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Décisions

CA Montpellier, 4e ch. civ., 23 octobre 2025, n° 23/05293

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Epilogue (Sté), BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soubeyran

Conseillers :

M. Bruey, Mme Franco

Avocats :

Me Lambert, Me Auché, SCP Ramahandriarivelo - Dubois

Carcassonne, du 28 févr. 2023, n° 20/013…

28 février 2023

FAITS ET PRÉTENTION

1- Selon bon de commande du 27 juin 2019, M. et Mme [C], ci-après les époux [C], ont confié à la société Francenergy, l'installation d'une climatisation réversible dans leur maison d'habitation situé [Adresse 8] à [Localité 12], moyennant un prix de 9 974 euros.

2- Afin de financer cette installation et suivant offre de prêt accepté le 27 juin 2019, les époux [C] ont souscrit auprès de la société BNP Paribas, un prêt d'un montant de 9 900 euros au taux annuel effectif global de 4,95%, d'une durée de 185 mois, remboursable en 180 échéances mensuelles constantes de 79,04 euros, avec différé d'amortissement.

3- Le 31 juillet 2019, une attestation de livraison a été établie par la société Francenergy et les époux [C] ont demandé à la société BNP Paribas de procéder à la mise à disposition des fonds au titre du contrat de crédit.

4- Par acte d'huissier de justice du 29 septembre 2020 et du 2 octobre 2020, les époux [C] ont assigné la société Francenergy, la société BNP Paribas et la société électricité de France devant le président du tribunal judiciaire de Carcassonne, en nullité du contrat principal et du contrat de prêt affecté et en paiement.

5- Avant-dire droit, ils ont sollicité la production, sous astreinte, par la société électricité de France des documents sur la base desquels elle aurait versé une prime de 5 500 euros à un dénommé [S] [F] sur la base de leur dossier et par la société BNP Paribas des documents sur la base desquels elle avait débloqué une somme de 9 900 euros en faveur de la société Francenergy sur la base de documents manifestement frauduleux et/ou entachés de nullité notamment le bon de commande n o 3525 et le contrat de crédit affecté exemplaire prêteur devant être produit en original afin de vérifier sa conformité à l'exemplaire original des emprunteurs.

6- Par jugement du 6 novembre 2020, le tribunal de commerce de Montpellier a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Francenergy et désigné la société Etude Balincourt, ès qualité de mandataire judiciaire, devenue société Epilogue.

Le 14 janvier 2021, les époux [C] ont déclaré leurs créances.

7- Par acte d'huissier de justice du 15 janvier 2021, les époux [C] ont fait assigner la société Etude Balincourt, ès qualité de mandataire judiciaire de la société Francenergy, devant le président du tribunal judiciaire de Carcassonne.

Le 21 septembre 2021, le redressement judiciaire de la société Francenergy a été converti en liquidation judiciaire.

8- Par jugement rendu le 28 février 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Carcassonne a :

' Constaté que la demande de communication de pièces formée par les époux [C] est devenue sans objet

' Déclaré les époux [C] pour l'essentiel fondés en leurs demandes introduites à l'encontre de la société Etude Balincourt, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Francenergy et de la société BNP Paribas

' Prononcé la nullité du contrat principal du 27 Juin 2019 conclu entre les époux [C] et la société Francenergy

' Fixé les créances les époux [C] à la liquidation judiciaire de la société Francenergy :

1/ la somme de 9 974 euros en restitution du prix de vente de l'installation de la climatisation,

2/ la somme de 4 625 euros au titre du coût de la dépose de la climatisation et de la remise en état des lieux,

3/ la somme de 1 500 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Dit qu'à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la signification du présent jugement pour procéder, aux frais de la liquidation judiciaire, à la dépose de l'installation de la climatisation et à la remise en état des lieux, le liquidateur sera considéré comme les ayant abandonnés et les époux [C] pourront déposer ou conserver l'installation ;

' Prononcé la nullité du contrat de prêt affecté du 27 juin 2019 conclu entre les époux [C] et la société BNP Paribas ;

' Dit que Mme [C] doit restituer à la société BNP Paribas la somme de 9 900 euros correspondant au montant du capital

' Ordonné la compensation entre cette dette et la créance de Mme [C] sur la société BNP Paribas au titre de l'intégralité des sommes versées en remboursement du crédit ;

' Condamné en conséquence Mme [C] à payer la somme résiduelle à société BNP Paribas

' Fixé la créance de société BNP Paribas à la liquidation judiciaire de la société Francenergy à la somme de 9 900 euros,

' Rejeté toutes demandes autres ou plus amples des parties ;

' Condamné in solidum la société BNP Paribas et la société Francenergy, représentée par son liquidateur judiciaire, la société Etude Balincourt, aux dépens.

9- Les époux [C] ont relevé appel de ce jugement le 27 octobre 2023.

PRÉTENTIONS

10- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 8 août 2025, les époux [C] demandent à la cour, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de :

' Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Carcassonne le 28 février 2023 en qu'il a :

- Dit que Mme [C] doit restituer à la société BNP Paribas la somme de 9 900 euros correspondant au montant du capital prêté,

- Ordonné la compensation entre cette dette et la créance de Mme [C] au titre de l'intégralité des sommes versées en remboursement du crédit,

- Condamné en conséquence les époux [C] à payer la somme résiduelle à la société BNP Paribas.

' Confirmer le jugement pour le surplus

Et statuant à nouveau,

' Juger que la société BNP Paribas ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation du contrat de crédit affecté à l'égard de Mme [C] compte tenu des fautes personnelles qu'elle a commises engageant sa responsabilité,

' Juger que les époux [C] justifient avoir subi un préjudice en lien avec la faute commise par la société BNP Paribas,

' Condamner la société BNP Paribas à rembourser à Mme [C] une somme de 9 900 euros avec intérêts dus,

' Condamner la société BNP Paribas à payer aux époux [C] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

À titre subsidiaire

Ordonner avant dire droit une mesure d'expertise judiciaire de nature à attester que l'installation ne fonctionnerait pas, étant ajouté que le matériel fait nécessairement l'objet d'une garantie.

11- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 7 juillet 2025, la société BNP Paribas demande à la cour, au visa des articles 9, 1315 du code civil et L312-56 du code de la consommation, de :

' Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

' Débouter les époux [C] de leurs moyens et demandes tels que dirigés contre elle,

' Les condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' Les condamner aux dépens.

12- La société Etude Balincourt (la société Epilogue) n'a pas constitué avocat :

La déclaration d'appel et les conclusions lui ont été signifiées suivants acte délivré le 23 janvier 2024, remise à domicile.

La SARL Epilogue, prise en la personne de Me [O], désignée en qualité d'administrateur ad'hoc par décision du président du tribunal de commerce de Montpellier du 11 avril 2025, a été citée en intervention forcée par acte de commissaire de justice du 23 mai 2025, par remise à l'étude.

13- Vu l'ordonnance de clôture en date du 18/08/2025

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

14- Les époux [C] ont interjeté un appel limité aux chefs du

jugements en ce qu'il a :

DIT que Madame [B] [P] épouse [C] doit restituer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 9900€ correspondant au montant du capital prêté,

- ORDONNE la compensation entre cette dette et la créance de Madame [B] [P] épouse [C] au titre de l'intégralité des sommes versées en remboursement du crédit,

- CONDAMNE en conséquence les époux [C] à payer la somme résiduelle à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

15- Ils poursuivent réformation de ces chefs en faisant valoir qu'après avoir justement prononcé la nullité du contrat principal et la nullité du contrat de crédit affecté, le premier juge a retenu que

'Il n'existe pas de lien de causalité entre le préjudice consistant dans la perte de chance de ne pas avoir contracté et la faute de l'établissement de crédit qui est commise lors de la libération des fonds » avant de conclure qu' « à défaut pour Madame [B] [P] épouse [C] d'avoir subi un préjudice consécutif à la faute de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, elle demeure tenue de rembourser le capital ».

16- Ils soulignent qu'il est de jurisprudence constante que l'emprunteur est tenu de rembourser le capital prêté, sauf s'il démontre que l'établissement prêteur a commis une faute ayant généré un préjudice pour le consommateur et ce, conformément à l'article L.312-55 du Code de la consommation. Ils reprochent ainsi à l'organisme financier d'avoir manqué à son obligation de vigilance en accordant un contrat de crédit accessoire à un contrat ne respectant pas les dispositions d'ordre public du code de la consommation, mais également en débloquant les fonds.

17- Toutefois, les époux [C] ont fait valoir, suivis en cela par le premier juge qui a prononcé la nullité du bon de commande pour dol en raison des pratiques commerciales trompeuses de la SARL France Energy, qu'ils avaient été victimes des manoeuvres de cette société indélicate.

18- Leur préjudice est en lien de causalité exclusif avec ce dol dont il n'est en rien allégué, a fortiori démontré, qu'il relève de la responsabilité quelconque de l'organisme financier, qui n'est en rien redevable des conséquences des agissements d'un prestataire qui n'est pas son préposé ou son mandataire, peu important à cet égard qu'il n'ait pas vérifié la régularité formelle du bon de commande ou libéré les fonds sur le vu d'une attestation de livraison. Les époux [C] l'expriment eux-mêmes clairement en énonçant que 'la seule raison pour laquelle ils ont accepté de contracter avec la SARL FRANCENERGY est la perception de primes promises par la société FRANCENERGY d'un montant de 9974€ pour une installation s'élevant au prix de 9.900€.'

En d'autres termes, peu importe que la BNP Paribas Personal Finance n'ait pas respecté les obligations que la jurisprudence met à sa charge, ce que les époux [C] qualifient de négligence fautive, le bon de commande en sa possession n'étant pas en lui-même révélateur des pratiques commerciales trompeuses - ni promesse de partenariat avec EDF ou usage de son logo, ni promesse de versement de primes n'y figurent -, le préjudice invoqué né de la déconfiture de la société prestataire et de l'impossibilité subséquente de recouvrer les sommes que la nullité du contrat principal entraîne au titre des restitutions et des remises en état restant étranger au comportement de l'organisme financier.

En d'autres termes encore, les époux [C] étaient tellement accrochés par un bon de commande portant sur la fourniture et la pose d'une pompe à chaleur pour un prix de 9974€ intégralement financé par les diverses primes que la société France Energy leur faisait miroiter pour un montant équivalent, qu'il est certain qu'ils auraient contracté, quand bien même la société BNP Paribas Personal Finance les aurait alertés sur les irrégularités formelles du bon de commande. Aucune perte de chance de ne pas contracter n'est caractérisée.

19- Le jugement sera en conséquence confirmé dans ses dispositions déférées.

20- Parties perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, les époux [C] supporteront les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

statuant par arrêt de défaut,

Confirme le jugement en ses dispositions déférées,

Y ajoutant,

Condamne M. [N] [C] et Mme [B] [P] épouse [C] aux dépens d'appel.

Condamne M. [N] [C] et Mme [B] [P] épouse [C] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

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