exige seulement l'existence de faits fautifs générateurs d'un préjudice.
Au cas particulier, les sociétés intimées ne se sont pas placées dans le sillage de la société Norprotex en faisant commerce de produits de la marque Maui and Sons intervenant sur le marché des vêtements de surf depuis 1980. La société Norportex Groupe ne critique d'ailleurs pas l'acquisition de la licence de cette marque par la société Beard & Co. Les sociétés se sont, de fait, retrouvées en situation de concurrence.
Le recours aux mêmes fournisseurs qu'une autre entreprise ne permet pas à lui seul de caractériser un comportement parasitaire, les fournisseurs étant libres de vendre leurs produits à qui ils le souhaitent, sauf clause d'exclusivité, qui n'est pas invoquée.
Enfin, il n'est pas davantage prouvé que l'embauche de M. [T] a emporté un quelconque préjudice pour la société Norprotex Groupe.
Elle sera donc déboutée de sa demande à ces deux titres.
Sur le préjudice moral
La société Norprotex Groupe soutient que le préjudice moral s'infère d'un acte de concurrence déloyale.
Les intimées lui opposent l'absence de preuve d'un préjudice.
Sur ce,
Force est de constater que la société Norprotex ne justifie d'aucun préjudice moral ou de réputation. Elle ne justifie pas non plus d'un acte de concurrence déloyale dont pourrait automatiquement découler un préjudice à ce titre.
Sa demande au titre du préjudice moral doit donc être rejetée.
En conséquence et à ces motifs substitués, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Norprotex Groupe de ses demandes.
Sur la demande de publication du présent arrêt
Cette demande de la société Norprotex Groupe qui succombe en ses prétentions ne saurait prospérer car elle est devenue sans objet.
- Sur la demande au titre de la procédure abusive
Compte tenu de la faute commise par la société Beard & Co., il n'est pas démontré que la société Norprotex Groupe ait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice.
La demande des intimées doit donc être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La société Norprotex Groupe, partie perdante, sera condamnée aux dépens, le jugement étant confirmé sur ce point.
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque. Le jugement sera confirmé de ce chef également.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne la société Norprotex Groupe aux dépens ;
Déboute les parties de leurs demandes en paiement d'indemnités procédurales.