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CA Aix-en-Provence, 10 mars 2022, n° 19/09153

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

SAS IGOL PICARDIE ILE DE FRANCE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gérard

Conseiller :

Mme Cesaro Pautrot

Avocat :

Me Tollinchi

Avocat :

Me Belfiore

Conseiller :

Mme Petel

CA Aix-en-Provence n° 19/09153

9 mars 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon acte sous signatures privées du 27 mars 2014, un contrat de partenariat commercial a été conclu entre la SAS Igol Picardie Île de France et la SARL MAB Échappement, dont M. Y Z est l'associé unique et le gérant, aux termes duquel la SARL MAB Échappement s'engageait à acquérir un minimum de 3 000 litres de lubrifiants par an pendant cinq ans, en contrepartie d'un prêt consenti par la SAS Igol Picardie Île de France d'un montant de 40 000 euros.

Par acte sous signatures privées du même jour, Mme X B épouse de M. Y Z s'est portée caution solidaire des engagements de la SARL MAB Échappement au titre de ce contrat, dans la limite de la somme de 53 982,40 euros et une durée de soixante mois.

Selon acte sous signatures privées du 26 mai 2015, la SAS Igol Picardie Île de France et la SARL MAB Échappement ont conclu un nouvel accord commercial prévoyant en contrepartie d'un prêt de 100 000 euros, un approvisionnement minimum de 8 500 litres de lubrifiants par an pendant cinq ans.

Selon acte sous signatures privées du même jour, Mme X B s'est portée caution solidaire des engagements de la SARL Midas Échappement pour un montant de 124 816,50 euros.

La SARL MAB Échappement a cédé son fonds de commerce à la SARL SAVP Automobile par acte de Me Philippe Lhomme, notaire à Béthune du 28 avril 2017 et la SAS Igol Picardie Île de France a formé opposition sur le prix de vente mais la créance n'a pas été réglée intégralement.

La SAS Igol Picardie Île de France a mis la caution en demeure de régler le solde de sa créance par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 novembre 2017.

La SARL MAB Échappement a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Arras du 21 mars 2018 et la SAS Igol Picardie Île de France a déclaré sa créance laquelle a été admise, à titre chirographaire, à hauteur de la somme de 39 855,42 euros, par ordonnance du 30 octobre 2019.

La SAS Igol Picardie Île de France a fait assigner Mme X B devant le tribunal judiciaire de A lequel a, par jugement du 14 mai 2019 :

- débouté Mme X B de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Mme X B en sa qualité de caution personnelle et solidaire à payer à la SAS Igol Picardie Île de France la somme de 39 855,42 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2017,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné Mme X B à payer à la SAS Igol Picardie Île de France la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme X B a interjeté appel par déclaration du 6 septembre 2019.

Par conclusions du 12 février 2020, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme X B demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de A le 14 mai 2019,

- constater ou prononcer la nullité de 1'acte de caution souscrit par Mme X Z le 26 mai 2015,

- constater l'opposabilité de l'engagement de caution de Mme X Z,

- en toute hypothèse, débouter la société Igol Picardie Île de France de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

- débouter la société Igol Picardie Île de France de ses demandes de pénalités et intérêts de retard,

- condamner la société Igol Picardie Île de France à payer à Mme X Z la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Igol Picardie Île de France aux entiers frais et dépens de la procédure, ceux l'appel distraits au profit de la SCP Tollinchi Perret Vigneron avocat aux offres de droit.

Par conclusions du 31 juillet 2020, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SAS Igol Picardie Île de France demande à la cour de :

- dire et juger que l'acte de caution irrévocable conclu entre Madame X B épouse Z et la société Igol Picardie Île de France est parfaitement régulier.

- dire et juger que Mme X B épouse Z avait pleinement conscience de la portée de son engagement,

- dire et juger que Mme X B épouse Z a reconnu extrajudiciairement cette conscience pleine et entière de la portée de son engagement ainsi que la dette qui en découlait,

- dire et juger qu'il n'existait aucune disproportion entre l'engagement souscrit et l'état du patrimoine de Mme X B épouse Z au moment de la conclusion du contrat de caution, ni au moment de l'appel en garantie, alors que les critères sont alternatifs,

- dire et juger que les sommes réclamées portent sur le principal et l'indemnité de résiliation du contrat, laquelle est due,

- dire et juger que la société Igol Picardie Île de France a parfaitement respecté les dispositions légales lui permettant de bénéficier des indemnités de retard, en conséquence,

- débouter Mme X B épouse Z de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal grande instance de Grasse le 14.05.2019, et y ajoutant,

- condamner Mme X B épouse Z à verser à la société Igol Picardie Île de France la somme de 473,11 € au titre de la partie de l'indemnité de résiliation non comprise dans le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse le 14.05.2019.

- condamner Mme X B épouse Z aux indemnités de retard légales et contractuelles, commençant à courir à compter de la mise en demeure du 07.11.2017.

- condamner Mme X B épouse Z, au paiement de la somme de 2.500,00€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS

1. Mme X B soulève la nullité de l'engagement de caution du 26 mai 2015 qui mentionne en qualité de débiteur principal « la SARL MIDAS Échappement » et non la SARL MAB Échappement, soutient que la mention du débiteur constituant une condition essentielle de l'engagement de caution, il doit être précisément désigné et qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une simple erreur matérielle.

2. La SAS IGOL Picardie île de France soutient au contraire que la jurisprudence considère que l'acte est régulier dès lors que le cautionné est pleinement identifiable, que la SARL MAB exerçait son activité sous l'enseigne C, ce que ne pouvait ignorer l'épouse du gérant, que si elle a écrit C au lieu de MAB, il ne s'agit que d'une interversion entre le nom de la société et le nom de l'enseigne sous lequel cette dernière exerce, qu'il n'y a aucune erreur sur la portée du cautionnement, l'identité du débiteur principal ne faisant aucun doute en l'espèce, que l'acte de cautionnement fait référence en première page à la SARL MAB Échappement dont l'identité complète est mentionnée et que la caution est de parfaite mauvaise foi.

3. L'article L. 331-1 du code de la consommation dispose que toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle ci : « En me portant caution de X'', dans la limite de la somme de ''. couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des intérêts de retard et pour la durée de ''.., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X ''' n'y satisfait pas lui même. »

4. L'inobservation de ces dispositions d'ordre public est sanctionnée par la nullité du cautionnement.

La désignation exacte du débiteur cautionné constitue un élément essentiel du cautionnement et la mention manuscrite prescrite doit permettre de l'identifier par son nom ou sa dénomination sociale, sans qu'il soit besoin de se référer à des éléments extérieurs, fussent ils les clauses pré imprimées de l'acte de cautionnement, et l'enseigne ne constitue pas un élément d'identification d'une personne morale.

5. En l'espèce, Mme X B a recopié le texte qui lui était proposé par la SAS Igol Picardie Île de France, créancier professionnel, mentionnant en qualité de débiteur principal « la SARL Midas Échappement », ce qui exclut toute mauvaise foi ou fraude de sa part. Cette dénomination ne correspond pas à l'identité de la débitrice principale et le cautionnement encourt la nullité pour non respect des dispositions de l'article L331-1 du code de la consommation.

6. Le jugement est infirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de A du 14 mai 2019,

Statuant à nouveau,

Annule le cautionnement souscrit par Mme X B le 26 mai 2015,

Déboute la SAS Igol Picardie Île de France de toutes ses demandes,

Condamne la SAS Igol Picardie Île de France aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SAS Igol Picardie Île de France à payer à Mme X B la somme de deux mille euros,

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