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Décisions

CA Pau, 2e ch - sect. 1, 21 octobre 2025, n° 24/00422

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 24/00422

21 octobre 2025

LB/PM

Numéro 25/2851

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 21 OCTOBRE 2025

Dossier : N° RG 24/00422 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IYEU

Nature affaire :

Demande de fixation du prix du bail révisé ou renouvelé

Affaire :

S.C.I. [Adresse 9]

C/

S.A.R.L. [Localité 7] SURF SHOP

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 21 OCTOBRE 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 07 Avril 2025, devant :

Laurence BAYLAUCQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Mme DENIS, Greffier présent à l'appel des causes,

Laurence BAYLAUCQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Philippe DARRACQ et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Présidente

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.C.I. [Adresse 9]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Elsa ORABE, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEE :

S.A.R.L. [Localité 7] SURF SHOP

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Christophe MIRANDA de la SELARL ETCHE AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 07 DECEMBRE 2023

rendue par le TJ A COMPETENCE COMMERCIALE DE [Localité 6]

EXPOSE DU LITIGE :

Par acte authentique du 1er juillet 2010, M. [H] [X] a consenti un bail commercial à la SARL [Localité 7] Surf Shop portant sur un immeuble bâti situé à [Adresse 8], comprenant un bâtiment à usage commercial sur terre-plein d'un rez-de-chaussée pour une superficie de 153 m3 environ ainsi que la jouissance du parking pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2010 moyennant un loyer annuel initial de 16.401,34 euros hors taxe à la valeur ajoutée.

Par acte sous seing privé du 28 avril 2011 auquel est intervenu M. [H] [X], la SARL [Localité 7] Surf Shop a consenti à la SARL EUMIJEED une cession partielle de droit au bail portant sur une superficie des locaux de 53m2 environ.

Deux nouveaux contrats de bail commercial ont été conclus le 28 avril 2011, l'un entre M. [X] et la société [Localité 7] Surf Shop, portant sur des locaux d'une superficie de 100 m2, l'autre conclu entre M. [X] et la SARL EUMIJEED portant sur des locaux d'une superficie de 53 m2.

Le contrat de bail commercial du 28 avril 2011 conclu avec la société [Localité 7] Surf Shop porte sur des locaux situés au sein d'un immeuble de plein pied situé à [Adresse 8] d'une superficie d'environ 100 m2, la jouissance privative du terrain situé derrière le local d'une superficie d'environ 300 m2, la jouissance partagée avec le second locataire du bien immobilier dans lequel se trouvent les locaux loués, du parking et du terre-plein sur lequel les locaux sont édifiés.

Il a été consenti pour une durée de 9 années à compter du 1er mai 2011 pour expirer le 30 avril 2020, moyennant le loyer initial de 12.600 euros hors taxe à la valeur ajoutée.

Selon acte notarié du 18 décembre 2012, le bien immobilier donné en location a été ensuite apporté par M. [H] [X] à la SCI [Adresse 9] qui est devenue la bailleresse de la SARL Biarritz Surf Shop.

Par acte d'huissier du 11 octobre 2019, la SCI [Adresse 9] venant aux droits de M. [H] [X] a fait délivrer à la société Biarritz Surf Shop un congé avec offre de renouvellement à effet au 30 avril 2020 aux conditions suivantes :

- pour une durée de 9 années, moyennant un loyer mensuel de 3000 euros TTC,

- autorisation d'utiliser la surface terrasse en béton imprimé du parking devant le magasin (environ 10m2) pour exposer le matériel,

- interdiction d'exposer du matériel sur la surface en béton désactivé, réservée à l'accès piéton et passant devant tous les commerces,

- fin de la jouissance du terrain en herbe derrière les lieux loués (compte tenu de l'absence d'entretien et l'édification d'une cabane sans l'autorisation du bailleur).

La société [Localité 7] Surf Shop a accepté la proposition de renouvellement mais a refusé l'augmentation du loyer, l'interdiction d'exposer du matériel sur la surface du béton désactivé, la fin de la jouissance du terrain en herbe situé derrière les locaux loués.

La commission départementale de conciliation saisie par la SCI [Adresse 9] a rendu un avis de non conciliation dans sa séance du 6 mai 2022.

Par acte d'huissier du 27 juillet 2022, la SCI Espace Beaurivage a assigné la SARL Biarritz Surf Shop devant le Président du tribunal judiciaire de Bayonne statuant en matière de baux commerciaux aux fins de voir notamment fixer à la somme de 30.000 euros HT/HC par an le montant du loyer des locaux commerciaux litigieux pour un renouvellement de bail de neuf ans à compter du 30 avril 2020 et à titre subsidiaire de voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire aux fins de voir déterminer contradictoirement la valeur locative des locaux loués telle que définie à l'article L145-33 du code de commerce.

Par jugement du 7 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Bayonne a :

Débouté la SCI [Adresse 9] de l'ensemble de ses demandes,

Condamné la SCI Espace Beaurivage à payer à la SARL Biarritz Surf Shop la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SCI [Adresse 9] aux dépens,

Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration en date du 6 février 2024, la SCI Espace Beaurivage a relevé appel de ce jugement.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées le 5 juillet 2024, la SCI [Adresse 9] demande à la cour de :

Déclarer irrecevable comme étant nouvelle la demande suivante présentée par la SARL [Localité 7] Surf Shop pour la première fois en cause d'appel : « Condamner la société [Adresse 9] à verser à la société [Localité 7] Surf Shop une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts. »

Infirmer le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Bayonne le 7 décembre 2023 en ce qu'il a :

Débouté la SCI [Adresse 9] de l'ensemble de ses demandes,

Condamné la SCI Espace Beaurivage à payer à la SARL [Localité 7] Sur Shop la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SCI [Adresse 9] aux dépens.

Statuant à nouveau,

A titre principal :

Juger que la valeur locative des locaux donnés à bail à la SARL [Localité 7] Surf Shop est supérieure au montant du loyer,

Fixer à la somme de 30.000 euros (trente mille) euros HT/HC par an le montant du loyer des locaux commerciaux sis [Adresse 2], pour un renouvellement de bail de neuf ans à compter du 30 avril 2020,

Juger que la SARL Biarritz Surf Shop devra payer à la SCI [Adresse 9] les sommes non perçues par elle au titre du loyer à compter du 30 avril 2020, avec intérêts au taux légal depuis cette date et ce, à compter de chaque échéance, outre capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

Condamner en tant que de besoin la SARL [Localité 7] Surf Shop à payer la somme correspondant à cette réévaluation,

A titre subsidiaire,

Ordonner une mesure d'expertise judiciaire et désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de déterminer la valeur locative des locaux loués telle que définie par l'article L145-33 du code de commerce,

Fixer le loyer provisionnel dû pendant la durée de la procédure à la somme annuelle en principal de 30.000 euros HT/HC,

Condamner en tant que de besoin la SARL [Localité 7] Surf Shop à payer la somme correspondant à cette réévaluation,

En tout état de cause,

Débouter la SARL [Localité 7] Surf Shop de l'ensemble de ses demandes, moyens fins et conclusions,

Condamner la SARL [Localité 7] Surf Shop à payer à la SCI [Adresse 9] la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SARL [Localité 7] Surf Shop à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses demandes, la SCI [Adresse 9] fait valoir que :

La demande de la société [Localité 7] Surf Shop tendant à la voir condamner au paiement d'une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts est irrecevable car nouvelle conformément aux dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;

Si la cour jugeait cette demande recevable, elle l'écarterait en raison de son caractère infondé, la société intimée n'établissant pas ses allégations et ne caractérisant pas de préjudice,

Au vu des cinq critères visés par l'article L145-33 du code de commerce il est manifeste que le loyer actuel ne correspond pas à la valeur locative ce qui aurait dû conduire à une revalorisation du montant du loyer du bail renouvelé ;

Sur les caractéristiques du local :

Les locaux litigieux sont situés dans un immeuble constituant un espace commercial disposant d'un parking gratuit et bénéficiant d'un accès piéton ;

En outre les caractéristiques du local et le terrain objets du bail ont été modifiés depuis 2011 afin de développer l'activité commerciale du preneur. En effet la SARL [Localité 7] Surf Shop a procédé à des installations périphériques du local, sans autorisation, en construisant une annexe à l'arrière du bâtiment en palissades bois fixées au mur, en aménageant plusieurs douches extérieures, ainsi qu'une terrasse. Le terrain est donc également exploité à titre commercial par le preneur.

Sur la destination des lieux

Initialement la SARL [Localité 7] Surf Shop vendait et louait des articles de plage et de surf. Elle exerce au sein des locaux des activités de location de matériels, vente et cours de surf.

Sur les obligations respectives des parties :

La clause tous commerces stipulée dans le bail liant les parties génère à elle seule une majoration de la valeur locative dont il doit être tenu compte dans le cadre de la fixation du montant du loyer du bail renouvelé.

Les clauses du bail sont favorables au preneur

Sur les facteurs locaux de commercialité : elle rapporte la preuve d'une modification notable des facteurs de commercialité au cours de la période du bail expiré, à savoir le développement de la zone commerciale et du quartier ;

Sur les prix couramment pratiqués dans le voisinage : elle démontre que le loyer actuel de 12,36 euros HT est clairement en dessous de la valeur locative ;

une modification notable des facteurs visés par cet article la rend de plus recevable à se prévaloir d'un déplafonnement du loyer tel que prévu par l'article L145-34 du code de commerce. Elle rapporte la preuve d'une modification notable, intervenue pendant la durée du bail à renouveler, des facteurs 1 à 4 de l'article L145-33 du code de commerce. Plusieurs modifications ont été apportées au bien donné à bail, à savoir la création d'une terrasse, la pose de douches extérieures pour la clientèle réservant des cours de surf, l'installation d'un cabanon en bois. En outre elle établit l'amélioration des facteurs commerciaux de localité.

Elle demande la fixation du loyer du bail renouvelé à 2500 euros mensuel HT et HC et 30.000 euros annuels HT et HC en retenant une pondération 1 pour les 100 m2 du local et un prix de 25 € HT et HC qui est cohérent au regard des prix couramment pratiqués dans le voisinage,

Si par extraordinaire la cour ne s'estimait pas suffisamment informée, elle demande d'ordonner une expertise judiciaire et de fixer le loyer provisionnel pendant la procédure à la somme de 30.000 euros HT et HC.

Par conclusions notifiées le 17 juin 2024, la société [Localité 7] Surf Shop demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire en toutes ses dispositions,

Condamner la société [Adresse 9] à lui verser une indemnité de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause,

Constater que la bailleresse a donné congé avec offre de renouvellement à compter du 1er mai 2020,

Constater que les modifications des facteurs de commercialité ne sauraient être considérés comme notables, et encore moins présentant une quelconque incidence sur son activité,

En conséquence,

Rejeter les prétentions de la société Espace Beaurivage,

A titre subsidiaire,

Constater que les éléments de prix visés par la bailleresse ne peuvent faire l'objet d'un quelconque débat judiciaire en l'absence de communication de l'ensemble des pièces requises conformément aux dispositions de l'article R145-7 du code de commerce,

Dire et juger qu'il appartient nécessairement à la bailleresse de fournir l'ensemble des éléments permettant de déterminer s'il s'agit de renouvellement amiable ou judiciaire ou de nouvelle location et ce en conformité des dispositions de l'article R145 du code de commerce,

Débouter en l'état la bailleresse de sa demande de fixation du loyer de base à une valeur annuelle de 30 000 euros HT pour un renouvellement à compter du 1er mai 2020,

Débouter la SCI [Adresse 9] du surplus de ses demandes,

En tout état de cause,

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

Condamner la bailleresse en tous les dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société [Localité 7] Surf Shop soutient que :

Sur les caractéristiques du local : sa situation privilégiée à proximité de l'Océan n'est pas nouvelle ; aucun accès n'existe sur la partie arrière donnant sur la voie publique ;l'aménagement de la terrasse ne s'est pas faite de manière irrégulière mais a été acceptée par la mairie de [Localité 7] ; l'annexe est un abri de stockage entièrement démontable et installé à titre précaire durant la saison estivale ; par conséquent les lieux loués n'ont subi aucune modification. Si une modification des caractéristiques des lieux loués a eu lieu elle n'est l''uvre que de la SCI Beaurivage ; du fait des travaux importants qu'elle a réalisés, le parking et le terre plein ont disparu puisque réattribués aux nouveaux commerces, la privant d'une partie de l'objet de son bail et d'un accessoire indispensable à l'utilisation normale de son local commercial,

Sur la destination du local : il est faux de prétendre que des cours seraient proposés via l'enseigne « [Localité 7] Eco Surf school » et que les inscriptions se feraient auprès de son local ; elle ne propose pas en direct des cours de surf. Le fait de proposer, pour un commerce tourné autour du surf des intervenants extérieurs pour donner des cours de surf ne démontre pas une évolution de son activité.

Le local n'a pas subi de modifications notables justifiant que le plafonnement du loyer renouvelé soit écarté au regard des critères de l'article L145-34 du code de commerce :

Le local n'a subi aucune modification positive, au contraire le bailleur a réduit à néant la jouissance qui lui était accordée du parking et du terre-plein sur lequel les locaux sont édifiés,

Le bail prévoyait une destination tous commerces de sorte qu'aucune modification n'est intervenue durant le cours du bail,

Les obligations respectives des parties n'ont aucunement été modifiées,

Les modifications alléguées des facteurs de commercialité n'ont eu aucune incidence sur son activité ; il n'est pas démontré une incidence favorable sur son activité ;

les commerces adjacents n'ont aucun lien avec l'activité qu'elle exerce ;

L'évolution des prix pratiqués dans le voisinage n'est pas susceptible de constituer un motif de déplafonnement.

Faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties à leurs dernières écritures visées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2025.

MOTIFS :

A titre liminaire il y a lieu de préciser que les demandes de la partie intimée tendant à voir « constater » et à voir « dire et juger » ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile sur lesquelles la cour est tenue de statuer mais en réalité des moyens développés au soutien de ses prétentions qui seront dès lors examinés comme tels dans les motifs de la présente décision.

Sur le prix du bail renouvelé :

L'article L145-33 du code de commerce dispose que le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.

A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :

1° Les caractéristiques du local considéré ;

2° La destination des lieux ;

3 Les obligations respectives des parties ;

4° Les facteurs locaux de commercialité ;

5° Les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Un décret en Conseil d'Etat précise la consistance de ces éléments.

L'article L145-34 du même code encadre le plafonnement du loyer du bail renouvelé « à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L145-33 ». Il dispose en son alinéa 4 :

En cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L145-33 ou s'il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d'une clause du contrat relative à la durée du bail, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l'année précédente.

En l'espèce, le montant du loyer au jour du renouvellement était de 1236,15 euros HT/HC par mois, soit 14833,80 euros HT/HC par an. Le loyer s'élevait par conséquent à 12,36 euros HT/HC au mètre carré.

La société [Adresse 9] demande de fixer à la somme de 30.000 euros (trente mille) euros HT/HC par an le montant du loyer des locaux commerciaux pour un renouvellement de bail de neuf ans à compter du 30 avril 2020.

Il convient par conséquent d'examiner ses moyens tendant au déplafonnement du loyer en examinant s'il existe une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L145-33 précité pendant la durée du bail expiré.

Sur les caractéristiques du local considéré

L'article R145-3 du code de commerce dispose que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :

1° De sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;

2° De l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;

3° De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée ;

4° De l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;

5° De la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.

Selon l'article R145-4 alinéa 1er les caractéristiques propres au local peuvent être affectées par des éléments extrinsèques constitués par des locaux accessoires, des locaux annexes ou des dépendances, donnés en location par le même bailleur et susceptibles d'une utilisation conjointe avec les locaux principaux.

En l'occurrence, les locaux sont situés au sein d'un immeuble de plein pied à [Adresse 8] d'une superficie d'environ 100 m2, de la jouissance privative du terrain situé derrière le local d'une superficie d'environ 300 m2, de la jouissance partagée avec le second locataire du bien immobilier dans le lequel se trouvent les locaux loués, du parking et du terre-plein sur lequel les locaux sont édifiés.

Ils sont situés dans un espace commercial composé de plusieurs commerces à proximité immédiate de la [Adresse 10] disposant d'un parking gratuit.

Ces éléments ne constituent pas des caractéristiques nouvelles du local considéré. Elles existaient au moment de la conclusion du bail le 28 avril 2011, à l'exception de l'ouverture de nouveaux commerces voisins. Cette nouveauté n'affecte pas les caractéristiques propres au local litigieux, sauf à entamer la jouissance du parking qui est désormais partagée avec de nouveaux commerces alors que le bail stipulait sa « jouissance partagée avec le second locataire du bien immobilier dans lequel se trouvent les locaux loués ».

Aucune évolution n'existe quant à la disposition intérieure du local.

L'installation en 2015 en périphérie du local d'une annexe à l'arrière du bâtiment en palissades en bois fixées au mur est un abri démontable mesurant 4,85 mètres X 3,50 m ainsi que cela résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 14 octobre 2015 produit par l'intimée (sa pièce numérotée 5). La société [Localité 7] Surf Shop indique qu'il s'agit d'un abri de stockage installé à titre précaire durant la saison estivale. La présence de cet abri démontable destiné à du stockage ne constitue pas une modification notable des caractéristiques du local.

Il n'est pas établi par les pièces produites que la terrasse en bois et les deux douches fixées au mur existaient pendant la durée du bail expiré alors que les procès-verbaux de constats de commissaire de justice établis à cette fin datent de 2022 (pièces 42 et 43 de l'appelante) et qu'aucun autre élément ne permet de le constater pour la période concernée. La demande d'autorisation de création d'une terrasse effectuée le 24 juin 2020 auprès de la mairie est postérieure à cette expiration.

En outre la terrasse en bois à l'arrière du local et la présence de deux douches extérieures fixées sur la façade ouest constatées en 2022 ne constituent une modification notable des caractéristiques du local considéré dans la mesure où il s'agit d' un magasin de vente d'articles de surf,,qu'il n'y a pas de modification de la zone de vente, que la terrasse est située à l'arrière du local dans une zone dont le locataire a la jouissance privative.

Par conséquent il n'est pas justifié par le bailleur d'une modification notable pendant la durée du bail expiré le 1er mai 2020 des caractéristiques du local considéré.

Sur la destination des lieux

Le contrat de bail du 28 avril 2011 dispose que « le preneur pourra exercer dans les lieux loués tous commerces sauf hôtellerie, restauration, bar, commerce avec transformation alimentaire et commerce lié à l'automobile ainsi que sous la restriction afférente aux activités de pharmacie et de parapharmacie sauf en la personne de Monsieur [I] et/ou Monsieur [C].

Il ne pourra étendre ou transformer son activité que dans les conditions prévues par les articles L145-47 et suivants du Code de commerce. »

Par conséquent le bailleur ne peut se prévaloir de l'existence d'une activité supplémentaire de cours de surf et de location de matériel de la société [Localité 7] Surf School pour solliciter le déplafonnement du loyer, car à la supposée établie, elle ne pourrait constituer une modification notable au regard de la destination contractuelle initiale très large prévue par le contrat qui vise l'exercice dans les lieux loués de « tous commerces' » et n'exclut pas cette activité.

Sur les obligations respectives des parties

La société [Adresse 9] ne caractérise aucune modification dans les obligations respectives des parties pendant la durée du bail expiré. En outre elle est infondée à invoquer l'incidence qu'aurait la clause tous commerces stipulée dans le bail sur la valeur du montant du loyer du bail renouvelé pour solliciter le déplafonnement de celui-ci. Il ne s'agit aucunement d'une modification mais au contraire d'un élément pris en compte par les parties lors de la conclusion du bail en 2011. S'agissant des obligations imposées au preneur par le bail il ne peut s'agir non plus d'un argument à l'appui d'un déplafonnement du loyer du bail renouvelé aucune modification de celles-ci n'étant démontrée ni même alléguée.

Par conséquent, il n'y a pas lieu à déplafonnement du loyer au regard des obligations respectives des parties.

Sur les facteurs locaux de commercialité

L'article R145-6 du code de commerce dispose que les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent de manière durable ou provisoire.

Pour être pris en considération, les modifications des facteurs locaux de commercialité doivent présenter un intérêt pour l'activité commerciale considérée.

En l'espèce, il résulte des pièces produites qu'au cours du bail expiré, plusieurs nouveaux commerces ont ouvert dans le voisinage immédiat du local considéré à la suite de travaux initiés par le bailleur en 2013 qui ont donné lieu à la signature par lui de nouveaux baux commerciaux. A proximité du local de la société [Localité 7] Surf Shop et partageant avec elle le parking se sont installés à partir de 2013 un poissonnier, un primeur, une fromagerie, un caviste, une boulangerie pâtisserie, un traiteur, un laboratoire d'analyses médicales, un cabinet dentaire, étant précisé que l'établissement bancaire existait déjà lors de la signature du bail du 28 avril 2011.

Si l'existence de ces commerces et de places délimitées dans le parking partagé est de nature à créer une dynamique positive amenant de la clientèle attirée par les produits proposés, aucun élément ne permet de corroborer l'impact de ce passage accru sur l'activité de vente d'articles de surf de la société [Localité 7] Surf Shop, ou de vente de cours de surf à la supposée établie, très différentes des autres commerces nouvellement implantés en lien avec la santé, ou des commerces de bouche. Cette incidence positive sur l'activité de la société [Localité 7] Surf Shop n'est pas corroborée par des pièces comptables établissant une augmentation de son chiffre d'affaires et/ou de son bénéfice entre le 1er mai 2011 et le 30 avril 2020, ou des données permettant de corroborant l'augmentation de la fréquentation du commerce de surf shop.

Les attestations de Mme [B] épouse [U] et de M. [F] qui évoquent en des termes très généraux leur situation et leur appréciation de l'effet bénéfique de la zone commerçante est insuffisant à établir l'incidence de cette zone sur le commerce de la société intimée. De même l'attestation de Mme [R], exerçant au sein du service commerce tourisme de la mairie de [Localité 7] du 7 septembre 2022 qui évoque « le caractère attractif et indispensable » de cette zone commerciale « pour les nombreuses familles qui y résident » et indique « les modifications que vous avez apportées à cette polarité en 2013 ont contribué au développement et au renforcement de la dynamique commerciale sur un quartier qui ne cesse, lui-même, de se développer », est trop imprécise pour caractériser l'incidence de la modification des facteurs locaux de commercialité sur l'activité commerciale de la société [Localité 7] Surf Shop et pour démontrer qu'il s'agit pour elle d'une modification notable.

Il ne peut davantage être démontré une amélioration notable des facteurs locaux de commercialité en faisant valoir une augmentation de près de 3% de la population biarrote entre 2011 et 2020 au regard du caractère limité de cette augmentation dont il ne peut pas être tiré de conséquence en l'espèce quant à son incidence sur l'activité du commerce du preneur.

Par conséquent la demande tendant au déplafonnement du loyer du bail renouvelé est également infondée en ce qui concerne le critère des facteurs locaux de commercialité.

En l'absence de déplafonnement du loyer du bail renouvelé le 1er mai 2020 , il convient de rejeter la demande de la SCI [Adresse 9] tendant à voir juger que la valeur locative des locaux donnés à bail à la société intimée est supérieure au montant du loyer, sa demande tendant à voir fixer à la somme de 30000 euros HT/HC par an le montant du loyer des locaux commerciaux situés [Adresse 1] à Biarritz pour un renouvellement de bail de neuf ans à compter du 30 avril 2020 ainsi que de la demande subséquente tendant à voir dire la société preneuse redevable des sommes au titre du loyer à compter du 30 avril 2020 et à la voir condamner en tant que de besoin au paiement de cette somme correspondant à la réévaluation sollicitée. En outre la demande subsidiaire d'expertise judicaire sera rejetée de même que les demandes afférentes de fixation d'un loyer provisionnel et de condamnation.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté l'appelante de ces demandes.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts :

La société [Localité 7] Surf Shop sollicite la condamnation de la société [Adresse 9] à lui verser une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle fait valoir que depuis 2013 et la création de ce que la bailleresse appelle un « espace commercial », elle tente par tous moyens de mettre fin au bail, multiplie les procédures à son encontre et a décidé de poursuivre sa procédure en saisissant la cour d'appel. Elle expose qu'elle vit depuis plus de dix ans dans la crainte de voir son commerce résilié au seul motif que sa présence dérange et n'est plus en adéquation avec les attentes de sa bailleresse que ce soit sur le plan financier ou sur le plan de l'activité exercée. Elle ajoute que la pression exercée mérite d'être sanctionnée.

La société Espace Beaurivage soutient au visa de l'article 564 du code de procédure civile que cette demande est nouvelle en cause d'appel et donc irrecevable. Elle ajoute que cette demande est également infondée faute pour l'intimée de justifier ses allégations selon lesquelles elle n'aurait eu de cesse de multiplier les procédures à son encontre et alors que l'intimée était elle-même à l'initiative de la première procédure qu'elle invoque.

* L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

La demande de dommages et intérêts formulées en l'espèce par la société [Localité 7] Surf Shop n'est pas destinée à opposer compensation ou à faire écarter les prétentions adverses alors qu'elle tend à invoquer une faute qui ne l'a pas été en première instance et est totalement distincte de l'objet du litige initié par la société [Adresse 9] qui portait sur le montant du loyer du bail renouvelé. Il s'agit par conséquent d'une demande nouvelle s'agissant de la part de la demande fondée sur des fautes invoquées antérieures au jugement déféré. Elle est recevable sur la partie de la demande fondée sur un appel prétendument abusif car elle se base alors sur un fait postérieur au jugement déféré.

Il convient par conséquent de déclarer irrecevable la demande en dommages et intérêts de la société [Localité 7] Surf Shop pour la partie fondée sur des fautes antérieures au jugement déféré et de déclarer recevable cette demande sur la partie fondée sur un appel prétendument abusif.

* L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus que dans des circonstances particulières le rendant fautif.

En l'espèce, la société [Localité 7] Surf Shop ne démontre pas en quoi l'exercice par la société [Adresse 9] de son droit de faire appel du jugement de première instance serait abusif, le caractère infondé de ses demandes eu égard à la solution du présent litige étant insuffisant pour caractériser des circonstances particulières le rendant fautif.

Il convient par conséquent de débouter la société [Localité 7] Surf Shop de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Eu égard à la solution du litige il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 9] aux dépens et au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Espace Beaurivage, partie perdante, sera également condamnée aux dépens d'appel, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.

Il convient de condamner la SCI [Adresse 9] à payer à la SARL [Localité 7] Surf Shop la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande en dommages et intérêts de la société [Localité 7] Surf Shop pour la partie fondée sur des fautes antérieures au jugement déféré ;

Déclare recevable la demande de dommages et intérêts de la société [Localité 7] Surf Shop pour la partie fondée sur un appel prétendument abusif ;

Rejette la demande de dommages et intérêts de la société [Localité 7] Surf Shop pour la partie fondée sur un appel prétendument abusif ;

Condamne la SCI [Adresse 9] aux dépens d'appel ;

Condamne la SCI Espace Beaurivage à payer à la SARL [Localité 7] Surf Shop la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le présent arrêt a été signé par Madame BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Président, et par M. MAGESTE, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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