CA Douai, ch. 8 sect. 3, 23 octobre 2025, n° 24/05108
DOUAI
Arrêt
Autre
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 3
ARRÊT DU 23/10/2025
N° de MINUTE : 25/750
N° RG 24/05108 - N° Portalis DBVT-V-B7I-V25U
Jugement (N° 23/02623) rendu le 03 Octobre 2024 par le Juge de l'exécution de Béthune
APPELANTS
Madame [I] [K]
née le [Date naissance 5] 1967 à [Localité 11] - de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 11]
Monsieur [G] [P]
né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 12] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
SARL OG [Localité 8] représentée par son liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras, prise en la personne de Maître [E] [W]
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai avocat constitué, assisté de Me Paul-Louis Minier, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
INTIMÉE
SARL GBI Groupe Bella Investissement
[Adresse 10]
[Localité 9]
Représentée par Me Pierre Noël, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 25 septembre 2025 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Sylvie Collière, président de chambre
Catherine Convain, conseiller
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 octobre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 2 septembre 2025
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique du 27 juillet 2018, la société M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement ont cédé à Mme [I] [K] et M. [G] [P] l'intégralité des parts composant le capital social de la SARL OG [Localité 8].
Par jugement du 12 avril 2023, le tribunal de commerce d'Arras a :
- débouté la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes, fins et conclusions ;
- constaté l'absence de renonciation de Mme [K] et M. [P] à la nullité de l'acte de cession des parts sociales ;
- donné acte à la SARL OG [Localité 8] de son intervention volontaire à la présente instance ;
- constaté l'existence de man'uvres frauduleuses de la SARL M2 Développement et la société GBI Groupe Bella Investissement destinées à inciter Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- constaté la réticence dolosive de la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement destinées à inciter Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- prononcé la nullité de la cession des parts sociales au 27 juillet 2018 ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au remboursement du prix de cession à savoir, 30 000 euros, respectivement aux parts détenues par chacun des consorts [K] et [P], en ce compris les intérêts légaux calculés à compter du 27 mars 2019 ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au remboursement des avances faites en compte courants d'associés pour un montant de 50 880 euros au profit de Mme [K] et 1 000 euros au profit de M. [P] au jour de la cession, en ce compris les intérêts légaux à compter du 27 mars 2019, ainsi qu'aux frais occasionnés par la
vente ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au paiement de la somme de 655,53 euros au profit de M. [P], au titre du remboursement des intérêts d'emprunt ;
- constaté l'existence d'une erreur substantielle ayant conduit Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- déclaré inopposable la durée de la clause de mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif compte tenu de l'impossibilité pour les concessionnaires d'agir faute de disposer des comptes sociaux ;
- constaté que Mme [K] et M. [P] justifient de la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019, au titre des faits suivants qui constituent des passifs, pertes et/ou préjudices couverts par la garantie :
* des prélèvements postérieurs à la date de signature de l'acte de cession constatés sur le compte courant EUR [XXXXXXXXXX01] de la SARL OG [Localité 8] au 24 octobre 2019 d'un montant total de 5 958,71 euros;
* des abonnements d'adhésion non versés au profit de la SARL OG [Localité 8] d'un montant de 804,68 euros ;
* des factures impayées à hauteur de 454,67 euros ;
* d'une dette d'imposition et de revalorisation de la cotisation sur la valeur ajoutée pour l'année 2017 et 2018 pour un montant de 2 380 euros ;
* de l'existence de charges antérieures au 27 juillet 2018 non comptabilisées au passif de la SARL OG [Localité 8] d'un montant de 233 033,10 euros TTC ;
* de frais d'entretien des locaux estimés à 34 987,45 euros;
* de la garantie au titre du bail commercial à hauteur de 15 000 euros ;
* des montants nantis à hauteur de 172 500 euros à titre d'indemnisation des cessionnaires.
- constaté que les conditions de mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019 sont réunies ;
- condamné conjointement les cédants pour manquement à l'obligation précontractuelle d'information et réticence dolosive, au paiement de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts;
- neutralisé en conséquence le plafonnement de la garantie d'actif et de passif en conséquence de la faute dolosive des cédants ;
- condamné en conséquence la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement sur le fondement de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019, in solidum, au versement d'une provision globale au bénéfice de Mme [K] et M. [P] et de la SARL OG [Localité 8], de 435 118,61 euros ;
- ordonné la communication du bail commercial en date du 31 décembre 2014 et l'arrêté des comptes aux cédants et ce, sous une astreinte de 250 euros par jour de retard ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- condamné solidairement la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement aux entiers dépens ;
- sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement à payer à Mme [K] et M. [P] la somme de 7 500 euros ;
- débouté Mme [K] et M. [P] du surplus de leurs demandes ;
- taxé les frais de greffe à la somme de 126,72 euros.
Mme [K] et M. [P] ont fait signifier ce jugement à la SARL GBI Groupe Bella Investissement et la SARL M2 Développement le 13 juin 2023.
Par déclaration du 1er juin 2023, la société M2 Développement a relevé appel de ce jugement.
Suivant procès-verbal du 10 juillet 2023, M. [P] et Mme [K] et la société OG [Localité 8] ont, en vertu du jugement du 12 avril 2023, fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes de la société GBI Groupe Bella Investissement ouverts dans les livres de la Caisse d'épargne Haut-de-France pour un montant de 440 233,88 euros.
Cette mesure d'exécution fructueuse à hauteur de 1 154,11 euros, a été dénoncée à la société GBI Groupe Bella Investissement le 18 juillet 2023.
Par actes du 14 et 16 août 2023, la SARL GBI Groupe Bella Investissement a fait assigner respectivement la SELARL [W] Aras, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société OG [Localité 8], nommée par jugement du tribunal de commerce d'Arras du 12 juillet 2023 qui a converti en liquidation judiciaire la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la société OG [Localité 8] le 31 mai 2023, M. [P] et Mme [K] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Béthune aux fins de contester cette mesure d'exécution.
Par jugement du 11 octobre 2023, le tribunal de commerce d'Arras, saisi de requêtes en retranchement des sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement, a :
- dit qu'il soit retranché de la décision en date du 12 avril 2023, tant des motifs que du dispositif, l'ensemble des chefs du jugement statuant sur les demandes formées à titre subsidiaire et à titre infiniment subsidiaire ;
- limité les effets de la décision aux seuls points compris dans les demandes respectives des parties ;
- ordonné qu'il soit fait mention de cette rectification en marge de la minute de la décision en cause et des expéditions qui seront délivrées ;
- dit que la décision sera signifiée aux parties par les requérantes ;
- débouté les consorts [K] et [P] de l'ensemble de leurs demandes à titre reconventionnel;
- dit que les frais et dépens seront à la charge du trésor public en compris les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 120,45 euros.
Par ordonnance du 19 octobre 2023, la première présidente de chambre déléguée par le premier président a :
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes formées à titre principal d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 12 avril 2023 ;
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes formées à titre subsidiaire d'aménagement de l'exécution provisoire ;
- condamné la SARL M2 Développement aux dépens ;
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes respectives d'indemnité d'article 700 du code de procédure
civile ;
- condamné les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement à payer à Mme [K], M. [P] et la SELARL [W] et Aras associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la société OG [Localité 8] une indemnité d'article 700 du code de procédure civile de 1 500 euros.
Par jugement contradictoire du 3 octobre 2024, le juge de l'exécution a :
- déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution délivré électroniquement le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France à la demande de la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras et associés, de Mme [K] et de M. [P], pour un montant global de 440 233,88 euros, lequel a été dénoncé au débiteur saisi, la société GBI Groupe Bella Investissement, le 18 juillet 2023, par un autre acte de commissaire de justice également déclaré nul,
- déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites,
- dit n'y avoir lieu de statuer sur les autres moyens et demandes, y compris celles subsidiaires,
- condamné la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras et associés, Mme [K] et M. [P] aux entiers dépens,
- laissé les parties supporter leurs propres frais irrépétibles.
Par déclaration adressée par voie électronique le 25 octobre 2024, Mme [K], M. [P] et la SARL OG [Localité 8], représentée par son liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras prise en la personne de Maître [E] [W] ont interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
Aux termes de leurs premières et dernières conclusions du 7 janvier 2025, Mme [K], M. [P] et la SARL OG [Localité 8], représentée par son liquidateur la SELARL [W]-Aras, demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de le confirmer néanmoins en ce qu'il a débouté la société GBI Groupe Bella Investissement de ses demandes de condamnations des consorts [K] et [P] à lui verser les sommes de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau, de :
- débouter la société GBI Groupe Bella Investissement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- ordonner le maintien de la saisie-attribution signifiée le 10 juillet 2023,
- condamner la société GBI Groupe Bella Investissement au paiement, à chacun des appelants, de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société GBI Groupe Bella Investissement au paiement des entiers frais et dépens.
Aux termes de ses premières et dernières conclusions du 7 mars 2025, la société GBI Groupe Bella Investissement demande à la cour, au visa des articles R.211-1 et suivants, 121-2 et L.121-2 du code des procédures civiles d'exécution et 648 du code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution délivré électroniquement le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France à la demande de la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W]-Aras et associés, de Mme [K] et de M. [P], pour un montant global de 440 233,88 euros, lequel lui a été dénoncé le 18 juillet 2023, par un autre acte de commissaire de justice également déclaré nul,
* déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites,
* condamné la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W]-Aras et associés, Mme [K] et M. [P] aux entiers dépens ;
- débouter Mme [K], M. [P] et la société OG [Localité 8] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
A défaut, si la cour entendait par extraordinaire infirmer le jugement notamment en ce qu'il a déclaré nuls le procès-verbal de saisie-attribution délivré le 10 juillet 2023 et l'acte de dénonciation du 18 juillet 2023 et déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites :
A titre subsidiaire,
- juger que le procès-verbal de saisie-attribution comporte des irrégularités lui causant des griefs, en l'occurrence le caractère erroné du titre exécutoire visé dans le procès-verbal de saisie-attribution ;
En conséquence,
- prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-attribution signifiée électroniquement le 10 juillet 2023 ;
- prononcer la nullité de l'acte de dénonciation de saisie-attribution signifiée le 18 juillet 2023;
A défaut, à titre infiniment subsidiaire :
- juger que la société OG [Localité 8] n'est pas titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible à l'encontre de la société GBI Groupe Bella Investissement ;
En conséquence,
- ordonner la mainlevée immédiate de la saisie-attribution signifiée le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France et dénoncée le 18 juillet 2023 ;
- ordonner le remboursement des sommes prélevées à parfaire au jour du
jugement ;
Reconventionnellement,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de statuer sur les autres moyens et demandes, y compris celles subsidiaires ;
En conséquence, et statuant à nouveau :
- juger que la saisie-attribution pratiquée pour le compte de Mme [K], M. [P] et la société OG [Localité 8] est disproportionnée,
- ordonner la main levée immédiate de la saisie-attribution susvisée ;
- juger que la saisie-attribution pratiquée est abusive ;
- condamner Mme [K] et M. [P] à lui verser chacun la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
En tout état de cause :
- condamner Mme [K] et M. [P] au paiement chacun de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
MOTIFS
Sur la nullité du procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2024 :
- en raison de l'absence de désignation de l'organe représentant la société OGC [Localité 8]:
Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte de commissaire de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs : (') 2° b) si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement, cette mention étant prescrite à peine de nullité.
La nullité des actes de commissaire de justice est, en application de l'article 649 du même code, régie par les dispositions qui gouvernent les actes de procédure.
L'article 114 du même code subordonne le prononcé de la nullité de forme à la justification d'un grief par celui qui l'invoque, même lorsque la formalité méconnue est substantielle ou d'ordre public.
En l'espèce, le procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2023 mentionne qu'il a été délivré à la demande de Mme [I] [K], M. [G] [P] et la 'SARL OG [Localité 8] immatriculée au RCS d'Arras sous le numéro 814 633 558 dont le siège social est [Adresse 6] [Localité 8], prise en la personne de son gérant'.
La société GBI Groupe Bella Investissement fait valoir que la mention 'prise en la personne de son gérant' est fausse car le jugement du 12 avril 2023 a prononcé la nullité de la cession de parts sociales du 27 juillet 2018, cette nullité entraînant par voie de conséquence la nullité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire des associés du 3 août 2018 nommant Mme [K] et M. [P] cogérants de la société OG [Localité 8].
Or, l'annulation de la cession de parts sociales du 27 juillet 2018 n'a pas entraîné automatiquement l'annulation des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 3 août 2018 au cours de laquelle Mme [K] et M. [P] ont été désignés cogérants de la société OG [Localité 8], le procès-verbal du 3 août 2018 ayant été déposé au registre du commerce et des sociétés le 10 octobre 2018.
A défaut de preuve d'annulation de ces délibérations, la société restait donc représentée par ses gérants, Mme [K] et M. [P], ou par l'un d'eux et la mention portée sur le procès-verbal de saisie-attribution n'était pas fausse.
En outre, la mention dans un acte de commissaire de justice du nom de la personne physique, organe représentant de la personne morale requérante, n'est pas exigée par l'article 648 du code de procédure civile.
Enfin, contrairement à ce qui a été retenu par le jugement déféré, le procès-verbal du 10 juillet 2024 n'avait pas à faire mention du 'lien de droit ou rapport' entre Mme [K], M. [P] et la société OGC [Localité 8].
- en raison de la mention erronée du titre exécutoire :
Selon l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier procède à la saisie par acte du commissaire de justice signifié au tiers, qui doit contenir à peine de nullité l'indication du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée.
La nullité des actes de commissaire de justice est, en application de l'article 649 du code de procédure civile, régie par les dispositions qui gouvernent les actes de procédure.
L'article 114 du même code subordonne le prononcé de la nullité de forme à la justification d'un grief par celui qui l'invoque, même lorsque la formalité méconnue est substantielle ou d'ordre public.
En l'espèce, l'acte du 10 juillet 2023 mentionne que la saisie-attribution est pratiquée 'en vertu d'un jugement contradictoire rendu en premier ressort par le président du tribunal de commerce d'Arras le 12 avril 2023' alors qu'il s'agit d'un jugement rendu par le tribunal de commerce d'Arras.
La mention erronée du président comme auteur du jugement du 12 avril 2023 n'a pu causer aucun grief à la société GBI Groupe Bella Investissement qui n'a pu se méprendre sur le titre exécutoire invoqué pour fonder la mesure d'exécution, aucune autre décision que le jugement du tribunal de commerce d'Arras signifié à la société GBI le 13 juin 2023 n'ayant été rendue le 12 avril 2023.
- en raison de l'absence de titre exécutoire du fait de la rétractation de l'exécution provisoire :
Selon l'article 500 du code de procédure civile, à force de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution.
Le jugement susceptible d'un tel recours acquiert la même force à l'expiration du délai du recours si ce dernier n'a pas été exercé dans le délai.
Selon l'article 501 du même code, le jugement est exécutoire, sous les conditions qui suivent, à partir du moment où il passe en force de chose jugée à moins que le débiteur ne bénéficie d'un délai de grâce ou le créancier de l'exécution provisoire.
En l'espèce, le jugement du 12 avril 2023 mentionne dans son dispositif que l'exécution provisoire est ordonnée. En effet, il résulte de ce jugement que le tribunal de commerce d'Arras a été saisi par l'assignation que Mme [K] et M. [P] ont fait délivrer aux sociétés M2 développement et GBI Groupe Bella Investissement le 29 mars 2019, de sorte que les dispositions applicables étaient celles de l'article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure à celle résultant du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et que l'exécution provisoire devait être ordonnée, la décision en cause n'en bénéficiant pas de plein droit.
Toutefois, par jugement du 11 octobre 2023 consécutif aux requêtes en retranchement des sociétés GBI Groupe Bella Investissement et M2 Développement, le tribunal de commerce d'Arras a 'dit qu'il soit retranché de la décision rendue en date du 12 avril 2023, tant des motifs que du dispositif, l'ensemble des chefs de jugement statuant sur les demandes formées à titre subsidiaire et à titre infiniment subsidiaire'. Le jugement du 11 octobre 2023 a, dans ses motifs, listé les chefs du jugement du 12 avril 2023 concernés, au nombre desquels le chef qui ordonne l'exécution provisoire.
Il en résulte que le jugement du 12 avril 2023 rectifié par le jugement du 11 octobre 2023 n'était donc pas assorti de l'exécution provisoire et qu'en raison de l'appel interjeté, il n'est pas passé en force de chose jugée et n'a pas de caractère exécutoire, l'ordonnance de la première présidente de chambre déléguée par le premier président du 19 octobre 2023 qui a débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes d'arrêt et d'aménagement de l'exécution provisoire du jugement du 12 avril 2023, alors que cette décision, rectifiée par le jugement du 11 octobre 2023, n'en était pas assortie, est sans incidence.
Le jugement du 12 avril 2023 ne pouvait donc fonder la saisie-attribution pratiquée le 10 juillet 2024. Cette acte pratiqué en exécution d'un jugement frappé d'appel non assorti de l'exécution provisoire est donc nul.
Il convient donc par substitution de motifs de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2023 et l'acte de dénonciation du 18 juillet 2023 qui en est la suite.
Sur la demande en dommages et intérêts de la société GBI Groupe Bella Investissement :
Selon l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d'abus de saisie.
La société GBI Groupe Bella Investissement ne démontre pas le préjudice allégué, à savoir que la saisie-attribution aurait mis en péril son bon fonctionnement et porté atteinte à sa réputation auprès des établissements bancaires.
Il convient donc de la débouter de sa demande en dommages et intérêts, le premier juge n'ayant, à tort, pas statué sur cette demande qui était pourtant formulée 'en tout état de cause'.
Sur les frais du procès :
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu'il a débouté Mme [K], M. [P] et la société OGC [Localité 8] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Partie perdante en appel, Mme [K] et M. [P] seront condamnés aux dépens d'appel ainsi qu'à régler à la société GBI Groupe Bella Investissement une somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles que cette dernière a été contrainte d'exposer en appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres moyens et demandes ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute la société GBI Groupe Bella Investissement de sa demande en dommages et intérêts ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [I] [K] et M. [G] [P] à régler à la société Groupe Bella Investissement la somme totale de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne Mme [I] [K] et M. [G] [P] aux dépens d'appel.
Le greffier
Ismérie CAPIEZ
Le président
Sylvie COLLIERE
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 3
ARRÊT DU 23/10/2025
N° de MINUTE : 25/750
N° RG 24/05108 - N° Portalis DBVT-V-B7I-V25U
Jugement (N° 23/02623) rendu le 03 Octobre 2024 par le Juge de l'exécution de Béthune
APPELANTS
Madame [I] [K]
née le [Date naissance 5] 1967 à [Localité 11] - de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 11]
Monsieur [G] [P]
né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 12] - de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
SARL OG [Localité 8] représentée par son liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras, prise en la personne de Maître [E] [W]
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai avocat constitué, assisté de Me Paul-Louis Minier, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
INTIMÉE
SARL GBI Groupe Bella Investissement
[Adresse 10]
[Localité 9]
Représentée par Me Pierre Noël, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 25 septembre 2025 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Sylvie Collière, président de chambre
Catherine Convain, conseiller
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 octobre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 2 septembre 2025
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique du 27 juillet 2018, la société M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement ont cédé à Mme [I] [K] et M. [G] [P] l'intégralité des parts composant le capital social de la SARL OG [Localité 8].
Par jugement du 12 avril 2023, le tribunal de commerce d'Arras a :
- débouté la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes, fins et conclusions ;
- constaté l'absence de renonciation de Mme [K] et M. [P] à la nullité de l'acte de cession des parts sociales ;
- donné acte à la SARL OG [Localité 8] de son intervention volontaire à la présente instance ;
- constaté l'existence de man'uvres frauduleuses de la SARL M2 Développement et la société GBI Groupe Bella Investissement destinées à inciter Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- constaté la réticence dolosive de la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement destinées à inciter Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- prononcé la nullité de la cession des parts sociales au 27 juillet 2018 ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au remboursement du prix de cession à savoir, 30 000 euros, respectivement aux parts détenues par chacun des consorts [K] et [P], en ce compris les intérêts légaux calculés à compter du 27 mars 2019 ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au remboursement des avances faites en compte courants d'associés pour un montant de 50 880 euros au profit de Mme [K] et 1 000 euros au profit de M. [P] au jour de la cession, en ce compris les intérêts légaux à compter du 27 mars 2019, ainsi qu'aux frais occasionnés par la
vente ;
- condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement in solidum au paiement de la somme de 655,53 euros au profit de M. [P], au titre du remboursement des intérêts d'emprunt ;
- constaté l'existence d'une erreur substantielle ayant conduit Mme [K] et M. [P] à la signature de l'acte de cession de parts sociales ;
- déclaré inopposable la durée de la clause de mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif compte tenu de l'impossibilité pour les concessionnaires d'agir faute de disposer des comptes sociaux ;
- constaté que Mme [K] et M. [P] justifient de la mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019, au titre des faits suivants qui constituent des passifs, pertes et/ou préjudices couverts par la garantie :
* des prélèvements postérieurs à la date de signature de l'acte de cession constatés sur le compte courant EUR [XXXXXXXXXX01] de la SARL OG [Localité 8] au 24 octobre 2019 d'un montant total de 5 958,71 euros;
* des abonnements d'adhésion non versés au profit de la SARL OG [Localité 8] d'un montant de 804,68 euros ;
* des factures impayées à hauteur de 454,67 euros ;
* d'une dette d'imposition et de revalorisation de la cotisation sur la valeur ajoutée pour l'année 2017 et 2018 pour un montant de 2 380 euros ;
* de l'existence de charges antérieures au 27 juillet 2018 non comptabilisées au passif de la SARL OG [Localité 8] d'un montant de 233 033,10 euros TTC ;
* de frais d'entretien des locaux estimés à 34 987,45 euros;
* de la garantie au titre du bail commercial à hauteur de 15 000 euros ;
* des montants nantis à hauteur de 172 500 euros à titre d'indemnisation des cessionnaires.
- constaté que les conditions de mise en 'uvre de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019 sont réunies ;
- condamné conjointement les cédants pour manquement à l'obligation précontractuelle d'information et réticence dolosive, au paiement de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts;
- neutralisé en conséquence le plafonnement de la garantie d'actif et de passif en conséquence de la faute dolosive des cédants ;
- condamné en conséquence la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement sur le fondement de la garantie d'actif et de passif régularisée le 27 mars 2019, in solidum, au versement d'une provision globale au bénéfice de Mme [K] et M. [P] et de la SARL OG [Localité 8], de 435 118,61 euros ;
- ordonné la communication du bail commercial en date du 31 décembre 2014 et l'arrêté des comptes aux cédants et ce, sous une astreinte de 250 euros par jour de retard ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;
- condamné solidairement la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement aux entiers dépens ;
- sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, condamné la SARL M2 Développement et la SARL GBI Groupe Bella Investissement à payer à Mme [K] et M. [P] la somme de 7 500 euros ;
- débouté Mme [K] et M. [P] du surplus de leurs demandes ;
- taxé les frais de greffe à la somme de 126,72 euros.
Mme [K] et M. [P] ont fait signifier ce jugement à la SARL GBI Groupe Bella Investissement et la SARL M2 Développement le 13 juin 2023.
Par déclaration du 1er juin 2023, la société M2 Développement a relevé appel de ce jugement.
Suivant procès-verbal du 10 juillet 2023, M. [P] et Mme [K] et la société OG [Localité 8] ont, en vertu du jugement du 12 avril 2023, fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes de la société GBI Groupe Bella Investissement ouverts dans les livres de la Caisse d'épargne Haut-de-France pour un montant de 440 233,88 euros.
Cette mesure d'exécution fructueuse à hauteur de 1 154,11 euros, a été dénoncée à la société GBI Groupe Bella Investissement le 18 juillet 2023.
Par actes du 14 et 16 août 2023, la SARL GBI Groupe Bella Investissement a fait assigner respectivement la SELARL [W] Aras, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société OG [Localité 8], nommée par jugement du tribunal de commerce d'Arras du 12 juillet 2023 qui a converti en liquidation judiciaire la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la société OG [Localité 8] le 31 mai 2023, M. [P] et Mme [K] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Béthune aux fins de contester cette mesure d'exécution.
Par jugement du 11 octobre 2023, le tribunal de commerce d'Arras, saisi de requêtes en retranchement des sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement, a :
- dit qu'il soit retranché de la décision en date du 12 avril 2023, tant des motifs que du dispositif, l'ensemble des chefs du jugement statuant sur les demandes formées à titre subsidiaire et à titre infiniment subsidiaire ;
- limité les effets de la décision aux seuls points compris dans les demandes respectives des parties ;
- ordonné qu'il soit fait mention de cette rectification en marge de la minute de la décision en cause et des expéditions qui seront délivrées ;
- dit que la décision sera signifiée aux parties par les requérantes ;
- débouté les consorts [K] et [P] de l'ensemble de leurs demandes à titre reconventionnel;
- dit que les frais et dépens seront à la charge du trésor public en compris les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 120,45 euros.
Par ordonnance du 19 octobre 2023, la première présidente de chambre déléguée par le premier président a :
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes formées à titre principal d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 12 avril 2023 ;
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes formées à titre subsidiaire d'aménagement de l'exécution provisoire ;
- condamné la SARL M2 Développement aux dépens ;
- débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes respectives d'indemnité d'article 700 du code de procédure
civile ;
- condamné les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement à payer à Mme [K], M. [P] et la SELARL [W] et Aras associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la société OG [Localité 8] une indemnité d'article 700 du code de procédure civile de 1 500 euros.
Par jugement contradictoire du 3 octobre 2024, le juge de l'exécution a :
- déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution délivré électroniquement le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France à la demande de la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras et associés, de Mme [K] et de M. [P], pour un montant global de 440 233,88 euros, lequel a été dénoncé au débiteur saisi, la société GBI Groupe Bella Investissement, le 18 juillet 2023, par un autre acte de commissaire de justice également déclaré nul,
- déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites,
- dit n'y avoir lieu de statuer sur les autres moyens et demandes, y compris celles subsidiaires,
- condamné la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras et associés, Mme [K] et M. [P] aux entiers dépens,
- laissé les parties supporter leurs propres frais irrépétibles.
Par déclaration adressée par voie électronique le 25 octobre 2024, Mme [K], M. [P] et la SARL OG [Localité 8], représentée par son liquidateur judiciaire la SELARL [W] Aras prise en la personne de Maître [E] [W] ont interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
Aux termes de leurs premières et dernières conclusions du 7 janvier 2025, Mme [K], M. [P] et la SARL OG [Localité 8], représentée par son liquidateur la SELARL [W]-Aras, demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de le confirmer néanmoins en ce qu'il a débouté la société GBI Groupe Bella Investissement de ses demandes de condamnations des consorts [K] et [P] à lui verser les sommes de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau, de :
- débouter la société GBI Groupe Bella Investissement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- ordonner le maintien de la saisie-attribution signifiée le 10 juillet 2023,
- condamner la société GBI Groupe Bella Investissement au paiement, à chacun des appelants, de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société GBI Groupe Bella Investissement au paiement des entiers frais et dépens.
Aux termes de ses premières et dernières conclusions du 7 mars 2025, la société GBI Groupe Bella Investissement demande à la cour, au visa des articles R.211-1 et suivants, 121-2 et L.121-2 du code des procédures civiles d'exécution et 648 du code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution délivré électroniquement le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France à la demande de la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W]-Aras et associés, de Mme [K] et de M. [P], pour un montant global de 440 233,88 euros, lequel lui a été dénoncé le 18 juillet 2023, par un autre acte de commissaire de justice également déclaré nul,
* déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites,
* condamné la société OG [Localité 8], ayant pour liquidateur judiciaire la SELARL [W]-Aras et associés, Mme [K] et M. [P] aux entiers dépens ;
- débouter Mme [K], M. [P] et la société OG [Localité 8] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
A défaut, si la cour entendait par extraordinaire infirmer le jugement notamment en ce qu'il a déclaré nuls le procès-verbal de saisie-attribution délivré le 10 juillet 2023 et l'acte de dénonciation du 18 juillet 2023 et déclaré nulle la procédure de saisie-attribution ainsi initiée et ses suites :
A titre subsidiaire,
- juger que le procès-verbal de saisie-attribution comporte des irrégularités lui causant des griefs, en l'occurrence le caractère erroné du titre exécutoire visé dans le procès-verbal de saisie-attribution ;
En conséquence,
- prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-attribution signifiée électroniquement le 10 juillet 2023 ;
- prononcer la nullité de l'acte de dénonciation de saisie-attribution signifiée le 18 juillet 2023;
A défaut, à titre infiniment subsidiaire :
- juger que la société OG [Localité 8] n'est pas titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible à l'encontre de la société GBI Groupe Bella Investissement ;
En conséquence,
- ordonner la mainlevée immédiate de la saisie-attribution signifiée le 10 juillet 2023 à la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France et dénoncée le 18 juillet 2023 ;
- ordonner le remboursement des sommes prélevées à parfaire au jour du
jugement ;
Reconventionnellement,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de statuer sur les autres moyens et demandes, y compris celles subsidiaires ;
En conséquence, et statuant à nouveau :
- juger que la saisie-attribution pratiquée pour le compte de Mme [K], M. [P] et la société OG [Localité 8] est disproportionnée,
- ordonner la main levée immédiate de la saisie-attribution susvisée ;
- juger que la saisie-attribution pratiquée est abusive ;
- condamner Mme [K] et M. [P] à lui verser chacun la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
En tout état de cause :
- condamner Mme [K] et M. [P] au paiement chacun de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
MOTIFS
Sur la nullité du procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2024 :
- en raison de l'absence de désignation de l'organe représentant la société OGC [Localité 8]:
Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte de commissaire de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs : (') 2° b) si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement, cette mention étant prescrite à peine de nullité.
La nullité des actes de commissaire de justice est, en application de l'article 649 du même code, régie par les dispositions qui gouvernent les actes de procédure.
L'article 114 du même code subordonne le prononcé de la nullité de forme à la justification d'un grief par celui qui l'invoque, même lorsque la formalité méconnue est substantielle ou d'ordre public.
En l'espèce, le procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2023 mentionne qu'il a été délivré à la demande de Mme [I] [K], M. [G] [P] et la 'SARL OG [Localité 8] immatriculée au RCS d'Arras sous le numéro 814 633 558 dont le siège social est [Adresse 6] [Localité 8], prise en la personne de son gérant'.
La société GBI Groupe Bella Investissement fait valoir que la mention 'prise en la personne de son gérant' est fausse car le jugement du 12 avril 2023 a prononcé la nullité de la cession de parts sociales du 27 juillet 2018, cette nullité entraînant par voie de conséquence la nullité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire des associés du 3 août 2018 nommant Mme [K] et M. [P] cogérants de la société OG [Localité 8].
Or, l'annulation de la cession de parts sociales du 27 juillet 2018 n'a pas entraîné automatiquement l'annulation des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 3 août 2018 au cours de laquelle Mme [K] et M. [P] ont été désignés cogérants de la société OG [Localité 8], le procès-verbal du 3 août 2018 ayant été déposé au registre du commerce et des sociétés le 10 octobre 2018.
A défaut de preuve d'annulation de ces délibérations, la société restait donc représentée par ses gérants, Mme [K] et M. [P], ou par l'un d'eux et la mention portée sur le procès-verbal de saisie-attribution n'était pas fausse.
En outre, la mention dans un acte de commissaire de justice du nom de la personne physique, organe représentant de la personne morale requérante, n'est pas exigée par l'article 648 du code de procédure civile.
Enfin, contrairement à ce qui a été retenu par le jugement déféré, le procès-verbal du 10 juillet 2024 n'avait pas à faire mention du 'lien de droit ou rapport' entre Mme [K], M. [P] et la société OGC [Localité 8].
- en raison de la mention erronée du titre exécutoire :
Selon l'article R. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier procède à la saisie par acte du commissaire de justice signifié au tiers, qui doit contenir à peine de nullité l'indication du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée.
La nullité des actes de commissaire de justice est, en application de l'article 649 du code de procédure civile, régie par les dispositions qui gouvernent les actes de procédure.
L'article 114 du même code subordonne le prononcé de la nullité de forme à la justification d'un grief par celui qui l'invoque, même lorsque la formalité méconnue est substantielle ou d'ordre public.
En l'espèce, l'acte du 10 juillet 2023 mentionne que la saisie-attribution est pratiquée 'en vertu d'un jugement contradictoire rendu en premier ressort par le président du tribunal de commerce d'Arras le 12 avril 2023' alors qu'il s'agit d'un jugement rendu par le tribunal de commerce d'Arras.
La mention erronée du président comme auteur du jugement du 12 avril 2023 n'a pu causer aucun grief à la société GBI Groupe Bella Investissement qui n'a pu se méprendre sur le titre exécutoire invoqué pour fonder la mesure d'exécution, aucune autre décision que le jugement du tribunal de commerce d'Arras signifié à la société GBI le 13 juin 2023 n'ayant été rendue le 12 avril 2023.
- en raison de l'absence de titre exécutoire du fait de la rétractation de l'exécution provisoire :
Selon l'article 500 du code de procédure civile, à force de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution.
Le jugement susceptible d'un tel recours acquiert la même force à l'expiration du délai du recours si ce dernier n'a pas été exercé dans le délai.
Selon l'article 501 du même code, le jugement est exécutoire, sous les conditions qui suivent, à partir du moment où il passe en force de chose jugée à moins que le débiteur ne bénéficie d'un délai de grâce ou le créancier de l'exécution provisoire.
En l'espèce, le jugement du 12 avril 2023 mentionne dans son dispositif que l'exécution provisoire est ordonnée. En effet, il résulte de ce jugement que le tribunal de commerce d'Arras a été saisi par l'assignation que Mme [K] et M. [P] ont fait délivrer aux sociétés M2 développement et GBI Groupe Bella Investissement le 29 mars 2019, de sorte que les dispositions applicables étaient celles de l'article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure à celle résultant du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et que l'exécution provisoire devait être ordonnée, la décision en cause n'en bénéficiant pas de plein droit.
Toutefois, par jugement du 11 octobre 2023 consécutif aux requêtes en retranchement des sociétés GBI Groupe Bella Investissement et M2 Développement, le tribunal de commerce d'Arras a 'dit qu'il soit retranché de la décision rendue en date du 12 avril 2023, tant des motifs que du dispositif, l'ensemble des chefs de jugement statuant sur les demandes formées à titre subsidiaire et à titre infiniment subsidiaire'. Le jugement du 11 octobre 2023 a, dans ses motifs, listé les chefs du jugement du 12 avril 2023 concernés, au nombre desquels le chef qui ordonne l'exécution provisoire.
Il en résulte que le jugement du 12 avril 2023 rectifié par le jugement du 11 octobre 2023 n'était donc pas assorti de l'exécution provisoire et qu'en raison de l'appel interjeté, il n'est pas passé en force de chose jugée et n'a pas de caractère exécutoire, l'ordonnance de la première présidente de chambre déléguée par le premier président du 19 octobre 2023 qui a débouté les sociétés M2 Développement et GBI Groupe Bella Investissement de leurs demandes d'arrêt et d'aménagement de l'exécution provisoire du jugement du 12 avril 2023, alors que cette décision, rectifiée par le jugement du 11 octobre 2023, n'en était pas assortie, est sans incidence.
Le jugement du 12 avril 2023 ne pouvait donc fonder la saisie-attribution pratiquée le 10 juillet 2024. Cette acte pratiqué en exécution d'un jugement frappé d'appel non assorti de l'exécution provisoire est donc nul.
Il convient donc par substitution de motifs de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré nul le procès-verbal de saisie-attribution du 10 juillet 2023 et l'acte de dénonciation du 18 juillet 2023 qui en est la suite.
Sur la demande en dommages et intérêts de la société GBI Groupe Bella Investissement :
Selon l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d'abus de saisie.
La société GBI Groupe Bella Investissement ne démontre pas le préjudice allégué, à savoir que la saisie-attribution aurait mis en péril son bon fonctionnement et porté atteinte à sa réputation auprès des établissements bancaires.
Il convient donc de la débouter de sa demande en dommages et intérêts, le premier juge n'ayant, à tort, pas statué sur cette demande qui était pourtant formulée 'en tout état de cause'.
Sur les frais du procès :
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu'il a débouté Mme [K], M. [P] et la société OGC [Localité 8] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Partie perdante en appel, Mme [K] et M. [P] seront condamnés aux dépens d'appel ainsi qu'à régler à la société GBI Groupe Bella Investissement une somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles que cette dernière a été contrainte d'exposer en appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres moyens et demandes ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Déboute la société GBI Groupe Bella Investissement de sa demande en dommages et intérêts ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [I] [K] et M. [G] [P] à régler à la société Groupe Bella Investissement la somme totale de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne Mme [I] [K] et M. [G] [P] aux dépens d'appel.
Le greffier
Ismérie CAPIEZ
Le président
Sylvie COLLIERE