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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 22 octobre 2025, n° 23/01417

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Danone (SA), Danone Nutricia Africa & Overseas (SAS), Danone Djurjura Algerie (Sté)

Défendeur :

Lotus Distribution (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Vice-président :

M. Gouarin

Conseiller :

M. Richaud

Avocats :

Me Herman, Me Boccon Gibod, Me Samama -Samuel

T. com. Lyon, du 22 nov. 2022, n° 2020J0…

22 novembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

La SA Danone est la société mère du groupe Danone qui détient directement ou indirectement des participations dans plusieurs sociétés du secteur agroalimentaire actives dans le monde et qui comprend notamment :

- la SAS Blédina qui commercialise des produits d'alimentation infantile sous la marque Blédina ;

- la SAS Danone Nutricia Africa & Overseas (anciennement Danone Baby Nutrition Africa & Overseas, ci-après, « la SAS DNAO ») qui exporte et commercialise des produits d'alimentation infantile du groupe Danone en Afrique. En vertu d'un apport partiel d'actifs du 1er mars 2010, les activités de la SAS Bledina en Afrique lui ont été transférées ;

- la société de droit algérien Danone Djurdjura Algérie (ci-après, « la société DDA ») qui intervient dans le secteur de la fabrication et la commercialisation de produits laitiers en Algérie, ainsi que dans la distribution, à titre non exclusif, des produits d'alimentation infantile du groupe Danone sur le territoire algérien.

La société de droit algérien Lotus Distribution a pour activité principale l'importation et la distribution de produits couverts par des marques internationales de grande consommation alimentaires et non-alimentaires.

Elle a distribué de 1996 à 2019 les produits de marque Bledina sur le territoire algérien, la SAS DNAO s'étant substituée à la SAS Bledina le 1er mars 2010. Dans ce cadre, les parties ont conclu le 10 février 2010 et le 1er avril 2010, pour une durée d'un an, deux contrats organisant leurs relations.

En 2012, la SA Danone, qui désirait accroître la couverture du territoire algérien, et la société Lotus Distribution ont envisagé de créer une société commune contrôlée par la première ayant vocation à importer et distribuer les produits d'alimentation infantile de marque Blédina. En dépit de la conclusion les 10 juillet 2012 et 27 septembre 2013 de trois protocoles d'accords organisant les modalités de création de cette société, définissant les conditions d'exercice de son activité et réglant les conséquences de la rupture des relations commerciales entre la société Lotus Distribution et la SA Danone, ce projet n'aboutissait pas.

Courant 2017, la SAS DNAO a confié l'importation et la distribution de produits d'alimentation de marque Blédina à la société DDA.

Par courrier de son conseil du 18 septembre 2017, la société Lotus Distribution dénonçait un refus d'approvisionnement ainsi qu'une atteinte à son droit exclusif d'importer et de distribuer ces produits en Algérie et des actes de concurrence déloyale, griefs intégralement contestés par la SAS DNAO le 2 octobre 2017. Cette dernière proposait alors la conclusion d'un accord de coexistence entre les sociétés DDA et Lotus Distribution auquel cette dernière s'est opposée par courrier du 4 décembre 2017 en excipant de sa qualité de distributeur exclusif et du déséquilibre de son économie générale.

Déplorant une situation de surstock de produits d'alimentation infantile Blédina qu'elle imputait à la captation progressive de ses parts de marché par la société DDA, la société Lotus Distribution a sollicité en juillet et septembre 2019 un report des livraisons de commandes effectuées en mai 2019 qui lui a été refusé le 1er août et le 21 octobre 2019 au motif qu'il risquait de compromettre irrémédiablement l'importation et la commercialisation en Algérie des produits, qui étaient pour partie nouveaux et objets d'investissements promotionnels exceptionnels, et de favoriser une pénurie de produits infantiles sur le marché algérien. Les partenaires maintenant leurs positions antagonistes, la SAS DNAO a informé la société Lotus Distribution qu'elle procédait à un ré-étiquetage des produits concernés pour les faire importer et commercialiser par la société DDA. La réglementation algérienne conditionnant une telle modification à l'autorisation de l'importateur initial, le refus opposé par la société Lotus Distribution les 2 et 18 décembre 2019 a entrainé le retour des marchandises en France.

Par courrier du 24 janvier 2020, la SAS DNAO imputait à la société Lotus Distribution qui avait cessé toute commande depuis les commandes d'avril et mai 2019 une rupture brutale de leurs relations commerciales établies et l'autorisait à écouler ses stocks conformément à ses conditions générales de ventes (ci-après, « les CGV »). En retour, la société Lotus Distribution dénonçait le 6 février 2020 une atteinte à son exclusivité ainsi que des actes de concurrence déloyale.

Le conflit s'aggravait durant l'été 2020, la SAS DNAO reprochant à la société Lotus Distribution d'écouler des produits non conformes (dépassement de la date limite d'utilisation optimale) et de se livrer à des pratiques illicites (distribution gratuite et promotion des substituts de lait maternel).

C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier du 30 décembre 2019, la société Lotus Distribution a assigné la SA Danone, la SAS Blédina, la SAS DNAO et la société DDA devant le tribunal de commerce de Lyon en indemnisation des préjudices causés par la violation de son exclusivité et leurs actes de concurrence déloyale et, subsidiairement, par la rupture brutale par la SAS DNAO de leurs relations commerciales établies.

Par jugement du 22 novembre 2022, le tribunal de commerce de Lyon a, avec exécution provisoire en toutes ses dispositions :

- mis hors de cause la SAS Bledina à la demande des parties ;

- mis en cause la SA Danone à raison de son immixtion dans les relations commerciales entre ses deux filiales DNAO et DDA et la société Lotus Distribution ;

- jugé que la société Lotus Distribution était le distributeur non-exclusif de la SAS DNAO pour les produits d'alimentation infantile en Algérie ;

- jugé que le protocole d'accord signé entre la SA Danone et la société Lotus Distribution était dépourvu d'effet juridique et était inopposable aux parties dès lors que la société commune n'avait pas été constituée ;

- jugé que la rupture brutale des relations commerciales était imputable aux sociétés Danone, DNAO et DDA ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 8 899 320,90 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales ;

- rejeté la demande d'expertise présentée par la société Lotus Distribution ;

- rejeté les autres demandes des parties ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 28 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA aux dépens de l'instance.

Par déclaration reçue au greffe le 5 janvier 2023, la SA Danone, la SAS DNAO et la société DDA ont interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 10 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a ordonné à la société DDA de produire et de communiquer tout document, le cas échéant certifié par un professionnel du chiffre, justifiant, pour la période du 1er mai 2017 au 31 juillet 2019, de l'identité des acteurs auprès desquels elle distribue directement les « produits contractuels » ainsi que des prix d'achat de ces produits auprès de la SAS DNAO et des prix qu'elle pratique à l'égard de ses distributeurs directs mais a rejeté la demande de la société Lotus Distribution au titre du volume des « produits contractuels » et de la balance générale (compte 700 et suivants) de la société DDA.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 11 mars 2025 par la voie électronique, les sociétés Danone, DNAO et DDA demandent à la cour, au visa des articles 32 et 122 du code de procédure civile, L 442-1 II du code de commerce et 1231-1 et 1240 du code civil :

- de réformer le jugement du 22 novembre 2022 en ce qu'il a :

o jugé que la rupture brutale des relations commerciales était imputable aux sociétés Danone, DNAO et DDA ;

o condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer la société Lotus Distribution la somme de 8 899 320,90 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales ;

o condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 28 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- statuant à nouveau, à titre de fin de non-recevoir, de juger que la SA Danone n'a aucun lien avec les faits reprochés, et, en conséquence, de prononcer l'irrecevabilité des demandes présentées contre la SA Danone et sa mise hors de cause ;

- à titre principal, de :

o juger qu'aucune rupture brutale (même partielle) des relations commerciales établies avec la société Lotus Distribution n'est démontrée et ne peut être reprochée à la SAS DNAO ;

o juger que les actes de concurrence déloyale reprochés aux sociétés Danone, DNAO et DDA par la société Lotus Distribution ne sont pas démontrés ;

o en conséquence, débouter la société Lotus Distribution de ses demandes ;

o juger que la société Lotus Distribution a manqué à ses obligations contractuelles en annulant des commandes confirmées d'un montant total de 14 540 460,62 euros ;

o en conséquence, juger que la SAS DNAO doit être indemnisée à ce titre, et condamner la société Lotus Distribution à lui verser la somme de 448 684,89 euros à titre de dommages et intérêts ;

o juger que la société Lotus Distribution s'est rendue coupable d'une commercialisation de produits non conformes à la réglementation applicable en Algérie du fait d'une gestion défectueuse de ses stocks résiduels ;

o en conséquence, juger que la SAS DNAO doit être indemnisée à ce titre et condamner la société Lotus Distribution à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

o juger que la société Lotus Distribution a brutalement rompu les relations commerciales établies qui l'unissaient à la SAS DNAO depuis 1996 sans préavis ni délai de prévenance écrit ;

o en conséquence, juger que la SAS DNAO doit être indemnisée à ce titre, et condamner la société Lotus Distribution à lui verser la somme de 3 805 741,10 euros, à titre de dommages et intérêts.

- à titre subsidiaire, de :

o juger que la société Lotus Distribution n'est pas en état de dépendance économique vis-à-vis de la SAS DNAO ;

o en conséquence, juger que la société Lotus Distribution n'aurait pu bénéficier que d'un préavis maximum de six mois au titre de la rupture de la relation commerciale ;

o juger que les prétentions indemnitaires de la société Lotus Distribution sont mal fondées et, en conséquence, débouter la société Lotus Distribution de l'ensemble de ses prétentions indemnitaires ;

- à titre plus subsidiaire :

o de juger que les prétentions indemnitaires de la société Lotus Distribution doivent tenir compte de la marge sur les produits qu'elle a effectivement perçue pendant le préavis qui aurait dû lui être accordé ;

o en conséquence, de juger que la SAS DNAO ne peut être tenue d'indemniser la société Lotus Distribution à hauteur de 22 360 224 euros ou de 17 798 642,30 euros ;

o de juger que les prétentions indemnitaires de la société Lotus Distribution doivent être évaluées et libellées en dinars algériens, et, en conséquence, d'ordonner à la société Lotus Distribution d'évaluer et de libeller ses prétentions indemnitaires en dinars algériens ;

- en toute hypothèse, de condamner la société Lotus Distribution à verser aux sociétés Danone, DNAO et DDA la somme de 70 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 11 mars 2025, la société Lotus Distribution demande à la cour, au visa des articles L 442-6 I-5 ancien et L 442-1 du code de commerce et 1240, 1103, 1104, 1217 du code civil :

- de déclarer la société Lotus Distribution recevable et bien fondé en son appel incident ;

- en conséquence, d'infirmer le jugement du 22 novembre 2022 en ce qu'il :

o a jugé que la société Lotus Distribution est le distributeur non exclusif de la SAS DNAO pour les produits d'alimentation infantile en Algérie ;

o n'a pas fait droit à la totalité de la demande indemnitaire de la société Lotus Distribution au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies en retenant une durée de préavis de seulement dix-huit mois ;

o a rejeté la demande de la société Lotus Distribution de désignation d'un expert afin de déterminer le préjudice à parfaire ;

o a rejeté la demande subsidiaire de la société Lotus Distribution de condamnation solidaire des sociétés Danone, DNAO et DDA à lui payer la somme de 7 108 935 euros sauf à parfaire ;

o a débouté la société Lotus Distribution de sa demande de condamnation solidaire des sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 7 447 942,47 euros au titre de la dépréciation des stocks de produits contractuels détenus par la société Lotus Distribution, et de la destruction des stocks pour cause de péremption en 2020 ;

- statuant à nouveau, sur la rupture brutale des relations commerciales, de :

o condamner in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à verser à la société Lotus Distribution, au titre de la réparation du préjudice lié à la rupture brutale des relations commerciales établies, la somme de 22 360 224 euros calculée sur la base d'un préavis raisonnable, compte tenu des circonstances, de 36 mois ;

o à titre subsidiaire, condamner in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à verser à la société Lotus Distribution, au titre de la réparation du préjudice lié à la rupture brutale des relations commerciales établies, la somme de 17 798 642,30 euros calculée sur la base d'un préavis raisonnable, compte tenu des circonstances, de 36 mois ;

- sur les autres manquements, de :

o juger que les sociétés Danone, DNAO et DDA ont commis des man'uvres déloyales et des manquements à leurs engagements d'exclusivité et de confidentialité à l'égard de la société Lotus Distribution en vue d'entraîner une captation de la clientèle de cette dernière ;

o désigner un expert afin de déterminer le préjudice subi par la société Lotus Distribution du fait de ces manquements, et comprenant le manque à gagner ainsi que la valeur de la clientèle captée par les sociétés du groupe Danone sans bourse délier ;

o subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour n'accéderait pas à cette demande d'expertise, condamner in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution un montant de 29 820 747,9 euros ;

o en tout état de cause, condamner in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à verser à la société Lotus Distribution la somme de 7 665 785,7 euros au titre de la dépréciation des stocks de produits contractuels détenus par la société Lotus Distribution et de la destruction des stocks pour cause de péremption en 2020 ;

- pour le surplus, de :

o confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions ;

o débouter les sociétés Danone, DNAO et DDA de l'ensemble de leurs demandes ;

o condamner in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 70 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à la décision entreprise ainsi qu'aux conclusions visées pour un exposé détaillé du litige et des moyens des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2025. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, l'arrêt sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.

MOTIVATION

A titre liminaire, la cour constate que, bien que le litige comporte un élément d'extranéité tenant à la nationalité des sociétés Lotus Distribution et DDA, les parties ne débattent ni de la compétence juridictionnelle ni de la loi applicable. Elle relève néanmoins que :

- en l'absence de convention internationale liant la France et l'Algérie sur la matière en litige et d'applicabilité du Règlement 1215/2012 du 12 décembre 2012 (dit Bruxelles I bis) conformément à son article 6§1 à raison de la domiciliation des sociétés Lotus Distribution et DDA en Algérie, la compétence des juridictions françaises est justifiée par l'extension dans l'ordre international des règles de compétences internes et en particulier des articles 42 et 43 du code de procédure civile, les sociétés Danone et DNAO ayant leurs sièges sociaux en France ;

- la loi applicable aux prétentions fondées sur des obligations contractuelles est la loi française conformément à l'article 3 du règlement 593/2008 du 17 juin 2008 (dit Rome I) qui a un caractère universel conformément à son article 2, cette loi étant désignée pour ces questions dans les contrats des 10 février et 1er avril 2010 ainsi que dans les CGV de la SAS DNAO ;

- la loi applicable aux prétentions fondées sur des obligations délictuelles (concurrence déloyale et rupture brutale) est la loi française conformément à l'article 14 du règlement 864/2007 du 11 juillet 2007 (dit Rome II) qui a un caractère universel conformément à son article 3, cette loi étant désignée pour ces questions dans les contrats des 10 février et 1er avril 2010 et dans les CGV de la SAS DNAO.

1°) Sur la recevabilité des demandes à l'égard de la SA Danone

Moyens des parties

La SA Danone conteste toute immixtion dans la relation commerciale nouée entre la SAS DNAO et la société Lotus Distribution et oppose le principe d'autonomie des personnes morales. Elle précise que l'appartenance à un groupe de sociétés implique nécessairement des relations croisées entre ses membres, un contrôle d'ensemble, une unité de décision et une stratégie commune impulsée par la société mère qui ne caractérisent pas pour autant une gestion de fait ou une immixtion de la part de la société mère dans la gestion de ses filiales, l'immixtion supposant que la société mère intervienne sans titre dans la gestion de sa filiale au-delà des nécessités de l'animation du groupe en créant une apparence trompeuse propre à autoriser l'autre partie à croire légitimement qu'elle était également son cocontractant. Elle ajoute que, à supposer l'immixtion prouvée, la société mère ne peut être tenue responsable des fautes commises par sa filiale que durant la période de son ingérence. Elle en déduit que sa seule participation à l'élaboration en juillet 2012 et septembre 2013 de protocoles d'accords portant sur la création d'une filiale commune ne peut caractériser son immixtion dans la relation commerciale entretenue avec la SAS DNAO, ces circonstances étant en outre insusceptibles de créer une apparence trompeuse puisqu'elle a systématiquement agi en son nom propre, qu'elle n'était pas partie à l'accord organisant la fin du partenariat entre la société Lotus Distribution et la SAS DNAO, et que les relations, encadrées par les seules CGV de la SAS DNAO, se sont poursuivies malgré l'abandon du projet. Elle ajoute enfin que les faits fautifs retenus par le tribunal sont postérieurs à l'ingérence qu'il constatait.

La société Lotus Distribution répond à cette fin de non-recevoir dans ses développements au fond. Elle précise dans ce cadre que les filiales de la SA Danone n'ont aucune autonomie de décision, les comptes étant consolidés et les dividendes reversés à la société mère qui était son seul interlocuteur. Elle ajoute que le projet de joint-venture a été porté par cette dernière qui a orchestré tant la captation de ses parts de marché algérien par ses filiales que la rupture des relations commerciales.

Réponse de la cour

Conformément aux articles 12 et 16 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et doit donner ou restituer dans le respect du principe de la contradiction leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En vertu des articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée, cette liste n'étant pas limitative. Et, au sens de l'article 71 du même code, constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire.

La « mise hors de cause » sollicitée par la SA Danone ne renvoie en soi à aucun moyen de défense de qualification univoque en ce qu'elle vise un résultat à atteindre sans révéler la nature des moyens qui la sous-tendent et qui peuvent toucher au droit d'agir, et caractériser une fin de non-recevoir, ou aux conditions de succès des prétentions, et être alors qualifiés de moyen de défense au fond. La détermination de sa nature dépend ainsi de celles des arguments développés à son soutien.

La SA Danone excipe de son absence d'immixtion dans la relation commerciale et dans les rapports contractuels noués entre la société Lotus Distribution et la SAS DNAO. Elle oppose ainsi à l'action de la société Lotus Distribution, non une impossibilité juridique de l'attraire tirée en particulier de son défaut de qualité ou d'intérêt, mais son absence d'implication matérielle dans la commission des actes fautifs allégués. Elle conteste ce faisant non le droit d'agir et la recevabilité de l'action mais la réunion de ses conditions de succès au fond, soit le bien-fondé des prétentions adverses au sens de l'article 71 du code de procédure civile.

Improprement qualifié de fin de non-recevoir, ce moyen de défense sera examiné avec les prétentions de la société Lotus Distribution, cette requalification ne justifiant aucune réouverture des débats puisqu'elle ne modifie pas les termes du débat.

2°) Sur la responsabilité contractuelle

Moyens des parties

Au soutien de leurs prétentions, les sociétés Danone, DNAO et DDA exposent que la société Lotus Distribution n'était pas le distributeur exclusif des produits d'alimentation infantile Blédina en Algérie, la relation n'ayant été encadrée par aucun contrat écrit à l'exception d'une lettre accord du 10 février 2010 et d'un contrat de distribution conclu le 1er avril 2010 pour une durée d'un an non renouvelable n'y faisant aucune référence et restreignant au contraire les marchandises qu'elle était autorisée à commercialiser sur ce territoire. Elles ajoutent que l'exclusivité envisagée dans les protocoles d'accord de 2012 et 2013 au bénéfice de la filiale commune à créer est sans portée sur les droits de la société Lotus Distribution, distincte de cette dernière qui n'a finalement pas été constituée, l'accord de rupture des relations commerciales stipulant d'ailleurs explicitement que la distribution qu'elle assurait n'était pas exclusive. Soulignant que l'exclusivité ne se présume pas et ne peut découler de la seule absence d'autres distributeurs, elles précisent que les certificats de 2015 et 2016, qui résumaient un état de fait, ont été fournis par la SAS DNAO à la société Lotus Distribution dans le cadre très spécifique d'un marché à passer avec des entités publiques algériennes, afin de garantir la traçabilité de trois références de produits par la désignation d'une seule source d'importation et de distribution en Algérie.

Reconventionnellement, elles soutiennent que la société Lotus Distribution a, en annulant ses commandes durant l'été 2019, violé les CGV de la SAS DNAO qui régissaient la relation depuis le 1er avril 2011 et stipulaient que toute commande de produits acceptée était irrévocable (article 2), cette faute causant à cette dernière un préjudice résidant dans les dépenses engagées pour réétiqueter puis détruire les produits concernés. Elles ajoutent qu'elle a également commis une faute en vendant, en dépit des instructions de la SAS DNAO qu'elle était tenue d'appliquer conformément à l'article 4 de ses CGV, des produits non conformes (DLUO dépassée) et en procédant à l'offre gratuite et à la promotion de substituts du lait maternel en infraction avec les règles [Localité 8] et la loi algérienne n°18-11

En réponse, la société Lotus Distribution expose qu'elle bénéficiait d'une exclusivité tacite de distribution qu'elle déduit :

- du caractère mono marque de son activité qui révèle l'importance de son implication dans la distribution des produits litigieux, « l'accord de vente de Blédina de 2008 » comportant à cet égard toutes les stipulations d'un contrat de distribution exclusive (désignation d'un distributeur économique, concession d'un territoire pour une durée déterminée, liste de produits de marque Blédina, obligation de non-concurrence, obligation d'achat sans reprise de stock, investissements pour préserver l'image de la marque). Elle précise que, dans la phrase « BLEDINA s'engage à vendre à LOTUS DISTRIBUTION uniquement la liste des Produits joint en Annexe 1 », l'adverbe restrictif « uniquement » se rapporte nécessairement au terme qui le précède et non à celui qui le suit. Elle ajoute que l'accord du 1er avril 2010, qui a été tacitement reconduit conformément à l'article 1215 du code civil, confirme les obligations et droits antérieurs des parties ;

- de leurs pratiques consensuelles et constantes jusqu'en 2017, y compris après le rachat partiel en 2001 puis total en 2006 de la société DDA. Elle ajoute que les certificats délivrés en 2015 et 2016 confirment l'exclusivité dont elle bénéficiait et que sa collaboration avec la SAS DNAO manifeste leur commune intention de lui accorder une exclusivité (engagements à long terme, objectifs de vente ambitieux reconduits en 2011, communication d'informations relatives au réseau de distribution qu'elle avait constitué, hébergement administratif de l'équipe de pré-vendeurs Danone, gratifications symboliques par l'attribution de prix). Elle explique que le projet de rapprochement de 2012 reposait sur l'octroi à la société à créer d'une exclusivité qui n'était que la poursuite de la sienne. Elle soutient que la négation de cette dernière dans le préambule du protocole du 27 septembre 2013 finalement abandonné n'a aucune portée juridique.

Elle conclut au rejet des demandes reconventionnelles des sociétés Danone, DNAO et DDA au motif que sa demande de report des livraisons du 30 juillet 2019 était causée par l'absence de commandes de ses clients qui étaient déjà déloyalement approvisionnés par la société DDA et que le refus opposé par la SAS DNAO était infondé. Elle ajoute que leur préjudice, illégitime en ce qu'il s'enracine dans sa volonté de se conformer à la législation algérienne, n'est prouvé ni en son principe ni en sa mesure. Elle conteste enfin toute vente de produits non conformes ou promotion et distribution gratuite de substituts du lait maternel ainsi que tout préjudice d'image en résultant.

Réponse de la cour

Pour prouver l'exclusivité qu'elle allègue, la société Lotus Distribution invoque un « accord de vente de Blédina de 2008 » formalisé le 10 février 2010 ainsi qu'un accord confirmatif du 1er avril 2010 tacitement reconduit. Aussi, conformément à l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les dispositions antérieures à cette réforme sont applicables au litige.

En application de l'article 1134 du code civil (devenu 1103, 1104 et 1193), les conventions légalement formées, qui tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise, doivent être exécutées de bonne foi.

En outre, en vertu des dispositions des articles 1147, 1149 et 1150 du code civil (devenus 1231-1 à 3), le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part, les dommages et intérêts dus au créancier étant, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé et le débiteur n'étant tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée.

- Sur le cadre juridique des relations entre les parties

Au sens des dispositions des articles 1156 et suivants (devenus 1188 et suivants) du code civil, qui constituent non des normes juridiques s'imposant à elle, mais un guide d'interprétation des conventions à l'usage des parties et du juge, la cour interprète les stipulations manquant de clarté en recherchant la commune intention des parties contractantes sans s'arrêter au sens littéral des termes et en donnant à celles-ci le sens qui leur permet de produire un effet plutôt que celui qui les annihile, en considération de la matière et de l'économie générale du contrat dont les clauses sont interdépendantes. L'intention des parties au jour de la conclusion peut être éclairée par leur comportement contemporain de la formation du contrat et adopté durant son exécution.

A défaut de stipulation expresse le consacrant, le caractère exclusif d'un droit, qui ne se présume pas, peut être prouvé par tous moyens et se déduire des conditions concrètes d'organisation de leurs relations consensuelles par les parties si elles révèlent sans équivoque leur commune intention de l'instituer.

La société Lotus Distribution tire le caractère exclusif de son droit de distribuer les produits d'alimentation infantile de marque Blédina des stipulations des actes conclus en 2010 ainsi que de leurs modalités concrètes d'exécution.

Sur les éléments intrinsèques

Les relations des parties, débutées en 1995, n'ont été encadrées que par deux contrats écrits. Au premier, conclu le 10 février 2010 avec une date d'effet fixée rétroactivement le 20 octobre 2009 et expirant le 31 mars 2011 (article 2, pièces 9 de l'intimée et 12 des appelantes), s'est substitué celui régularisé le 1er avril 2011 pour la période courant de sa signature au 31 janvier 2011 (article 2, pièce 65 de l'intimée). La société Lotus Distribution fonde son raisonnement sur deux clauses rédigées en termes pour partie identiques.

Aux termes de l'article 3 de la lettre accord du 10 février 2010 qui définit les conditions de distribution par la société Lotus Distribution de produits limitativement énumérés sur le territoire algérien (article 1), « Blédina s'engage à vendre à Lotus Distribution uniquement la liste des Produits joints en Annexe 1 ». Contrairement à ce que soutient cette dernière, ni la rédaction imprécise adoptée ni les règles grammaticales qui l'encadrent, qui impliquent seulement que l'adverbe soit généralement placé après le verbe qu'il complète, ne sont de nature à éclairer l'intention des parties : l'indétermination du sens de cet énoncé autorise littéralement le rattachement du terme « uniquement » tant à la dénomination du distributeur qu'à la liste des produits annoncée. Cependant, la nature de l'acte, le contexte de sa rédaction ainsi que la qualité des parties sont propres à lever cette ambiguïté au sens des articles 1158 et 1162 du code civil et à identifier la signification la plus conforme à l'intention des parties.

Ce contrat a été conclu entre professionnels, par hypothèse particulièrement au fait des usages et des règles applicables à leur activité, qui étaient en relation depuis près de 15 ans au jour de sa rédaction. Aussi, il n'est pas envisageable que les parties aient, dans une convention déterminante de l'organisation de leurs rapports commerciaux dont elle constituait la synthèse, opté pour un terme non juridique de portée incertaine en lieu et place d'un mot existant et adéquat habituellement utilisé en pratique. De fait, les appelantes prouvent que, lorsqu'elles concèdent une exclusivité à un distributeur, elles emploient explicitement ce terme (leur pièce 92) tandis que l'article 2 du contrat du 1er avril 2010, de même objet, ne reproduit pas cet adverbe. Dans un tel contexte d'énonciation, l'appartenance de l'adverbe « uniquement » au registre du langage courant induit son rattachement non à la société Lotus Distribution mais à la liste des produits dont il souligne et renforce le caractère limitatif. Cette stipulation ne caractérise ainsi aucune exclusivité de distribution.

La seconde clause opposée par la société Lotus Distribution définit les contours de l'obligation de non-concurrence à laquelle elle est soumise (articles 8 de l'acte du 10 février 2010 et 9 du contrat du 1er avril 2010 rédigés en termes identiques) et se réfère au « territoire algérien » puis au « territoire concédé » pour interdire l'importation et la distribution de produits concurrents d'une part et la commercialisation en dehors de ses frontières des marchandises de marque Blédina d'autre part. Outre le fait que cette occurrence isolée est en elle-même insuffisante pour établir l'exclusivité revendiquée, les différentes obligations par ailleurs stipulées correspondant à celles prévues dans toute relation entre un fournisseur et un distributeur et n'exprimant pas, même implicitement et dans leur économie générale, une exclusivité quelconque, son inscription dans une clause limitant les droits de la société Lotus Distribution prive de pertinence l'extrapolation à laquelle elle se livre.

Par ailleurs, les relations des parties étaient régies, avant la conclusion de ces actes et parallèlement à leur exécution, par les CGV de la SAS Blédina puis de la SAS DNAO, peu important l'éventuel renouvellement du second contrat malgré l'exclusion qu'il stipule à ce titre puisque ces dernières ne cèdent devant ses conditions particulières qu'en cas de contrariété, hypothèse qui n'est pas en débat (annexe 2 des contrats). Or, les versions successives de ces CGV de 2012, 2014 et 2016 à 2019 (pièces 18 à 23 des appelantes) précisent à l'article « revente des produits » que la SAS DNAO « pourra être amenée à conseiller des prix à ses clients ['] et ne pourra en aucun cas être amenée à expliquer ou à justifier au client le prix de revente pratiqué par un autre de ses clients », formule révélant clairement la possibilité pour la SAS Blédina et la SAS DNAO de confier la distribution de leurs produits à des tiers. Cette faculté ne peut concerner, comme le prétend la société Lotus Distribution, les ventes en dehors du territoire algérien, celles-ci ne l'intéressant pas à raison de l'interdiction posée par les articles 8 et 9 des contrats.

Aussi, les actes conclus entre les parties n'expriment explicitement ou tacitement aucune exclusivité.

Sur les éléments extrinsèques

La société Lotus Distribution infère l'exclusivité qu'elle allègue des modalités d'exécution des contrats ainsi que de sa reconnaissance dans les relations de la SAS DNAO avec les tiers et des échanges ayant présidé à l'élaboration des protocoles de 2012 et 2013. Ses moyens et arguments manquent en fait et en droit pour les raisons suivantes :

- sa qualité de distributeur exclusif en droit ne peut se déduire de sa situation de distributeur unique en fait entre 1995 et 2017. Cette position privilégiée explique tant l'emploi par la SAS DNAO du singulier pour désigner « son » distributeur que la nature des objectifs de vente qui lui étaient assignés, l'échange des informations librement organisé par les parties, l'hébergement administratif d'une équipe de pré-vendeurs Danone et l'attribution de prix gratifiant symboliquement ses bons résultats, éléments qui révèlent l'intensité mais non l'exclusivité de la relation de distribution. Elle n'est pas pour autant en elle-même propre à caractériser cette dernière. De fait, la société Lotus Distribution, qui a profité comme la SAS Bledina puis la SAS DNAO de l'intensification de leur partenariat, ne prouve pas avoir réalisé des investissements excédant ceux attendus d'un distributeur non-exclusif ;

- les protocoles de 2012 et 2013 élaborés dans le cadre du projet de joint-venture n'ont aucune portée normative faute d'avoir été effectivement acceptés mais sont des éléments de fait pertinents pour éclairer l'intention des parties et la perception qu'elles avaient de leurs rapports juridiques. Or, ils encadraient la création d'une société commune, par hypothèse dotée d'une personnalité morale distincte de celle de la société Lotus Distribution, bénéficiant d'une exclusivité mais demeurant soumise au contrôle de la SA Danone (pièces 17 à 25 de l'intimée et 26, 27 et 30 des appelantes), signe que cette dernière n'envisageait pas d'accorder une exclusivité sans maîtrise de la distribution. Et, le projet de protocole du 27 septembre 2013, paraphé et signé par le représentant de la société Lotus Distribution qui reconnaissait ainsi l'exactitude de ses termes à défaut d'en accepter les conséquences juridiques faute de finalisation, précisait en préambule que « Lotus est en Algérie l'importateur et le distributeur à titre non exclusif des produits d'alimentation fabriqués par Danone depuis 1996 sur la base d'une relation contractuelle non écrite » ;

- si les certificats officiels de distribution dressés en 2015 et 2016 par la SAS DNAO pour permettre la passation d'un marché avec les autorités publiques algériennes concernant trois produits indiquent que la société Lotus Distribution « est actuellement [son] seul et exclusif partenaire commercial » (pièces 72 et 75 de l'intimée), ils ne sont pas susceptibles de caractériser la reconnaissance par la SAS DNAO d'une exclusivité de distribution en droit. Outre le caractère ponctuel et leur objet limité, ils ne sont destinés qu'à certifier auprès de tiers une situation de fait, dont l'actualité est d'ailleurs soulignée, et non à déterminer un rapport de droit entre les parties.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu que la société Lotus Distribution ne bénéficiait juridiquement d'aucune exclusivité.

- Sur les manquements

Sans articuler clairement les fondements juridiques qu'elle mobilise, la société Lotus Distribution érige la rupture brutale des relations commerciales établies en manquement contractuel. Or, l'action engagée sur le fondement de l'article L 442-6 I 5° devenu L 442-1 II du code de commerce est, en droit interne de nature délictuelle (en ce sens, Com., 24 octobre 2018, n° 17-25.672, confirmé par Com., 12 mars 2025, n° 23-22.051, qui étend cette solution à l'ordre international hors champ d'application du droit de l'Union). Aussi, ce moyen est inopérant. La cour constate surabondamment que, en l'absence d'engagement de volume et d'exclusivité, la réduction des quantités livrées opérée par la SAS DNAO et la distribution de produits par la société DDA ne constituent pas en soi des fautes contractuelles.

Demeurent en conséquence les demandes reconventionnelles de la SAS DNAO.

A supposer que les demandes de report de commandes présentées par la société Lotus Distribution à l'été 2019 soit fautives au sens de l'article 2 des CGV de la SAS DNAO qui stipule le caractère irrévocable des commandes acceptées, et ce malgré sa situation objective de surstock qui aurait justifié une adaptation des livraisons équivalente à celle effectuée par la SAS DNAO en septembre 2017, cette dernière ne démontre ni le principe ni la mesure de son préjudice, les pièces qu'elle produit ne permettant pas de lier les marchandises concernées aux différents frais fracturés entre avril et juin 2020 (ses pièces 54 à 57 et 87.1 à 87.19).

Par ailleurs, l'unique article de presse produit par les appelantes (leur pièce 74) est très insuffisant pour démontrer la commercialisation par la société Lotus Distribution de produits non conformes ou l'offre gratuite et la promotion de substituts du lait maternel, rien ne permettant de déterminer les sources d'approvisionnement du « commerçant » concerné, l'imputation de ces faits à la société Lotus Distribution ne pouvant découler de la seule absence de preuve de la destruction de ses stocks puisqu'elle était libre de les commercialiser malgré la cessation des relations contractuelles (pièce 75 des appelantes). Et, à nouveau, la SAS DNAO ne fournit pas le moindre élément permettant d'apprécier la réalité et la mesure du préjudice d'image qu'elle évalue forfaitairement.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes reconventionnelles de la SAS DNAO.

3°) Sur les actes de concurrence déloyale

Moyens des parties

Les sociétés Danone, DNAO et DDA expliquent que la société Lotus Distribution ne démontre pas le détournement d'informations confidentielles qu'elle allègue et dont elle ne précise pas la nature. Elles ajoutent que l'entrée sur le marché de la société DDA en 2017 n'a pas entrainé une diminution du chiffre d'affaires de la société Lotus Distribution et que la liste de ses clients confirme qu'ils sont distincts des siens entre 2017 et 2019, les 3 clients communs sur 21 qu'elle évoque, qui ne représentaient que 0,35 % de son chiffre d'affaires, ayant été en relation en 2015 et 2016, soit avant le commencement de ses activités d'importation et de distribution en Algérie des produits d'alimentation infantile Blédina par la société DDA. Soulignant que la pratique de prix inférieurs n'est pas en soi fautive, elles observent que la société Lotus Distribution ne prouve pas cette dernière, les prix communiqués aux grossistes par la société DDA étant, comme les prix distributeurs, identiques ou, pour deux tiers d'entre eux, supérieurs aux siens et ayant été stables, y compris après 2019, et les remises qu'elle oppose n'étant pas prouvées. Elles contestent en outre la valeur probante des attestations communiquées ainsi que leur portée. Elles estiment en outre que le rapport versé au débat par la société Lotus Distribution révèle que l'entrée sur le marché de la société DDA a entrainé une perte de parts de marché de tous les distributeurs sur le marché algérien et que ses conclusions relatives à l'anormalité du taux de croissance de la société DDA, qui s'explique par sa qualité de nouvel entrant, s'appuient sur des données erronées non vérifiables faute d'être produites et sur des comparaisons sans pertinence, le marché chinois étant distinct.

Subsidiairement, elles exposent que la société Lotus Distribution poursuit la réparation d'un préjudice unique sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales et de la concurrence déloyale. Elles ajoutent qu'elle ne prouve ni la diminution de son activité à compter de 2017 ni qu'elle soit en lien avec l'entrée sur le marché de la société DDA, l'évaluation de son préjudice étant de surcroît incompréhensible. Elles précisent par ailleurs que la société Lotus Distribution ne prouve ni la dépréciation de ses stocks, la détermination des « prix suffisamment concurrentiels » ne reposant sur aucune donnée objective, ni le coût impliqué par leur destruction, sa situation de surstock étant en outre exclusivement causée par ses volumes de commandes excessifs et son refus de céder ses stocks à la SAS DNAO.

En réponse, la société Lotus Distribution expose que les sociétés Danone, DNAO et DDA ont détourné sa clientèle résidant dans :

- l'obtention d'informations confidentielles sur son réseau de distribution, dont la communication était justifiée par leur confiance mutuelle et la croissance constante du flux d'affaires ainsi que par leur volonté de consolider leur partenariat, pour introduire la société DDA sur le marché comme nouveau distributeur exclusif ;

- le refus d'honorer sa commande d'août 2017 pour accroître la capacité de distribution de la société DDA ;

- le démarchage de sa clientèle accompagné d'actes de dénigrement portant sur son incapacité à assurer l'approvisionnement en produits litigieux et la pratique de prix prédateurs grâce aux données transmises, procédés déloyaux expliquant la captation rapide des parts de marché par la société DDA qui est devenue le premier distributeur de lait infantile et de farines lactées en 2019, sa progression depuis 2017 étant ainsi de 1 661 %, tandis qu'elle perdait de son côté respectivement 74 et 78 % de ses parts de marché. Elle conteste avoir commis une faute en refusant de signer l'accord de coexistence proposé le 28 novembre 2017, le projet étant déséquilibré. Elle estime que les documents produits en exécution de l'ordonnance du 10 septembre 2024 sont incomplets mais révèlent que les prix pratiqués par la société DDA étaient systématiquement inférieurs à ses propres prix d'achat, pratique illicite renforcée par la multiplication des remises et ristournes.

Rappelant qu'une demande indemnitaire « au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies n'est pas exclusive d'une demande de réparation au titre d'autres manquements, tels que la violation d'un engagement d'exclusivité ou la commission d'actes de concurrence déloyale », elle soutient que ces actes de concurrence déloyale lui ont causé un préjudice résidant dans la perte de sa clientèle, déterminée par référence au chiffre d'affaires réalisé en 2016, et dans celle de son stock, constitué en excès à raison des pratiques de la société DDA, et dévalorisé puis détruit faute d'avoir pu être écoulé. Elle ajoute que la juridiction n'a pas le pouvoir d'ordonner à une partie d'évaluer son préjudice en monnaie étrangère et que celle du contrat était l'euro

Réponse de la cour

En vertu des dispositions des articles 1240 et 1241 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

L'action en concurrence déloyale est une modalité particulière de mise en 'uvre de la responsabilité civile délictuelle pour fait personnel de droit commun. Elle suppose ainsi la caractérisation d'une faute, d'une déloyauté appréciée à l'aune de la liberté du commerce et de l'industrie et du principe la libre concurrence, ainsi que d'un préjudice et d'un lien de causalité les unissant. A ce titre, si une situation de concurrence effective n'est pas une condition préalable de sa mise en 'uvre (en ce sens, Com. 10 novembre 2012, n° 1-25.873), l'absence d'incidence prouvée de la faute sur la situation du demandeur à l'action fera obstacle à la caractérisation du préjudice et du lien de causalité (en ce sens, Com. 16 mars 2022, n° 20-18.882). Et, si le préjudice s'infère d'un acte de concurrence déloyale, la victime doit en prouver l'étendue (en ce sens, Com. 12 février 2020, n° 17-31.614). Dans ce cadre, le juge, tenu de réparer intégralement tout préjudice dont il constate le principe (en ce sens, Com., 10 janvier 2018, n° 16-21.500), apprécie souverainement son montant dont il justifie l'existence par la seule évaluation qu'il en fait sans être tenu d'en préciser les divers éléments (en ce sens, Ass. plén., 26 mars 1999, n° 95-20.640).

Le parasitisme s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution, appréciée sans égard pour la situation de concurrence effective à raison de sa nature (en ce sens, Com., 15 novembre 2011, n° 10-25-473), est indifférente au risque de confusion (en ce sens, Com. 20 mai 2014, n° 13-16.943). Il consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel (même arrêt).

- Sur le fondement de l'action

En vertu des dispositions combinées des articles 1134, 1147 et 1382 (devenus 1103, 1231 et suivants et 1240) du code civil, la responsabilité délictuelle ne peut pas régir les rapports contractuels entre les parties qui ne disposent ni d'une option entre ces deux régimes de responsabilité, l'existence d'une faute commise dans l'exécution d'un contrat imposant la mise en 'uvre exclusive de la responsabilité contractuelle de son auteur qui à l'inverse ne régit pas les relations hors convention, ni d'une possibilité de cumul des actions dont les fondements sont juridiquement incompatibles. De surcroît le principe de la réparation intégrale, sans perte ni profit, exclut la double indemnisation d'un préjudice unique.

Si ce principe n'exclut pas, à la condition que les préjudices invoqués soient distincts et individualisés et que les demandes indemnitaires soient divisées (en ce sens, Com. 4 déc. 2019, n° 17-20.032), la présentation d'une demande distincte fondée sur l'article L 442-1 du code de commerce qui tend à la réparation d'un préjudice résultant non pas d'un manquement contractuel mais de la rupture brutale d'une relation commerciale établie (en ce sens, Com., 24 octobre 2018, n° 17-25.672), il interdit au créancier d'une obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle.

Or, la société Lotus Distribution poursuit la réparation d'un préjudice unique qu'elle estime causé par des « man'uvres déloyales et des manquements [des appelantes] à leurs engagements d'exclusivité et de confidentialité » (dispositif de ses écritures, page 84), soit par des fautes contractuelles et délictuelles. Ce constat emporte en principe l'irrecevabilité de ses prétentions. Cependant, l'argumentation développée en corps de ses écritures par la société Lotus Distribution révèle que les premières, évoquées pour renforcer sa motivation et éclairer le contexte de l'affaire, ne sont pas spécialement invoquées au soutien de la demande fondée sur la concurrence déloyale dont les éléments constitutifs résident, selon elle, dans l'introduction sur le marché de la société DDA malgré des annonces de progression du flux d'affaires, dans le report de ses commandes au bénéfice de cette dernière, dans la pratique de prix prédateurs et le démarchage systématique de sa clientèle auprès de qui elle était dénigrée ainsi que dans la multiplication des remises, soit un faisceau de procédés déloyaux servant un objectif unique : son éviction d'un marché qu'elle avait préparé et développé depuis 1995 grâce à ses efforts et ses investissements. Aussi, seules des fautes délictuelles étant spécifiquement alléguées, sa demande est recevable, les appelantes n'ayant d'ailleurs soulevé aucune fin de non-recevoir à ce titre.

- Sur la caractérisation des actes de concurrence déloyale et parasitaire

La seule progression rapide du chiffre d'affaires et du taux de pénétration du marché de la société DDA, qui était libre de commercialiser les produits de la SAS DNAO en l'absence d'exclusivité et dont le commencement d'activité n'avait pas à être préalablement porté à la connaissance de la société Lotus Distribution, ne peut caractériser à elle seule une concurrence déloyale. A cet égard, le rapport économique produit par cette dernière pour confirmer ce postulat et établir le caractère « anormal » de la croissance de la société DDA (pièce 71 de l'intimée) n'est pas pertinent. Outre le fait qu'il met en évidence une diminution des parts de marché de tous les distributeurs et non seulement de la société Lotus Distribution, constat qui contredit sa thèse d'une prédation ciblée, il repose sur des comparaisons de marchés très différents (la Chine ne pouvant être prise pour référence à raison du seul fait qu'elle importe massivement du lait maternisé en poudre) et s'appuie sur des données invérifiables.

Aussi, il incombe à la société Lotus Distribution de prouver les man'uvres qu'elle allègue conformément à l'article 9 du code civil.

Sur le détournement d'informations confidentielles

La société Lotus Distribution, qui ne conteste pas les conditions d'obtention des informations confidentielles qu'elle évoque sans les détailler et qu'elle a librement communiquées à son partenaire pour les besoins de la distribution des produits et de la fixation de ses objectifs (ses pièces 31 à 34), ne produit pas de preuve directe de leur communication par la SAS DNAO à la société DDA. Elle échoue également à la démontrer indirectement car :

- le volume d'affaires généré par la relation a augmenté entre 2017 et 2018 malgré la présence de la société DDA (pièces 53, 121 et 121 bis de l'intimée), peu important que cette croissance trouve en tout ou partie sa cause dans l'éviction d'un concurrent ;

- la comparaison des listes des clients des sociétés Lotus Distribution et DDA révèle que les parties ont seulement 3 grossistes en commun sur 21 clients représentant une faible part de son chiffre d'affaires (pièces 96 des appelantes et 112 et 140 de l'intimée). A la différence de la liste produite par la société Lotus Distribution, l'attestation communiquée par les sociétés Danone, DNAO et DDA a été établie par un commissaire aux comptes. Outre le fait que ce dernier exerce une profession règlementée et engage sa responsabilité contractuelle et délictuelle à raison notamment des inexactitudes qu'il certifie, cadre juridique qui constitue un gage sérieux de la sincérité de ses assertions, les critiques de la société Lotus Distribution ne sont pas étayées. En effet, indépendamment même de leur absence de force probante qui découle du défaut de production des pièces justificatives de l'identité de leurs auteurs, les attestations qu'elle produit à ce titre en pièces 48.3.a à 48.4.a ne rapportent en des termes imprécis, dont la quasi-identité et la pré rédaction partielle entament la crédibilité, que des tentatives de rapprochement réalisées à des dates indéterminées ou vaguement précisées. Les documents qu'elle verse au débat en cause d'appel ne modifient pas cette analyse (ses pièces 48.1.a.a.a, 48-2.a à 48.2.a.a, 48-5 et 48-6).

Ainsi, la société Lotus Distribution ne prouve pas que la SAS DNAO ait communiqué à la société DDA des informations qu'elle aurait recueillies dans le cadre de leurs relations commerciales et contractuelles.

Sur la réduction des commandes

La société Lotus Distribution érige la diminution des commandes de septembre 2017, qu'elle n'évoque pas dans le cadre de ses développements sur les manquements contractuels faute d'engagement de volume mais invoque au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies, en procédé déloyal visant à faciliter, par un report des commandes, l'entrée sur le marché de la société DDA. Cependant, alors que sa seule concomitance avec le début d'activité effective de la société DDA ne peut suffire à en faire un procédé déloyal, cette diminution temporaire des livraisons était objectivement justifiée, ainsi qu'il sera dit infra lors de l'examen de la rupture brutale des relations commerciales établies.

Sur le détournement de la clientèle

Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie implique que tout professionnel puisse attirer à lui la clientèle de ses concurrents dès lors qu'il use de moyens légaux et loyaux. La société Lotus Distribution oppose à ce titre des actes de dénigrement accompagnant un démarchage massif ainsi que la pratique de prix prédateurs.

Les abus de la liberté d'expression ne peuvent être sanctionnés que sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881, loi spéciale, sauf dénigrement de produits et services entendu comme l'atteinte portée à un concurrent à travers le discrédit jeté sur ses produits ou services (voir en ce sens en dernier lieu, Com., 26 septembre 2018, n° 17-15502 : « hors restriction légalement prévue, la liberté d'expression est un droit dont l'exercice, sauf dénigrement de produits ou services, ne peut être contesté sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240, du code civil »). Même en l'absence d'une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l'une, d'une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l'autre, peut constituer un acte de dénigrement mais que, lorsque l'information en cause se rapporte à un sujet d'intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, cette divulgation relève du droit à la liberté d'expression, qui inclut le droit de libre critique, et ne saurait, dès lors, être regardée comme fautive, sous réserve qu'elle soit exprimée avec une certaine mesure (en ce sens, 1ère Civ, 11 juillet 2018, n° 17-21.457 ; Com. 9 janvier 2019, n° 17-18.350).

Pour établir les actes de dénigrement qu'elle impute aux appelantes sans les identifier clairement, la société Lotus Distribution produit, outre les attestations déjà évoquées (ses pièces 48.3 et suivantes) trois nouveaux témoignages et une pièce d'identité à annexer à un précédent (ses pièces 48.1.a.a.a, 48-2.a à 48.2.a.a, 48-5 et 48-6). Ces derniers, qui font état de rumeurs relatives à l'arrivée d'un nouveau distributeur sur le marché pratiquant des prix bas et provoquant en 2017 des baisses de chiffre d'affaires chez les distributeurs historiques de la société Lotus Distribution ne caractérisent aucun propos susceptible de jeter le discrédit sur les prestations et les produits de la société Lotus Distribution.

Ne rapportant pas de faits s'apparentant à un démarchage qui ne serait pas conforme aux usages du commerce, ils n'établissent pas non plus la pratique de prix prédateurs. Cette dernière renvoie à une hypothèse d'abus de position dominante au sens de l'article L 420-2 du code de commerce consistant à évincer des concurrents ou à fermer l'accès au marché par la mise en 'uvre d'une politique agressive de réduction des prix puis à augmenter librement ces derniers pour récupérer les pertes une fois le succès de l'opération acquis. Outre le fait que les conditions de caractérisation d'un abus de position dominante ne sont pas en débat, la société Lotus Distribution ne démontre pas que la société DDA aurait pratiqué des prix anormalement bas ni modifié ceux-ci après la rupture des relations ou qu'elle aurait, au sens cette fois de l'article L 420-5 du code de commerce qu'elle ne cite pas, fixé des prix abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation. Circonscrivant sa comparaison aux « prix de vente de la société DDA » et à ses « prix d'achat », elle impute en réalité à la société DDA la pratique de prix inférieurs au sien.

Or, non seulement celle-ci n'est pas en soi fautive (en ce sens, Com., 21 octobre 2008, n° 07-11.546), mais la société Lotus Distribution ne livre aucun élément sérieux révélant une différence de prix significative. Les tableaux qu'elle produit ne sont pas certifiés et ne reposent sur aucune donnée vérifiable (ses pièces 51 et 51 bis) tandis que les attestations établies par un commissaire aux comptes produites par les appelantes (leurs pièces 97 et 98) et non utilement contestées par la société Lotus Distribution confirment la stabilité des prix de revente de la société DDA et leur lien avec ses prix d'achat ainsi que, en moyenne, l'absence d'écart notable avec ceux allégués par la société Lotus Distribution.

Enfin, la société Lotus Distribution ne prouve pas le montant des remises qu'elle tire sans expliquer ses calculs de la balance générale de la société DDA.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Lotus Distribution au titre de la concurrence déloyale.

4°) Sur la rupture brutale des relations commerciales établies

Moyens des parties

Les sociétés Danone, DNAO et DDA, qui reconnaissant l'existence de relations commerciales établies, exposent que la SAS DNAO n'a pas refusé d'honorer des commandes en septembre 2017 mais qu'elle diminué leurs volumes conformément à son mécanisme de gestion des stocks de ses distributeurs (40 conteneurs sur 90 pour la livraison de novembre 2017 et 15 conteneurs sur 135 pour celle de décembre 2017), la société Lotus Distribution étant alors en surstock à leur date (le surstock s'entendant d'une période de couverture des stocks de plus de cinq mois excédant les deux mois habituellement accordés), situation inacceptable pour des denrées périssables. Elle ajoute que cette réduction n'a pas affecté les capacités de commercialisation des produits de la société Lotus Distribution, les relations ayant par ailleurs perduré jusqu'en mai 2019 et le flux d'affaires ayant augmenté de 10 % en 2018. Elle en déduit que le partenariat n'a pas été modifié durablement et substantiellement et que cette variation ponctuelle ne caractérise aucune rupture, totale ou partielle, des relations, y compris en 2018, la seule absence de livraison constatée en janvier 2018 s'expliquant par le défaut de commande de la société Lotus Distribution. Elle ajoute que l'argument de cette dernière tenant à l'existence d'une rupture totale en 2017 suivie d'une rupture partielle en 2018 est incohérent. Elle estime au contraire que la cessation des relations commerciales établies est le fait de la société Lotus Distribution au motif qu'elle a annulé ses commandes en avril et mai 2019 et n'en a passé aucune pendant six mois, ce que la SAS DNAO a constaté le 24 janvier 2020.

Subsidiairement, elles contestent le principe et la mesure du préjudice allégué par la société Lotus Distribution au motif que :

- son état de dépendance économique n'est pas prouvé, la société Lotus Distribution, qui n'était tenue par aucune exclusivité, ne démontrant pas qu'elle ait été empêchée de diversifier ses fournisseurs, certains de ses partenaires étant en outre d'importance (Colgate & Palm, Mondelez, Kellogg's et Quaker Oats Company). Elles en déduisent que le préavis éludé ne pouvait excéder six mois ;

- le résultat courant avant impôt (qui comprend notamment le résultat financier non rattachable à l'activité), comme la marge brute, ne sont pas pertinents pour déterminer le préjudice consécutif à une rupture brutale des relations commerciales établies, seule la marge sur coûts variables étant adéquate pour assurer une réparation sans perte ni profit. Elles ajoutent que le calcul de celle-ci, tardivement réalisé par la société Lotus Distribution, est erroné, la clé de répartition employée étant fausse et le taux de change utilisé indéterminé ;

- la marge perçue postérieurement à la rupture doit être déduite du quantum accordé ;

- en matière délictuelle, la monnaie de compte qui détermine le montant du préjudice est celle de l'Etat sur le territoire duquel la victime a son domicile ou sa résidence habituelle au moment où le dommage est subi, sauf le cas, notamment, où il y a lieu de rembourser des frais ou dépenses faits dans une autre monnaie. Elles précisent à ce titre que la société Lotus Distribution, qui entend engager leur responsabilité délictuelle et obtenir la réparation d'un préjudice subi en Algérie, a son siège social en Algérie dont la monnaie est le dinar algérien.

Reconventionnellement, la SAS DNAO soutient que la rupture des relations commerciales est imputable à la société Lotus Distribution qui a annulé ses commandes le 29 juillet 2019 et a ensuite cessé d'en passer. Elle fixe le préavis dont elle a été privée à trois mois.

En réponse, la société Lotus Distribution érige la rupture brutale des relations commerciales établies en manquement contractuel. Elle impute dans ce cadre aux sociétés Danone, DNAO et DDA une cessation soudaine de leur partenariat, totale en 2017 puis partielle les années suivantes, qui s'inscrit dans une stratégie d'éviction concertée. Elle précise ainsi que la SAS DNAO a, pour favoriser la pénétration du marché par la société DDA, refusé d'honorer sa commande en septembre 2017 alors qu'elle représentait un volume équivalent à celui de l'année 2016 et que ses commandes antérieures avaient toutes étaient validées, son chiffre d'affaires ayant ainsi crû de 485 % les cinq années précédentes. Elle ajoute que la SAS DNAO lui a ensuite livré entre janvier et août 2018, postérieurement au rappel des produits Lactalis à raison d'un scandale sanitaire, d'importantes quantités pour servir de réserve à la société DDA qui pratiquait parallèlement des prix prédateurs avant de réduire à nouveau ses livraisons alors que son surstock la contraignait à vendre à perte, situation lui imposant de cesser toute commande en juillet 2019, son résultat ordinaire devenant nettement négatif en 2020. Au regard de la durée, de la continuité, de la stabilité et de l'intensité des relations ainsi que de son exclusivité et de son état de dépendance économique, elle estime le préavis éludé à 36 mois et calcule son préjudice par référence à sa marge moyenne nette avant impôts et, à défaut, sur sa marge sur coûts variables en excluant le produit des ventes réalisées en 2018 du fait de la sortie du groupe Lactalis du marché du lait infantile algérien.

En réponse à la demande reconventionnelle des sociétés Danone, DNAO et DDA, elle conteste la réalité et la mesure du préjudice allégué et souligne avoir été contrainte d'annuler ses commandes à raison de son incapacité à distribuer les produits directement causée par leurs pratiques déloyales.

Réponse de la cour

Tandis que la société Lotus Distribution invoque une rupture en septembre 2017, la SAS DNAO lui oppose reconventionnellement une cessation du partenariat en juillet 2019. Les textes applicables sont ainsi les suivants :

- l'article L 442-6 I 5° du code de commerce dans sa version issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 est applicable au jour de la rupture alléguée en septembre 2017 par la société Lotus Distribution. Aux termes de celui-ci, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ;

- l'article L 442-1 II du code de commerce dans sa version issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 régit la rupture de juillet 2019 opposée par la SAS DNAO. Il dispose que, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels. En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois. Les dispositions du présent II ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure.

Au sens de ces textes, la relation, notion propre du droit des pratiques restrictives de concurrence qui n'implique aucun contrat (en ce sens, Com., 9 mars 2010, n° 09-10.216) et n'est soumise à aucun formalisme quoiqu'une convention ou une succession d'accords poursuivant un objectif commun puisse la caractériser, peut se satisfaire d'un simple courant d'affaires, sa nature commerciale étant entendue plus largement que la commercialité des articles L 110-1 et suivants du code de commerce comme la fourniture d'un produit ou d'une prestation de service (en ce sens, Com., 23 avril 2003, n° 01-11.664). Elle est établie dès lors qu'elle présente un caractère suivi, stable et habituel laissant entendre à la victime de la rupture qu'elle pouvait raisonnablement anticiper, pour l'avenir, une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial (en ce sens, Com., 15 septembre 2009, n° 08-19.200 qui évoque « la régularité, le caractère significatif et la stabilité de la relation commerciale » et Com., 11 janvier 2023, n° 21-18.299, qui souligne l'importance pour la victime de démontrer la légitimité de sa croyance dans la pérennité des relations). La poursuite de la relation par une personne distincte de celle qui l'a nouée initialement ne fait pas obstacle à sa stabilité en présence d'une transmission universelle de patrimoine et, à défaut, si des éléments démontrent que la commune intention des parties était de continuer la même relation (en ce sens, Com., 10 février 2021, n° 19-15.369).

Ces textes sanctionnent non la rupture, qui doit néanmoins être imputable à l'agent économique à qui elle est reprochée, mais sa brutalité qui résulte de l'absence de préavis écrit ou de préavis suffisant. Celui-ci, qui s'apprécie au moment de la notification ou de la matérialisation de la rupture, s'entend du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser, soit pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une solution de remplacement en bénéficiant, sauf circonstances particulières, d'un maintien des conditions antérieures (en ce sens, Com., 10 février 2015, n° 13-26.414), les éléments postérieurs ne pouvant être pris en compte pour déterminer sa durée (en ce sens, Com, 1er juin 2022, n° 20-18960). Les critères pertinents sont notamment l'ancienneté des relations et les usages commerciaux, le degré de dépendance économique, le volume d'affaires réalisé, la progression du chiffre d'affaires, les investissements effectués, l'éventuelle exclusivité des relations et la spécificité du marché et des produits et services en cause ainsi que tout obstacle économique ou juridique à la reconversion. En revanche, le comportement des partenaires consécutivement à la rupture est sans pertinence pour apprécier la suffisance du préavis accordé. La rupture peut être totale ou partielle, la relation commerciale devant dans ce dernier cas être modifiée substantiellement (en ce sens, Com. 31 mars 2016, n° 14-11.329 ; Com 20 novembre 2019, n° 18-11.966).

Au regard de la fonction du préavis, la date d'appréciation de la suffisance de sa durée est celle de sa matérialisation concrète dans le tarissement du flux d'affaires ou de la notification de la rupture, qui correspond à l'annonce faite par un cocontractant à l'autre de sa volonté univoque de cesser la relation à une date déterminée, seule information qui peut permettre au partenaire délaissé de se projeter et d'organiser son redéploiement ou sa reconversion en disposant de la visibilité indispensable à toute anticipation.

Les parties ne contestent pas le caractère établi des relations depuis 1995 mais débattent de la réalité de la rupture, de sa date et de son imputation.

Il ressort des tableaux produits par la société Lotus Distribution non contestés sur ce point que, après avoir honoré la totalité des commandes qu'elle avait passées durant l'année 2017, la SAS DNAO ne lui a livré en novembre 2017 que 43 % de ses commandes de septembre 2017. Si l'absence de données sur les années antérieures ne permet pas d'apprécier utilement la pratique des parties, les échanges de courriels produits par la SAS DNAO (ses pièces 53.1.1 à 53.27.2) révèlent que, conformément à l'article 2 de ses CGV qui ménage sa faculté de refuser ou modifier toute commande qui présente un caractère manifestement anormal ou est susceptible d'occasionner une désorganisation de ses services industriels et logistiques, le fournisseur ne validait les commandes qu'en considération des stocks constitués par son distributeur, ce point étant par exemple explicitement évoqué dès janvier 2017 (pièce 53.3.1). Aussi, le motif opposé en novembre 2017 tenant à la situation de surstock de la société Lotus Distribution n'était-il pas nouveau et s'inscrivait dans les usages adoptés consensuellement par les parties qui sont cohérents avec la périssabilité des produits en cause.

Or, la société Lotus Distribution, qui avait commandé en moyenne 62,5 conteneurs par mois, avec un pic de 92 en mai 2017, a porté ses exigences à, respectivement, 92 et 135 conteneurs en août et septembre 2017 (pièces 40 et 41). Et, elle ne conteste pas que tels volumes auraient abouti à une période de couverture supérieure à cinq mois au lieu des deux à trois mois habituellement recommandés, ce que la SAS DNAO lui rappelait le 23 septembre 2017 (pièces 42.1 et 53.11 des appelantes). Aussi, la validation partielle de ces commandes, peu important le débat sur la réalité de la livraison de décembre 2017 qui touche à la responsabilité contractuelle de la SAS DNAO et non à la rupture brutale des relations à l'endroit de laquelle seul le flux d'affaires importe, était contractuellement permise et était objectivement justifiée.

Par ailleurs, le tableau produit par la société Lotus Distribution révèle que, en dehors cette réduction ponctuelle et isolée, la relation s'est poursuivie en 2018 et en 2019, avec, malgré des commandes qui n'étaient pas systématiquement validées en totalité, une hausse des volumes particulièrement nette en 2018 (près de 15 % sur l'année couplés à une augmentation du chiffre d'affaires de près de 10 %) et moindre en début d'année 2019 (environ 2 % sur le premier semestre) dont il est indifférent qu'elle soit liée à la libération du marché par un acteur concurrent. Aussi, même en occultant la légitimité de sa cause, cette diminution du flux d'affaires est trop circonscrite dans le temps et en volume pour caractériser une modification substantielle de la relation commerciale s'analysant en sa rupture, même partielle.

Et, si le partenariat a effectivement cessé en mai 2019, constat qui prive de toute pertinence la référence aux années 2020 et 2021 qui sont postérieures à la rupture alléguée, la société Lotus Distribution ne peut de bonne foi imputer ce tarissement à son partenaire puisqu'elle dénonçait elle-même sa situation de surstock, dont elle ne prouve pas qu'elle trouvait sa cause dans les actions concertées de la société DDA et de la SAS DNAO, et qu'elle sollicitait en conséquence un report des livraisons en juillet 2029 avant de cesser ses commandes.

Aussi, la société Lotus Distribution ne démontrant aucune rupture brutale des relations commerciales établies en septembre 2017 ou ultérieurement, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à ce titre et la demande de la société Lotus Distribution sera rejetée, sa demande d'expertise étant de ce fait privée d'objet.

Pour autant, si les CGV précisent que toute commande acceptée est irrévocable, elles autorisent la SAS DNAO à réduire ou refuser les commandes anormales ou susceptibles de générer une désorganisation, motif opposé en septembre 2017 à raison du surstock de la société Lotus Distribution. Or, cette dernière disposait objectivement en juillet 2019, date de sa première demande de report, d'un stock excessif qu'elle n'était pas en mesure d'écouler. A raison du rôle actif joué par la SAS DNAO dans la validation des commandes au regard du taux de couverture prévisible permis par le stock de son distributeur, une telle situation ne peut être reprochée à la société Lotus Distribution qui subissait la concurrence nouvelle et, quoiqu'elle fût licite, intense de la société DDA dont la SAS DNAO connaissait l'activité. Et, l'arrêt des commandes constaté en avril 2020 par cette dernière s'origine dans cette incapacité objective de distribuer les produits de marque Blédina.

A cet égard, le dispositif institué par l'article L 442-1 II du code de commerce, applicable à la date de la rupture alléguée reconventionnellement par la SAS DNAO, est irrigué par un critère de liberté décisionnelle : la possibilité de sanctionner une rupture brutale présuppose, par hypothèse, que les partenaires soient libres d'en décider le principe et les modalités (critère mobilisé pour imputer la rupture à une société mère qui maîtrise en droit ou en fait les relations commerciales établies entre des tiers et ses filiales et, les privant de tout pouvoir de décision autonome quant au choix de leur partenaire et quant à la poursuite des relations qu'elles entretiennent avec lui, leur impose la rupture : Com., 22 juin 2022, n° 21-14.230). Dans cette logique, les moyens développés par la société Lotus Distribution, qui tendent à établir le caractère exclusivement contraint de sa décision de cesser ses commandes, ne constituent pas des faits justificatifs de la rupture ou des causes exonératoires devant correspondre, en l'absence d'allégation d'une faute grave, à un cas de force majeure, mais des éléments touchant à l'imputation de la rupture à son auteur au sens de l'article L 442-6 I 5° du code de commerce, des causes exogènes subies imposant objectivement la modification du flux d'affaires y faisant obstacle (dans une logique voisine, retenant que la baisse des commandes inhérente à un marché en crise n'engageait pas la responsabilité de son auteur, Com. 8 novembre 2017, n° 16-15.285, cité par l'appelante).

En conséquence, contrainte par des facteurs exogènes objectifs, la rupture du partenariat en juillet 2019 n'est pas imputable à la société Lotus Distribution au sens de l'article L 442-1 II du code de commerce. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la SAS DNAO à ce titre.

5°) Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement entrepris sera infirmé en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens.

Succombant en ses prétentions, la société Lotus Distribution, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, sera condamnée à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer aux sociétés Danone, DNAO et DDA la somme de 15 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

- « mis en cause » la SA Danone ;

- jugé que la rupture brutale des relations commerciales était imputable aux sociétés Danone, DNAO et DDA ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 8 899 320,90 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA à payer à la société Lotus Distribution la somme de 28 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum les sociétés Danone, DNAO et DDA aux dépens de l'instance ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Requalifie la fin de non-recevoir opposée par la SA Danone en moyen de défense au fond ;

Rejette la demande de la société Lotus Distribution au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies ;

Y ajoutant,

Rejette la demande de la société Lotus Distribution au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la société Lotus Distribution à payer à la SA Danone, à la SAS Danone Nutricia Africa & Overseas et à la société de droit algérien Danone Djurdjura Algérie la somme de 15 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Lotus Distribution à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

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