CA Poitiers, 1re ch., 21 octobre 2025, n° 24/00106
POITIERS
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Monge
Conseillers :
M. Orsini, M. Maury
Avocats :
Me Brugiere, Me Nicaise, Me Pichon, Me Lecossois-Lemaitre, Me Mady, Me Salomon
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte du 31 août 2015, les époux [C] [X] et [J] [I] ont acquis au prix de 130.000 € la propriété du lot n° 2 d'un immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 15] (Vienne).
Ce lot n° 2 comporte 4 étages.
Un local commercial situé au rez-de-chaussée constitue le lot n° 1.
L'immeuble est situé à l'angle de la [Adresse 5] et de la [Adresse 14].
Par compromis en date du 3 mai 2017, les époux [C] [X] et [J] [I] ont convenu de la vente du lot n° 2 à [D] [V], au prix de 190.000 €. La vente a été réitérée par acte authentique du 21 juillet 2017 reçu par Maître [R] [L], notaire à [Localité 16] (Vienne), avec la participation de Maître [F] [B], notaire à [Localité 15] assistant les vendeurs.
Par acte des 15 et 16 février 2022, [D] [V] a assigné devant le tribunal judiciaire de Poitiers les époux [C] [X] et [J] [I], Maîtres [R] [L] et [F] [B].
Il a soutenu que :
- ses vendeurs avaient commis un dol en ayant dissimulé l'obligation faite par l'autorité municipale de faire procéder au ravalement de l'immeuble ;
- la preuve de ce dol était rapportée par les termes des attestations du chargé de mission rénovation du patrimoine au Service urbanisme et habitat de la ville de [Localité 15] avec lequel les vendeurs avaient échangé antérieurement à la vente ;
- le coût du ravalement était de 165.084,560 €, à augmenter des honoraires de maîtrise d'oeuvre ;
- les notaires ayant instrumenté avaient commis une faute en n'ayant pas vérifié les mentions du certificat d'urbanisme délivré par le maire de la commune de [Localité 15].
Il a demandé paiement à titre de dommages et intérêts des sommes de :
- 165.084,50 € correspondant au coût des travaux de ravalement ;
- 16.085 € au titre des frais de maîtrise d''uvre (10 % du montant des travaux) ;
- 20.000 € en réparation de son préjudice moral ;
- 72.329 € en réparation de la perte de chance de réinvestir la plus-value qui serait résultée de la revente du bien en 2021.
Les époux [C] [X] et [J] [I] ont conclu au rejet de ces prétentions aux motifs que :
- leur acte de vente n'avait pas mentionné l'obligation de procéder au ravalement ;
- les arrêtés municipaux ayant imposé cette obligation ne leur avaient pas été notifiés ;
- le certificat d'urbanisme délivré à l'occasion de la vente n'avait pas fait mention de cette obligation ;
- le manquement allégué à l'obligation précontractuelle d'information n'était ainsi pas établi.
Les notaires ont de même conclu au rejet des demandes formées à leur encontre en l'absence selon eux de faute de leur part.
Par jugement du 12 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Poitiers a statué en ces termes :
'REJETTE la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n° 15 et 17 de M. [D] [V] ;
CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
REJETTE toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
REJETTE toute demande en garantie présentée par M. [C] [X] et Mme [J] [I] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
MAINTIENT I'exécution provisoire sur le tout ;
REJETTE toute autre demande'.
Il a considéré que :
- si la preuve de la notification aux vendeurs des arrêtés municipaux n'était pas rapportée et que le certificat d'urbanisme n'en faisait pas mention, l'attestation et les courriels produits aux débats établissaient que les vendeurs avaient eu connaissance de l'obligation de procéder au ravalement du lot ;
- les vendeurs avaient, en dissimulant une information déterminante du consentement de l'acquéreur, commis un dol ;
- l'indemnisation de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables s'évaluait à 135.000 €.
Il a rejeté les autres chefs de demande aux motifs que :
- le demandeur ne justifiait pas des autres postes de préjudice allégués ;
- n'était pas rapportée la preuve d'une faute des notaires qui avaient sollicité un certificat d'urbanisme en vue de la vente.
Il a fait droit à la demande [D] [V] de faire défense aux défendeurs d'utiliser des photographies du bien vendu.
Par déclaration reçue au greffe le 16 janvier 2024 enrôlée sous le numéro 24/106, [C] [X] et [J] [I] son épouse ont interjeté appel de ce jugement, n'intimant que [D] [V].
Par déclaration reçue au greffe le 18 janvier 2024 enrôlée sous le numéro 24/124, [D] [V] a interjeté appel de ce jugement, intimant ses époux [C] [X] et [J] [I], Maître [R] [L] et Maître [F] [B].
Par ordonnance du 30 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a jopint ces procédures.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2024, [C] [X] et [J] [I] ont demandé de :
'Vu les articles 1112-1 et suivants du Code civil,
Vu les articles L.132-3 et suivants du Code de la construction et de l'habitation, dans leur version en vigueur au moment de la vente de 2017,
Vu les articles 564 et suivants du Code de procédure civile,
Juger que Monsieur [X] et Madame [I] n'avaient pas connaissance lors de la vente en 2017 des arrêtés de la mairie de 2011 2013 2015 et 2019 produits en première instance par Monsieur [V],
Juger que Monsieur [M] n'a jamais informé Monsieur [X] de l'existence d'une obligation de faire les travaux lors de leurs échanges de 2016,
Juger que les époux [X] ont légitimement pu croire à l'absence d'injonction de travaux portant sur leur immeuble compte tenu de la communication par le service d'urbanisme de la mairie d'un certificat d'urbanisme ne comportant aucune mention sur des servitudes affectant l'immeuble,
CONFIRMER le jugement rendu le 12 décembre 2023 (RG n°22/00448) en ce qu'il a :
« Rejette le surplus de la demande indemnitaire de Monsieur [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
- Rejette la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n°15 et 17 de M. [D] [V] ;
- Maintient l'exécution provisoire sur le tout ;
- Rejette toute autre demande. »
INFIRMER le jugement rendu le 12 décembre 2023 (RG n°22/00448) en ce qu'il a :
« - Condamne in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
- Fait interdiction à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
- Condamne M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
- Condamne M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
- Rejette toute demande en garantie présentée par M. [C] [X] et Mme [J] [I] contre Me [R] [L] et Me [F] [B]. »
STATUANT A NOUVEAU,
A titre principal,
REJETER l'ensemble des demandes formulées par Monsieur [V] à l'encontre de Monsieur [X] et de Madame [I],
CONDAMNER Monsieur [V] à payer à Monsieur [X] et Madame [I] la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
A titre subsidiaire,
Si par exceptionnel, la Cour prononçait la condamnation des consorts [X]-[I] et des notaires Maître [L] et Maître [B] au profit de Monsieur [V],
REJETER les demandes de Maître [L] et Maître [B] formulées à titre subsidiaire à l'encontre des consorts [X]-[I],
CONDAMNER Maître [L] et Maître [B] à garantir et relever indemne Monsieur [X] et Madame [I] de toute condamnation au profit de Monsieur [V]'.
Ils ont soutenu ne pas avoir eu connaissance de l'information litigieuse. Ils ont exposé que :
- leur propre acte de vente n'avait pas fait mention de l'obligation de ravaler l'immeuble ;
- les arrêtés municipaux ne leur avaient pas été notifiés ;
- les courriels échangés avec le chargé de mission à la mairie n'avaient pas fait mention de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble ;
- le certificat d'urbanisme délivré n'avait pas mentionné cette obligation.
Ils ont contesté tout dol de leur part et tout manquement à l'obligation précontractuelle d'information.
Ils ont ajouté que :
- [D] [V], salarié d'entreprises de construction avant d'exercer l'activité de [X] de biens, ne pouvait pas ignorer que l'état de la façade l'immeuble qu'il achetait pour revendre nécessitait un ravalement ;
- le bien initialement mis en vente à 230.000 € avait été acquis par [D] [V] à un prix bien moindre.
Ils ont contesté :
- toute utilisation des photographies du bien litigieux ;
- le coût des travaux tel qu'évalué par [D] [V].
Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 mai 2025, [D] [V] a demandé de :
'Vu les articles et la jurisprudence précités,
[...]
CONFIRMER le jugement du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
« REJETTE la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n° 15 et 17 de M. [D] [V] ;
CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile
DIT n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me [R] [L] et Me [F] [B] MAINTIENT l'exécution provisoire sur le tout ;
REJETTE toute autre demande ».
INFIRMER le jugement du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
« REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
REJETTE toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ».
Et en ce qu'il a limité le montant des condamnations à la somme de 135.000€;
STATUANT A NOUVEAU :
JUGER que Monsieur [X] et Madame [I] ont notamment manqué à leurs obligations précontractuelles d'information et délibérément caché à Monsieur [V] l'existence des injonctions de travaux ;
JUGER que Maître [R] [L] et Maître [F] [B] ont manqué à leurs obligations professionnelles ;
JUGER que ces manquements sont de nature à engager leurs responsabilités;
CONDAMNER in solidum Monsieur [X] et Madame [I], d'une part, Maître [R] [L] et Maître [F] [B], d'autre part, à indemniser Monsieur [V] de l'ensemble des préjudices subis, en lui allouant, à titre de dommages & intérêts :
'165.084,50€ au titre du coût de travaux de ravalement, avec indexation sur les indices applicables à compter du 19 janvier 2022 et jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,
' 20.940€ au titre des frais de maitrise d''uvre pour le suivi des travaux (10%),
' 20.000€ au titre du préjudice moral,
' 72.329€ pour la perte de chance sur leur seconde opération immobilière.
DEBOUTER les intimés de l'intégralité de leurs demandes, en toutes fins qu'elles comportent ;
CONDAMNER in solidum les intimés à payer à Monsieur [V] une somme de 5.000€ au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens'.
Il a exposé que :
- le certificat d'urbanisme qui avait été délivré le 30 mars 2021, la veille de la date prévue de signature de l'acte de revente du bien, avait fait mention de l'arrêté municipal du 15 juillet 2019 ayant imposé le ravalement de la façade du bien ;
- [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine à la mairie de [Localité 15], avait attesté que les travaux de ravalement avaient été évoqués dès février 2016 avec [C] [X], antérieurement à la vente du lot.
Il a maintenu que :
- ses vendeurs, en dissimulant l'obligation de procéder au ravalement du bien dont ils avaient eu connaissance, avaient commis un dol ;
- cette dissimulation avait été déterminante de son consentement ;
- les vendeurs avaient en outre manqué à leur obligation précontractuelle d'information ;
- ceux-ci avaient subsidiairement engagé leur responsabilité civile délictuelle.
Il a conclu à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu une perte de chance, mais à son infirmation s'agissant de l'indemnisation de ce préjudice. Il a demandé paiement du coût du ravalement (165.084,50 €) avec indexation, augmenté des honoraires de maîtrise d'oeuvre (20.940 €).
Il a en outre sollicité l'indemnisation :
- d'un préjudice moral, l'irrespect de l'arrêté municipal étant pénalement sanctionné (article L 152-11 ancien, L 183-12 nouveau du code de la construction et de l'habitation) ;
- de la perte de la possibilité ou de chance de réinvestir la plus-value qui serait résultée de la revente du bien.
Il a ajouté que :
- l'état de la façade ne pouvait pas laisser deviner l'obligation imposée par l'autorité municipale ;
- le profil internet de [C] [X] le présentait comme étant un 'conseiller en immobilier' ;
- les époux [C] [X] et [J] [I] avaient manifestement pour activité l'achat de biens immobiliers en vue de leur revente ;
- ingénieur de formation et chargé d'affaires chez Engie à la date de la vente, il était profane en matière immobilière, la vente litigieuse ayant été son premier investissement locatif ;
- la nue-propriété de parts d'une société civile immobilière donnée par ses parents en 2015 ne lui conférait pas la qualité de professionnel de l'immobilier et de la construction.
Il a soutenu que les notaires, informés que le bien était situé dans un secteur faisant l'objet d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur, auraient dû avoir connaissance de l'arrêté du 16 novembre 2015 ou, à tout le moins, se rapprocher de la mairie pour savoir si le bien était grevé de servitudes ou de contraintes particulières. Selon lui, cette abstention fautive engageait leur responsabilité à son égard.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2025, Maître [R] [L] et Maître [F] [B] ont demandé de :
'Vu le bordereau de pièces fondant les prétentions de Maître [L] et de Maître [B], annexé aux présentes conclusions conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,
Dire et juger que Monsieur [V] ne justifie d'aucune faute, et d'aucun préjudice indemnisable en lien avec l'intervention de Maître [L] et de MAITRE [B], au titre de la rédaction de l'acte du 21 juillet 2017.
Dire et juger que Maître [L] et Maître [B] n'ont pas engagé leur responsabilité civile professionnelle à l'égard de Monsieur [V].
Confirmer en conséquence le jugement du tribunal judiciaire de POITIERS du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
Rejeté toute demande en garantie présentée par Monsieur [C] [X] et Madame [J] [I] contre Maître [R] [L] et Maître [F] [B].
Débouter en conséquence Monsieur [V] de ses demandes visant à condamner, in solidum, Maître [L] et Maître [B], avec Monsieur [X] et Madame [I], à lui payer à titre de dommage intérêt :
165 084,50 € au titre du coût des travaux de ravalement
20 940 € au titre des frais de maîtrise d'oeuvre pour le suivi des travaux (10%)
20 000 € au titre du préjudice moral
72 329 € pour la perte de chance de leur opération immobilière.
5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
SUBSIDIAIREMENT,
Dans l'hypothèse impossible où une condamnation in solidum de Maître [L] et de Maître [B] était prononcée, avec Monsieur [X] et Madame [I], au profit de Monsieur [V],
Condamner Monsieur [X] et Madame [I] à garantir et relever indemne Maître [L] et Maître [B] de toute condamnation au profit de Monsieur [V].
Débouter Monsieur [X] et Madame [I] de toute demande de garantie qui serait présentée contre Maître [L] et Maître [B].
En tout état de cause
Condamner Monsieur [V], ou tout succombant, à payer à Maître [L] et à Maître [B] une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner les mêmes en tous les frais et dépens de l'instance dont distraction au profit de la SELARL MADY-GILLET-BRIAND-PETILLION, avocat, qui sera autorisée à les recouvrer dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile'.
Ils ont exposé que si le certificat d'urbanisme délivré le 30 mars 2021 avait indiqué que l'immeuble était concerné pat le plan de ravalement obligatoire (arrêté n° 1590 du 15 juillet 2019), celui délivré le 7 juillet 2017 en vue de la vente litigieuse n'avait pas fait mention de cette obligation et d'un arrêté municipal, s'étant limité à rappeler l'approbation le 25 juillet 2013 d'un plan relatif à un secteur sauvegardé.
Ils ont rappelé qu'un acte administratif était présumé exact et soutenu qu'ils n'avaient pas en l'espèce de motif de vérifier les énonciations de ce certificat dont rien ne permettait de douter de l'exactitude.
Ils ont conclu à l'absence de préjudice indemnisable aux motifs que :
- le dol des vendeurs, s'il venait à être retenu, ne pouvait pas leur être imputé ;
- la demande formée au titre des travaux constituait une demande réduction du prix de vente à laquelle ils n'étaient pas tenus ;
- le préjudice moral et la perte de chance de réinvestir le montant de la plus-value n'étaient pas démontrés.
Ils ont subsidiairement sollicité la garantie des vendeurs.
L'ordonnance de clôture est du 12 mai 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A - SUR LES DEMANDES FORMEES A L'ENCONTRE DES VENDEURS
1 - sur le dol
Aux termes de l'article 1112-1 du code civil :
'Celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants'.
L'article 1130 du code civil dispose que :
'L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné'.
Aux termes de l'article 1137 du même code :
'Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation'.
Il appartient à [D] [V] de rapporter la preuve que ses vendeurs avaient à la date de la vente, connaissance de l'obligation faite par l'autorité municipale de procéder au ravalement du bien qu'il allait acquérir et qu'ils ne l'ont pas informé de cette obligation.
Par arrêté du 16 décembre 2008, le préfet de la Vienne a inscrit la commune de [Localité 15] sur la liste des communes autorisées à faire procéder au ravalement des immeubles situés sur leur territoire. Les arrêtés municipaux produits aux débats et imposant le ravalement sont du 28 septembre 2011, 28 février 2013, 16 septembre 2015, puis 15 juillet 2019.
L'arrêté n° 2103 du 28 septembre 2011 du maire de [Localité 15] visant l'arrêté municipal du 26 janvier 2009 n° 187 précisant le premier périmètre de ravalement des façades, dispose en son article 1er que :
'La campagne de ravalement de façades vise les axes suivants :
[...]
La [Adresse 5] au n°[Adresse 5]".
L'arrêté du 28 février 2013 (n° 646) étend l'obligation comme suit :
'La [Adresse 6] du n° [Adresse 6] à la fin de la rue et du n° [Adresse 9] à la fin de la rue, La [Adresse 5] au n°[Adresse 5]".
L'article 2 de ces arrêtés précise en son alinéa 2 que :
'Le Maire notifie aux propriétaires concernés une obligation de ravalement de leur immeuble dans un délai allant de 2 ans, pour les plus dégradés à 5 ans pour ceux qui le sont moins. La commission d'attribution des aides aux ravalements, mentionnée dans la délibération du 19 janvier 2009 est chargée de définir le délai s'appliquant pour chaque façade'.
Cette obligation et cette information des propriétaires a également été rappelée dans l'arrêté du 16 septembre 2015 n° 2157.
L'arrêté du 28 septembre 2011 a été notifié par courrier recommandé en date du 11 juin 2012 distribué le 13 juin 2012 à [N] [U]. Il mentionne en objet
''Coeur d'Agglomération -Ravalement de façades
[Adresse 5]'.
Les époux [N] [U] et [T] [A] son épouse avaient acquis le bien par acte du 30 juin 1972. Ils l'ont revendu par acte du 21 octobre 2004, antérieurement aux arrêtés imposant le ravalement.
L'acte de vente du lot litigieux aux époux [C] [X] et [J] [I] est du 31 août 2015. Il a été indiqué en page 12 de cet acte, au paragraphe 'dispositions relatives à l'urbanisme', que :
'Note de renseignements d'urbanisme
Une note de renseignements d'urbanisme dont l 'original est annexé a été délivré le 29 juillet 2015 de laquelle il résulte que le bien vendu est concerné par le plan de sauvegarde et de mise en valeur, concerné par les servitudes d'utilité publiques suivantes:
- protection des monuments historiques
- périmètre archéologique
- protection de la circulation aérienne (servitude de dégagernent)
- protection contre le bruit
Les parties :
- s'obligent à faire leur affaire personnelle de l'exécution des charges et prescriptions et du respect des servitudes publiques et autres limitations administratives au droit de propriété qui sont mentionnées en ce document au caractère purement informatif et dont elles déclarent avoir pris connaissance
- reconnaissent que le notaire soussigné leur a fourni tous éclaircissements complémentaires sur la portée, l'étendue et les effets desdites charges et prescriptions ;
- déclarent qu'elles n'ont jamais fait de l'obtention d'un certificat d'urbanisme pré opérationnel et de la possibilité d'exécuter des travaux nécessitant l'obtention préalable d'un permis de construire une condition des présentes'.
Ce certificat d'urbanisme, pourtant annexé au titre des époux [C] [X] et [J] [I], n'a pas été produit aux débats.
A la date de la vente, l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble résultait des arrêtés des 28 septembre 2011 et 28 février 2013.
Si ces arrêtés ne sont mentionnés ni à l'acte de vente, ni sur le certificat d'urbanisme, il convient de constater que les vendeurs ont reconnu à l'acte que le notaire instrumentant leur avait fourni 'tous éclaircissements complémentaires' sur les 'charges et prescriptions et... servitudes publiques et autres limitations administratives au droit de propriété' étant résultés du 'plan de sauvegarde et de mise en valeur', bien antérieur à la vente.
L'acte de vente du lot à [D] [V] ne fait pas mention de l'obligation de procéder au ravalement, de même que le certificat d'urbanisme annexé à cet acte, contrairement à celui du 30 mars 2021.
Le courrier adressé à [N] [U] indiquait que :
'Afin d'établir votre projet dans de bonnes conditions, je vous invite à prendre contact avec Monsieur [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine, situé au Point Info Environnement Coeur d'Agglo, [Adresse 10] à [Localité 15] ([XXXXXXXX01]). Il examinera avec vous les modalités de réalisation de votre opération et vous aidera à monter les dossiers de demande d'autorisation de travaux et éventuellement de subvention'.
[P] [M] précité a communiqué à [D] [V] les courriers éléchangés avec [C] [X].
Par courriel en date du 1er février 2016, ce dernier a indiqué que :
'Comme convenue vous trouverez en pièces jointe mon avis d'imposition afin de calculer l'aide possible concernant mn devis déjà envoyé.
Merci de me confirmé l'acceptation de mon devis aussi, UNISCOP étant les meilleurs concernant le ravalement de façade à l'ancienne'.
[P] [M] a répondu par courriel en date du 3 février suivant que :
'...vous pourriez bénéficier d'une aide de la Ville de XXXX ainsi que d'une aide de XXXX € pour les travaux de remplacement de pierres.
Ces sommes sont versées une fois las travaux achevés et réputés conformes.
Par contre manquent les travaux suivants :...'.
Par courriel en date du 4 février 2016, il a précisé en réponse à [C] [X] que :
'Le dossier, une fois complet passera en commission d'attribution des aides ou il recevra un avis favorable ou non
Ace moment un courrier pourra éventuellement vous être envoyé, sinon par la suite un arrêté attributif de subvention signé du maire sera envoyé (lorsque l'engagement de réaliser les travaux dans l'année nous aura été communiqué)'.
Par courriel en date du 24 mars 2017, il a indiqué àà [C] [X] que :
'Une commission d'attribution des aides est prévue le 03/04/17, pensez-vous présenter une demande pour cette date ''
[C] [X] a répondu le même jour par courriel que :
'L'appartement est en cours de vente (signature du compromis de vente). C'est le future propriétaire qui fera la démarche. Il est au courant'.
[C] [X] avait échangé avec [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine, sur le ravalement à réaliser sur le bien. Les courriers ne font pas explicitement mention du caractère obligatoire de ce ravalement.
[C] [X] ne justifie pas avoir informé [D] [V] des démarches en cours auprès des services de la mairie de [Localité 15] en vue du versement d'une subvention.
[P] [M], fonctionnaire territorial, a rédigé une attestation en date du 4 août 2023 sur la demande de [D] [V]. Il a déclaré que :
'Je relate les contacts eus avec l'ancien propriétaire M.[X]
[...]
12/11/15 M [X] a contacté le service urbanisme pour des renseignements dans le cadre du ravalement de façade
[...]
13/11/15 je l'ai appelé, et rappelé rvlt obligatoire
[...]
Par autre mail du 13/11/15 'Encore une question' à propos du propriétaire du N° [Adresse 4]...dans lequel il a un droit de passage pour savoir s'il doit participer au ravalement...«C'est peut-être le syndic de l'immeuble qui a reçu votre courrier concernant les travaux extérieurs à effectuer»
Il était donc bien au courant du caractère obligatoire de ces travaux de ravalement.
[...]
Précision : les aides de la Ville s'appliquent dans le périmètre du ravalement obligatoire et c'est également dans ce cadre qu'on demande aux pétitionnaires de compléter leur projet de ravalement pour satisfaire au ravalement obligatoire qui est imposé aux propriétaires.
[...]
Il devait ensuite me communiquer les coordonnées de l'acheteur, après relance m'a fourni le nom mais ne connaissait pas son adresse. Par mail du 7/2/18 donné le nom de l'étude notariale et dit qu'il avait déjà déposé les volets.
J'ai contacté par mail l'étude notariale [W] pour avoir les coordonnées de M. [V] et précisé le cadre du ravalement obligatoire dans le mail'.
Il résulte de cette attestation circonstanciée que [C] [X] avait connaissance du caractère obligatoire du ravalement qui lui avait été rappelé lors des démarches entreprises pour obtenir une subvention de la ville de [Localité 15].
Les arrêtés municipaux des 28 septembre 2011 et 28 février 2013 lient en leur article 2 dont les termes ont été précédemment partiellement rappelés, ce financement à l'obligation de procéder au ravalement.
[C] [X] a ainsi sollicité un financement qui ne pouvait être accordé qu'à l'occasion de la réalisation des travaux de ravalement rendus obligatoire.
Il résulte de ces développements que [C] [X] et par voie de conséquence [J] [I] son épouse avaient, à la date de la vente, connaissance de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble qu'ils allaient céder et qu'ils n'en avaient pas informé [D] [V].
Le coût du ravalement est conséquent en regard du prix d'acquisition du bien, de 190.000 € (dont 10.000 € de meubles) :
- 165.084,50 € toutes taxes comprises aux termes d'un devis n° 21/406 en date du 18 janvier 2022 de la société Art de bâtir produit par [D] [V], hors frais de maîtrise d'oeuvre ;
- 48.833,23 € toutes taxes comprises aux termes de deux devis, l'un en date du 26 janvier 2016 de la société Uniscop, l'autre n° D202500354 en date du 9 février 2025 de la société Label'Renov, 52.250 € toutes taxes comprises aux termes d'un devis n° DE00000238 en date du 24 février 2025 de l'eirl Marques, devis communiqués par les vendeurs.
Il est indifférent que le certificat d'urbanisme établi à l'occasion de la vente litigieuse n'ait pas fait mention du ravalement obligatoire, dès lors qu'ils avaient connaissance de cette obligation dont ils devaient informer leur cocontractant.
Maître [H] [O], commissaire de justice associé à [Localité 15] a fait le 4 février 2025 sur la requête de [C] [X] le constat suivant :
'L'immeuble dont s'agit se situe à l'angle des [Adresse 5] et [Adresse 14].
[...]
Les deux façades apparaissent sales, particulièrement au niveau des trois derniers étages'.
Ces constatations n'établissent pas que les façades du bâtiment nécessitaient en 2017, près de 8 années auparavant et indépendamment de toute contrainte administrative, un ravalement à réaliser à bref délai.
L'extrait du contrat de travail produit aux débats établit que [D] [V] était à la date de la vente employé en qualité de : 'ingénieur conseil - Iac' par la société Cofely Axima Gdf Suez. Le bulletin de paye du mois de juillet 2017 mentionne un emploi de : 'chargé d'affaires junior'. Il est associé non gérant de deux sociétés civiles immobilières à caractère familial. Le récépissé de dépôt au centre de formalités des entreprises en date du 25 septembre 2017 établi par le greffe du tribunal de commerce de Poitiers établit qu'il exerce en qualité de loueur individuel en meublé, non professionnel. Le formulaire de début d'activité mentionne un exercice de celle-ci au [Adresse 5].
Ces éléments n'établissent pas que [D] [V] avait à la date de la vente la qualité de professionnel de l'immobilier, ni les connaissances et les compétences nécessaires pour se convaincre qu'un ravalement était nécessaire, au surplus imposé par l'autorité administrative.
La dissimulation intentionnelle de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble, information déterminante du consentement de l'acquéreur est, au sens de l'article 1137 précité, un dol.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
2 - sur le préjudice
L'article 1178 du code civil dispose que:
'Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord.
Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
Indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle'.
Le dol du vendeur constitue une faute engageant se responsabilité extra contractuelle, l'obligeant à réparer l'intégralité du préjudice subi par l'acquéreur.
Les époux [C] [X] et [J] [I] sont tenus in solidum de cette indemnisation.
a - sur le préjudice matériel
1 - sur le coût des travaux de ravalement
Ce préjudice à indemniser correspond au coût des travaux de ravalement, non en une perte de chance d'acquérir à un moindre prix. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Ainsi que précédemment exposé, 4 devis ont été produits aux débats.
Le devis n° 21/406 en date du 18 janvier 2022 de la société Art de bâtir produit par [D] [V] a été établi après communication par courriel en date du 8 juillet 2021 par [P] [M] du 'cahier des charges 'écrit' sur la base du repérage des désordres pour vous permettre de consulter plusieurs entreprises'.
Les devis produits par les époux [C] [X] et [J] [I] sont soit antérieurs à la communication du cahier des charges, soit n'y satisfont pas.
Le devis de la société Art de bâtir sera pour ces motifs retenu.
Le montant de 165.085,50 € sera indexé sur l'indice BT 01 publié par l'Insee à compter de la date de son émission (valeur au mois de janvier 2022: 121,04) et jusqu'à celui publié au 21 octobre 2025, date du présent arrêt.
La complexité des travaux et le contrôle qui sera exercé par l'administration justifient que le coût des travaux précité soit augmenté du coût de la maîtrise d'oeuvre. La société CDC Ingénierie & conseil a établi à l'intention de [D] [V] un devis n° PR2309-3764 en date du 11 septembre 2023 relatif à cette mission de maîtrise d'oeuvre, d'un montant toutes taxes comprises de 20.940 €. Les époux [C] [X] et [J] [I] ne rapportant pas la preuve du caractère erroné de cette évaluation, ce montant de 20.940 € sera retenu.
Le jugement sera en conséquence réformé sur l'indemnisation accordée à [D] [V].
2 - sur une perte de chance de réinvestir une plus-value
Un compromis de vente du bien par [D] [V] est en date du 13 janvier 2021.
L'étude de Maître [R] [L] chargé d'instrumenter la vente a transmis un courriel en date du 7 juin 2021 de l'étude Maître [K] [S] indiquant que :
'Je reviens vers vous concernant l'obligation de ravalement de façade révélée par le CU délivré lors de I'instruction du dossier en références.
Afin de compléter son information, mon client a eu une conversation avec Monsieur [P] [M]
[...]
Ce dernier a confirmé à mon client les points suivants :
- Ce bien est situé en site patrimonial remarquable
- Qu'il est concerné par le ravalement obligatoire
- Que des travaux sans autorisation y ont été réalisés dont notamment la pose de fenêtres PVC ainsi que des barreaudages dont les modèles ne sont pas adaptés, une parabole est à enlever, pour ce qui est de la partie visible (il rappelle que les intérieurs sont également à examiner en SPR).
- Que les persiennes ont été déposées et seront à remettre une fois resta urées ou neuves (à l'identique : persiennes à la Française avec lames affleurantes).
Monsieur [M] confirme que ces travaux avaient été envisagés avec Mr [X] précédent propriétaire ainsi qu'il résultait d'un devis produit en 2016 (environ 50 000 € et qui ne devait concerner que la partie maçonnerie - pierre de taille).
Compte tenu de ces éléments, constituant une charge non connue de mon client à la signature du compromis de vente, et qui remettent en cause l'économie générale de son projet, celui-ci souhaite résilier purement et simplement le compromis de vente signé le 13 janvier 2021".
La vente n'a pas été poursuivie par les potentiels acquéreurs, avec l'accord du vendeur (courriel de l'étude de Maître [R] [L] en date du 10 juin 2021).
[D] [V] demande à être indemnisé de la perte de chance de pouvoir réinvestir la plus-value qu'aurait dégagée cette vente.
Un tel préjudice, hypothétique, n'est pas certain.
[D] [V] n'est pour ces motifs pas fondé en sa demande présentée de chef.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
b - sur le préjudice moral
Les manquements de ses cocontractants ont été à l'origine par [D] [V] d'un préjudice moral qui sera indemnisé pour un montant de 3.000 €.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
3 - sur l'utilisation de photographies du bien
Une annonce en vue de la vente du bien litigieux avait été publiée sur le site 'leboncoin.fr'. Le bien y a été décrit comme comportant 5 pièces dont 4 chambres, et être d'une superficie de 134 m².
[D] [V] a produit une annoncé publiée le 6 juin 2019 sur site 'le bonconcoin.fr'. Cette annonce, qui a trait à la location d'un logement de 4 pièces en colocation situé en 'hyper centre proche facs', 'sur le plateau, a deux pas des facs et commerce', de '3 chambres à louées' et de 99 m². Elle comporte la photographie d'une salle d'eau du bien.
Les époux [C] [X] et [J] [I] contestent être les auteurs de cette annonce.
Celle-ci ne comporte aucune indication sur l'identité de son auteur. Le profil de l'auteur de l'annonce, sous forme de lien hypertexte, n'a pas été exploité. Les caractéristiques du bien (superficie, nombre de chambre) ne correspondent pas.
Un examen attentif de la photographie de la salle d'eau annexée à cette annonce établit qu'elle diffère de celle produite par [D] [V]. Les motifs du dallage au sol de la douche diffèrent. Un meuble figure en coin de la photographie de l'annonce, mais non sur celle versée par [D] [V].
Aucun élément des débats ne permet de retenir que la photographie annexée à une annonce publiée sur le même site internet le 20 mai 2021, relative à un bien qui n'est pas celui litigieux, est celle de ce bien. Il est dès lors indifférent que le numéro de téléphone du contact mentionné sur cette annonce soit celui de [C] [X].
Le jugement sera pour ces motifs infirmé en ce qu'il a fait défense d'utiliser la photographie du bien, dès lors que l'atteinte au droit de propriété de [D] [V] n'a pas été caractérisée.
B - SUR LES DEMANDES FORMEES A L'ENCONTRE DES NOTAIRES
L'article 1240 du code civil dispose que : 'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
[D] [V] demande la condamnation solidaire des notaires aux motifs qu'ils auraient commis une faute en ne recherchant qu'elles étaient les obligations imposées en raison du plan de sauvegarde et de mise en valeur adopté par la ville de [Localité 15] et en procédant pas aux vérifications complémentaires nécessaires.
Les vendeurs sollicitent quant à eux la garantie des notaires.
L'acte de vente du bien aux époux [C] [X] et [J] [I] n'a pas fait mention de l'obligation litigieuse.
Le certificat d'urbanisme annexé à l'acte de vente du bien à [D] [V] ne fait pas mention de cette obligation.
Aucun élément des débats ne permet de considérer que les notaires disposaient d'élements d'information leur permettant de penser que le certificat délivré par l'autorité administrative en vue de la vente, qui rappelait que l'immeuble était soumis aux obligations du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la ville, était erroné et comportait une omission s'agissant de l'obligation de ravalement.
Il ne se déduit pas du seul fait que le notaire ayant assisté le vendeur exerçait à [Localité 15] qu'il avait nécessairement connaissance de l'obligation particulière pesant sur le bien devant être cédé.
Les époux [C] [X] et [J] [I] ne sont pas fondés à solliciter la garantie des notaires dès lors que le préjudice dont ils doivent réparation a pour cause leur dissimulation d'une information déterminante du consentement de l'acquéreur qui, fautive, a rompu le lien de causalité entre le préjudice et la faute imputée.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à l'encontre des notaires.
C - SUR LES DÉPENS
La charge des dépens d'appel incombe aux époux [C] [X] et [J] [I].
D - SUR LES DEMANDES PRESENTEES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Le premier juge a équitablement apprécié :
- l'indemnité due sur ce fondement par les époux [C] [X] et [J] [I] ;
- n'y avoir lieu de faire application de ces disposition au profit des notaires.
Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de [D] [V] d'une part, de Maîtres [R] [L] et [F] [B] d'autre part de laisser à leur charge les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit aux demandes formée de ce chef par [D] [V] à l'encontre de ses vendeurs d'une part, des notaires à l'encontre de ce dernier d'autre part, pour les montants ci-après précisés.
PAR CES MOTIFS
statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement du 12 décembre 2023 du tribunal judiciaire de Poitiers sauf en ce qu'il :
'CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C][X] et Mme [J] [I] ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation' ;
et statuant à nouveau de ces chefs d'infirmation,
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] à payer à titre de dommages et intérêts à [D] [V] les sommes de :
- 165.085,50 € correspondant au coût des travaux de ravalement, avec indexation sur l'indice BT 01 publié par l'Insee à compter du 18 janvier 2022 (valeur au mois de janvier 2022 : 121,04), arrêtée à celui publié au 21 octobre 2025, date du présent arrêt, puis avec intérêts de retard au taux légal à compter de cette dernière date ;
- 20.940 € correspondant aux frais de maîtrise d'oeuvre, avec intérêts de retard au taux légal à compter de la date du jugement ;
- 3.000 € en réparation du préjudice moral ;
REJETTE la demande de [D] [V] d'interdire aux époux [C] [X] et [J] [I] d'utiliser des photographies du bien vendu ;
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] aux dépens d'appel ;
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] à payer en cause d'appel à [D] [V] la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [D] [V] à payer en cause d'appel à Maîtres [R] [L] et [F] [B] pris ensemble la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte du 31 août 2015, les époux [C] [X] et [J] [I] ont acquis au prix de 130.000 € la propriété du lot n° 2 d'un immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 15] (Vienne).
Ce lot n° 2 comporte 4 étages.
Un local commercial situé au rez-de-chaussée constitue le lot n° 1.
L'immeuble est situé à l'angle de la [Adresse 5] et de la [Adresse 14].
Par compromis en date du 3 mai 2017, les époux [C] [X] et [J] [I] ont convenu de la vente du lot n° 2 à [D] [V], au prix de 190.000 €. La vente a été réitérée par acte authentique du 21 juillet 2017 reçu par Maître [R] [L], notaire à [Localité 16] (Vienne), avec la participation de Maître [F] [B], notaire à [Localité 15] assistant les vendeurs.
Par acte des 15 et 16 février 2022, [D] [V] a assigné devant le tribunal judiciaire de Poitiers les époux [C] [X] et [J] [I], Maîtres [R] [L] et [F] [B].
Il a soutenu que :
- ses vendeurs avaient commis un dol en ayant dissimulé l'obligation faite par l'autorité municipale de faire procéder au ravalement de l'immeuble ;
- la preuve de ce dol était rapportée par les termes des attestations du chargé de mission rénovation du patrimoine au Service urbanisme et habitat de la ville de [Localité 15] avec lequel les vendeurs avaient échangé antérieurement à la vente ;
- le coût du ravalement était de 165.084,560 €, à augmenter des honoraires de maîtrise d'oeuvre ;
- les notaires ayant instrumenté avaient commis une faute en n'ayant pas vérifié les mentions du certificat d'urbanisme délivré par le maire de la commune de [Localité 15].
Il a demandé paiement à titre de dommages et intérêts des sommes de :
- 165.084,50 € correspondant au coût des travaux de ravalement ;
- 16.085 € au titre des frais de maîtrise d''uvre (10 % du montant des travaux) ;
- 20.000 € en réparation de son préjudice moral ;
- 72.329 € en réparation de la perte de chance de réinvestir la plus-value qui serait résultée de la revente du bien en 2021.
Les époux [C] [X] et [J] [I] ont conclu au rejet de ces prétentions aux motifs que :
- leur acte de vente n'avait pas mentionné l'obligation de procéder au ravalement ;
- les arrêtés municipaux ayant imposé cette obligation ne leur avaient pas été notifiés ;
- le certificat d'urbanisme délivré à l'occasion de la vente n'avait pas fait mention de cette obligation ;
- le manquement allégué à l'obligation précontractuelle d'information n'était ainsi pas établi.
Les notaires ont de même conclu au rejet des demandes formées à leur encontre en l'absence selon eux de faute de leur part.
Par jugement du 12 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Poitiers a statué en ces termes :
'REJETTE la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n° 15 et 17 de M. [D] [V] ;
CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
REJETTE toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
REJETTE toute demande en garantie présentée par M. [C] [X] et Mme [J] [I] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
MAINTIENT I'exécution provisoire sur le tout ;
REJETTE toute autre demande'.
Il a considéré que :
- si la preuve de la notification aux vendeurs des arrêtés municipaux n'était pas rapportée et que le certificat d'urbanisme n'en faisait pas mention, l'attestation et les courriels produits aux débats établissaient que les vendeurs avaient eu connaissance de l'obligation de procéder au ravalement du lot ;
- les vendeurs avaient, en dissimulant une information déterminante du consentement de l'acquéreur, commis un dol ;
- l'indemnisation de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables s'évaluait à 135.000 €.
Il a rejeté les autres chefs de demande aux motifs que :
- le demandeur ne justifiait pas des autres postes de préjudice allégués ;
- n'était pas rapportée la preuve d'une faute des notaires qui avaient sollicité un certificat d'urbanisme en vue de la vente.
Il a fait droit à la demande [D] [V] de faire défense aux défendeurs d'utiliser des photographies du bien vendu.
Par déclaration reçue au greffe le 16 janvier 2024 enrôlée sous le numéro 24/106, [C] [X] et [J] [I] son épouse ont interjeté appel de ce jugement, n'intimant que [D] [V].
Par déclaration reçue au greffe le 18 janvier 2024 enrôlée sous le numéro 24/124, [D] [V] a interjeté appel de ce jugement, intimant ses époux [C] [X] et [J] [I], Maître [R] [L] et Maître [F] [B].
Par ordonnance du 30 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a jopint ces procédures.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2024, [C] [X] et [J] [I] ont demandé de :
'Vu les articles 1112-1 et suivants du Code civil,
Vu les articles L.132-3 et suivants du Code de la construction et de l'habitation, dans leur version en vigueur au moment de la vente de 2017,
Vu les articles 564 et suivants du Code de procédure civile,
Juger que Monsieur [X] et Madame [I] n'avaient pas connaissance lors de la vente en 2017 des arrêtés de la mairie de 2011 2013 2015 et 2019 produits en première instance par Monsieur [V],
Juger que Monsieur [M] n'a jamais informé Monsieur [X] de l'existence d'une obligation de faire les travaux lors de leurs échanges de 2016,
Juger que les époux [X] ont légitimement pu croire à l'absence d'injonction de travaux portant sur leur immeuble compte tenu de la communication par le service d'urbanisme de la mairie d'un certificat d'urbanisme ne comportant aucune mention sur des servitudes affectant l'immeuble,
CONFIRMER le jugement rendu le 12 décembre 2023 (RG n°22/00448) en ce qu'il a :
« Rejette le surplus de la demande indemnitaire de Monsieur [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
- Rejette la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n°15 et 17 de M. [D] [V] ;
- Maintient l'exécution provisoire sur le tout ;
- Rejette toute autre demande. »
INFIRMER le jugement rendu le 12 décembre 2023 (RG n°22/00448) en ce qu'il a :
« - Condamne in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
- Fait interdiction à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
- Condamne M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
- Condamne M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ;
- Rejette toute demande en garantie présentée par M. [C] [X] et Mme [J] [I] contre Me [R] [L] et Me [F] [B]. »
STATUANT A NOUVEAU,
A titre principal,
REJETER l'ensemble des demandes formulées par Monsieur [V] à l'encontre de Monsieur [X] et de Madame [I],
CONDAMNER Monsieur [V] à payer à Monsieur [X] et Madame [I] la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
A titre subsidiaire,
Si par exceptionnel, la Cour prononçait la condamnation des consorts [X]-[I] et des notaires Maître [L] et Maître [B] au profit de Monsieur [V],
REJETER les demandes de Maître [L] et Maître [B] formulées à titre subsidiaire à l'encontre des consorts [X]-[I],
CONDAMNER Maître [L] et Maître [B] à garantir et relever indemne Monsieur [X] et Madame [I] de toute condamnation au profit de Monsieur [V]'.
Ils ont soutenu ne pas avoir eu connaissance de l'information litigieuse. Ils ont exposé que :
- leur propre acte de vente n'avait pas fait mention de l'obligation de ravaler l'immeuble ;
- les arrêtés municipaux ne leur avaient pas été notifiés ;
- les courriels échangés avec le chargé de mission à la mairie n'avaient pas fait mention de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble ;
- le certificat d'urbanisme délivré n'avait pas mentionné cette obligation.
Ils ont contesté tout dol de leur part et tout manquement à l'obligation précontractuelle d'information.
Ils ont ajouté que :
- [D] [V], salarié d'entreprises de construction avant d'exercer l'activité de [X] de biens, ne pouvait pas ignorer que l'état de la façade l'immeuble qu'il achetait pour revendre nécessitait un ravalement ;
- le bien initialement mis en vente à 230.000 € avait été acquis par [D] [V] à un prix bien moindre.
Ils ont contesté :
- toute utilisation des photographies du bien litigieux ;
- le coût des travaux tel qu'évalué par [D] [V].
Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 mai 2025, [D] [V] a demandé de :
'Vu les articles et la jurisprudence précités,
[...]
CONFIRMER le jugement du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
« REJETTE la demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] tendant à voir écarter des débats les pièces n° 15 et 17 de M. [D] [V] ;
CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] in solidum aux dépens ;
CONDAMNE M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute demande de M. [C] [X] et Mme [J] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile
DIT n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me [R] [L] et Me [F] [B] MAINTIENT l'exécution provisoire sur le tout ;
REJETTE toute autre demande ».
INFIRMER le jugement du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
« REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C] [X] et Mme [J] [I] ;
REJETTE toutes les demandes indemnitaires de M. [D] [V] contre Me [R] [L] et Me [F] [B] ».
Et en ce qu'il a limité le montant des condamnations à la somme de 135.000€;
STATUANT A NOUVEAU :
JUGER que Monsieur [X] et Madame [I] ont notamment manqué à leurs obligations précontractuelles d'information et délibérément caché à Monsieur [V] l'existence des injonctions de travaux ;
JUGER que Maître [R] [L] et Maître [F] [B] ont manqué à leurs obligations professionnelles ;
JUGER que ces manquements sont de nature à engager leurs responsabilités;
CONDAMNER in solidum Monsieur [X] et Madame [I], d'une part, Maître [R] [L] et Maître [F] [B], d'autre part, à indemniser Monsieur [V] de l'ensemble des préjudices subis, en lui allouant, à titre de dommages & intérêts :
'165.084,50€ au titre du coût de travaux de ravalement, avec indexation sur les indices applicables à compter du 19 janvier 2022 et jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir,
' 20.940€ au titre des frais de maitrise d''uvre pour le suivi des travaux (10%),
' 20.000€ au titre du préjudice moral,
' 72.329€ pour la perte de chance sur leur seconde opération immobilière.
DEBOUTER les intimés de l'intégralité de leurs demandes, en toutes fins qu'elles comportent ;
CONDAMNER in solidum les intimés à payer à Monsieur [V] une somme de 5.000€ au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens'.
Il a exposé que :
- le certificat d'urbanisme qui avait été délivré le 30 mars 2021, la veille de la date prévue de signature de l'acte de revente du bien, avait fait mention de l'arrêté municipal du 15 juillet 2019 ayant imposé le ravalement de la façade du bien ;
- [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine à la mairie de [Localité 15], avait attesté que les travaux de ravalement avaient été évoqués dès février 2016 avec [C] [X], antérieurement à la vente du lot.
Il a maintenu que :
- ses vendeurs, en dissimulant l'obligation de procéder au ravalement du bien dont ils avaient eu connaissance, avaient commis un dol ;
- cette dissimulation avait été déterminante de son consentement ;
- les vendeurs avaient en outre manqué à leur obligation précontractuelle d'information ;
- ceux-ci avaient subsidiairement engagé leur responsabilité civile délictuelle.
Il a conclu à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu une perte de chance, mais à son infirmation s'agissant de l'indemnisation de ce préjudice. Il a demandé paiement du coût du ravalement (165.084,50 €) avec indexation, augmenté des honoraires de maîtrise d'oeuvre (20.940 €).
Il a en outre sollicité l'indemnisation :
- d'un préjudice moral, l'irrespect de l'arrêté municipal étant pénalement sanctionné (article L 152-11 ancien, L 183-12 nouveau du code de la construction et de l'habitation) ;
- de la perte de la possibilité ou de chance de réinvestir la plus-value qui serait résultée de la revente du bien.
Il a ajouté que :
- l'état de la façade ne pouvait pas laisser deviner l'obligation imposée par l'autorité municipale ;
- le profil internet de [C] [X] le présentait comme étant un 'conseiller en immobilier' ;
- les époux [C] [X] et [J] [I] avaient manifestement pour activité l'achat de biens immobiliers en vue de leur revente ;
- ingénieur de formation et chargé d'affaires chez Engie à la date de la vente, il était profane en matière immobilière, la vente litigieuse ayant été son premier investissement locatif ;
- la nue-propriété de parts d'une société civile immobilière donnée par ses parents en 2015 ne lui conférait pas la qualité de professionnel de l'immobilier et de la construction.
Il a soutenu que les notaires, informés que le bien était situé dans un secteur faisant l'objet d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur, auraient dû avoir connaissance de l'arrêté du 16 novembre 2015 ou, à tout le moins, se rapprocher de la mairie pour savoir si le bien était grevé de servitudes ou de contraintes particulières. Selon lui, cette abstention fautive engageait leur responsabilité à son égard.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2025, Maître [R] [L] et Maître [F] [B] ont demandé de :
'Vu le bordereau de pièces fondant les prétentions de Maître [L] et de Maître [B], annexé aux présentes conclusions conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,
Dire et juger que Monsieur [V] ne justifie d'aucune faute, et d'aucun préjudice indemnisable en lien avec l'intervention de Maître [L] et de MAITRE [B], au titre de la rédaction de l'acte du 21 juillet 2017.
Dire et juger que Maître [L] et Maître [B] n'ont pas engagé leur responsabilité civile professionnelle à l'égard de Monsieur [V].
Confirmer en conséquence le jugement du tribunal judiciaire de POITIERS du 12 décembre 2023 en ce qu'il a :
Rejeté toute demande en garantie présentée par Monsieur [C] [X] et Madame [J] [I] contre Maître [R] [L] et Maître [F] [B].
Débouter en conséquence Monsieur [V] de ses demandes visant à condamner, in solidum, Maître [L] et Maître [B], avec Monsieur [X] et Madame [I], à lui payer à titre de dommage intérêt :
165 084,50 € au titre du coût des travaux de ravalement
20 940 € au titre des frais de maîtrise d'oeuvre pour le suivi des travaux (10%)
20 000 € au titre du préjudice moral
72 329 € pour la perte de chance de leur opération immobilière.
5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
SUBSIDIAIREMENT,
Dans l'hypothèse impossible où une condamnation in solidum de Maître [L] et de Maître [B] était prononcée, avec Monsieur [X] et Madame [I], au profit de Monsieur [V],
Condamner Monsieur [X] et Madame [I] à garantir et relever indemne Maître [L] et Maître [B] de toute condamnation au profit de Monsieur [V].
Débouter Monsieur [X] et Madame [I] de toute demande de garantie qui serait présentée contre Maître [L] et Maître [B].
En tout état de cause
Condamner Monsieur [V], ou tout succombant, à payer à Maître [L] et à Maître [B] une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner les mêmes en tous les frais et dépens de l'instance dont distraction au profit de la SELARL MADY-GILLET-BRIAND-PETILLION, avocat, qui sera autorisée à les recouvrer dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile'.
Ils ont exposé que si le certificat d'urbanisme délivré le 30 mars 2021 avait indiqué que l'immeuble était concerné pat le plan de ravalement obligatoire (arrêté n° 1590 du 15 juillet 2019), celui délivré le 7 juillet 2017 en vue de la vente litigieuse n'avait pas fait mention de cette obligation et d'un arrêté municipal, s'étant limité à rappeler l'approbation le 25 juillet 2013 d'un plan relatif à un secteur sauvegardé.
Ils ont rappelé qu'un acte administratif était présumé exact et soutenu qu'ils n'avaient pas en l'espèce de motif de vérifier les énonciations de ce certificat dont rien ne permettait de douter de l'exactitude.
Ils ont conclu à l'absence de préjudice indemnisable aux motifs que :
- le dol des vendeurs, s'il venait à être retenu, ne pouvait pas leur être imputé ;
- la demande formée au titre des travaux constituait une demande réduction du prix de vente à laquelle ils n'étaient pas tenus ;
- le préjudice moral et la perte de chance de réinvestir le montant de la plus-value n'étaient pas démontrés.
Ils ont subsidiairement sollicité la garantie des vendeurs.
L'ordonnance de clôture est du 12 mai 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A - SUR LES DEMANDES FORMEES A L'ENCONTRE DES VENDEURS
1 - sur le dol
Aux termes de l'article 1112-1 du code civil :
'Celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants'.
L'article 1130 du code civil dispose que :
'L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné'.
Aux termes de l'article 1137 du même code :
'Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation'.
Il appartient à [D] [V] de rapporter la preuve que ses vendeurs avaient à la date de la vente, connaissance de l'obligation faite par l'autorité municipale de procéder au ravalement du bien qu'il allait acquérir et qu'ils ne l'ont pas informé de cette obligation.
Par arrêté du 16 décembre 2008, le préfet de la Vienne a inscrit la commune de [Localité 15] sur la liste des communes autorisées à faire procéder au ravalement des immeubles situés sur leur territoire. Les arrêtés municipaux produits aux débats et imposant le ravalement sont du 28 septembre 2011, 28 février 2013, 16 septembre 2015, puis 15 juillet 2019.
L'arrêté n° 2103 du 28 septembre 2011 du maire de [Localité 15] visant l'arrêté municipal du 26 janvier 2009 n° 187 précisant le premier périmètre de ravalement des façades, dispose en son article 1er que :
'La campagne de ravalement de façades vise les axes suivants :
[...]
La [Adresse 5] au n°[Adresse 5]".
L'arrêté du 28 février 2013 (n° 646) étend l'obligation comme suit :
'La [Adresse 6] du n° [Adresse 6] à la fin de la rue et du n° [Adresse 9] à la fin de la rue, La [Adresse 5] au n°[Adresse 5]".
L'article 2 de ces arrêtés précise en son alinéa 2 que :
'Le Maire notifie aux propriétaires concernés une obligation de ravalement de leur immeuble dans un délai allant de 2 ans, pour les plus dégradés à 5 ans pour ceux qui le sont moins. La commission d'attribution des aides aux ravalements, mentionnée dans la délibération du 19 janvier 2009 est chargée de définir le délai s'appliquant pour chaque façade'.
Cette obligation et cette information des propriétaires a également été rappelée dans l'arrêté du 16 septembre 2015 n° 2157.
L'arrêté du 28 septembre 2011 a été notifié par courrier recommandé en date du 11 juin 2012 distribué le 13 juin 2012 à [N] [U]. Il mentionne en objet
''Coeur d'Agglomération -Ravalement de façades
[Adresse 5]'.
Les époux [N] [U] et [T] [A] son épouse avaient acquis le bien par acte du 30 juin 1972. Ils l'ont revendu par acte du 21 octobre 2004, antérieurement aux arrêtés imposant le ravalement.
L'acte de vente du lot litigieux aux époux [C] [X] et [J] [I] est du 31 août 2015. Il a été indiqué en page 12 de cet acte, au paragraphe 'dispositions relatives à l'urbanisme', que :
'Note de renseignements d'urbanisme
Une note de renseignements d'urbanisme dont l 'original est annexé a été délivré le 29 juillet 2015 de laquelle il résulte que le bien vendu est concerné par le plan de sauvegarde et de mise en valeur, concerné par les servitudes d'utilité publiques suivantes:
- protection des monuments historiques
- périmètre archéologique
- protection de la circulation aérienne (servitude de dégagernent)
- protection contre le bruit
Les parties :
- s'obligent à faire leur affaire personnelle de l'exécution des charges et prescriptions et du respect des servitudes publiques et autres limitations administratives au droit de propriété qui sont mentionnées en ce document au caractère purement informatif et dont elles déclarent avoir pris connaissance
- reconnaissent que le notaire soussigné leur a fourni tous éclaircissements complémentaires sur la portée, l'étendue et les effets desdites charges et prescriptions ;
- déclarent qu'elles n'ont jamais fait de l'obtention d'un certificat d'urbanisme pré opérationnel et de la possibilité d'exécuter des travaux nécessitant l'obtention préalable d'un permis de construire une condition des présentes'.
Ce certificat d'urbanisme, pourtant annexé au titre des époux [C] [X] et [J] [I], n'a pas été produit aux débats.
A la date de la vente, l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble résultait des arrêtés des 28 septembre 2011 et 28 février 2013.
Si ces arrêtés ne sont mentionnés ni à l'acte de vente, ni sur le certificat d'urbanisme, il convient de constater que les vendeurs ont reconnu à l'acte que le notaire instrumentant leur avait fourni 'tous éclaircissements complémentaires' sur les 'charges et prescriptions et... servitudes publiques et autres limitations administratives au droit de propriété' étant résultés du 'plan de sauvegarde et de mise en valeur', bien antérieur à la vente.
L'acte de vente du lot à [D] [V] ne fait pas mention de l'obligation de procéder au ravalement, de même que le certificat d'urbanisme annexé à cet acte, contrairement à celui du 30 mars 2021.
Le courrier adressé à [N] [U] indiquait que :
'Afin d'établir votre projet dans de bonnes conditions, je vous invite à prendre contact avec Monsieur [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine, situé au Point Info Environnement Coeur d'Agglo, [Adresse 10] à [Localité 15] ([XXXXXXXX01]). Il examinera avec vous les modalités de réalisation de votre opération et vous aidera à monter les dossiers de demande d'autorisation de travaux et éventuellement de subvention'.
[P] [M] précité a communiqué à [D] [V] les courriers éléchangés avec [C] [X].
Par courriel en date du 1er février 2016, ce dernier a indiqué que :
'Comme convenue vous trouverez en pièces jointe mon avis d'imposition afin de calculer l'aide possible concernant mn devis déjà envoyé.
Merci de me confirmé l'acceptation de mon devis aussi, UNISCOP étant les meilleurs concernant le ravalement de façade à l'ancienne'.
[P] [M] a répondu par courriel en date du 3 février suivant que :
'...vous pourriez bénéficier d'une aide de la Ville de XXXX ainsi que d'une aide de XXXX € pour les travaux de remplacement de pierres.
Ces sommes sont versées une fois las travaux achevés et réputés conformes.
Par contre manquent les travaux suivants :...'.
Par courriel en date du 4 février 2016, il a précisé en réponse à [C] [X] que :
'Le dossier, une fois complet passera en commission d'attribution des aides ou il recevra un avis favorable ou non
Ace moment un courrier pourra éventuellement vous être envoyé, sinon par la suite un arrêté attributif de subvention signé du maire sera envoyé (lorsque l'engagement de réaliser les travaux dans l'année nous aura été communiqué)'.
Par courriel en date du 24 mars 2017, il a indiqué àà [C] [X] que :
'Une commission d'attribution des aides est prévue le 03/04/17, pensez-vous présenter une demande pour cette date ''
[C] [X] a répondu le même jour par courriel que :
'L'appartement est en cours de vente (signature du compromis de vente). C'est le future propriétaire qui fera la démarche. Il est au courant'.
[C] [X] avait échangé avec [P] [M], chargé de mission rénovation du patrimoine, sur le ravalement à réaliser sur le bien. Les courriers ne font pas explicitement mention du caractère obligatoire de ce ravalement.
[C] [X] ne justifie pas avoir informé [D] [V] des démarches en cours auprès des services de la mairie de [Localité 15] en vue du versement d'une subvention.
[P] [M], fonctionnaire territorial, a rédigé une attestation en date du 4 août 2023 sur la demande de [D] [V]. Il a déclaré que :
'Je relate les contacts eus avec l'ancien propriétaire M.[X]
[...]
12/11/15 M [X] a contacté le service urbanisme pour des renseignements dans le cadre du ravalement de façade
[...]
13/11/15 je l'ai appelé, et rappelé rvlt obligatoire
[...]
Par autre mail du 13/11/15 'Encore une question' à propos du propriétaire du N° [Adresse 4]...dans lequel il a un droit de passage pour savoir s'il doit participer au ravalement...«C'est peut-être le syndic de l'immeuble qui a reçu votre courrier concernant les travaux extérieurs à effectuer»
Il était donc bien au courant du caractère obligatoire de ces travaux de ravalement.
[...]
Précision : les aides de la Ville s'appliquent dans le périmètre du ravalement obligatoire et c'est également dans ce cadre qu'on demande aux pétitionnaires de compléter leur projet de ravalement pour satisfaire au ravalement obligatoire qui est imposé aux propriétaires.
[...]
Il devait ensuite me communiquer les coordonnées de l'acheteur, après relance m'a fourni le nom mais ne connaissait pas son adresse. Par mail du 7/2/18 donné le nom de l'étude notariale et dit qu'il avait déjà déposé les volets.
J'ai contacté par mail l'étude notariale [W] pour avoir les coordonnées de M. [V] et précisé le cadre du ravalement obligatoire dans le mail'.
Il résulte de cette attestation circonstanciée que [C] [X] avait connaissance du caractère obligatoire du ravalement qui lui avait été rappelé lors des démarches entreprises pour obtenir une subvention de la ville de [Localité 15].
Les arrêtés municipaux des 28 septembre 2011 et 28 février 2013 lient en leur article 2 dont les termes ont été précédemment partiellement rappelés, ce financement à l'obligation de procéder au ravalement.
[C] [X] a ainsi sollicité un financement qui ne pouvait être accordé qu'à l'occasion de la réalisation des travaux de ravalement rendus obligatoire.
Il résulte de ces développements que [C] [X] et par voie de conséquence [J] [I] son épouse avaient, à la date de la vente, connaissance de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble qu'ils allaient céder et qu'ils n'en avaient pas informé [D] [V].
Le coût du ravalement est conséquent en regard du prix d'acquisition du bien, de 190.000 € (dont 10.000 € de meubles) :
- 165.084,50 € toutes taxes comprises aux termes d'un devis n° 21/406 en date du 18 janvier 2022 de la société Art de bâtir produit par [D] [V], hors frais de maîtrise d'oeuvre ;
- 48.833,23 € toutes taxes comprises aux termes de deux devis, l'un en date du 26 janvier 2016 de la société Uniscop, l'autre n° D202500354 en date du 9 février 2025 de la société Label'Renov, 52.250 € toutes taxes comprises aux termes d'un devis n° DE00000238 en date du 24 février 2025 de l'eirl Marques, devis communiqués par les vendeurs.
Il est indifférent que le certificat d'urbanisme établi à l'occasion de la vente litigieuse n'ait pas fait mention du ravalement obligatoire, dès lors qu'ils avaient connaissance de cette obligation dont ils devaient informer leur cocontractant.
Maître [H] [O], commissaire de justice associé à [Localité 15] a fait le 4 février 2025 sur la requête de [C] [X] le constat suivant :
'L'immeuble dont s'agit se situe à l'angle des [Adresse 5] et [Adresse 14].
[...]
Les deux façades apparaissent sales, particulièrement au niveau des trois derniers étages'.
Ces constatations n'établissent pas que les façades du bâtiment nécessitaient en 2017, près de 8 années auparavant et indépendamment de toute contrainte administrative, un ravalement à réaliser à bref délai.
L'extrait du contrat de travail produit aux débats établit que [D] [V] était à la date de la vente employé en qualité de : 'ingénieur conseil - Iac' par la société Cofely Axima Gdf Suez. Le bulletin de paye du mois de juillet 2017 mentionne un emploi de : 'chargé d'affaires junior'. Il est associé non gérant de deux sociétés civiles immobilières à caractère familial. Le récépissé de dépôt au centre de formalités des entreprises en date du 25 septembre 2017 établi par le greffe du tribunal de commerce de Poitiers établit qu'il exerce en qualité de loueur individuel en meublé, non professionnel. Le formulaire de début d'activité mentionne un exercice de celle-ci au [Adresse 5].
Ces éléments n'établissent pas que [D] [V] avait à la date de la vente la qualité de professionnel de l'immobilier, ni les connaissances et les compétences nécessaires pour se convaincre qu'un ravalement était nécessaire, au surplus imposé par l'autorité administrative.
La dissimulation intentionnelle de l'obligation de procéder au ravalement de l'immeuble, information déterminante du consentement de l'acquéreur est, au sens de l'article 1137 précité, un dol.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
2 - sur le préjudice
L'article 1178 du code civil dispose que:
'Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord.
Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé.
Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.
Indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle'.
Le dol du vendeur constitue une faute engageant se responsabilité extra contractuelle, l'obligeant à réparer l'intégralité du préjudice subi par l'acquéreur.
Les époux [C] [X] et [J] [I] sont tenus in solidum de cette indemnisation.
a - sur le préjudice matériel
1 - sur le coût des travaux de ravalement
Ce préjudice à indemniser correspond au coût des travaux de ravalement, non en une perte de chance d'acquérir à un moindre prix. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Ainsi que précédemment exposé, 4 devis ont été produits aux débats.
Le devis n° 21/406 en date du 18 janvier 2022 de la société Art de bâtir produit par [D] [V] a été établi après communication par courriel en date du 8 juillet 2021 par [P] [M] du 'cahier des charges 'écrit' sur la base du repérage des désordres pour vous permettre de consulter plusieurs entreprises'.
Les devis produits par les époux [C] [X] et [J] [I] sont soit antérieurs à la communication du cahier des charges, soit n'y satisfont pas.
Le devis de la société Art de bâtir sera pour ces motifs retenu.
Le montant de 165.085,50 € sera indexé sur l'indice BT 01 publié par l'Insee à compter de la date de son émission (valeur au mois de janvier 2022: 121,04) et jusqu'à celui publié au 21 octobre 2025, date du présent arrêt.
La complexité des travaux et le contrôle qui sera exercé par l'administration justifient que le coût des travaux précité soit augmenté du coût de la maîtrise d'oeuvre. La société CDC Ingénierie & conseil a établi à l'intention de [D] [V] un devis n° PR2309-3764 en date du 11 septembre 2023 relatif à cette mission de maîtrise d'oeuvre, d'un montant toutes taxes comprises de 20.940 €. Les époux [C] [X] et [J] [I] ne rapportant pas la preuve du caractère erroné de cette évaluation, ce montant de 20.940 € sera retenu.
Le jugement sera en conséquence réformé sur l'indemnisation accordée à [D] [V].
2 - sur une perte de chance de réinvestir une plus-value
Un compromis de vente du bien par [D] [V] est en date du 13 janvier 2021.
L'étude de Maître [R] [L] chargé d'instrumenter la vente a transmis un courriel en date du 7 juin 2021 de l'étude Maître [K] [S] indiquant que :
'Je reviens vers vous concernant l'obligation de ravalement de façade révélée par le CU délivré lors de I'instruction du dossier en références.
Afin de compléter son information, mon client a eu une conversation avec Monsieur [P] [M]
[...]
Ce dernier a confirmé à mon client les points suivants :
- Ce bien est situé en site patrimonial remarquable
- Qu'il est concerné par le ravalement obligatoire
- Que des travaux sans autorisation y ont été réalisés dont notamment la pose de fenêtres PVC ainsi que des barreaudages dont les modèles ne sont pas adaptés, une parabole est à enlever, pour ce qui est de la partie visible (il rappelle que les intérieurs sont également à examiner en SPR).
- Que les persiennes ont été déposées et seront à remettre une fois resta urées ou neuves (à l'identique : persiennes à la Française avec lames affleurantes).
Monsieur [M] confirme que ces travaux avaient été envisagés avec Mr [X] précédent propriétaire ainsi qu'il résultait d'un devis produit en 2016 (environ 50 000 € et qui ne devait concerner que la partie maçonnerie - pierre de taille).
Compte tenu de ces éléments, constituant une charge non connue de mon client à la signature du compromis de vente, et qui remettent en cause l'économie générale de son projet, celui-ci souhaite résilier purement et simplement le compromis de vente signé le 13 janvier 2021".
La vente n'a pas été poursuivie par les potentiels acquéreurs, avec l'accord du vendeur (courriel de l'étude de Maître [R] [L] en date du 10 juin 2021).
[D] [V] demande à être indemnisé de la perte de chance de pouvoir réinvestir la plus-value qu'aurait dégagée cette vente.
Un tel préjudice, hypothétique, n'est pas certain.
[D] [V] n'est pour ces motifs pas fondé en sa demande présentée de chef.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
b - sur le préjudice moral
Les manquements de ses cocontractants ont été à l'origine par [D] [V] d'un préjudice moral qui sera indemnisé pour un montant de 3.000 €.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
3 - sur l'utilisation de photographies du bien
Une annonce en vue de la vente du bien litigieux avait été publiée sur le site 'leboncoin.fr'. Le bien y a été décrit comme comportant 5 pièces dont 4 chambres, et être d'une superficie de 134 m².
[D] [V] a produit une annoncé publiée le 6 juin 2019 sur site 'le bonconcoin.fr'. Cette annonce, qui a trait à la location d'un logement de 4 pièces en colocation situé en 'hyper centre proche facs', 'sur le plateau, a deux pas des facs et commerce', de '3 chambres à louées' et de 99 m². Elle comporte la photographie d'une salle d'eau du bien.
Les époux [C] [X] et [J] [I] contestent être les auteurs de cette annonce.
Celle-ci ne comporte aucune indication sur l'identité de son auteur. Le profil de l'auteur de l'annonce, sous forme de lien hypertexte, n'a pas été exploité. Les caractéristiques du bien (superficie, nombre de chambre) ne correspondent pas.
Un examen attentif de la photographie de la salle d'eau annexée à cette annonce établit qu'elle diffère de celle produite par [D] [V]. Les motifs du dallage au sol de la douche diffèrent. Un meuble figure en coin de la photographie de l'annonce, mais non sur celle versée par [D] [V].
Aucun élément des débats ne permet de retenir que la photographie annexée à une annonce publiée sur le même site internet le 20 mai 2021, relative à un bien qui n'est pas celui litigieux, est celle de ce bien. Il est dès lors indifférent que le numéro de téléphone du contact mentionné sur cette annonce soit celui de [C] [X].
Le jugement sera pour ces motifs infirmé en ce qu'il a fait défense d'utiliser la photographie du bien, dès lors que l'atteinte au droit de propriété de [D] [V] n'a pas été caractérisée.
B - SUR LES DEMANDES FORMEES A L'ENCONTRE DES NOTAIRES
L'article 1240 du code civil dispose que : 'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
[D] [V] demande la condamnation solidaire des notaires aux motifs qu'ils auraient commis une faute en ne recherchant qu'elles étaient les obligations imposées en raison du plan de sauvegarde et de mise en valeur adopté par la ville de [Localité 15] et en procédant pas aux vérifications complémentaires nécessaires.
Les vendeurs sollicitent quant à eux la garantie des notaires.
L'acte de vente du bien aux époux [C] [X] et [J] [I] n'a pas fait mention de l'obligation litigieuse.
Le certificat d'urbanisme annexé à l'acte de vente du bien à [D] [V] ne fait pas mention de cette obligation.
Aucun élément des débats ne permet de considérer que les notaires disposaient d'élements d'information leur permettant de penser que le certificat délivré par l'autorité administrative en vue de la vente, qui rappelait que l'immeuble était soumis aux obligations du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la ville, était erroné et comportait une omission s'agissant de l'obligation de ravalement.
Il ne se déduit pas du seul fait que le notaire ayant assisté le vendeur exerçait à [Localité 15] qu'il avait nécessairement connaissance de l'obligation particulière pesant sur le bien devant être cédé.
Les époux [C] [X] et [J] [I] ne sont pas fondés à solliciter la garantie des notaires dès lors que le préjudice dont ils doivent réparation a pour cause leur dissimulation d'une information déterminante du consentement de l'acquéreur qui, fautive, a rompu le lien de causalité entre le préjudice et la faute imputée.
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à l'encontre des notaires.
C - SUR LES DÉPENS
La charge des dépens d'appel incombe aux époux [C] [X] et [J] [I].
D - SUR LES DEMANDES PRESENTEES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Le premier juge a équitablement apprécié :
- l'indemnité due sur ce fondement par les époux [C] [X] et [J] [I] ;
- n'y avoir lieu de faire application de ces disposition au profit des notaires.
Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de [D] [V] d'une part, de Maîtres [R] [L] et [F] [B] d'autre part de laisser à leur charge les sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit aux demandes formée de ce chef par [D] [V] à l'encontre de ses vendeurs d'une part, des notaires à l'encontre de ce dernier d'autre part, pour les montants ci-après précisés.
PAR CES MOTIFS
statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement du 12 décembre 2023 du tribunal judiciaire de Poitiers sauf en ce qu'il :
'CONDAMNE in solidum M. [C] [X] et Mme [J] [I] à payer à M. [D] [V] la somme de 135.000,00 euros au titre de la perte de chance de contracter à des conditions plus favorables ;
REJETTE le surplus de la demande indemnitaire de M. [D] [V] contre M. [C][X] et Mme [J] [I] ;
FAIT INTERDICTION à M. [C] [X] et Mme [J] [I] d'utiliser, dans un but commercial ou à des fins de mise en location ou plus généralement de gestion immobilière, les photographies des biens de M. [D] [V], notamment le bien situé [Adresse 5] vendu par acte du 21 juillet 2017, sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée et par jour dans la limite de 180 jours sans s'en réserver la liquidation' ;
et statuant à nouveau de ces chefs d'infirmation,
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] à payer à titre de dommages et intérêts à [D] [V] les sommes de :
- 165.085,50 € correspondant au coût des travaux de ravalement, avec indexation sur l'indice BT 01 publié par l'Insee à compter du 18 janvier 2022 (valeur au mois de janvier 2022 : 121,04), arrêtée à celui publié au 21 octobre 2025, date du présent arrêt, puis avec intérêts de retard au taux légal à compter de cette dernière date ;
- 20.940 € correspondant aux frais de maîtrise d'oeuvre, avec intérêts de retard au taux légal à compter de la date du jugement ;
- 3.000 € en réparation du préjudice moral ;
REJETTE la demande de [D] [V] d'interdire aux époux [C] [X] et [J] [I] d'utiliser des photographies du bien vendu ;
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] aux dépens d'appel ;
CONDAMNE in solidum les époux [C] [X] et [J] [I] à payer en cause d'appel à [D] [V] la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [D] [V] à payer en cause d'appel à Maîtres [R] [L] et [F] [B] pris ensemble la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.