CA Riom, 1re ch., 21 octobre 2025, n° 22/00283
RIOM
Arrêt
Autre
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur [J] [F] a, selon devis en date du 20 septembre 2016, confié à la SAS VASEE la construction et la pose d'une piscine d'agrément pour un prix de 23.720 € TTC dans sa propriété, sise [Adresse 2] à [Localité 9].
Les travaux ont été réceptionnés courant 2017.
Alléguant l'apparition de désordres dès 2020, Monsieur [J] [F] a, par acte d'huissier de justice signifié le 2 avril 2021, assigné la SAS VASEE devant le Tribunal judiciaire de CLERMONT FERRAND, demandant au terme de cet acte, constituant ses seules écritures, de :
- juger que la garantie décennale de la SAS VASEE est engagée à raison de désordres contradictoirement constatés,
- condamner la SAS VASEE à lui payer et porter les indemnités suivantes :
* au titre du préjudice matériel : 11.059,19 €,
* au titre du préjudice immatériel et de la privation de jouissance du bassin d'agrément écoulé pendant les travaux : 2.500 €,
* au titre de l'article 700 CPC : 3.000 €,
- condamner la société SAS VASEE aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître DOS [Z].
Suivant un jugement RG 21/1116 rendu le 17 janvier 2022, le Tribunal judiciaire de CLERMONT FERRAND a :
- débouté Monsieur [J] [F] de l'intégralité de ses demandes,
- condamné Monsieur [J] [F] aux dépens,
- écarté l'exécution provisoire.
Par déclaration formalisée par le RPVA le 03 février 2022, le conseil de Monsieur [J] [F] a interjeté appel du jugement susmentionné, dans les termes ci-après libellés :
« Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués :
- Déboute Monsieur [J] [F] de l'intégralité de ses demandes,
- Condamne Monsieur [J] [F] aux entiers dépens. »
Par ordonnance du 27 octobre 2022, le Conseiller de la mise en l'état a ordonné une expertise confiée à M. [E] [Y].
L'expert a déposé son rapport le 27 mai 2024.
Par dernières conclusions d'appelant notifiées par le RPVA le 5 mars 2025, Monsieur [J] [F] a demandé de :
au visa des articles 1792 et suivants du code civil,
- Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 janvier 2022 par le Tribunal Judiciaire de CLERMONT-FERRAND,
STATUANT à nouveau,
- Juger que la garantie décennale de la SAS VASEE est engagée à raison des désordres contradictoirement constatés,
- Condamner en conséquence la société VASEE lui payer et porter les indemnités suivantes :
' 109.209 € au titre du préjudice matériel constitué par la nécessité de reprendre l'intégralité des ouvrages, outre réactualisation selon la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le dernier indice connu au jour du dépôt du rapport d'expertise, le 18 mai 2024, et le dernier indice connu au jour de l'arrêt de la Cour,
' 7.500 € au titre du préjudice immatériel et de la privation de jouissance du bassin d'agrément écoulé pendant les travaux,
' 6.000 € au titre de l'article 700 du CPC,
- Débouter la société VASEE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner la société VASEE aux entiers dépens, qui comprendront ceux de première instance, le coût du constat d'huissier de la SELARL CM JUSTITIA du 3 février 2022, les dépens en appel et le coût définitivement taxé de la mesure d'expertise judiciaire pour 5.712 €, dont distraction au profit de Maître DOS [Z].
Au soutien de ses prétentions, en premier lieu, Monsieur [F] fait valoir que, contrairement à ce que soutient la société VASEE, celle-ci a bien installé la cave préfabriquée, ainsi que tous les branchements du local technique de la piscine. Il souligne qu'il n'avait pas la capacité physique de réaliser lui-même des travaux de terrassement et qu'en tout état de cause, il avait confié à la SAS VASEE une prestation complète, le devis ne comprenant aucune exclusion. Il ajoute qu'à supposer qu'il ait lui même réalisé l'installation de la cave préfabriquée, la société VASEE a manqué à son devoir de conseil en n'informant pas le maître de l'ouvrage de la nécessité de vérifier la stabilité du sol.
Quant à la dalle et à la ceinture béton, il maintient que si la société VASEE soutient ne pas avoir construit la ceinture béton, ces allégations sont démenties par le devis/bon de commande signé entre les parties le 20 septembre 2016 qui prévoit les travaux de maçonnerie, la fourniture et la pose des margelles, ainsi que par la facture qui mentionne très clairement les margelles et le dallage. Il précise que l'entreprise COTE PAYSAGE (qui a posé les dalles de piscine et les margelles) a facturé sa prestation directement à la société VASEE, tel que cela ressort de la facture au nom de ladite société, de sorte que celle-ci est intervenue en qualité de sous-traitant. Il rappelle que la société intimée reste responsable de son sous-traitant et n'est pas dispensée de sa garantie décennale à l'égard du maître de l'ouvrage et qu'il lui appartenait le cas échéant de l'appeler en cause en première instance.
Monsieur [F] indique que les désordres ne posent aucune difficulté, sont avérés, de nature décennale, et procèdent d'une mauvaise réalisation des ouvrages par la société VASEE, tel que cela résulte de l'expertise judiciaire. Ainsi, il souligne que l'affaissement du local technique préfabriqué est dû à l'absence de fondation de l'ouvrage, de même que pour les dalles des plages et les conditions de pose des margelles. Il ajoute que l'expert a bien retenu que les margelles et les dalles de la terrasse sont posées à la fois sur la ceinture béton et sur la dalle, de sorte que l'argument développé par l'intimé, tendant à dire qu'elle n'est pas à l'origine des travaux de maçonnerie, notamment la ceinture béton, est inopérant.
Il précise que l'expert [Y] confirme l'expertise SARETEC, en ce qu'il décrit la situation du local technique comme critique au regard du tassement observé laissant craindre une rupture des canalisations le raliant à la piscine, et ce qu'il confirme le descellement des margelles et de certaines dalles de plage, avec une aggravation lors de la dernière visite, ces désordres résultant d'un défaut de réalisation imputable à l'entreprise, faute de fondations pour le local technique et faute d'étude béton en ce qui concerne l'implantation du bassin, son chaînage et la réalisation des plages périphériques. Il conclut que la nature décennale des désordres ne souffre d'aucune contestation, rappelant que l'expert précise que la piscine ne doit pas être utilisée en raison des risques de chute de margelles.
Enfin, s'agissant de la réparation du préjudice, Monsieur [F] indique que le chiffrage de l'expert ne tient pas compte des difficultés pour remédier aux désordres, notamment l'impossibilité d'accéder à la parcelle avec des engins lourds et de déposer la piscine sans dégradation. Il indique produire un devis concernant la réparation du local technique et la reconstruction de la piscine, le montant s'élèvant à 97'743 € TTC, auquel doivent être ajoutés le coût de l'étude de sol et de l'étude béton, les travaux de dépose, de remplacement de la toiture avec chaînons et impostes latérales, ainsi que le démontage complet du système de filtration et sa repose à l'identique.
Monsieur [F] rappelle que les désordres existent, s'aggravent et se généralisent depuis plus de cinq ans, le privant de la jouissance de cette piscine.
Par dernières conclusions d'intimé et d'appel incident notifiées par le RPVA le 29 avril 2025, la SAS VASEE a demandé de :
au visa des articles 1792 et suivants du code civil ;
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand du 17 janvier 2022 ;
Statuant de nouveau,
- Débouter Monsieur [J] [R] [F] de sa demande de condamnation de la SAS VASEE à lui payer la somme de 109.209,00 € TTC au titre de son préjudice matériel indexé sur la valeur de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le dernier indice connu au jour du dépôt du rapport d'expertise, le 18 mai 2024, et le dernier indice connu au jour de l'arrêt de la Cour ;
- Déclarer que la SAS VASEE ne saurait être tenue à une somme supérieure à 403,34 € TTC, correspondant au montant des travaux de remise en état des quelques dalles d'entourage de la piscine ;
- Débouter Monsieur [J] [R] [F] de sa demande de condamnation de la SAS VASEE à lui payer une somme de 7.500 € au titre du préjudice de jouissance ;
- Débouter Monsieur [J] [R] [F] de sa demande de condamnation de la SAS VASEE à lui payer une somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner Monsieur [J] [R] [F] à payer et porter à la SAS VASEE une somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel, comprenant frais d'expertise judiciaire et le coût du constat d'huissier de CM JUSTITIA.
Au soutien de ses prétentions, la SAS VASEE conteste que l'affaissement de la cave préfabriquée puisse lui être imputée, en ce qu'elle n'avait en charge ni la réalisation, ni l'installation du local piscine, ni même les prestations de fondations et de maçonneries. Elle conclut que sa responsabilité décennale ne saurait être engagée, dès lors qu'elle n'a pas la qualité de constructeur au sens de l'article 1792 du code civil. Elle ajoute ne pas devoir assumer la remise en état des arrivées électriques et des tuyaux hydrauliques puisque procédant des désordres affectant le local technique.
Elle conteste avoir été mandatée pour l'exécution de la ceinture béton et la dalle béton en pourtour de la piscine.
Quant aux sommes versées par Monsieur [F], elle rappelle que celui-ci l'avait sollicitée pour des travaux sur un autre chantier sis [Adresse 1] à [Localité 6] et qu'une partie des sommes qu'il décompte correspond à ces travaux et non à ceux concernant la piscine litigieuse.
Elle ajoute que les devis produits par l'appelant ne permettent pas d'établir la nécessité de procéder au remplacement intégral des plages et dalles, ni d'une quelconque intervention sur les margelles.
Quant à la demande au titre du préjudice immatériel, elle conteste l'impossibilité d'usage de la piscine, aucun désordre affectant le bassin n'étant avancé et le devis fourni par l'appelant ne faisant état que du changement de quatre dalles.
Par ordonnance rendue le 12 juin 2025, le Conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de cette procédure. Lors de l'audience civile collégiale du 1er septembre 2025 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré ses précédentes écritures. La décision suivante a été mise en délibéré au 21 octobre 2025, par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire, la Cour entend rappeler qu'en application des dispositions de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif [des conclusions d'appel] (') », de sorte que les mentions tendant à 'Constater que'', 'Dire et juger que'', 'Juger que'', 'Dire que'' ou 'Donner acte...' qui figurent dans certains dispositifs de conclusions d'appel ne feront pas l'objet directe de réponse dans le dispositif de la présente décision, constituant en réalité des moyens et arguments développés dans le corps de ces mêmes conclusions et donnant lieu à motivation.
1/ Sur le principe de la responsabilité décennale de la SAS VASEE
L'article 1792 du code civil dispose que « tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination. »
L'article 1792-1 du même code précise qu'est réputé constructeur de l'ouvrage tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage.
L'article 1792-2 du même code prévoit que la présomption de responsabilité s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
En application des dispositions des articles précités et de l'article 1792-4-1 du code civil, la garantie décennale prévue ne s'applique que s'il y a eu réception des travaux.
En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats qu'un procès-verbal de réception de fin de travaux réalisés par la SAS VASEE a été signé par les parties le 10 mai 2017. La réception des travaux a donc bien eu lieu et les désordres allégués sont bien apparus dans le délai de dix ans suivant cette réception. Ce point n'est d'ailleurs pas contesté.
Il résulte du rapport d'expertise les éléments suivants :
- les désordres concernent le local technique réalisé sans fondation, ainsi que les plages et margelles de la piscine qui se décollent et sont instables ;
- la situation du local technique est critique, en ce que le tassement observé laisse craindre une rupture des canalisations le reliant avec la piscine par cisaillement au droit de la paroi jouxtant la maison ;
- l'affaissement du local technique préfabriqué est dû à l'absence de fondation de l'ouvrage ;
- le dessellement des margelles et de certaines dalles de plage s'est aggravé entre les deux visites de l'expert ;
- la dégradation résulte du fait que les dalles sont collées sur deux supports réalisés à deux périodes distinctes et dont les niveaux diffèrent de près d'un centimètre : la dalle de terrasse mitoyenne à la maison et le ceinture tirage béton, mais aussi en raison de l'absence de stabilisation de la coque de la piscine qui continue de bouger du fait de la solution retenue (terrassement en laissant la terre en place) ;
- les désordres résultent d'un défaut de réalisation et ne sont pas réparables de manière durable ;
- le local technique doit être déposé avec désolidarisation des canalisations, excavation suffisante pour recevoir une fondation adaptée, repose et raccordement des réseaux ; la piscine, les dalles et margelles doivent être déposées et l'ensemble refait ;
- l'experte estime que la piscine ne doit pas être utilisée du fait du risque de la chute de margelles.
Ainsi, Monsieur [F] subit différents types de désordres quant à la construction de sa piscine, à savoir :
- des désordres affectant le local technique (cave préfabriquée), celui-ci s'affaissant et se décollant de la maison à laquelle il est accolé ;
- des désordres affectant le pourtour de la piscine avec le descellement des margelles et de certaines dalles de plage.
Ces désordres constatés sont de nature décennale, tant en ce qu'ils affectent la solidité de l'ouvrage, qu'en ce qu'ils sont de nature à rendre la piscine impropre à son usage, dès lors qu'il existe un risque de sectionnement des canalisations reliées à la piscine au niveau du local technique et dans la mesure où l'expert constate l'existence d'un danger dû au risque de chute des margelles.
Cependant, la SAS VASEE conteste sa qualité de constructeur de la cave préfabriquée servant de local technique et l'imputabilité des désordres à son intervention.
L'expert retient que les désordres affectant la cave préfabriquée, servant de local technique, résultent de l'absence de toute fondation.
La SAS VASEE soutient qu'elle n'a pas la qualité de constructeur de cette cave, en ce qu'elle n'en était que le fournisseur et qu'elle n'a fait que la livrer.
Cette cave est mentionnée tant dans le devis/bon de commande signé le 20 septembre 2016 que dans la facture du 23 janvier 2017, acquittée par Monsieur [F]. Si aucune précision n'est faite quant au détail de la prestation la concernant, ni le devis, ni la facture n'exclut la pose et/ou l'installation de cette cave. La mise en place de cette cave aux fins de créer un local technique s'inclut dans une prestation globale de fourniture et d'installation d'une piscine confiée à la SAS VASEE. Celle-ci a donc bien la qualité de constructeur.
S'il n'est effectivement pas prévu que la SAS VASEE effectue de fondations pour la pose de cette cave, la société intimée a manifestement accepté de poser cette cave, alors même qu'aucune fondation n'avait été réalisée. Elle est entièrement responsable envers le maître de l'ouvrage des conséquences dommageables de ces désordres de construction pour avoir accepté d'intervenir en l'absence de tout support adapté.
S'agissant des dalles de plage et des margelles, l'expert indique que les désordres résultent du fait que les dalles sont collées sur deux supports réalisés à deux périodes distinctes et dont les niveaux diffèrent de près d'un centimètre (la dalle de terrasse mitoyenne à la maison et le ceinturage béton), mais aussi en raison de l'absence de stabilisation de la coque de la piscine qui continue de bouger du fait de la solution retenue (terrassement en laissant la terre en place).
La SAS VASEE ne conteste pas sa qualité de constructeur, bien qu'ayant sous-traité la réalisation de la pose de celles-ci, mais soutient que les désordres qui les affectent ne peuvent lui être imputables, dès lors qu'elle n'a pas réalisé le ceinturage béton, ni la dalle de terrasse.
Il n'est effectivement pas établi que la dalle de terrasse ait été réalisé par la SAS VASEE, sa construction étant antérieur à la construction de la piscine. En outre, il est vrai qu'il est difficile de savoir si le ceinturage béton, qui figure sur le devis initial accepté par Monsieur [F] ainsi que sur la facture proforma du 23 septembre 2016, a bien été réalisé par la SAS VASEE. En effet, la société intimée a elle-même entretenu une confusion en reconnaissant l'avoir réalisé lors de la première réunion d'expertise, puis en revenant sur ses dires lors de la seconde réunion, propos consignés par l'expert dans son rapport. En outre, ce ceinturage béton ne figure pas expressément sur la facture du 23 janvier 2017, d'un montant de 18.164 € TTC, acquittée par l'appelant. A ce titre, ce dernier ne peut valablement soutenir qu'il aurait versé une somme plus importante que celle figurant sur cette facture, en ce qu'il justifie avoir effectué deux paiements 7116 € chacun, outre le paiement du solde à hauteur de 3.932 €, et que la somme de 6.523 €, effectivement versée à la SAS VASEE, correspondant à une facture pour des travaux réalisés sur un autre chantier, situé à [Localité 6].
Néamoins, comme précédemment indiqué pour la cave préfabriquée, la SAS VASEE a, en acceptant d'intervenir sur un tel support (ceinturage béton et dalle), engagé pleinement sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage de l'ensemble des conséquences dommageables de ces désordres de construction. Au surplus, les désordres sont aussi imputables à une mauvaise stabilisation de la coque de la piscine, relevant de la responsablité directe de la SAS VASEE.
Les désordres sont donc bien imputables à la société intimée. Ainsi, sa responsabilité décennale est engagée.
Le jugement de première instance sera donc infirmé.
2/ Sur l'indemnisation des préjudices
- Les préjudices matériels
L'expert retient que les désordres ne sont pas réparables de manière durable et que l'entreprise consultée par l'appelant ne souhaite pas reprendre ses travaux, au risque d'avoir à assumer la dégradation ultérieure. Il conclut qu'il est nécessaire de reprendre l'ensemble de la piscine et des plages.
Au regard de ces éléments, la seule reprise de quelques dalles de plage, comme proposée par l'intimé, ne saurait suffire à réparer le préjudice subi par Monsieur [F].
L'expert indique qu'à défaut de devis de reprise complète, produit au cours de l'expertise, Monsieur [F] devra être remis dans l'état initial, c'est-à-dire être remboursé des versements effectués.
Cependant, c'est à juste titre que Monsieur [F] indique que cela ne permet pas une réparation intégrale de ses préjudices dès lors qu'en l'absence de reprise des travaux sa piscine reste inutilisable.
Au titre du chiffrage des travaux, sont produit aux débats plusieurs devis :
- un devis de l'entreprise [Localité 10], portant sur la réalisation d'un radier sous le local technique, ainsi que la dépose et la repose de quatre dalles d'entourage de piscine pour un montant total de 8.957,19 € TTC,
- deux devis de l'entreprise Jaune et bleu pour le démontage du matériel de filtration de la piscine (arrivée électrique, tuyaux hydrauliques) pour un montant total de 518 € TTC, réactualisé en 2023 à 695 € TTC,
- deux devis de l'entreprise PERRET pour la dépose et la repose de la toiture sur le local technique d'un montant de 1.584 € TTC (datant de 2021) et de 1.771 € TTC (datant de 2023),
- un devis établi par l'entreprise Da [C] & Fils le 15 mai 2025 portant sur la reprise du local technique et la reconstruction de la piscine, en ce non compris les travaux de dépose et repose du local technique, ainsi que les travaux de dépose et de repose de la tuyauterie, de l'électricité et des appareils à la charge du plombier ou de l'électricien pour un montant global de 97.743 € TTC.
Force est de constater que le devis de l'entreprise [Localité 10] ne prévoit pas l'intégralité des travaux nécessaires à la reprise de la piscine, de sorte que celui-ci est insuffisant. Néanmoins, le coût de reprise du local technique (7.776,22 € HT hors reprise des dalles) apparaît moindre que celui proposé par l'entreprise Da [C] & Fils (12.910 € HT). En outre, le devis tant de l'entreprise [Localité 10] que de l'entreprise Da [C] & Fils ne prennent pas en compte la dépose et la repose du matériel dans le local technique, le démontage du toit et des alimentations électriques.
Au regard des travaux préconisés par l'expert et en application du principe de réparation intégrale des préjudices, il convient de fixer le montant des préjudices matériels aux sommes suivantes que la SAS VASEE sera condamnée à verser à Monsieur [F] :
- 1.771 € TTC pour la dépose et la repose du toit du local technique,
- 695 € TTC pour le démontage du matériel à l'intérieur du local technique,
- 8.553,84 € TTC pour la reprise local technique (réalisation d'un radier),
le tout avec actualisation selon la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le dernier indice connu au jour du dépôt du rapport, le 27 mai 2024 et le dernier indice connu au jour du présent arrêt,
- 70.660 € HT, outre la TVA applicable au jour du paiement (la TVA n'étant pas spécifiée pour chaque poste de travaux, la Cour ne peut calculer le coût TTC des réparations), pour la reprise de la piscine et de son pourtour, sans actualisation nécessaire eu regard de la date du devis (15 mai 2025).
L'expert n'a pas estimé nécessaire la réalisation d'une étude de sol, ni d'une étude béton, de sorte que ces éléments, qui ne résultent que de l'avis de l'entreprise Da [C] & Fils ne seront pas retenus.
- Les préjudices immatériels
Par ailleurs, il ne peut être contesté que Monsieur [F] a subi un préjudice de jouissance du fait, a minima, de la diminution de l'usage de la piscine depuis l'apparition des désordres. Ainsi, il convient de lui accorder la somme de 500 € par an, soit la somme de 2.500 € pour cinq ans.
3/ Sur les demandes accessoires
Succombant intégralement à la présence instance, la SAS VASEE sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, comprenant les frais d'expertise, taxés à 5.712 €, avec distraction au profit de Maître DOS [Z].
Le constat d'huissier de la SELARL CM JUSTITIA ne peut être compris dans les dépens conformément aux dispositions de l'article 695 du code de procédure civile. Le coût de ce constat sera compris le cas échéant, dans l'indemnité accordée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamnée aux dépens, il convient de condamner la SAS VASEE à verser à Monsieur [F] la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, tenant compte des frais de première instance et d'appel.
La SAS VASEE sera déboutée de sa propre demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, et contradictoirement,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal judiciaire de CLERMONT FERRAND,
Statuant de nouveau,
CONDAMNE la SAS VASEE à verser à Monsieur [J] [F] les sommes suivantes au tite de ses préjudices matériels :
- 1.771 € TTC pour la dépose et la repose du toit du local technique,
- 695 € TTC pour le démontage du matériel à l'intérieur du local technique,
- 8.553,84 € TTC pour la reprise local technique,
le tout avec actualisation selon la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction entre le dernier indice connu au jour du dépôt du rapport, le 27 mai 2024 et le dernier indice connu au jour du présent arrêt,
- 70.660 € HT, outre la TVA applicable au jour du paiement, pour la reprise de la piscine et de son pourtour,
CONDAMNE la SAS VASEE à verser à Monsieur [J] [F] la somme de 2.500 € au titre de son préjudice de jouissance ;
CONDAMNE la SAS VASEE à payer au profit de Monsieur [J] [F] une indemnité de 5.000 € en dédommagement de ses frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE le surplus des demandes des parties ;
CONDAMNE la SAS VASEE aux entiers dépens, comprenant ceux de première instance et d'appel et le coût de l'expertise judiciaire, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me DOS SANTOS, avocat au barreau de CLERMONT FERRAND.