Cass. com., 6 juillet 2022, n° 20-16.998
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mollard
Avocat :
SCP Claire Leduc et Solange Vigand
M. [J] [L], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 20-16.998 contre l'arrêt rendu le 7 janvier 2020 par la cour d'appel de Reims (chambre civile 1re section), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, société coopérative à capital variable, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [L], après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 7 janvier 2020), la société ECF a ouvert un compte dans les livres de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque). Par deux actes des 5 février et 1er septembre 2014, M. [L], gérant de la société ECF, s'est rendu caution de tous les engagements de cette société, d'une part, dans la limite de 20 000 euros, d'autre part, à hauteur de 40 000 euros, à chaque fois pour une durée de douze mois. La société ECF ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné M. [L], qui lui a opposé la disproportion de ses engagements et le manquement de cette dernière à son obligation de mise en garde.
Sur le second moyen pris en sa seconde branche, ci-après annexé
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
3. M. [L] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque la somme principale de 52 642,61 euros, alors :
« 1°/ que la disproportion d'un cautionnement doit être appréciée au regard de l'endettement global de la caution, y compris celui résultant d'un précédent engagement de caution ; qu'en se bornant, pour dire non disproportionnés les cautionnements litigieux, à rapprocher le montant de chaque engagement de la situation patrimoniale de M. [L], telle qu'elle résultait de ses actifs et revenus à la date considérée, sans prendre en considération, s'agissant d'apprécier la disproportion éventuelle du second engagement, l'endettement global de M. [L], en ce compris celui résultant du cautionnement précédemment consenti, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation ;
2°/ que ce n'est qu'en l'absence d'anomalies apparentes que le banquier n'a pas à vérifier l'exactitude des revenus et charges déclarés par la caution, cependant que constitue une telle anomalie l'absence de mention, dans la fiche de renseignements remplie par la caution, de l'endettement résultant d'un précédent cautionnement qui, pour avoir été fourni à la même banque, ne peut être ignoré par celle-ci ; qu'en considérant que M. [L] était mal fondé, en l'absence d'anomalie apparente, à se plaindre de l'incomplétude ou de l'inexactitude des fiches de renseignements qu'il avait lui-même remplies et signées, tout en relevant que, dans la fiche de renseignements concernant le second cautionnement, il n'avait pas fait figurer l'endettement résultant du premier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article L. 341-4, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation. »
4. Après avoir analysé les deux fiches de renseignements signées par M. [L] les 5 février et 1er septembre 2014, l'arrêt retient que son patrimoine déclaré lui permet de faire face à son premier engagement, limité à 20 000 euros. Il retient en outre que, s'agissant du second cautionnement de 40 000 euros, qui s'ajoute au premier engagement, le montant total du patrimoine déclaré, correspondant à une somme de 32 000 euros, lui permet de faire face à la moitié de son engagement cependant que ses revenus lui procurent une capacité d'emprunt suffisante pour pouvoir faire face à l'autre moitié.
5. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve versés aux débats que la cour d'appel, qui a tenu compte de l'endettement global de la caution lors de l'appréciation de la proportionnalité du second engagement, a pu retenir que M. [L] ne rapportait pas la preuve que son engagement conclu le 1er septembre 2014 était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.
6. Inopérant en sa seconde branche, dès lors qu'il a été tenu compte des deux engagements de caution, le moyen n'est donc pas fondé pour le surplus.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
7. M. [L] fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce compris ses demandes subsidiaires tentant à voir constater que la banque a manqué à son devoir de mise en garde à son égard et à la voir condamner à lui payer à titre de dommages-intérêts une somme de même montant que celle qu'elle lui réclame, avec compensation des créances réciproques, alors « que la banque est tenue à un devoir de mise en garde à l'égard d'une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n'est pas adapté à ses capacités financières ; qu'il s'ensuit que la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen de cassation, qui est relatif à la disproportion du cautionnement, ne pourra qu'entraîner l'annulation par voie de conséquence de la disposition ayant exonéré la Banque de toute responsabilité au titre de son devoir de mise en garde, motif pris qu'il ne serait pas établi que la situation financière de M. [L] imposait à la banque de le mettre en garde contre le risque d'un endettement excessif résultant de ses engagements, ce par application de l'article 624 du code de procédure civile. »
8. Le rejet du premier moyen rend ce grief inopérant.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] ;