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Cass. com., 17 septembre 2025, n° 24-11.619

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Cass. com. n° 24-11.619

16 septembre 2025

La Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes, société coopérative de banque à forme anonyme et capital variable, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [Adresse 1], administrateur, a formé le pourvoi n° A 24-11.619 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2023 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à M. [T] [N], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseillère, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [N], et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 juin 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Graff-Daudret, conseillère rapporteure, M. Ponsot, conseiller doyen, et M. Doyen, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 30 novembre 2023), la société LNA (la société) était titulaire d'un compte courant dans les livres de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes (la banque) depuis le 9 novembre 2012. Elle a également souscrit un prêt pour l'achat de son fonds de commerce pour un montant de 334 000 euros le 23 décembre 2012.

2. Par un acte du 5 décembre 2014, M. [N] s'est rendu caution à hauteur de la somme de 208 000 euros, en garantie de toutes les obligations dont la société pourrait être tenue à l'égard de la banque.

3. Par un acte du 1er juillet 2015, M. [N] s'est également rendu caution à hauteur de la somme de 159 000 euros, en garantie du prêt consenti le 23 décembre 2012 à la société.

4. La société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné la caution en paiement des sommes dues au titre du solde du prêt et du solde débiteur du compte courant.

5. Autorisée par une ordonnance d'un juge de l'exécution, la banque a pris une inscription provisoire d'hypothèque sur des biens appartenant à M. [N], le 9 juillet 2021, puis l'a assigné en paiement. M. [N] lui a opposé l'exception de nullité de l'engagement de caution du 1er juillet 2015.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

6. La banque fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de l'engagement de caution de M. [N] souscrit le 1er juillet 2015, alors :

« 1°/ que l'exception de nullité ne peut être opposée lorsque la convention

litigieuse a reçu commencement d'exécution ; que le commencement d'exécution n'a pas à être caractérisé par des mesures d'exécution forcée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la banque ne justifiait pas d'un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement de M. [N] au motif que l'inscription d'hypothèque prise par la banque sur les biens du second ne constituait pas une mesure d'exécution forcée ; qu'en statuant ainsi, par une motivation impropre à caractériser l'absence de commencement d'exécution de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil, dans sa version applicable à l'espèce ;

2°/ que l'exception de nullité ne peut être opposée lorsque la convention litigieuse a commencé à être exécutée ; que le commencement d'exécution peut être caractérisé, en présence d'un cautionnement personnel, par l'inscription d'une hypothèque judiciaire sur les biens de la caution dès lors que celle-ci tend à la réalisation des droits que le créancier tire de l'acte d'engagement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la banque ne pouvait se prévaloir de la prescription de la nullité de l'acte de cautionnement de M. [N] au motif que l'inscription d'une hypothèque ne

peut valoir commencement d'exécution d'un cautionnement personnel ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil, dans sa version applicable à l'espèce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

7. Il résulte de ce texte que l'exception de nullité ne se prescrit que si le contrat n'a reçu aucun commencement d'exécution. Constitue un commencement d'exécution d'un acte de cautionnement l'inscription d'une hypothèque sur un bien de la caution, indépendamment de la personne qui l'effectue.

8. Pour annuler le cautionnement du 1er juillet 2015, l'arrêt retient que si la banque justifie d'une ordonnance du juge de l'exécution l'autorisant à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens de M. [N] et d'une inscription de cette hypothèque le 9 juillet 2021, dénoncée à la caution le 21 juillet 2021, cette inscription ne constitue pas une mesure d'exécution forcée, et ne caractérise donc pas un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement souscrit par ce dernier.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes recevable en ses demandes, l'arrêt rendu le 30 novembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [N] et le condamne à payer à la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

 

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