CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 23 octobre 2025, n° 23/01162
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2025
(n° /2025, 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 23/01162 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CG6KP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 novembre 2022- Tribunal judiciaire de Paris (18ème chambre, 1ère section) - RG n° 20/06891
APPELANTS
Mme [D] [O]
née le 13 février 1936 à [Localité 11]
[Adresse 4]
[Localité 8]
M. [T] [O]
né le 09 mai 1937 à [Localité 11]
[Adresse 4]
[Localité 8]
Mme [G] [O]
née le 02 juin 1940 à [Localité 12]
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentés et assistés par Me Olivier AKERMAN, avocat au barreau de Paris, toque : A0076
INTIMÉS
M. [V] [Z] [C]
né le 17 février 1957 à [Localité 13] - Cambodge
[Adresse 7]
[Localité 6]
S.A.R.L. SAYTEX
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 9] sous le n° 313 896 797
Prise en la persone de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés et assistés par Me Fabrice POMMIER de l'ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocat au barreau de Paris, toque : J114
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Stéphanie Dupont, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Yulia TREFILOVA, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
La société Saytex, dont M. [V] [Z] [C] est actuellement le gérant, exploite, depuis 1978, un fonds de commerce de « mercerie, bonneterie, lingerie, tissus, nouveautés, linge de maison, confection, bimbeloterie et accessoires », dans des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 10].
Ces locaux sont donnés à bail à la société Saytex et M. [C] par Mme [D] [O], M. [T] [O] et Mme [G] [O] (ci-après ensemble les « consorts [O] ») suivant trois baux distincts. Ils sont désignés, selon les termes des baux, ainsi :
une boutique ayant devanture sur rue, située entre la boutique contigüe à l'entrée de l'immeuble et le mur mitoyen avec l'immeuble : [Adresse 3], une arrière-boutique donnant sur la cour, un bureau, une cave sous partie de la boutique,
la totalité d'un atelier situé dans le fond de la cour, avec porte d'accès par cette cour, élevé sur terre-plein d'un rez-de-chaussée, à la suite sous le bâtiment en aile, une pièce au rez-de-chaussée et cave voutée sous cette pièce,
une boutique sise au rez-de-chaussée ayant devanture sur rue située à gauche de l'entrée de l'immeuble, avec une arrière-boutique donnant sur la cour, une cave.
Il est constant que le dernier renouvellement des trois baux date de 2018, pour une durée de 9 ans à compter du 1er octobre 2018.
En 2017, la société Saytex a fait part aux bailleurs de son intention de céder ses baux compte tenu du souhait de son gérant de faire valoir ses droits à la retraite.
Par lettre du 15 juin 2017 de son avocat, la société Saytex a informé les bailleurs du projet de céder les trois baux à la société Or du monde pour que celle-ci exerce dans les locaux loués l'activité de commerce, fabrication, réparation dans les domaines de l'horlogerie, la bijouterie et l'orfèvrerie, ledit projet incluant le renouvellement des baux aux clauses et conditions des précédents pour une durée de 9 ans à compter du 1er août 2017 et des travaux d'aménagement à réaliser par la société Or du monde (réfection des installations électriques, remplacement des vitrines avec adaptation aux normes PMR, mises aux normes de résucité, refection des revêtements des sols, murs et plafonds).
Par lettre du 13 juillet 2017 de son avocat, la société Saytex a demandé aux bailleurs de lui exposer les motifs de leur refus.
Par lettre du 21 juillet 2017, les consorts [O] ont confirmé à l'avocat de leur locataire qu'ils maintenaient leur position 'de respecter le bail en cours' et qu'ils n'avaient 'nullement l'intention de modifier la structure de la boutique'.
La cession des trois baux à la société Or du monde n'a pas eu lieu.
Par acte sous seing privé du 23 mai 2018, la société Saytex a donné en location gérance à une personne tierce son fonds de commerce exploité dans l'une des deux boutiques louées, à savoir la boutique du rez-de-chaussée située à gauche de l'entrée de l'immeuble.
Par acte du 16 décembre 2019, M. [C] et la société Saytex ont conclu une promesse de cession portant sur les deux autres baux avec la société SCM [Localité 15]-Lemonnier, dont les deux associées voulaient exercer l'activité de masseur-kinésithérapeute dans les locaux loués. Cette promesse comporte trois conditions suspensives :
- l'accord exprès ou tacite du bailleur à la cession, dans les conditions de l'article L.145-51 du code de commerce,
- l'obtention d'un prêt par la SCI Thierry-Lemonnier,
- l'absence d'exercice par la mairie de [Localité 9] de son droit de préemption.
Par lettre du 18 décembre 2019 de leur avocat, rappelant les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce, la société Saytex et M. [C] ont informé les bailleurs de cette promesse dont une copie a été signifiée à chacun des bailleurs par actes du 20 décembre 2019.
Par lettre du 3 février 2020 de leur avocat, la société Saytex et M. [C], après avoir rappelé le projet de cession des deux baux, ont transmis aux bailleurs les plans et devis des travaux de rénovation et d'aménagement des locaux envisagés par la SCM [Localité 15]-Lemonier et sollicité de leurs bailleurs qu'ils leur fassent retour de leur courrier avec la mention 'bon pour accord'.
Par lettre du 10 février 2020, les consorts [O] ont exprimé auprès de l'avocat de la société Saytex et de M. [C] leur incompréhension quant à la promesse de cession des baux au motif que les baux renouvelés n'avaient pas été signés. Les consorts [O] ont invité M. [C] à venir signer les baux renouvelés.
Par lettre du 13 février 2020 de son avocat, la SCM [Localité 15]-Lemonier a sollicité des bailleurs leur accord concernant les travaux d'aménagement qu'elle envisageait de faire dans les locaux loués et qui avaient été portés à leur connaissance par la lettre du 3 février 2020 de l'avocat de la société Saytex et de M. [C].
Par lettre du 17 février 2020, les consorts [O] ont répondu à l'avocat de la SCM [Localité 15]-Lemonier que les travaux ne les concernaient pas. Ils terminaient leur lettre en demandant ' que tous cabinets d'avocats arrêtent de nous (leur) adresser de la correspondance, au sujet du contrat cité en références, dont nous sommes complètement étranger'.
Par lettre du 20 février 2020, les consorts [O] ont informé l'avocat de la société Saytex et de M. [C] qu'ils considéraient que, faute pour M. [C], en sa qualité de gérant de la société Saytex, d'être venu signer les baux renouvelés, la société Saytex était 'occupante sans droit depuis le 1er octobre 2018" et que la promesse de cession était donc nulle et non avenue. Ils terminaient leur lettre en demandant à leur interloctuteur 'de ne plus nous (leur) adresser de correspondance sur ce dossier.'
Par lettre du 10 mars 2020 de leur avocat, la société Saytex et M. [C] ont rappelé aux bailleurs, d'une part, que la société Saytex avait accepté leur offre de renouvellement des baux à compter du 1er octobre 2018 et, d'autre part, que le renouvellement des baux n'étaient soumis à aucune formalité particulière. Ils demandait également aux bailleurs de reconsidérer leur position et de lui confirmer leur 'accord, tant sur la cession telle que projetée par la société Saytex et M. [C]'.
La cession des deux baux à la SCM [Localité 15]-Lemonier n'a pas eu lieu.
Par actes du 1er juillet 2020, M. [C] et la société Saytex ont fait assigner les consorts [O] devant le tribunal judiciaire de Paris en réparation des préjudices financiers et moraux qu'ils estiment avoir subis du fait de l'opposition des bailleurs à la cession des baux ainsi qu'en remboursement de loyers, dépôt de garantie et frais.
Par jugement du 29 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
débouté M. [V] [Z] [C] et la société Saytex de leurs demandes en paiement des sommes de 86.189,04 euros au titre des loyers payés, 8.337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5.280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie ;
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
rejeté la demande de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] d'acquisition de la clause résolutoire rappelée dans le commandement de payer signifié les 4 et 5 février 2021 à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C], devenue sans objet ;
débouté, en conséquence, Mme [D] [O] et Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leurs demandes subséquentes d'expulsion de la société Saytex et M. [V] [Z] [C] et de condamnation à une indemnité d'occupation ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande en paiement de la somme de 15.563,55 euros au titre d'arriérés de loyers et charges ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral ;
condamné in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C] la somme de 3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande sur ce même fondement ;
condamné Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens ;
rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Par déclaration du 2 janvier 2023, Mme [D] [O], M. [T] [O] et Mme [G] [O], ont interjeté appel du jugement en critiquant les chefs du dispositif suivants :
condamne solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
condamne solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
déboute Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral ;
condamnein solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C] la somme de 3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
déboute Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande sur ce même fondement ;
condamne Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens.
La société Saytex et M. [C] ont interjeté appel incident dans leurs premières conclusions.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 mai 2025.
MOYENS ET PRETENTIONS
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 14 juin 2023, les consorts [O] demandent à la cour de :
juger recevable et bien fondé leur appel,
infirmer le jugement qui les a solidairement condamnés au paiement des sommes suivantes au profit de la société Saytex et de M. [C] :
29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance,
10.000 euros en réparation du préjudice moral subi par M. [C],
3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance,
statuant à nouveau,
juger que la signification du projet de cession de droit au bail effectuée aux termes d'un acte dressé le 20 décembre 2019 par la selarl Bichon-Renassia, huissier de justice à [Localité 9], ne mentionne nulle part que le bailleur dispose dans un délai de deux mois, d'une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification,
juger que l'absence de mention des recours mis à la disposition des consorts [O] dans l'acte de signification du projet de cession de droit au bail à la requête de la société Saytex et de M. [C], prive de tout effet juridique cet acte dont la signification est réputée n'avoir jamais eu lieu,
débouter M. [C] et la société Saytex de toutes leurs demandes, fins et conclusions qui sont irrecevables et mal fondées,
accueillir les consorts [O] en leur demande reconventionnelle et condamner solidairement la société Saytex et M. [C] à leur verser une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur entier préjudice moral,
condamner solidairement la société Saytex et M. [C] au paiement d'une somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance, et par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner solidairement la société Saytex et M. [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Olivier Akerman dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Les consorts [O] font valoir :
Sur l'application des stipulations contractuelles,
- qu'ils ne pouvaient donner leur accord au projet de cession des baux dès lors que ce projet méconnaissait les stipulations contractuelles des baux ;
- que les baux stipulent qu'en cas de cession, le preneur doit demeurer garant solidaire des preneurs successifs pendant toute la durée du bail pour le paiement des loyers et l'exécution de toutes ses conditions alors que la promesse de cession du 16 décembre 2019 prévoit que la société Saytex exécutera toutes les charges et conditions des baux jusqu'à la date de cession définitive ;
- que la promesse ne portait pas sur la boutique du rez-de-chaussée située à gauche de l'entrée de l'immeuble alors que les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce ne prévoient pas que le bailleur doive supporter un démembrement de sa situation locative lorsque le cédant entend demeurer locataire d'une partie des locaux ;
Sur les dispositions légales applicables,
- que les actes de signification aux bailleurs de la promesser de cession des baux , dressés le 20 décembre 2019, ne mentionnent pas que, conformément aux dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce, le bailleur dispose, dans un délai de deux mois, d'une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification et qu' àdéfaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal judiciaire ; qu'en l'absence de ces mentions les actes de signification sont privés de toute effet juridique ;
Sur les préjudices invoqués par la société Saytex et par M. [C],
- que les premiers juges ont retenu à juste titre que le refus opposé par les consorts [O] au projet de cession des baux à la société Or du monde en 2017 n'était pas abusif au motif que les échanges entre les parties ne constituaient pas la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce ; que les pièces produites aux débats n'établissent pas que la probabilité de réaliser cette cession était certaine de sorte que l'indemnité de 200.000 euros réclamée par les intimés n'est pas justifiée ;
- que s'agissant du projet de cession des baux à la société SCM [Localité 15]-Lemonier, les premiers juges se sont contentés d'un faisceau de présomptions pour juger que le refus des consorts [O] avait fait perdre à la société Saytex et à M. [C] une chance de réaliser cette cession au prix projeté de 118.000 euros ; que contrairement à ce que soutiennent la société Saytex et M. [C], la SCM [Localité 15]-Lemonier n'avait pas obtenu le financement de son projet ; que c'est l'absence de réalisation de la condition suspensive d'obtention d'un prêt par la SCM [Localité 15]-Lemonier qui a fait échouer le projet de cession ;
- que le refus opposé par les consorts [O] aux projets de cession des baux de la société Saytex et de M.[C] n'étant pas abusif, ils ne seraient être tenus responsables du préjudice moral de M. [C] ; qu'en outre, la somme de 100.000 euros réclamée par M. [C] est excessive au regard du certificat médical de trois lignes produit aux débats ;
Sur les demandes de remboursement des loyers, frais d'avocat et dépôt de garantie formulées par les intimés
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement de la somme de 86.189,04 euros au titre des loyers payés postérieurement au refus opposé par les consorts [O] au projet de cession de 2017 dès lors que ces loyers ont été payés par la société Saytex ; que la société Saytex est bien débitrice de ces loyers en vertu des baux ;
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement de la somme de 8.337,60 euros au titre des honoraires d'avocat versés pour la période du 16 mai 2018 au 28 mai 2020 dès lors que ces honoraires ont été payés par la société Saytex ; que les consorts [O] ne peuvent être débiteurs d'honoraires pour les conseils qui ont été prodigués à la société Saytex ;
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement des dépôts de garantie qui ont été versés par la société Saytex ; que les baux n'ont pas pris fin ;
Sur la demande reconventionnelle formée par les consorts [O],
- que l'attitude de la société Saytex et de M. [C], dans leurs échanges avec les bailleurs à propos de leur projet de cession des baux, a été quérulente et vétilleuse, ce qui leur a occasionné un préjudice moral étant rappelé que les consorts [O] sont tous âgés de plus de 80 ans ;
- que dans ses lettres du 18 décembre 2019 et du 3 février 2020, l'avocat de la société Saytex et de M.[C] n'a pas indiqué aux bailleurs qu'ils pouvaient se faire assister d'un avocat ;
- que les consorts [O] ont été harcelés par l'agence immobilière en charge de la transaction, par l'avocat des cessionnaires, par M. [C] ainsi que par le conseil de la société Saytex et de M. [C] qui leur a adressé un courrier le 10 mars 2020 alors qu'ils lui avaient demandé, dans leur courrier du 20 février 2020, de ne plus leur adresser de correspondance.
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 9 mai 2023, M. [C] et la société Saytex demandent à la cour de :
débouter Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de toutes leurs prétentions ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité à 29.500 euros le préjudice financier de la société Saytex et M. [C], causé par le refus abusif de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O], de céder les droits au bail ;
Statuant de nouveau à ce titre,
condamner solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 200.000 euros en réparation du préjudice financier causé par leur refus abusif de cession des droits au bail ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité à 29.500 euros le préjudice financier de la société Saytex et M. [C], causé par le refus abusif de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O], de céder les droits au bail ;
Statuant de nouveau à ce titre,
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [C] la somme de 100.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Saytex et M. [C] de leurs demandes en paiement des sommes de 86 189,04 euros au titre des loyers impayés, 8 337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5 280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie ;
Statuant de nouveau,
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à verser à la société Saytex et M. [C] la somme de 86.189,04 euros correspondant aux loyers payés en pure perte ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 8.337,60 euros au titre des frais inutilement exposés ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 5.280 euros en remboursement des dépôts de garantie ;
confirmer pour le surplus, le jugement dont appel ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 5.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
condamner Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens.
La société Saytex et M. [C] font valoir :
Sur les fautes imputables aux consorts [O],
- que les deux projets de cession ont été notifiés aux bailleurs le 15 juin 2017 (société Or du monde) et le 20 décembre 2019 (SCM [Localité 15]-Lemonier) ; qu'en application de l'article L.145-51 du code de commerce et faute pour eux d'avoir exercer leur droit de rachat ou leur droit de saisir le tribunal judiciaire pour contester la cession dans le délai de deux mois, leur accord était réputé acquis ;
- qu'en s'opposant aux deux cessions malgré l'absence de saisine du tribunal, les consorts [O] ont commis une faute ; qu'ils ont fait preuve de mauvaise foi en soutenant que la société Saytex ne détiendrait aucun droit au bail faute de renouvellement régulier des baux à compter du 1er octobre 2018 alors qu'ils avaient continué à encaisser les loyers ; qu'ils se sont entêtés malgré la lettre explicative du 10 mars 2020 de l'avocat de la société Saytex et de M. [C] ;
- que l'attitude des consorts [O] est particulièrement abusive au regard de la longeur des relations contractuelles (33 ans) qui ont été sans difficultés, de leur connaissance de la situation de M. [C], fragilisé par l'âge et la maladie, et des difficultés économiques de la société Saytex, de la répétition du refus des bailleurs, du sérieux des deux candidats cessionnaires et del'absence de nuisance causée par leur activité ;
- que la garantie du cédant prévue dans les deux baux et le financement sollicité par le cessionnaire ne soulevait aucune difficulté ; que les deux masseuses kinésithérapeutes éconduites par les consorts [O] sont parvenues à s'installer ailleurs dans [Localité 9], ce qui démontre la qualité de leur projet ;
- que la société Saytex et M. [C], qui sont co-preneurs des locaux, ne sont pas tenus de céder les trois baux à une personne unique alors qu'ils concernent des locaux séparés et indépendants ;
- que la société Saytex et M. [C], qui sont co-preneurs des locaux, ont autant l'un que l'autre intérêt à agir en réparation des préjudices causés par le comportement des bailleurs ; - que les dispositions de l'artcile L.145-51 du code de commerce ne font pas obligation de mentionner, dans l'acte de signification au bailleur du projet de cession du droit au bail, le délai imparti au bailleur pour agir en justice ;
Sur les préjudices subis,
- que par leur refus fautif, les consorts [O] ont privé la société Saytex et M. [C] d'une chance de céder leurs droits au bail à la société Or du Monde au prix de 200.000 euros ; que la probabilité était quasiment certaine ;
- que le second refus des consorts [O] a privé M. [C] et la société Saytex de la faculté de céder leurs droits au bail à la [14] [Localité 15]-Lemonnier au prix de 118.000 euros ; que la SCM [Localité 15]-Lemonier était très intéressée, avait signé une promesse de cession et versé une indemnité d'immobilisation de 20.000 euros ;
- que depuis mars 2017, date du refus par les consorts [O] de la cession des baux à la société Or du monde, la société Saytex et M. [C] sont contraints de payer le loyer sans en retirer aucun bénéfice, l'activité de la société Saytex étant déficitaire ;
- qu'ils ont aussi exposé en pure perte des honoraires de conseils et de rédaction d'acte s'élevant à 8.337,60 euros TTC ;
- que M. [C] et la société Saytex ont versé deux dépôts de garantie dont ils demandent le remboursement ;
- que le refus injustifié des consorts [O] a empêché M. [C], âgé et malade, de prendre sa retraite après 43 ans d'activité, étant précisé qu'il est locataire des consorts [O] depuis 1987 ; que ce refus l'a contraint à poursuivre son travail malgré les pertes de la société Saytex ; que M. [C] est vivement tourmenté par l'incertitude pesant sur la date de cession de ses droits au bail.
Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.
SUR CE,
1- Sur la demande dommages et intérêts formée par la société Saytex et M. [C]
L'article 1217 du code civil dispose que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
L'article 1231-1 précise que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
L'article 1232-2 ajoute que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications prévues aux articles 1231-3 à 1231-5.
Par ailleurs, l'article L.145-51 du code de commerce dispose que lorsque le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite ou ayant été admis au bénéfice d'une pension d'invalidité attribuée par le régime d'assurance invalidité-décès des professions artisanales ou des professions industrielles et commerciales, a signifié à son propriétaire et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce son intention de céder son bail en précisant la nature des activités dont l'exercice est envisagé ainsi que le prix proposé, le bailleur a, dans un délai de deux mois, une prirorité de rachat aux conditions fixées dans la signification. A défaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal judiciaire. La nature des activités dont l'exercice est envisagé doit être compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble.
1-1 Sur la faute reprochée aux consorts [O]
Il ressort des pièces produites aux débats qu'en 2017, la société Saytex et M. [C] n'ont pas inscrit leur projet de cession des trois baux à la société Or du monde dans le cadre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce.
En effet, si la lettre du 15 juin 2017 par laquelle les bailleurs ont été informés du projet mentionne le souhait de M. [C] de partir à la retraite, elle ne mentionne pas les dispositions de l'article L. 145-51 du code de commerce. Elle ne mentionne pas non plus le prix proposé pour la cession des baux. En outre, cette lettre n'est pas la signfication prévue à l'article L.145-51 du code de commerce.
Dans ces conditions, ce projet requérait l'accord des bailleurs quant au changement de destination des locaux. Ce projet, qui incluait la signature concomitante de nouveaux baux avec le cessionnaire et des travaux d'aménagement dans les locaux loués, requérait également l'accord des bailleurs sur ces points.
Les bailleurs ont refusé de donner leur accord, souhaitant ' respecter le bail en cours' et ne souhaitant pas 'modifier la structure de la boutique', sans qu'il soit apporté la preuve d'un abus dans l'exercice de leurs droits étant observé que la longueur et la bonne qualité des relations contractuelles entre les bailleurs et les preneurs jusque là, la situation de la société Saytex et de M. [C], le sérieux du projet de cession ne sont pas de nature à caractériser un abus.
En 2019, la société Saytex et M. [C] ont clairement inscrit leur projet de cession des baux dans le cadre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce.
Contrairement à ce que soutiennentt les consorts [O], la signification par les preneurs de la promesse de cession de deux des baux à la SCM [Localité 15]-Lemonier, suivant actes du 20 décembre 2019, respecte les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce. Si les actes de signification ne mentionnent pas eux-même la priorité de rachat des bailleurs dans le délai de deux mois, leur droit de saisir le tribunal judiciaire pour contester la cession dans le même délai de deux mois et le fait que leur accord sera réputé acquis faute d'usage de l'un ou l'autre de ces droits, l'acte signifié, joint à l'acte de signification, comporte toutes ces mentions ainsi que celles prescrites par l'article L.145-51 du code de commerce, à savoir la nature des activités envisagés ainsi que le prix proposé.
Les consorts [O] étaient donc bien informés du fait qu'ils devaient saisir le tribunal judiciaire dans le délai de deux mois à compter des significations du 20 décembre 2019, s'ils entendaient contester la cession des baux.
En l'absence d'exercice de leur priorité de rachat et de saisine du tribunal judiciaire par les consorts [O], leur accord à la cession des baux entre les preneurs et la société SCM [Localité 15]-Lemonier est réputé acquis.
Dans ces conditions, la faute imputable aux consorts [O] repose non pas sur leur opposition abusive ou injustifiée à la cession des baux, leur accord étant réputé acquis, que sur leur comportement lors des échanges qu'ils ont eus avec les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier à l'occasion des discussions relatives à la cession.
Les moyens soulevés par les consorts [O] dans le cadre de la présente instance pour établir la légitimité de leur opposition à la cession sont donc inopérants puisque que leur faute n'est pas fondée sur le caractère abusif ou injustifié de leur opposition à la cession.
Sans saisir le tribunal judiciaire, les consorts [O] ont expressément fait état de leur désaccord à la cession des baux entre les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier au motif erroné que les preneurs étaient occupants sans droit des locaux depuis le 1er octobre 2018 faute de signature des baux renouvelés.
Ils ont ainsi crée une situation litigieuse, source d'insécurité juridique.
Par ailleurs, ils ont refusé de se positionner sur les travaux envisagés par la SCM [Localité 15]-Lemonier pour adapter les locaux à son activité, estimant que ces travaux ne les concernaient pas alors qu'il résulte des pièces produites aux débats que la nature de ces travaux requérait leur autorisation compte tenu des clauses des baux. Ils ont également refusé toute discussion avec leurs locataires et la SCM [Localité 15]-Lemonier sur le projet de cession des baux, intimant à leurs interlocuteurs de ne plus leur adresser de correspondance sur le sujet.
Ils ont ainsi adopté un comportement laissant augurer à la SCM [Localité 15]-Lemonier des relations bailleurs-preneur difficiles nécessitant des procédures longues et coûteuses pour faire valoir ses droits.
En agissant ainsi, les bailleurs, opposés à tout changement, ont oeuvré pour faire échec à la cession des baux entre les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier et ont ainsi commis une faute au détriment de leurs preneurs.
Sans preuve que la SCM [Localité 15]-Lemonier n'avait pas obtenu le prêt mentionné dans la promesse de cession du 16 décembre 2019, étant observé qu'il est acquis que la société s'est depuis installée dans d'autres locaux dans le [Localité 1], il apparait que c'est bien le comportement fautif des consorts [O] qui a dissuadé la SCM [Localité 15]-Lemonier de conclure le contrat de cession des baux avec la société Saytex et M. [C].
1-2 Sur les préjudices subis par la société Saytex et M. [C]
Le préjudice subi par les preneurs, à savoir la société Saytex et M. [C], s'analyse en une perte de chance de voir la cession des baux avec la SCM [Localité 15]-Lemonier aboutir.
Le projet de cession des baux entre d'une part la société Saytex et M. [C] et d'autre part la SCM [Localité 15]-Lemonier était trés avancé en ce que la promesse de cession avait été signé et une indemnité d'immobilisation de 20.000 euros versée par la SCM [Localité 15]-Lemonier.
En outre, l'installation de la SCM [Localité 15]-Lemonier dans un autre quartier de [Localité 9] après l'échec de ce projet établit le sérieux de cette société.
Au regard de ces éléments de faits, il convient d'estimer la perte de chance à 40% et d'allouer à la société Saytex et M. [C] des dommages et intérêts à hauteur de 47.200 euros correspondant à 40 % du prix proposé par la SCM [Localité 15]-Lemonier.
M. [C] produit deux certificats médicaux, l'un du 3 juin 2020 d'un médecin généraliste et l'autre du 15 juin 2021 d'un médecin psychiatre. Il ressort de l'examen de ces certificats que M. [C] présente un état anxio-dépressif qui nécessite un traitement sous surveillance médicale, en lien avec l'échec de la cession des baux.
Le tribunal a fait une juste anaylse des faits en allouant à M. [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral.
C'est par des motifs exacts et pertinents, que la cour adopte et auxquels elle renvoie, que le tribunal a débouté la société Saytex et M. [C] de leurs demandes au titre du remboursement des loyers du 1er janvier 2017 au 30 juin 2021, du remboursement des honoraires de leur avocat du 16 mai 2018 au 20 mai 2020 et de la restitution des dépôts de garantie.
Il convient seulement d'ajouter concernant les honoraires d'avocat dont le remboursement est sollicité à hauteur de 8.337,60 euros TTC que ces frais ne concernent pas exclusivement la cession des baux avec la SCM [Localité 15]-Lemonier.
Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance,
débouté M. [V] [Z] [C] et la société Saytex de leurs demandes en paiement des sommes de 86.189,04 euros au titre des loyers payés, 8.337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5.280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie,
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral.
2- Sur la demande de dommages et intérêts des consorts [O]
Les consorts [O] n'apportent pas la preuve de l'attitude quérulente et vétilleuse de la société Saytex et de M. [C] dont ils se prévalent à l'appui de leur demande de dommages et intérêts. L'envoi de 3 lettres entre le 18 décembre 2019 et le 10 mars 2020, au contenu poli, ne caractérise pas une attitude fautive des preneurs. La société Saytex et société Saytex ne sont pas responsables de l'attitude de l'agence immobilière et de la SCM [Localité 15]-Lemonier étant en outre observé que le harcèlement dont auraient fait preuve ces personnes n'est établi par aucune pièce produite aux débats.
La société Saytex et M. [C] n'ont fait qu'exercer leurs droits vis à vis de leurs bailleurs.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté les consorts [O] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.
3- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les consorts [O] succombent en première instance et en appel.
Il convient en conséquence, en application de l'article 696 du code de procédure civile, de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné les consorts [O] aux dépens de première instance et de les condamner aux dépens de la procédure d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de confirmer les dispositions du jugement querellé relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner les consorts [O], in solidum, à payer à société Saytex et à M. [C] la somme de 5.000 euros chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par eux en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 novembre 2022 en ce qu'il a condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 novembre 2022 en toutes ses autres dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
CONDAMNE solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 47.200 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de Mme Olivier Akerman, avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer la somme de 5.000 euros à la société Saytex et la somme de 5.000 euros à M. [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2025
(n° /2025, 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 23/01162 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CG6KP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 novembre 2022- Tribunal judiciaire de Paris (18ème chambre, 1ère section) - RG n° 20/06891
APPELANTS
Mme [D] [O]
née le 13 février 1936 à [Localité 11]
[Adresse 4]
[Localité 8]
M. [T] [O]
né le 09 mai 1937 à [Localité 11]
[Adresse 4]
[Localité 8]
Mme [G] [O]
née le 02 juin 1940 à [Localité 12]
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentés et assistés par Me Olivier AKERMAN, avocat au barreau de Paris, toque : A0076
INTIMÉS
M. [V] [Z] [C]
né le 17 février 1957 à [Localité 13] - Cambodge
[Adresse 7]
[Localité 6]
S.A.R.L. SAYTEX
Immatriculée au R.C.S. de [Localité 9] sous le n° 313 896 797
Prise en la persone de son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentés et assistés par Me Fabrice POMMIER de l'ASSOCIATION AMIGUES, AUBERTY, JOUARY & POMMIER, avocat au barreau de Paris, toque : J114
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 11 juin 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Stéphanie Dupont, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre
Mme Stéphanie Dupont, conseillère
Mme Hélène Bussière, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Yulia TREFILOVA, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
La société Saytex, dont M. [V] [Z] [C] est actuellement le gérant, exploite, depuis 1978, un fonds de commerce de « mercerie, bonneterie, lingerie, tissus, nouveautés, linge de maison, confection, bimbeloterie et accessoires », dans des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 10].
Ces locaux sont donnés à bail à la société Saytex et M. [C] par Mme [D] [O], M. [T] [O] et Mme [G] [O] (ci-après ensemble les « consorts [O] ») suivant trois baux distincts. Ils sont désignés, selon les termes des baux, ainsi :
une boutique ayant devanture sur rue, située entre la boutique contigüe à l'entrée de l'immeuble et le mur mitoyen avec l'immeuble : [Adresse 3], une arrière-boutique donnant sur la cour, un bureau, une cave sous partie de la boutique,
la totalité d'un atelier situé dans le fond de la cour, avec porte d'accès par cette cour, élevé sur terre-plein d'un rez-de-chaussée, à la suite sous le bâtiment en aile, une pièce au rez-de-chaussée et cave voutée sous cette pièce,
une boutique sise au rez-de-chaussée ayant devanture sur rue située à gauche de l'entrée de l'immeuble, avec une arrière-boutique donnant sur la cour, une cave.
Il est constant que le dernier renouvellement des trois baux date de 2018, pour une durée de 9 ans à compter du 1er octobre 2018.
En 2017, la société Saytex a fait part aux bailleurs de son intention de céder ses baux compte tenu du souhait de son gérant de faire valoir ses droits à la retraite.
Par lettre du 15 juin 2017 de son avocat, la société Saytex a informé les bailleurs du projet de céder les trois baux à la société Or du monde pour que celle-ci exerce dans les locaux loués l'activité de commerce, fabrication, réparation dans les domaines de l'horlogerie, la bijouterie et l'orfèvrerie, ledit projet incluant le renouvellement des baux aux clauses et conditions des précédents pour une durée de 9 ans à compter du 1er août 2017 et des travaux d'aménagement à réaliser par la société Or du monde (réfection des installations électriques, remplacement des vitrines avec adaptation aux normes PMR, mises aux normes de résucité, refection des revêtements des sols, murs et plafonds).
Par lettre du 13 juillet 2017 de son avocat, la société Saytex a demandé aux bailleurs de lui exposer les motifs de leur refus.
Par lettre du 21 juillet 2017, les consorts [O] ont confirmé à l'avocat de leur locataire qu'ils maintenaient leur position 'de respecter le bail en cours' et qu'ils n'avaient 'nullement l'intention de modifier la structure de la boutique'.
La cession des trois baux à la société Or du monde n'a pas eu lieu.
Par acte sous seing privé du 23 mai 2018, la société Saytex a donné en location gérance à une personne tierce son fonds de commerce exploité dans l'une des deux boutiques louées, à savoir la boutique du rez-de-chaussée située à gauche de l'entrée de l'immeuble.
Par acte du 16 décembre 2019, M. [C] et la société Saytex ont conclu une promesse de cession portant sur les deux autres baux avec la société SCM [Localité 15]-Lemonnier, dont les deux associées voulaient exercer l'activité de masseur-kinésithérapeute dans les locaux loués. Cette promesse comporte trois conditions suspensives :
- l'accord exprès ou tacite du bailleur à la cession, dans les conditions de l'article L.145-51 du code de commerce,
- l'obtention d'un prêt par la SCI Thierry-Lemonnier,
- l'absence d'exercice par la mairie de [Localité 9] de son droit de préemption.
Par lettre du 18 décembre 2019 de leur avocat, rappelant les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce, la société Saytex et M. [C] ont informé les bailleurs de cette promesse dont une copie a été signifiée à chacun des bailleurs par actes du 20 décembre 2019.
Par lettre du 3 février 2020 de leur avocat, la société Saytex et M. [C], après avoir rappelé le projet de cession des deux baux, ont transmis aux bailleurs les plans et devis des travaux de rénovation et d'aménagement des locaux envisagés par la SCM [Localité 15]-Lemonier et sollicité de leurs bailleurs qu'ils leur fassent retour de leur courrier avec la mention 'bon pour accord'.
Par lettre du 10 février 2020, les consorts [O] ont exprimé auprès de l'avocat de la société Saytex et de M. [C] leur incompréhension quant à la promesse de cession des baux au motif que les baux renouvelés n'avaient pas été signés. Les consorts [O] ont invité M. [C] à venir signer les baux renouvelés.
Par lettre du 13 février 2020 de son avocat, la SCM [Localité 15]-Lemonier a sollicité des bailleurs leur accord concernant les travaux d'aménagement qu'elle envisageait de faire dans les locaux loués et qui avaient été portés à leur connaissance par la lettre du 3 février 2020 de l'avocat de la société Saytex et de M. [C].
Par lettre du 17 février 2020, les consorts [O] ont répondu à l'avocat de la SCM [Localité 15]-Lemonier que les travaux ne les concernaient pas. Ils terminaient leur lettre en demandant ' que tous cabinets d'avocats arrêtent de nous (leur) adresser de la correspondance, au sujet du contrat cité en références, dont nous sommes complètement étranger'.
Par lettre du 20 février 2020, les consorts [O] ont informé l'avocat de la société Saytex et de M. [C] qu'ils considéraient que, faute pour M. [C], en sa qualité de gérant de la société Saytex, d'être venu signer les baux renouvelés, la société Saytex était 'occupante sans droit depuis le 1er octobre 2018" et que la promesse de cession était donc nulle et non avenue. Ils terminaient leur lettre en demandant à leur interloctuteur 'de ne plus nous (leur) adresser de correspondance sur ce dossier.'
Par lettre du 10 mars 2020 de leur avocat, la société Saytex et M. [C] ont rappelé aux bailleurs, d'une part, que la société Saytex avait accepté leur offre de renouvellement des baux à compter du 1er octobre 2018 et, d'autre part, que le renouvellement des baux n'étaient soumis à aucune formalité particulière. Ils demandait également aux bailleurs de reconsidérer leur position et de lui confirmer leur 'accord, tant sur la cession telle que projetée par la société Saytex et M. [C]'.
La cession des deux baux à la SCM [Localité 15]-Lemonier n'a pas eu lieu.
Par actes du 1er juillet 2020, M. [C] et la société Saytex ont fait assigner les consorts [O] devant le tribunal judiciaire de Paris en réparation des préjudices financiers et moraux qu'ils estiment avoir subis du fait de l'opposition des bailleurs à la cession des baux ainsi qu'en remboursement de loyers, dépôt de garantie et frais.
Par jugement du 29 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
débouté M. [V] [Z] [C] et la société Saytex de leurs demandes en paiement des sommes de 86.189,04 euros au titre des loyers payés, 8.337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5.280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie ;
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
rejeté la demande de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] d'acquisition de la clause résolutoire rappelée dans le commandement de payer signifié les 4 et 5 février 2021 à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C], devenue sans objet ;
débouté, en conséquence, Mme [D] [O] et Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leurs demandes subséquentes d'expulsion de la société Saytex et M. [V] [Z] [C] et de condamnation à une indemnité d'occupation ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande en paiement de la somme de 15.563,55 euros au titre d'arriérés de loyers et charges ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral ;
condamné in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C] la somme de 3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande sur ce même fondement ;
condamné Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens ;
rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Par déclaration du 2 janvier 2023, Mme [D] [O], M. [T] [O] et Mme [G] [O], ont interjeté appel du jugement en critiquant les chefs du dispositif suivants :
condamne solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
condamne solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
déboute Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral ;
condamnein solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et à M. [V] [Z] [C] la somme de 3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
déboute Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de leur demande sur ce même fondement ;
condamne Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens.
La société Saytex et M. [C] ont interjeté appel incident dans leurs premières conclusions.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 mai 2025.
MOYENS ET PRETENTIONS
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 14 juin 2023, les consorts [O] demandent à la cour de :
juger recevable et bien fondé leur appel,
infirmer le jugement qui les a solidairement condamnés au paiement des sommes suivantes au profit de la société Saytex et de M. [C] :
29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance,
10.000 euros en réparation du préjudice moral subi par M. [C],
3.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance,
statuant à nouveau,
juger que la signification du projet de cession de droit au bail effectuée aux termes d'un acte dressé le 20 décembre 2019 par la selarl Bichon-Renassia, huissier de justice à [Localité 9], ne mentionne nulle part que le bailleur dispose dans un délai de deux mois, d'une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification,
juger que l'absence de mention des recours mis à la disposition des consorts [O] dans l'acte de signification du projet de cession de droit au bail à la requête de la société Saytex et de M. [C], prive de tout effet juridique cet acte dont la signification est réputée n'avoir jamais eu lieu,
débouter M. [C] et la société Saytex de toutes leurs demandes, fins et conclusions qui sont irrecevables et mal fondées,
accueillir les consorts [O] en leur demande reconventionnelle et condamner solidairement la société Saytex et M. [C] à leur verser une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur entier préjudice moral,
condamner solidairement la société Saytex et M. [C] au paiement d'une somme de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance, et par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner solidairement la société Saytex et M. [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Olivier Akerman dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Les consorts [O] font valoir :
Sur l'application des stipulations contractuelles,
- qu'ils ne pouvaient donner leur accord au projet de cession des baux dès lors que ce projet méconnaissait les stipulations contractuelles des baux ;
- que les baux stipulent qu'en cas de cession, le preneur doit demeurer garant solidaire des preneurs successifs pendant toute la durée du bail pour le paiement des loyers et l'exécution de toutes ses conditions alors que la promesse de cession du 16 décembre 2019 prévoit que la société Saytex exécutera toutes les charges et conditions des baux jusqu'à la date de cession définitive ;
- que la promesse ne portait pas sur la boutique du rez-de-chaussée située à gauche de l'entrée de l'immeuble alors que les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce ne prévoient pas que le bailleur doive supporter un démembrement de sa situation locative lorsque le cédant entend demeurer locataire d'une partie des locaux ;
Sur les dispositions légales applicables,
- que les actes de signification aux bailleurs de la promesser de cession des baux , dressés le 20 décembre 2019, ne mentionnent pas que, conformément aux dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce, le bailleur dispose, dans un délai de deux mois, d'une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification et qu' àdéfaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal judiciaire ; qu'en l'absence de ces mentions les actes de signification sont privés de toute effet juridique ;
Sur les préjudices invoqués par la société Saytex et par M. [C],
- que les premiers juges ont retenu à juste titre que le refus opposé par les consorts [O] au projet de cession des baux à la société Or du monde en 2017 n'était pas abusif au motif que les échanges entre les parties ne constituaient pas la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce ; que les pièces produites aux débats n'établissent pas que la probabilité de réaliser cette cession était certaine de sorte que l'indemnité de 200.000 euros réclamée par les intimés n'est pas justifiée ;
- que s'agissant du projet de cession des baux à la société SCM [Localité 15]-Lemonier, les premiers juges se sont contentés d'un faisceau de présomptions pour juger que le refus des consorts [O] avait fait perdre à la société Saytex et à M. [C] une chance de réaliser cette cession au prix projeté de 118.000 euros ; que contrairement à ce que soutiennent la société Saytex et M. [C], la SCM [Localité 15]-Lemonier n'avait pas obtenu le financement de son projet ; que c'est l'absence de réalisation de la condition suspensive d'obtention d'un prêt par la SCM [Localité 15]-Lemonier qui a fait échouer le projet de cession ;
- que le refus opposé par les consorts [O] aux projets de cession des baux de la société Saytex et de M.[C] n'étant pas abusif, ils ne seraient être tenus responsables du préjudice moral de M. [C] ; qu'en outre, la somme de 100.000 euros réclamée par M. [C] est excessive au regard du certificat médical de trois lignes produit aux débats ;
Sur les demandes de remboursement des loyers, frais d'avocat et dépôt de garantie formulées par les intimés
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement de la somme de 86.189,04 euros au titre des loyers payés postérieurement au refus opposé par les consorts [O] au projet de cession de 2017 dès lors que ces loyers ont été payés par la société Saytex ; que la société Saytex est bien débitrice de ces loyers en vertu des baux ;
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement de la somme de 8.337,60 euros au titre des honoraires d'avocat versés pour la période du 16 mai 2018 au 28 mai 2020 dès lors que ces honoraires ont été payés par la société Saytex ; que les consorts [O] ne peuvent être débiteurs d'honoraires pour les conseils qui ont été prodigués à la société Saytex ;
- que M. [C] n'a pas d'intérêt à demander le remboursement des dépôts de garantie qui ont été versés par la société Saytex ; que les baux n'ont pas pris fin ;
Sur la demande reconventionnelle formée par les consorts [O],
- que l'attitude de la société Saytex et de M. [C], dans leurs échanges avec les bailleurs à propos de leur projet de cession des baux, a été quérulente et vétilleuse, ce qui leur a occasionné un préjudice moral étant rappelé que les consorts [O] sont tous âgés de plus de 80 ans ;
- que dans ses lettres du 18 décembre 2019 et du 3 février 2020, l'avocat de la société Saytex et de M.[C] n'a pas indiqué aux bailleurs qu'ils pouvaient se faire assister d'un avocat ;
- que les consorts [O] ont été harcelés par l'agence immobilière en charge de la transaction, par l'avocat des cessionnaires, par M. [C] ainsi que par le conseil de la société Saytex et de M. [C] qui leur a adressé un courrier le 10 mars 2020 alors qu'ils lui avaient demandé, dans leur courrier du 20 février 2020, de ne plus leur adresser de correspondance.
Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 9 mai 2023, M. [C] et la société Saytex demandent à la cour de :
débouter Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] de toutes leurs prétentions ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité à 29.500 euros le préjudice financier de la société Saytex et M. [C], causé par le refus abusif de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O], de céder les droits au bail ;
Statuant de nouveau à ce titre,
condamner solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 200.000 euros en réparation du préjudice financier causé par leur refus abusif de cession des droits au bail ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité à 29.500 euros le préjudice financier de la société Saytex et M. [C], causé par le refus abusif de Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O], de céder les droits au bail ;
Statuant de nouveau à ce titre,
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [C] la somme de 100.000 euros en réparation de son préjudice moral ;
infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Saytex et M. [C] de leurs demandes en paiement des sommes de 86 189,04 euros au titre des loyers impayés, 8 337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5 280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie ;
Statuant de nouveau,
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à verser à la société Saytex et M. [C] la somme de 86.189,04 euros correspondant aux loyers payés en pure perte ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 8.337,60 euros au titre des frais inutilement exposés ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 5.280 euros en remboursement des dépôts de garantie ;
confirmer pour le surplus, le jugement dont appel ;
condamner in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à la société Saytex et M. [C] la somme de 5.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
condamner Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens.
La société Saytex et M. [C] font valoir :
Sur les fautes imputables aux consorts [O],
- que les deux projets de cession ont été notifiés aux bailleurs le 15 juin 2017 (société Or du monde) et le 20 décembre 2019 (SCM [Localité 15]-Lemonier) ; qu'en application de l'article L.145-51 du code de commerce et faute pour eux d'avoir exercer leur droit de rachat ou leur droit de saisir le tribunal judiciaire pour contester la cession dans le délai de deux mois, leur accord était réputé acquis ;
- qu'en s'opposant aux deux cessions malgré l'absence de saisine du tribunal, les consorts [O] ont commis une faute ; qu'ils ont fait preuve de mauvaise foi en soutenant que la société Saytex ne détiendrait aucun droit au bail faute de renouvellement régulier des baux à compter du 1er octobre 2018 alors qu'ils avaient continué à encaisser les loyers ; qu'ils se sont entêtés malgré la lettre explicative du 10 mars 2020 de l'avocat de la société Saytex et de M. [C] ;
- que l'attitude des consorts [O] est particulièrement abusive au regard de la longeur des relations contractuelles (33 ans) qui ont été sans difficultés, de leur connaissance de la situation de M. [C], fragilisé par l'âge et la maladie, et des difficultés économiques de la société Saytex, de la répétition du refus des bailleurs, du sérieux des deux candidats cessionnaires et del'absence de nuisance causée par leur activité ;
- que la garantie du cédant prévue dans les deux baux et le financement sollicité par le cessionnaire ne soulevait aucune difficulté ; que les deux masseuses kinésithérapeutes éconduites par les consorts [O] sont parvenues à s'installer ailleurs dans [Localité 9], ce qui démontre la qualité de leur projet ;
- que la société Saytex et M. [C], qui sont co-preneurs des locaux, ne sont pas tenus de céder les trois baux à une personne unique alors qu'ils concernent des locaux séparés et indépendants ;
- que la société Saytex et M. [C], qui sont co-preneurs des locaux, ont autant l'un que l'autre intérêt à agir en réparation des préjudices causés par le comportement des bailleurs ; - que les dispositions de l'artcile L.145-51 du code de commerce ne font pas obligation de mentionner, dans l'acte de signification au bailleur du projet de cession du droit au bail, le délai imparti au bailleur pour agir en justice ;
Sur les préjudices subis,
- que par leur refus fautif, les consorts [O] ont privé la société Saytex et M. [C] d'une chance de céder leurs droits au bail à la société Or du Monde au prix de 200.000 euros ; que la probabilité était quasiment certaine ;
- que le second refus des consorts [O] a privé M. [C] et la société Saytex de la faculté de céder leurs droits au bail à la [14] [Localité 15]-Lemonnier au prix de 118.000 euros ; que la SCM [Localité 15]-Lemonier était très intéressée, avait signé une promesse de cession et versé une indemnité d'immobilisation de 20.000 euros ;
- que depuis mars 2017, date du refus par les consorts [O] de la cession des baux à la société Or du monde, la société Saytex et M. [C] sont contraints de payer le loyer sans en retirer aucun bénéfice, l'activité de la société Saytex étant déficitaire ;
- qu'ils ont aussi exposé en pure perte des honoraires de conseils et de rédaction d'acte s'élevant à 8.337,60 euros TTC ;
- que M. [C] et la société Saytex ont versé deux dépôts de garantie dont ils demandent le remboursement ;
- que le refus injustifié des consorts [O] a empêché M. [C], âgé et malade, de prendre sa retraite après 43 ans d'activité, étant précisé qu'il est locataire des consorts [O] depuis 1987 ; que ce refus l'a contraint à poursuivre son travail malgré les pertes de la société Saytex ; que M. [C] est vivement tourmenté par l'incertitude pesant sur la date de cession de ses droits au bail.
Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.
SUR CE,
1- Sur la demande dommages et intérêts formée par la société Saytex et M. [C]
L'article 1217 du code civil dispose que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
L'article 1231-1 précise que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
L'article 1232-2 ajoute que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications prévues aux articles 1231-3 à 1231-5.
Par ailleurs, l'article L.145-51 du code de commerce dispose que lorsque le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite ou ayant été admis au bénéfice d'une pension d'invalidité attribuée par le régime d'assurance invalidité-décès des professions artisanales ou des professions industrielles et commerciales, a signifié à son propriétaire et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce son intention de céder son bail en précisant la nature des activités dont l'exercice est envisagé ainsi que le prix proposé, le bailleur a, dans un délai de deux mois, une prirorité de rachat aux conditions fixées dans la signification. A défaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal judiciaire. La nature des activités dont l'exercice est envisagé doit être compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble.
1-1 Sur la faute reprochée aux consorts [O]
Il ressort des pièces produites aux débats qu'en 2017, la société Saytex et M. [C] n'ont pas inscrit leur projet de cession des trois baux à la société Or du monde dans le cadre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce.
En effet, si la lettre du 15 juin 2017 par laquelle les bailleurs ont été informés du projet mentionne le souhait de M. [C] de partir à la retraite, elle ne mentionne pas les dispositions de l'article L. 145-51 du code de commerce. Elle ne mentionne pas non plus le prix proposé pour la cession des baux. En outre, cette lettre n'est pas la signfication prévue à l'article L.145-51 du code de commerce.
Dans ces conditions, ce projet requérait l'accord des bailleurs quant au changement de destination des locaux. Ce projet, qui incluait la signature concomitante de nouveaux baux avec le cessionnaire et des travaux d'aménagement dans les locaux loués, requérait également l'accord des bailleurs sur ces points.
Les bailleurs ont refusé de donner leur accord, souhaitant ' respecter le bail en cours' et ne souhaitant pas 'modifier la structure de la boutique', sans qu'il soit apporté la preuve d'un abus dans l'exercice de leurs droits étant observé que la longueur et la bonne qualité des relations contractuelles entre les bailleurs et les preneurs jusque là, la situation de la société Saytex et de M. [C], le sérieux du projet de cession ne sont pas de nature à caractériser un abus.
En 2019, la société Saytex et M. [C] ont clairement inscrit leur projet de cession des baux dans le cadre des dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce.
Contrairement à ce que soutiennentt les consorts [O], la signification par les preneurs de la promesse de cession de deux des baux à la SCM [Localité 15]-Lemonier, suivant actes du 20 décembre 2019, respecte les dispositions de l'article L.145-51 du code de commerce. Si les actes de signification ne mentionnent pas eux-même la priorité de rachat des bailleurs dans le délai de deux mois, leur droit de saisir le tribunal judiciaire pour contester la cession dans le même délai de deux mois et le fait que leur accord sera réputé acquis faute d'usage de l'un ou l'autre de ces droits, l'acte signifié, joint à l'acte de signification, comporte toutes ces mentions ainsi que celles prescrites par l'article L.145-51 du code de commerce, à savoir la nature des activités envisagés ainsi que le prix proposé.
Les consorts [O] étaient donc bien informés du fait qu'ils devaient saisir le tribunal judiciaire dans le délai de deux mois à compter des significations du 20 décembre 2019, s'ils entendaient contester la cession des baux.
En l'absence d'exercice de leur priorité de rachat et de saisine du tribunal judiciaire par les consorts [O], leur accord à la cession des baux entre les preneurs et la société SCM [Localité 15]-Lemonier est réputé acquis.
Dans ces conditions, la faute imputable aux consorts [O] repose non pas sur leur opposition abusive ou injustifiée à la cession des baux, leur accord étant réputé acquis, que sur leur comportement lors des échanges qu'ils ont eus avec les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier à l'occasion des discussions relatives à la cession.
Les moyens soulevés par les consorts [O] dans le cadre de la présente instance pour établir la légitimité de leur opposition à la cession sont donc inopérants puisque que leur faute n'est pas fondée sur le caractère abusif ou injustifié de leur opposition à la cession.
Sans saisir le tribunal judiciaire, les consorts [O] ont expressément fait état de leur désaccord à la cession des baux entre les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier au motif erroné que les preneurs étaient occupants sans droit des locaux depuis le 1er octobre 2018 faute de signature des baux renouvelés.
Ils ont ainsi crée une situation litigieuse, source d'insécurité juridique.
Par ailleurs, ils ont refusé de se positionner sur les travaux envisagés par la SCM [Localité 15]-Lemonier pour adapter les locaux à son activité, estimant que ces travaux ne les concernaient pas alors qu'il résulte des pièces produites aux débats que la nature de ces travaux requérait leur autorisation compte tenu des clauses des baux. Ils ont également refusé toute discussion avec leurs locataires et la SCM [Localité 15]-Lemonier sur le projet de cession des baux, intimant à leurs interlocuteurs de ne plus leur adresser de correspondance sur le sujet.
Ils ont ainsi adopté un comportement laissant augurer à la SCM [Localité 15]-Lemonier des relations bailleurs-preneur difficiles nécessitant des procédures longues et coûteuses pour faire valoir ses droits.
En agissant ainsi, les bailleurs, opposés à tout changement, ont oeuvré pour faire échec à la cession des baux entre les preneurs et la SCM [Localité 15]-Lemonier et ont ainsi commis une faute au détriment de leurs preneurs.
Sans preuve que la SCM [Localité 15]-Lemonier n'avait pas obtenu le prêt mentionné dans la promesse de cession du 16 décembre 2019, étant observé qu'il est acquis que la société s'est depuis installée dans d'autres locaux dans le [Localité 1], il apparait que c'est bien le comportement fautif des consorts [O] qui a dissuadé la SCM [Localité 15]-Lemonier de conclure le contrat de cession des baux avec la société Saytex et M. [C].
1-2 Sur les préjudices subis par la société Saytex et M. [C]
Le préjudice subi par les preneurs, à savoir la société Saytex et M. [C], s'analyse en une perte de chance de voir la cession des baux avec la SCM [Localité 15]-Lemonier aboutir.
Le projet de cession des baux entre d'une part la société Saytex et M. [C] et d'autre part la SCM [Localité 15]-Lemonier était trés avancé en ce que la promesse de cession avait été signé et une indemnité d'immobilisation de 20.000 euros versée par la SCM [Localité 15]-Lemonier.
En outre, l'installation de la SCM [Localité 15]-Lemonier dans un autre quartier de [Localité 9] après l'échec de ce projet établit le sérieux de cette société.
Au regard de ces éléments de faits, il convient d'estimer la perte de chance à 40% et d'allouer à la société Saytex et M. [C] des dommages et intérêts à hauteur de 47.200 euros correspondant à 40 % du prix proposé par la SCM [Localité 15]-Lemonier.
M. [C] produit deux certificats médicaux, l'un du 3 juin 2020 d'un médecin généraliste et l'autre du 15 juin 2021 d'un médecin psychiatre. Il ressort de l'examen de ces certificats que M. [C] présente un état anxio-dépressif qui nécessite un traitement sous surveillance médicale, en lien avec l'échec de la cession des baux.
Le tribunal a fait une juste anaylse des faits en allouant à M. [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral.
C'est par des motifs exacts et pertinents, que la cour adopte et auxquels elle renvoie, que le tribunal a débouté la société Saytex et M. [C] de leurs demandes au titre du remboursement des loyers du 1er janvier 2017 au 30 juin 2021, du remboursement des honoraires de leur avocat du 16 mai 2018 au 20 mai 2020 et de la restitution des dépôts de garantie.
Il convient seulement d'ajouter concernant les honoraires d'avocat dont le remboursement est sollicité à hauteur de 8.337,60 euros TTC que ces frais ne concernent pas exclusivement la cession des baux avec la SCM [Localité 15]-Lemonier.
Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance,
débouté M. [V] [Z] [C] et la société Saytex de leurs demandes en paiement des sommes de 86.189,04 euros au titre des loyers payés, 8.337,60 euros au titre des frais d'avocat, 5.280 euros au titre du remboursement des dépôts de garantie,
condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral.
2- Sur la demande de dommages et intérêts des consorts [O]
Les consorts [O] n'apportent pas la preuve de l'attitude quérulente et vétilleuse de la société Saytex et de M. [C] dont ils se prévalent à l'appui de leur demande de dommages et intérêts. L'envoi de 3 lettres entre le 18 décembre 2019 et le 10 mars 2020, au contenu poli, ne caractérise pas une attitude fautive des preneurs. La société Saytex et société Saytex ne sont pas responsables de l'attitude de l'agence immobilière et de la SCM [Localité 15]-Lemonier étant en outre observé que le harcèlement dont auraient fait preuve ces personnes n'est établi par aucune pièce produite aux débats.
La société Saytex et M. [C] n'ont fait qu'exercer leurs droits vis à vis de leurs bailleurs.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté les consorts [O] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.
3- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les consorts [O] succombent en première instance et en appel.
Il convient en conséquence, en application de l'article 696 du code de procédure civile, de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné les consorts [O] aux dépens de première instance et de les condamner aux dépens de la procédure d'appel.
Par ailleurs, l'équité commande de confirmer les dispositions du jugement querellé relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner les consorts [O], in solidum, à payer à société Saytex et à M. [C] la somme de 5.000 euros chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par eux en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 novembre 2022 en ce qu'il a condamné solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 29.500 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 novembre 2022 en toutes ses autres dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
CONDAMNE solidairement Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer à M. [V] [Z] [C] et à la société Saytex la somme de 47.200 euros en réparation de leur préjudice de perte de chance ;
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de Mme Olivier Akerman, avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum Mme [D] [O], Mme [G] [O] et M. [T] [O] à payer la somme de 5.000 euros à la société Saytex et la somme de 5.000 euros à M. [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente