Cass. com., 17 septembre 2025, n° 24-13.590
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Groupement France défi (GIE), France défi (SAS)
Défendeur :
Martinique-Guadeloupe expertise (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
1°/ La société Groupement France défi, groupement d'intérêt économique, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ la société France défi, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° T 24-13.590 contre l'arrêt rendu le 1er février 2024 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant à la société Martinique-Guadeloupe expertise, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat des sociétés groupement France défi et France Défi, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Martinique-Guadeloupe expertise, après débats en l'audience publique du 17 juin 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et M. Doyen, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er février 2024), la société Martinique-Guadeloupe expertise, société d'expertise comptable (la société MG expertise) a adhéré au groupement d'intérêt économique France défi (le GIE France défi) lors de sa création en 1989, lequel regroupe des cabinets d'expertise comptable et de commissariat aux comptes. La société France défi est l'organe d'exécution des décisions de l'administrateur du GIE France défi.
2. Le 27 novembre 2020, la société MG expertise a avisé le GIE France défi de sa démission en raison de l'abandon, par le GIE France défi, du respect du principe de libre adhésion individuelle des membres aux projets votés en assemblée générale, figurant au règlement intérieur.
3. Par lettre du 8 décembre 2020, le GIE France défi a adressé à la société MG expertise les factures qu'il estimait rester dues à la société France défi et au GIE France défi.
4. Après avoir vainement mis en demeure la société MG expertise, le GIE France défi et la société France défi l'ont assignée en paiement de diverses sommes.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première, quatrième, cinquième et sixièmes branches
6. Le GIE France défi et la société France défi font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à la condamnation de la société MG Expertise et de rejeter leurs autres demandes, alors :
« 1°/ que les clauses de la convention régissant un groupement d'intérêt économique prévalent sur les prévisions de son règlement intérieur ; qu'au cas présent, le contrat de groupement régissant les relations des membres du GIE France Défi stipule, en son article 10.4, que l'appartenance au groupement vaut de plein droit adhésion aux décisions de l'assemblée générale, du conseil des associés ou du comité de direction ; que ces stipulations prévalent sur celles du règlement intérieur selon lesquelles, d'une part, chaque projet, dont le contenu et les modalités sont fixées par l'administrateur, le comité de direction ou le conseil des associés, est proposé à chaque membre qui est libre d'y adhérer ou non et, d'autre part, pour les projets communs impliquant un financement quel que soit le mode de consultation adopté, l'engagement de l'adhérent doit être confirmé par écrit ; que pour rejeter les demandes en paiement des exposants, la cour d'appel a retenu qu'il n'existait aucune primauté normative du contrat de groupement sur le règlement intérieur au motif que l'article 1er du contrat de groupement stipule que "le groupement est régi par le présent contrat y compris le règlement intérieur" ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant à établir que les parties avaient entendu annihiler toute hiérarchie entre le contrat de groupement et le règlement intérieur, en violation de l'article 1134, alinéa 1er, devenu 1103 du code civil ;
4° / que, subsidiairement, les clauses claires et précises ne peuvent être interprétées, à peine de dénaturation ; qu'au cas présent, le contrat de groupement régissant les relations des membres du GIE France Défi stipule, en son article 10.4, que l'appartenance au groupement vaut de plein droit
adhésion aux décisions de l'assemblée générale, du conseil des associés ou du comité de direction ; qu'il s'en évince que les prévisions de l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur selon lesquelles tout projet, dont le contenu et les modalités sont fixées par l'administrateur, le comité de direction ou le conseil des associés est proposé à chaque membre qui est libre d'y adhérer ou non ne sont pas applicables dans le cas où le projet a été adopté par l'assemblée générale ; qu'il s'en évince que, s'agissant des projets votés en assemblée générale, il n'existait aucune contradiction entre
l'article 10.4 du contrat de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur ; que pour rejeter les demandes en paiement des exposants, la cour d'appel a retenu qu'il existait une contrariété entre, d'une part, l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur posant le principe de libre adhésion par les membres du groupement à chacun des projets pris individuellement et, d'autre part, l'article 10-4 du contrat de groupement dont il résulte que les décisions régulièrement prises en assemblée générale s'imposent aux adhérents, et qu'elle était donc tenue de procéder à l'interprétation de ces clauses ; qu'en décelant ainsi entre l'article 10.4 du contrat de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur une contradiction inexistante nécessitant prétendument une interprétation, la cour d'appel les a dénaturés, en violation du principe interdisant au juge de dénaturer le contrat et de l'article 1192 du code civil ;
5°/ que, subsidiairement, les clauses claires et précises ne peuvent être interprétées, à peine de dénaturation ; qu'au cas présent, le contrat de groupement régissant les relations des membres du GIE France Défi stipule, en son article 10.4, que l'appartenance au groupement vaut de plein droit
adhésion aux décisions de l'assemblée générale, du conseil des associés ou du comité de direction ; que selon l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur, tout projet, dont le contenu et les modalités sont fixées par l'administrateur, le comité de direction ou le conseil des associés est proposé à chaque membre qui est libre d'y adhérer ou non ; que selon l'article 19.1 du contrat de groupement, les décisions collectives autres que celles statuant sur les comptes du groupement sont prises, soit en assemblée générale, soit par consultation écrite ; qu'ainsi, le recours à l'assemblée générale exclut la consultation individuelle, de sorte qu'il n'existe aucune contradiction entre l'article 10.4 du contrat de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur ; que pour rejeter les demandes en paiement des exposants, la cour d'appel a retenu qu'il existait une contrariété entre, d'une part, l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur posant le principe de libre adhésion par les membres du groupement à chacun des projets pris individuellement et, d'autre part, l'article 10-4 du contrat de groupement dont il résulte que les décisions régulièrement prises en assemblée générale s'imposent aux adhérents et qu'elle était donc tenue de procéder à l'interprétation de ces clauses ; qu'en décelant ainsi entre l'article 10.4 du contrat de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur une contradiction inexistante nécessitant prétendument une interprétation, après avoir pourtant rappelé les termes de l'article 19.1 du contrat de groupement, la cour d'appel a dénaturé ces stipulations, en violation du principe interdisant au juge de dénaturer le contrat et de l'article 1192 du code civil ;
6°/ que, subsidiairement, les stipulations claires et précises ne peuvent être interprétées, à peine de dénaturation ; qu'au cas présent, le contrat de groupement régissant les relations des membres du GIE France Défi stipule, en son article 10.4, que l'appartenance au groupement vaut de plein droit adhésion aux décisions de l'assemblée générale, du conseil des associés ou du comité de direction ; que, selon le règlement intérieur du GIE (article 1er, partie 2), chaque projet, dont le contenu et les modalités sont fixés par l'administrateur, le comité de direction ou le conseil des associés, est proposé à chaque membre qui est libre d'y adhérer ou non ; qu'ainsi lorsque le projet est présenté en assemblée générale, le vote du membre constitue la forme que prend sa libre adhésion, ce dont il s'évince qu'il n'existe aucune contradiction entre l'article 10.4 de la convention de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur ; que pour rejeter les demandes en paiement des exposants, la cour d'appel a retenu qu'il existait une contrariété entre, d'une part, l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur posant le principe de libre adhésion par les membres du groupement à chacun des projets pris individuellement et, d'autre part, l'article 10-4 du contrat de groupement dont il résulte que les décisions régulièrement prises en assemblée générale s'imposent aux adhérents, et qu'elle était donc tenue de procéder à l'interprétation de ces clauses ; qu'en décelant ainsi entre l'article 10-4 du contrat de groupement et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur du GIE une contradiction inexistante nécessitant prétendument une interprétation, la cour d'appel les a dénaturés, en violation du principe interdisant au juge de dénaturer le contrat et de l'article 1192 du code civil. »
7. C'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, du contrat de groupement, rendue nécessaire par l'ambiguïté résultant de la contradiction existant entre son article 10-4 et l'article 1er de la seconde partie du règlement intérieur, que la cour d'appel a retenu que l'intention des parties était de privilégier le principe, prévu au règlement intérieur, de la liberté d'adhésion au projet par chaque membre du groupement d'intérêt économique, ce dont elle a déduit que les décisions de l'assemblée générale ayant soumis au vote le projet digital et son financement, bien que régulièrement adoptées, ne sauraient s'imposer aux membres du GIE qui n'auraient pas adhéré individuellement audit projet dans les formes prévues par l'article 1er du règlement intérieur et l'article 19-1 du contrat de groupement, à savoir la consultation écrite des membres adhérents au groupement, et que les demandes présentées à l'encontre de la société MG expertise devaient être rejetées.
8. Le moyen, qui en sa première branche critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Groupement France défi et la société France défi aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Groupement France défi et la société France défi et les condamne à payer à la société Martinique-Guadeloupe expertise la somme globale de 3 000 euros ;