CA Aix-en-Provence, ch. 3-2, 23 octobre 2025, n° 21/04587
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 23 OCTOBRE 2025
Rôle N° RG 21/04587 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGAI
S.A. FRANFINANCE
C/
[R] [I]
S.A.R.L. CO APTE GROUPE SANTE
S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIES
Société STAR LEASE
Copie exécutoire délivrée
le : 23 octobre 2025
à :
Me Marion MASSONG
Me Benjamin AYOUN
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire du tribunal de commerce de MARSEILLE en date du 16 Mars 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2020M06439.
APPELANTE
S.A. FRANFINANCE
Société Anonyme au capital de 31.357.776,00, immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le numéro 719 807 406, ayant son siège social sis [Adresse 4], représentée par son Directeur Général, domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Marion MASSONG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉS
Maître [R] [I]
es qualitès de mandataire judiciaire de la société CO APTE GROUPE SANTE désigné par un jugement du 29 janvier 2020 du Tribunal de Commerce de MARSEILLE, demeurant [Adresse 3],
représenté par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
S.A.R.L. CO APTE GROUPE SANTE,
SARL au capital social de 137.500,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le numéro 502 391 857, ayant son siège social sis [Adresse 2]
[Adresse 5]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIES
prise en la personne de Maître [P] [Z] es qualités d'administrateur judiciaire de la Sopciété CO APTE GROUPE SANTE, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE
Société STAR LEASE,
Société anonyme au capital de 55 000 000,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n° 423 465 905, ayant son siège social sis à [Adresse 9]
HAUSSMANN, représentée par son Directeur Général, domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Marion MASSONG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Juillet 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère
Greffiere lors des débats : Madame [I] METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre et Madame Chantal DESSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Star Lease a conclu le 12 janvier 2016 un contrat de crédit-bail n°0013537-59 avec la Sarl Co Apte Groupe Santé pour la mise à disposition de 5 Bodyscanners FIT3D pour une durée irrévocable de 60 mois avec règlement d'un loyer mensuel de 621,78 euros HT outre une assurance de 3,21 euros. Ce matériel a été réceptionné par la Sarl Co Apte Groupe Santé le 26 janvier 2016.
Par jugement du 29 janvier 2020 publié au Bodacc le 2 février 2020, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la Sarl Co Apte Groupe Santé et désigné en qualité d'administrateur judiciaire la SCP [Z] et Me [R] [I] en qualité de mandataire judiciaire.
L'administrateur judiciaire ayant informé le 11 mars 2020 la société Star Lease qu'il ne poursuivrait pas le contrat de crédit-bail, la SA Franfinance a déclaré pour le compte de la société Star Lease sa créance d'indemnité de résiliation, d'un montant total de 8 723,28 euros, décomposée comme suit':
- 1 498,70 € au titre de l'article L.622-17 du code de commerce
- indemnité de résiliation': 7 224,58 € (6 217,80 € 10 loyers restant, 350 € pour l'option d'achat, 656,78 euros pour l'indemnité contractuelle)
Me [I] a informé la SA Franfinance d'une contestation de la créance par courrier du 23 juillet 2020, à laquelle la SA Franfinance a répondu par courrier du 24 août 2020 en maintenant sa déclaration de créance.
Saisi de la contestation, le juge commissaire a, par ordonnance rendue le 16 mars 2021 (n°2020J00108)':
- admis la créance de la SA Franfinance pour la somme de 1 000 euros au titre de l'indemnité de résiliation,
- rejeté la somme de 1 498,70 euros au titre de l'article L622-17 du code de commerce,
- dit les dépens de la présente instance, toutes taxes comprises, en frais privilégiés de la procédure collective.
La SA Franfinance a formé appel contre cette décision le 29 mars 2021, enregistré sous les numéros RG 21/04587 et 21/04588.
Par conclusions n°2 récapitulatives déposées et notifiées par RPVA 17 décembre 2021, la SA Franfinance, appelante, et la société Star Lease, intervenante volontaire, demande à la cour de':
- réformer l'ordonnance en toutes ses dispositions';
- recevoir l'intervention volontaire de la société Star Lease,
- débouter la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [P] [Z] ès qualités de l'intégralité de leurs demandes';
- fixer et admettre au passif de la Sarl Co Apte Groupe Santé la créance de la société Star Lease pour la somme totale de 8 723,28 euros se décomposant en':
* 1 498,70 euros au titre de l'article L622-17 du code de commerce,
* 7 224,28 euros HT au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation.
- condamner la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [Z] ès qualités aux entiers dépens';
- condamner la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [Z] ès qualités à payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
- les condamner aux entiers dépens, ceux d'appel était distraits au profit de Me Marion Massong, avocat postulant sur son affirmation de droit.
Par conclusions d'intimés n°1 déposées et notifiées par RPVA le 17 septembre 2021, Me [R] [I] ès qualités de mandataire judiciaire de la Sarl Co Apte Groupe Santé, la Sarl Co Apte Groupe Santé, intimées et appelantes incident, et la Selarl [Z] & Associés ès qualités demandent à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau':
- de rejeter les demandes nouvelles de la société Star Lease,
- de condamner les sociétés Franfinance et Star Lease à verser à la Sarl Co Apte Groupe Santé la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens
A titre subsidiaire,
- de confirmer l'ordonnance'entreprise.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 23 avril 2021, la jonction des procédures RG 21/04587 et 21/04588 a été ordonnée sous le numéro unique 21/04587.
L'affaire a été fixée à l'audience du 3 juillet 2025 et la clôture prononcée le 12 juin 2025.
Il sera renvoyé, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens respectifs.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la société Star Lease
Les intimées contestent l'intervention volontaire de la société Star Lease en appel au motif que la créance de la société Star Lease déclarée par la SA Franfinance a été enregistrée comme étant celle de la SA Franfinance et que Star Lease avait 30 jours pour contester l'erreur du mandataire, ce qu'elle n'a pas fait, de sorte que «'le défaut de réponse interdit toute contestation ultérieure de la proposition du représentant des créancier, conformément à l'article L621-47 du code de commerce». Star Lease était régulièrement représentée dans le processus d'admission et n'est donc plus recevable à solliciter son admission au passif en cause d'appel.
Sur quoi, la SA Franfinance et la société Star Lease rétorquent que l'intervention volontaire de cette dernière est recevable conformément aux dispositions des articles 325 à 329 et 554 du code de procédure civile dès lors qu'elle a un intérêt à agir en tant que titulaire de la créance. Enfin, la SA Franfinance était bien mandataire de la Star Lease et qu'en tout état de cause, le créancier peut ratifier la créance jusqu'au jour où le juge statue.
Sur ce,
Selon l'article 554 du code de procédure civile, les parties qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, peuvent intervenir en cause d'appel. L'intervention n'est toutefois recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant (article 325 du code de procédure civile). L'article 564 du même code interdit en principe aux parties de soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions.
Il ressort de la déclaration de créance faite entre les mains du mandataire judiciaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 23 juillet 2020 réceptionnée le 28 juillet 2020 (sa pièce n°6) à en-tête de «'FRANFINANCE ' Service contentieux'», que cette déclaration mentionnait clairement que la déclaration était faite pour le compte de «'SA STAR LEASE représentée par la société FRANFINANCE'». La SA Franfinance, en sa qualité de mandataire de Star Lease, justifiant avoir répondu par courrier RAR du 24 août 2020 à la contestation de la débitrice, soit dans le délai de 30 jours visé à l'article L622-27 du code de commerce, ce qui n'est pas contesté, les intimés ne peuvent utilement opposer la forclusion.
La société Star Lease, représentée par la SA Franfinance dans le processus de déclaration et de vérification des créances par le mandataire judiciaire n'a pas été convoquée à l'audience du juge commissaire par suite d'une erreur dont elle n'est pas à l'origine, de sorte qu'elle est parfaitement recevable à intervenir personnellement à hauteur d'appel, étant titulaire de la créance et justifiant d'un intérêt personnel en lien direct avec l'objet du litige.
Il résulte des conclusions déposées qu'elle ne formule en appel aucune demande nouvelle.
La société Star Lease sera par conséquent déclarée recevable en son intervention volontaire.
Au fond,
La SA Franfinance et la société Star Lease soutiennent que l'article 11 intitulé «'Résiliation'» prévoit le versement d'une indemnité en cas de résiliation du contrat et que n'est pas démontré par la débitrice le caractère manifestement excessif de cette indemnité.
En réplique, les intimées considèrent que cette clause doit être interprétée comme une clause pénale dont le caractère excessif résulte de ce qu'elle impose le paiement d'une somme équivalent à 10 loyers'et que la SA Franfinance ne justifie d'aucun préjudice ou frais mis en place'; que la SA Franfinance n'étant pas partie au contrat est donc illégitime dans ses demandes
Sur ce,
La clause insérée dans le contrat de crédit-bail prévoyant en cas de résiliation anticipée le versement au profit de Star Lease d'une indemnité égale à «'la totalité des loyers restant à échoir HT majorée du montant de l'option d'achat HT, augmentée d'une peine égale à 10 % de la totalité des loyers HT restant à échoir majorée du montant de l'option d'achat HT'» s'analyse en une clause pénale.
Conformément à l'article 1152 du code civil applicable aux faits de l'espèce s'agissant d'un contrat conclu avant le 1er octobre 2016, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité convenue par le contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'apprécie in concreto en comparant le montant de l'indemnité conventionnellement fixée et celui du préjudice effectivement subi par le créancier.
Dans le cas présent, la cour relève :
- que la société Star Lease justifie d'un investissement de 35 000 euros HT au titre du matériel objet du contrat de crédit bail ;
- qu'elle était en droit d'attendre de l'exécution de ce contrat une somme totale de 37 306,80 euros,
- qu'elle a déja perçu au titre de l'exécution du contrat la somme de 30 467,22 euros HT
- qu'au moment de la résiliation du contrat, soit le 11 mars 2020, le montant des loyers restant à échoir étaient de 6 217,80 euros HT à laquelle se rajoute la valeur de rachat soit 350 euros HT, soit au total une somme de 6 567,80 euros HT
- que le montant de l'indemnité conventionnelle de 10 % représente 656,78 euros.
Dès lors, et au vu de ces éléments, le caractère excessif de l'indemnité conventionnelle n'est pas démontré, de sorte qu'il y a lieu d'admettre la créance de la société Star Lease au passif de la Sarl Co Apte Groupe Santé à hauteur de la somme de 7 224,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation
L'ordonnance sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a réduit à 1 000 euros l'indemnité de résiliation.
S'agissant du pose de créance relatif à la créance déclarée au titre de l'article L.622-17 I du code de commerce (1 498,70 euros).
Il résulte de cette disposition que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période son payées à leur échéance et à défaut d'un tel paiement, sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûreté, à l'exception de celles garanties par le privilège des articles L3253-2, L3253-4 et L7313-8 du code du travail, des frais de justice et celles garanties par le privilège établi par l'article L611-11 du code de commerce.
Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 1353 du code civil, s'il appartient au créancier de justifier de sa créance tant dans son principe que dans son montant il incombe au débiteur ou son représentant, qui se prétend libéré de son obligation d'en rapporter la preuve.
L'administrateur judiciaire n'ayant pas opté pour la poursuite du contrat de crédit bail, celui-ci a donc été résilié le 11 mars 2020. La créance de loyers échus depuis le jugement d'ouverture, restés impayés, ne bénéficie pas du traitement préférentiel prévu par les dispositions de l'article L622-17 du code de commerce faute d'être née pour les besoins de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur. Elle relève, dès lors, des dispositions de l'alinéa ' de l'article L622-24 qui dispose qu'elles «'sont soumises aux dispositions du présent article. Les délais courent à compter de la date d'exigibilité de la créance. Toutefois, les créanciers dont les créances résultent d'un contrat à exécution successive déclarent l'intégralité des sommes qui leur sont dues' (...)».
Il résulte en outre du contrat de crédit-bail n°001353759-00 conclu entre la Sarl Co Apte Groupe Santé et Star Lease et des conditions générales du contrat, que le contrat ayant continué à s'exécuter entre la date d'ouverture de la procédure collective, le 20 janvier 2020 et la date de la résiliation, le 11 mars 2020,'les deux échéances de 746,14 euros TTC correspondant à celles de février et mars 2020 étaient dues. Il n'est pas rapporté à cet égard par les intimées que ces deux loyers aient fait l'objet de réglements à leur échéance, de sorte que la créance de la société Star Lease est fondée en son principe comme en son montant.
Sur ce poste de créance, l'ordonnance critiquée sera également infirmée.
Sur les demandes accessoires
Les intimés succombant, sont infondés en leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Star Lease les frais qu'elle a exposés pour la défense de ses intérêts. Il lui sera allouée au titre des frais irrépétibles la somme de 2 000 euros.
En revanche la demande de la SA Franfinance au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
Déclare la société Star Lease recevable en son intervention volontaire';
Infirme l'ordonnance rendue le 16 mars 2021 (n°2020J00108) par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, en toutes ses dispositions, sauf celles concernant les dépens de la première instance';
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce l'admission de la créance de la société Star Lease portant la référence 11/FRANFINANCE sur l'état des créances, à titre chirographaire et échu, pour les montants suivants':
- 1 498,70 euros au titre des échéances de février et mars 2020 du contrat de crédit-bail n°001353759-00'(article L622-24 alinéa 6 du code de commerce) ;
- 7 224,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation;
Ordonne conformément à l'article R624-8 du code de commerce qu'il soit fait mention par le greffe du tribunal des affaires économiques de Marseille de cette décision en marge de l'état des créances
Condamne la société Co Apte Groupe Santé à verser à la société Star Lease la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société Franfinance de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Ordonne que les dépens, dont distraction au profit de Me Marion Massong, avocat postulant, soient employés en frais privilégiés de la procédure collective.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 23 OCTOBRE 2025
Rôle N° RG 21/04587 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHGAI
S.A. FRANFINANCE
C/
[R] [I]
S.A.R.L. CO APTE GROUPE SANTE
S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIES
Société STAR LEASE
Copie exécutoire délivrée
le : 23 octobre 2025
à :
Me Marion MASSONG
Me Benjamin AYOUN
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire du tribunal de commerce de MARSEILLE en date du 16 Mars 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2020M06439.
APPELANTE
S.A. FRANFINANCE
Société Anonyme au capital de 31.357.776,00, immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le numéro 719 807 406, ayant son siège social sis [Adresse 4], représentée par son Directeur Général, domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Marion MASSONG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉS
Maître [R] [I]
es qualitès de mandataire judiciaire de la société CO APTE GROUPE SANTE désigné par un jugement du 29 janvier 2020 du Tribunal de Commerce de MARSEILLE, demeurant [Adresse 3],
représenté par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
S.A.R.L. CO APTE GROUPE SANTE,
SARL au capital social de 137.500,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le numéro 502 391 857, ayant son siège social sis [Adresse 2]
[Adresse 5]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIES
prise en la personne de Maître [P] [Z] es qualités d'administrateur judiciaire de la Sopciété CO APTE GROUPE SANTE, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE
PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE
Société STAR LEASE,
Société anonyme au capital de 55 000 000,00 euros, immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n° 423 465 905, ayant son siège social sis à [Adresse 9]
HAUSSMANN, représentée par son Directeur Général, domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Marion MASSONG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Juillet 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Mme Isabelle MIQUEL, Conseillère
Greffiere lors des débats : Madame [I] METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre et Madame Chantal DESSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Star Lease a conclu le 12 janvier 2016 un contrat de crédit-bail n°0013537-59 avec la Sarl Co Apte Groupe Santé pour la mise à disposition de 5 Bodyscanners FIT3D pour une durée irrévocable de 60 mois avec règlement d'un loyer mensuel de 621,78 euros HT outre une assurance de 3,21 euros. Ce matériel a été réceptionné par la Sarl Co Apte Groupe Santé le 26 janvier 2016.
Par jugement du 29 janvier 2020 publié au Bodacc le 2 février 2020, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la Sarl Co Apte Groupe Santé et désigné en qualité d'administrateur judiciaire la SCP [Z] et Me [R] [I] en qualité de mandataire judiciaire.
L'administrateur judiciaire ayant informé le 11 mars 2020 la société Star Lease qu'il ne poursuivrait pas le contrat de crédit-bail, la SA Franfinance a déclaré pour le compte de la société Star Lease sa créance d'indemnité de résiliation, d'un montant total de 8 723,28 euros, décomposée comme suit':
- 1 498,70 € au titre de l'article L.622-17 du code de commerce
- indemnité de résiliation': 7 224,58 € (6 217,80 € 10 loyers restant, 350 € pour l'option d'achat, 656,78 euros pour l'indemnité contractuelle)
Me [I] a informé la SA Franfinance d'une contestation de la créance par courrier du 23 juillet 2020, à laquelle la SA Franfinance a répondu par courrier du 24 août 2020 en maintenant sa déclaration de créance.
Saisi de la contestation, le juge commissaire a, par ordonnance rendue le 16 mars 2021 (n°2020J00108)':
- admis la créance de la SA Franfinance pour la somme de 1 000 euros au titre de l'indemnité de résiliation,
- rejeté la somme de 1 498,70 euros au titre de l'article L622-17 du code de commerce,
- dit les dépens de la présente instance, toutes taxes comprises, en frais privilégiés de la procédure collective.
La SA Franfinance a formé appel contre cette décision le 29 mars 2021, enregistré sous les numéros RG 21/04587 et 21/04588.
Par conclusions n°2 récapitulatives déposées et notifiées par RPVA 17 décembre 2021, la SA Franfinance, appelante, et la société Star Lease, intervenante volontaire, demande à la cour de':
- réformer l'ordonnance en toutes ses dispositions';
- recevoir l'intervention volontaire de la société Star Lease,
- débouter la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [P] [Z] ès qualités de l'intégralité de leurs demandes';
- fixer et admettre au passif de la Sarl Co Apte Groupe Santé la créance de la société Star Lease pour la somme totale de 8 723,28 euros se décomposant en':
* 1 498,70 euros au titre de l'article L622-17 du code de commerce,
* 7 224,28 euros HT au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation.
- condamner la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [Z] ès qualités aux entiers dépens';
- condamner la Sarl Co Apte Groupe Santé, Me [R] [I] ès qualités et Me [Z] ès qualités à payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';
- les condamner aux entiers dépens, ceux d'appel était distraits au profit de Me Marion Massong, avocat postulant sur son affirmation de droit.
Par conclusions d'intimés n°1 déposées et notifiées par RPVA le 17 septembre 2021, Me [R] [I] ès qualités de mandataire judiciaire de la Sarl Co Apte Groupe Santé, la Sarl Co Apte Groupe Santé, intimées et appelantes incident, et la Selarl [Z] & Associés ès qualités demandent à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau':
- de rejeter les demandes nouvelles de la société Star Lease,
- de condamner les sociétés Franfinance et Star Lease à verser à la Sarl Co Apte Groupe Santé la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens
A titre subsidiaire,
- de confirmer l'ordonnance'entreprise.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 23 avril 2021, la jonction des procédures RG 21/04587 et 21/04588 a été ordonnée sous le numéro unique 21/04587.
L'affaire a été fixée à l'audience du 3 juillet 2025 et la clôture prononcée le 12 juin 2025.
Il sera renvoyé, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens respectifs.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la société Star Lease
Les intimées contestent l'intervention volontaire de la société Star Lease en appel au motif que la créance de la société Star Lease déclarée par la SA Franfinance a été enregistrée comme étant celle de la SA Franfinance et que Star Lease avait 30 jours pour contester l'erreur du mandataire, ce qu'elle n'a pas fait, de sorte que «'le défaut de réponse interdit toute contestation ultérieure de la proposition du représentant des créancier, conformément à l'article L621-47 du code de commerce». Star Lease était régulièrement représentée dans le processus d'admission et n'est donc plus recevable à solliciter son admission au passif en cause d'appel.
Sur quoi, la SA Franfinance et la société Star Lease rétorquent que l'intervention volontaire de cette dernière est recevable conformément aux dispositions des articles 325 à 329 et 554 du code de procédure civile dès lors qu'elle a un intérêt à agir en tant que titulaire de la créance. Enfin, la SA Franfinance était bien mandataire de la Star Lease et qu'en tout état de cause, le créancier peut ratifier la créance jusqu'au jour où le juge statue.
Sur ce,
Selon l'article 554 du code de procédure civile, les parties qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, peuvent intervenir en cause d'appel. L'intervention n'est toutefois recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant (article 325 du code de procédure civile). L'article 564 du même code interdit en principe aux parties de soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions.
Il ressort de la déclaration de créance faite entre les mains du mandataire judiciaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 23 juillet 2020 réceptionnée le 28 juillet 2020 (sa pièce n°6) à en-tête de «'FRANFINANCE ' Service contentieux'», que cette déclaration mentionnait clairement que la déclaration était faite pour le compte de «'SA STAR LEASE représentée par la société FRANFINANCE'». La SA Franfinance, en sa qualité de mandataire de Star Lease, justifiant avoir répondu par courrier RAR du 24 août 2020 à la contestation de la débitrice, soit dans le délai de 30 jours visé à l'article L622-27 du code de commerce, ce qui n'est pas contesté, les intimés ne peuvent utilement opposer la forclusion.
La société Star Lease, représentée par la SA Franfinance dans le processus de déclaration et de vérification des créances par le mandataire judiciaire n'a pas été convoquée à l'audience du juge commissaire par suite d'une erreur dont elle n'est pas à l'origine, de sorte qu'elle est parfaitement recevable à intervenir personnellement à hauteur d'appel, étant titulaire de la créance et justifiant d'un intérêt personnel en lien direct avec l'objet du litige.
Il résulte des conclusions déposées qu'elle ne formule en appel aucune demande nouvelle.
La société Star Lease sera par conséquent déclarée recevable en son intervention volontaire.
Au fond,
La SA Franfinance et la société Star Lease soutiennent que l'article 11 intitulé «'Résiliation'» prévoit le versement d'une indemnité en cas de résiliation du contrat et que n'est pas démontré par la débitrice le caractère manifestement excessif de cette indemnité.
En réplique, les intimées considèrent que cette clause doit être interprétée comme une clause pénale dont le caractère excessif résulte de ce qu'elle impose le paiement d'une somme équivalent à 10 loyers'et que la SA Franfinance ne justifie d'aucun préjudice ou frais mis en place'; que la SA Franfinance n'étant pas partie au contrat est donc illégitime dans ses demandes
Sur ce,
La clause insérée dans le contrat de crédit-bail prévoyant en cas de résiliation anticipée le versement au profit de Star Lease d'une indemnité égale à «'la totalité des loyers restant à échoir HT majorée du montant de l'option d'achat HT, augmentée d'une peine égale à 10 % de la totalité des loyers HT restant à échoir majorée du montant de l'option d'achat HT'» s'analyse en une clause pénale.
Conformément à l'article 1152 du code civil applicable aux faits de l'espèce s'agissant d'un contrat conclu avant le 1er octobre 2016, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité convenue par le contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'apprécie in concreto en comparant le montant de l'indemnité conventionnellement fixée et celui du préjudice effectivement subi par le créancier.
Dans le cas présent, la cour relève :
- que la société Star Lease justifie d'un investissement de 35 000 euros HT au titre du matériel objet du contrat de crédit bail ;
- qu'elle était en droit d'attendre de l'exécution de ce contrat une somme totale de 37 306,80 euros,
- qu'elle a déja perçu au titre de l'exécution du contrat la somme de 30 467,22 euros HT
- qu'au moment de la résiliation du contrat, soit le 11 mars 2020, le montant des loyers restant à échoir étaient de 6 217,80 euros HT à laquelle se rajoute la valeur de rachat soit 350 euros HT, soit au total une somme de 6 567,80 euros HT
- que le montant de l'indemnité conventionnelle de 10 % représente 656,78 euros.
Dès lors, et au vu de ces éléments, le caractère excessif de l'indemnité conventionnelle n'est pas démontré, de sorte qu'il y a lieu d'admettre la créance de la société Star Lease au passif de la Sarl Co Apte Groupe Santé à hauteur de la somme de 7 224,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation
L'ordonnance sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a réduit à 1 000 euros l'indemnité de résiliation.
S'agissant du pose de créance relatif à la créance déclarée au titre de l'article L.622-17 I du code de commerce (1 498,70 euros).
Il résulte de cette disposition que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période son payées à leur échéance et à défaut d'un tel paiement, sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûreté, à l'exception de celles garanties par le privilège des articles L3253-2, L3253-4 et L7313-8 du code du travail, des frais de justice et celles garanties par le privilège établi par l'article L611-11 du code de commerce.
Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 1353 du code civil, s'il appartient au créancier de justifier de sa créance tant dans son principe que dans son montant il incombe au débiteur ou son représentant, qui se prétend libéré de son obligation d'en rapporter la preuve.
L'administrateur judiciaire n'ayant pas opté pour la poursuite du contrat de crédit bail, celui-ci a donc été résilié le 11 mars 2020. La créance de loyers échus depuis le jugement d'ouverture, restés impayés, ne bénéficie pas du traitement préférentiel prévu par les dispositions de l'article L622-17 du code de commerce faute d'être née pour les besoins de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur. Elle relève, dès lors, des dispositions de l'alinéa ' de l'article L622-24 qui dispose qu'elles «'sont soumises aux dispositions du présent article. Les délais courent à compter de la date d'exigibilité de la créance. Toutefois, les créanciers dont les créances résultent d'un contrat à exécution successive déclarent l'intégralité des sommes qui leur sont dues' (...)».
Il résulte en outre du contrat de crédit-bail n°001353759-00 conclu entre la Sarl Co Apte Groupe Santé et Star Lease et des conditions générales du contrat, que le contrat ayant continué à s'exécuter entre la date d'ouverture de la procédure collective, le 20 janvier 2020 et la date de la résiliation, le 11 mars 2020,'les deux échéances de 746,14 euros TTC correspondant à celles de février et mars 2020 étaient dues. Il n'est pas rapporté à cet égard par les intimées que ces deux loyers aient fait l'objet de réglements à leur échéance, de sorte que la créance de la société Star Lease est fondée en son principe comme en son montant.
Sur ce poste de créance, l'ordonnance critiquée sera également infirmée.
Sur les demandes accessoires
Les intimés succombant, sont infondés en leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA Star Lease les frais qu'elle a exposés pour la défense de ses intérêts. Il lui sera allouée au titre des frais irrépétibles la somme de 2 000 euros.
En revanche la demande de la SA Franfinance au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
Déclare la société Star Lease recevable en son intervention volontaire';
Infirme l'ordonnance rendue le 16 mars 2021 (n°2020J00108) par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, en toutes ses dispositions, sauf celles concernant les dépens de la première instance';
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce l'admission de la créance de la société Star Lease portant la référence 11/FRANFINANCE sur l'état des créances, à titre chirographaire et échu, pour les montants suivants':
- 1 498,70 euros au titre des échéances de février et mars 2020 du contrat de crédit-bail n°001353759-00'(article L622-24 alinéa 6 du code de commerce) ;
- 7 224,58 euros au titre de l'indemnité de résiliation;
Ordonne conformément à l'article R624-8 du code de commerce qu'il soit fait mention par le greffe du tribunal des affaires économiques de Marseille de cette décision en marge de l'état des créances
Condamne la société Co Apte Groupe Santé à verser à la société Star Lease la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société Franfinance de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
Ordonne que les dépens, dont distraction au profit de Me Marion Massong, avocat postulant, soient employés en frais privilégiés de la procédure collective.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE