CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 23 octobre 2025, n° 22/07268
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2025
(n° /2025, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 22/07268 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFT5J
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 mars 2022- Tribunal judiciaire de PARIS (18ème chambre, 1ère section) - RG n° 20/07809
APPELANTE
Société S.C.I. 53 VICTOR HUGO, société civile immobilière
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 12] sous le n° 504 964 784
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Yoni MARCIANO, avocat au barreau de Hauts-de-Seine, toque : P0316
INTIMÉE
Société KEITH TITANIUM, société à responsabilité limitée, exerçant sous le nom commercial HI-TECH INTERNATIONAL
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 10] sous le n° 820 881 738
Prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représentée par Me Naïma HABIB-GOLDBERG, avocat au barreau de l'Essonne, substituée à l'audience par Me Alizée CERVELLO, avocat au barreau de Paris, toque : E2344
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Stéphanie Dupont, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Yulia TREFILOVA, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 24 février 2017, la société dénommée S.C.I. 53 Victor Hugo (ci-après la SCI 53 Victor Hugo) a consenti à la société Keith Titanium un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 1] à Paris 13ème, pour une durée de 9 ans à compter du 1er mars 2017 et moyennant un loyer annuel hors taxe en principal de 21.600 euros outre une provision sur charges de 100 euros par mois.
La destination contractuelle des locaux est 'négoce de produits de beauté, vente et réparation de produits hi-tech'.
Un dépôt de garantie d'un montant de 10.800 €, correspondant à six mois de loyer, a été versé par la société Keith Titanium à la bailleresse.
Par lettre recommandé avec demande d'avis de réception du 7 octobre 2019, la société Keith Titanium s'est prévalue de la résiliation amiable de ce bail, en date du 15 mai 2019, pour réclamer la restitution du dépôt de garantie.
La SCI [Adresse 7] s'est opposée à cette demande et a sollicité le paiement des loyers contractuels jusqu'au 26 février 2020, date du terme de la première période triennale du bail.
Par acte du 26 août 2020, la société Keith Titanium a fait assigner la SCI [Adresse 7] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir le remboursement de son dépôt de garantie.
Par jugement du 1er mars 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
dit que le bail du 24 février 2017 consenti par la SCI [Adresse 7] à la société Keith Titanium sur les locaux situés [Adresse 2] à Paris 13ème a pris fin le 31 mai 2019 ;
dit que la SCI [Adresse 7] est débitrice à l'égard de la société Keith Titanium de la somme de 10.800 euros correspondant au montant du dépôt de garantie ;
dit que la société Keith Titanium est débitrice à l'égard de la SCI [Adresse 7] de la somme de 3.925,54 euros correspondant aux loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 ;
condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 6.874,14 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
condamné la SCI 53 Victor Hugo à payer à la société Keith Titanium en application de l'article L.145-40 du code de commerce, les intérêts échus à compter du 24 février 2017 sur la somme de 7.200 euros au taux pratiqué par la Banque de France ;
débouté la société Keith Titanium de sa demande de dommages et intérêts ;
débouté la SCI 53 Victor Hugo de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
débouté la SCI [Adresse 7] de ses autres demandes de paiement ;
condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code procédure civile ;
condamné la SCI [Adresse 5] Victor [Adresse 11] à payer les dépens de l'instance ;
ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 7 avril 2022, la SCI [Adresse 7] a interjeté appel du jugement en critiquant tous les chefs du dispositif à l'exception de celui qui dit que la société Keith Titanium était débitrice à l'égard de la SCI [Adresse 7] de la somme de 3.925,54 euros correspondant aux loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 et de celui qui débouté la société Keith Titanium de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 décembre 2024.
PRETENTIONS ET MOYENS
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26 octobre 2022, la SCI [Adresse 7] demande à la cour de :
infirmer le jugement sur tous les chefs attaqués par la SCI,
statuant à nouveau,
débouter la société Keith Titanium de l'ensemble de ses demandes,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI [Adresse 7] la somme de 21 590 euros au titre des loyers dus jusqu'à la fin de la période triennale,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI [Adresse 7] la somme de 3 300 euros au titre du remboursement de la commission payée par la SCI pour relouer son local,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI 53 Victor Hugo la somme de 10 000 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI 53 Victor [Adresse 11] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société Keith Titanium aux entiers dépens.
La SCI [Adresse 7] fait valoir :
Sur l'absence de résiliation amiable du bail,
- que la résiliation d'un bail ne se présume pas ;
- que la bailleresse n'a pas donné congé ;
- que la locataire n'a pas donné congé selon les modalités prévues à l'article L.145-4 du code de commerce ; qu'elle s'est contentée d'informer la bailleresse de son départ des locaux ; que la bailleresse a été mise devant le fait accompli et n'a jamais accepté ce départ ;
- que la locataire était engagée jusqu'au 29 février 2020 ;
- qu'il ne saurait être tiré argument du fait que la bailleresse n'a pas restitué les clefs à la locataire après son départ ;
- que le silence de la bailleresse à la suite du départ de la locataire et la relocation des locaux ne valent pas acceptation par la bailleresse de la résiliation du bail ;
Sur le préjudice de la SCI [Adresse 7],
- qu'elle a versé une commission d'un montant de 3 300 euros à l'agence immobilière qu'elle a mandatée pour lui trouver un nouveau locataire ; que cette dépense est consécutive au départ précipité de la locataire, sans l'accord du propriétaire ;
Sur les demandes de la société [Adresse 7],
- que la société Keith Titanium a agi en justice de manière abusive pour avoir assigné sa bailleresse après avoir quitté le local sans avoir donné congé ; qu'elle réclame le remboursement de son dépôt de garantie alors qu'elle doit de l'argent à sa bailleresse.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 5 août 2022, la société Keith Titanium demande à la cour de :
rejeter l'ensemble des demande de la SCI [Adresse 7] ;
confirmer le jugement du 1er mars 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
condamner la SCI [Adresse 7] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 de code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société Keith Titanium fait valoir :
Sur le rejet de la demande au titre du paiement des loyers postérieurs à la remise des clés,
- que la bailleresse n'a pas contesté la remise des clés du local, le 15 mai 2019 ; que les locaux ont été reloués dès le mois de juin 2019 ;
- qu'en dehors de la résiliation triennale, rien ne s'oppose à ce que les parties conviennent à tout moment d'une résiliation anticipée amiable du bail, sans se soumettre nécessairement aux conditions de formes et de délai prévues pour le congé par le code de commerce ;
Sur le rejet de la demande de remboursement des frais de commission d'agence,
- que la demande de remboursement des frais de commission d'agence ne repose sur aucun fondement juridique ;
Sur le rejet de la demande au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- que l'amende civile prononcée sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile bénéficie au Trésor public et non au demandeur ;
- que la SCI [Adresse 7] ne caractérise pas les circonstances de nature à faire dégéner en faute son droit de demande le remboursement du dépôt de garantie.
Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.
SUR CE,
Sur la résiliation du bail,
En application de l'article 1193 du code civil, les contrats peuvent être révoqués du consentement mutuel des parties.
Il est constant que l'accord révocatoire des parties n'est soumis à aucune condition de forme et qu'il peut être tacite, l'accord tacite se déduisant de circonstances établissant sans équivoque la volonté des parties de mettre fin au contrat.
En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que la société Keith Titanium a quitté les lieux en remettant les clés à la SCI [Adresse 7], que la SCI [Adresse 7] a accepté les clés sans émettre ni protestation ni réserve quant au départ de sa locataire, étant observé qu'au moment de son départ la locataire n'était pas à jour de ses loyers, et que la société Keith Titanium a immédiatement reloué les locaux à un nouveau locataire. En effet, les locaux ont été restitués le 15 mai 2019 et le nouveau locataire prenait contact avec la société Keith Titanium dès le 24 mai 2019 pour obtenir les informations nécessaires au transfert du contrat de fourniture d'électricité des locaux.
Ces circonstances caractérisent l'accord des parties pour mettre fin au bail du 24 février 2017 avant son terme.
En présence d'un accord révocatoire tacite des parties, les moyens soulevés par la SCI [Adresse 7] et fondés sur l'absence de congé sont inopérants.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit que le bail du 24 février 2017, portant sur les locaux situés [Adresse 1] à Paris 13ème, conclu entre la SCI [Adresse 7] et la société Keith Titanium avait pris fin le 31 mai 2019 et en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande en paiement des loyers postérieurs au 31 mai 2019.
Sur le dépôt de garantie
Il est acquis que la société Keith Titanium a versé un dépôt de garantie d'un montant de 10.800 € à la SCI [Adresse 7].
Le bail du 24 février 2017 stipule que ce dépôt de garantie sera restitué au preneur à l'expiration du bail, déduction faite de toute somme dont il pourrait être débiteur à quelque titre que ce soit et notamment au titre de loyers, charges, taxes, réparations ou indemnités quelconques.
Il n'est pas apporté la preuve que la société Keith Titanium était redevable d'autres sommes que celle de 3.925,54 euros au paiement de laquelle elle a été condamnée au titre des loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 par le jugement de première instance, non querellé de ce chef.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit que la SCI [Adresse 7] était débitrice à l'égard de la société Keith Titanium de la somme de 10.800 euros au titre du dépôt de garantie et en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 6.874,46 euros après compensation avec la somme de 3.925,54 euros due par la société Keith Titanium au titre des loyers des mois d'avril et mai 2019.
Sur la demande d'intérêts en application de l'article L.145-40 du code de commerce
L'article L.145-40 du code de commerce dispose que les loyers payés d'avance, sous quelque forme que ce soit, et même à titre de garantie, portent intérêt au profit du locataire, au taux pratiqué par la Banque de France pour les avances sur titres, pour les sommes excédant celle qui correspond au prix du loyer de plus de deux termes.
La SCI [Adresse 7] demande l'infirmation du chef du jugement querellé qui l'a condamnée à payer à la société Keith Titanium, en application de cet article, les intérêts échus à compter du 24 février 2017 sur la somme de 7.200 euros au taux pratiqué par la Banque de France.
Mais, elle ne soutient aucun moyen à l'appui de cette demande d'infirmation.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé de ce chef.
Sur la demande en paiement de la SCI [Adresse 7] au titre de la commission de 3.300 euros payée à l'agence immobilière mandatée pour lui trouver un nouveau locataire
Le bail du 24 février 2017 ayant été résilié du consentement mutuel des parties, les honoraires de l'agence immobilière payés par la SCI [Adresse 7] ne sont pas la conséquence d'une faute de la société Keith Titanium.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande en paiement de la somme de 3.300 euros.
Sur la demande de la SCI [Adresse 7] de dommages et intérêts
Dans la mesure où il est fait droit à la demande de la société Keith Titanium de restitution du dépôt de garantie, il est établi que celle-ci n'a pas agi en justice de manière abusive.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La SCI [Adresse 7] succombre principalement en première instance et totalement en appel.
En conséquence, en application de l'article 696 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] aux dépens de première instance et de condamenr la SCI [Adresse 7] aux dépens de la procédure d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la SCI [Adresse 6] Hugo à payer à la société Keith Titanium la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par cette dernière à hauteur d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 1er mars 2022 en toutes ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Condamne la société S.C.I. 53 Victor Hugo aux dépens de la procédure d'appel,
Condamne la société S.C.I. 53 Victor Hugo à payer à la société Keith Titanium la somme de 2.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés par cette dernière en appel,
La greffière La présidente
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2025
(n° /2025, 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 22/07268 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFT5J
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 mars 2022- Tribunal judiciaire de PARIS (18ème chambre, 1ère section) - RG n° 20/07809
APPELANTE
Société S.C.I. 53 VICTOR HUGO, société civile immobilière
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 12] sous le n° 504 964 784
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Yoni MARCIANO, avocat au barreau de Hauts-de-Seine, toque : P0316
INTIMÉE
Société KEITH TITANIUM, société à responsabilité limitée, exerçant sous le nom commercial HI-TECH INTERNATIONAL
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 10] sous le n° 820 881 738
Prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représentée par Me Naïma HABIB-GOLDBERG, avocat au barreau de l'Essonne, substituée à l'audience par Me Alizée CERVELLO, avocat au barreau de Paris, toque : E2344
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Stéphanie Dupont, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Yulia TREFILOVA, greffière, présente lors de la mise à disposition.
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FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 24 février 2017, la société dénommée S.C.I. 53 Victor Hugo (ci-après la SCI 53 Victor Hugo) a consenti à la société Keith Titanium un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 1] à Paris 13ème, pour une durée de 9 ans à compter du 1er mars 2017 et moyennant un loyer annuel hors taxe en principal de 21.600 euros outre une provision sur charges de 100 euros par mois.
La destination contractuelle des locaux est 'négoce de produits de beauté, vente et réparation de produits hi-tech'.
Un dépôt de garantie d'un montant de 10.800 €, correspondant à six mois de loyer, a été versé par la société Keith Titanium à la bailleresse.
Par lettre recommandé avec demande d'avis de réception du 7 octobre 2019, la société Keith Titanium s'est prévalue de la résiliation amiable de ce bail, en date du 15 mai 2019, pour réclamer la restitution du dépôt de garantie.
La SCI [Adresse 7] s'est opposée à cette demande et a sollicité le paiement des loyers contractuels jusqu'au 26 février 2020, date du terme de la première période triennale du bail.
Par acte du 26 août 2020, la société Keith Titanium a fait assigner la SCI [Adresse 7] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir le remboursement de son dépôt de garantie.
Par jugement du 1er mars 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
dit que le bail du 24 février 2017 consenti par la SCI [Adresse 7] à la société Keith Titanium sur les locaux situés [Adresse 2] à Paris 13ème a pris fin le 31 mai 2019 ;
dit que la SCI [Adresse 7] est débitrice à l'égard de la société Keith Titanium de la somme de 10.800 euros correspondant au montant du dépôt de garantie ;
dit que la société Keith Titanium est débitrice à l'égard de la SCI [Adresse 7] de la somme de 3.925,54 euros correspondant aux loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 ;
condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 6.874,14 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
condamné la SCI 53 Victor Hugo à payer à la société Keith Titanium en application de l'article L.145-40 du code de commerce, les intérêts échus à compter du 24 février 2017 sur la somme de 7.200 euros au taux pratiqué par la Banque de France ;
débouté la société Keith Titanium de sa demande de dommages et intérêts ;
débouté la SCI 53 Victor Hugo de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
débouté la SCI [Adresse 7] de ses autres demandes de paiement ;
condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code procédure civile ;
condamné la SCI [Adresse 5] Victor [Adresse 11] à payer les dépens de l'instance ;
ordonné l'exécution provisoire de la décision ;
débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 7 avril 2022, la SCI [Adresse 7] a interjeté appel du jugement en critiquant tous les chefs du dispositif à l'exception de celui qui dit que la société Keith Titanium était débitrice à l'égard de la SCI [Adresse 7] de la somme de 3.925,54 euros correspondant aux loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 et de celui qui débouté la société Keith Titanium de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 décembre 2024.
PRETENTIONS ET MOYENS
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26 octobre 2022, la SCI [Adresse 7] demande à la cour de :
infirmer le jugement sur tous les chefs attaqués par la SCI,
statuant à nouveau,
débouter la société Keith Titanium de l'ensemble de ses demandes,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI [Adresse 7] la somme de 21 590 euros au titre des loyers dus jusqu'à la fin de la période triennale,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI [Adresse 7] la somme de 3 300 euros au titre du remboursement de la commission payée par la SCI pour relouer son local,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI 53 Victor Hugo la somme de 10 000 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
condamner la société Keith Titanium à verser à la SCI 53 Victor [Adresse 11] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société Keith Titanium aux entiers dépens.
La SCI [Adresse 7] fait valoir :
Sur l'absence de résiliation amiable du bail,
- que la résiliation d'un bail ne se présume pas ;
- que la bailleresse n'a pas donné congé ;
- que la locataire n'a pas donné congé selon les modalités prévues à l'article L.145-4 du code de commerce ; qu'elle s'est contentée d'informer la bailleresse de son départ des locaux ; que la bailleresse a été mise devant le fait accompli et n'a jamais accepté ce départ ;
- que la locataire était engagée jusqu'au 29 février 2020 ;
- qu'il ne saurait être tiré argument du fait que la bailleresse n'a pas restitué les clefs à la locataire après son départ ;
- que le silence de la bailleresse à la suite du départ de la locataire et la relocation des locaux ne valent pas acceptation par la bailleresse de la résiliation du bail ;
Sur le préjudice de la SCI [Adresse 7],
- qu'elle a versé une commission d'un montant de 3 300 euros à l'agence immobilière qu'elle a mandatée pour lui trouver un nouveau locataire ; que cette dépense est consécutive au départ précipité de la locataire, sans l'accord du propriétaire ;
Sur les demandes de la société [Adresse 7],
- que la société Keith Titanium a agi en justice de manière abusive pour avoir assigné sa bailleresse après avoir quitté le local sans avoir donné congé ; qu'elle réclame le remboursement de son dépôt de garantie alors qu'elle doit de l'argent à sa bailleresse.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 5 août 2022, la société Keith Titanium demande à la cour de :
rejeter l'ensemble des demande de la SCI [Adresse 7] ;
confirmer le jugement du 1er mars 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
condamner la SCI [Adresse 7] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 de code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La société Keith Titanium fait valoir :
Sur le rejet de la demande au titre du paiement des loyers postérieurs à la remise des clés,
- que la bailleresse n'a pas contesté la remise des clés du local, le 15 mai 2019 ; que les locaux ont été reloués dès le mois de juin 2019 ;
- qu'en dehors de la résiliation triennale, rien ne s'oppose à ce que les parties conviennent à tout moment d'une résiliation anticipée amiable du bail, sans se soumettre nécessairement aux conditions de formes et de délai prévues pour le congé par le code de commerce ;
Sur le rejet de la demande de remboursement des frais de commission d'agence,
- que la demande de remboursement des frais de commission d'agence ne repose sur aucun fondement juridique ;
Sur le rejet de la demande au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- que l'amende civile prononcée sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile bénéficie au Trésor public et non au demandeur ;
- que la SCI [Adresse 7] ne caractérise pas les circonstances de nature à faire dégéner en faute son droit de demande le remboursement du dépôt de garantie.
Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.
SUR CE,
Sur la résiliation du bail,
En application de l'article 1193 du code civil, les contrats peuvent être révoqués du consentement mutuel des parties.
Il est constant que l'accord révocatoire des parties n'est soumis à aucune condition de forme et qu'il peut être tacite, l'accord tacite se déduisant de circonstances établissant sans équivoque la volonté des parties de mettre fin au contrat.
En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que la société Keith Titanium a quitté les lieux en remettant les clés à la SCI [Adresse 7], que la SCI [Adresse 7] a accepté les clés sans émettre ni protestation ni réserve quant au départ de sa locataire, étant observé qu'au moment de son départ la locataire n'était pas à jour de ses loyers, et que la société Keith Titanium a immédiatement reloué les locaux à un nouveau locataire. En effet, les locaux ont été restitués le 15 mai 2019 et le nouveau locataire prenait contact avec la société Keith Titanium dès le 24 mai 2019 pour obtenir les informations nécessaires au transfert du contrat de fourniture d'électricité des locaux.
Ces circonstances caractérisent l'accord des parties pour mettre fin au bail du 24 février 2017 avant son terme.
En présence d'un accord révocatoire tacite des parties, les moyens soulevés par la SCI [Adresse 7] et fondés sur l'absence de congé sont inopérants.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit que le bail du 24 février 2017, portant sur les locaux situés [Adresse 1] à Paris 13ème, conclu entre la SCI [Adresse 7] et la société Keith Titanium avait pris fin le 31 mai 2019 et en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande en paiement des loyers postérieurs au 31 mai 2019.
Sur le dépôt de garantie
Il est acquis que la société Keith Titanium a versé un dépôt de garantie d'un montant de 10.800 € à la SCI [Adresse 7].
Le bail du 24 février 2017 stipule que ce dépôt de garantie sera restitué au preneur à l'expiration du bail, déduction faite de toute somme dont il pourrait être débiteur à quelque titre que ce soit et notamment au titre de loyers, charges, taxes, réparations ou indemnités quelconques.
Il n'est pas apporté la preuve que la société Keith Titanium était redevable d'autres sommes que celle de 3.925,54 euros au paiement de laquelle elle a été condamnée au titre des loyers et charges des mois d'avril et mai 2019 par le jugement de première instance, non querellé de ce chef.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit que la SCI [Adresse 7] était débitrice à l'égard de la société Keith Titanium de la somme de 10.800 euros au titre du dépôt de garantie et en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 6.874,46 euros après compensation avec la somme de 3.925,54 euros due par la société Keith Titanium au titre des loyers des mois d'avril et mai 2019.
Sur la demande d'intérêts en application de l'article L.145-40 du code de commerce
L'article L.145-40 du code de commerce dispose que les loyers payés d'avance, sous quelque forme que ce soit, et même à titre de garantie, portent intérêt au profit du locataire, au taux pratiqué par la Banque de France pour les avances sur titres, pour les sommes excédant celle qui correspond au prix du loyer de plus de deux termes.
La SCI [Adresse 7] demande l'infirmation du chef du jugement querellé qui l'a condamnée à payer à la société Keith Titanium, en application de cet article, les intérêts échus à compter du 24 février 2017 sur la somme de 7.200 euros au taux pratiqué par la Banque de France.
Mais, elle ne soutient aucun moyen à l'appui de cette demande d'infirmation.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé de ce chef.
Sur la demande en paiement de la SCI [Adresse 7] au titre de la commission de 3.300 euros payée à l'agence immobilière mandatée pour lui trouver un nouveau locataire
Le bail du 24 février 2017 ayant été résilié du consentement mutuel des parties, les honoraires de l'agence immobilière payés par la SCI [Adresse 7] ne sont pas la conséquence d'une faute de la société Keith Titanium.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande en paiement de la somme de 3.300 euros.
Sur la demande de la SCI [Adresse 7] de dommages et intérêts
Dans la mesure où il est fait droit à la demande de la société Keith Titanium de restitution du dépôt de garantie, il est établi que celle-ci n'a pas agi en justice de manière abusive.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté la SCI [Adresse 7] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La SCI [Adresse 7] succombre principalement en première instance et totalement en appel.
En conséquence, en application de l'article 696 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] aux dépens de première instance et de condamenr la SCI [Adresse 7] aux dépens de la procédure d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SCI [Adresse 7] à payer à la société Keith Titanium la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la SCI [Adresse 6] Hugo à payer à la société Keith Titanium la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par cette dernière à hauteur d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 1er mars 2022 en toutes ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Condamne la société S.C.I. 53 Victor Hugo aux dépens de la procédure d'appel,
Condamne la société S.C.I. 53 Victor Hugo à payer à la société Keith Titanium la somme de 2.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés par cette dernière en appel,
La greffière La présidente