CA Douai, 8e ch. sect. 1, 23 octobre 2025, n° 23/00181
DOUAI
Autre
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Cofidis (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Benhamou
Conseiller :
Mme Ménegaire
Avocats :
Me Boulaire, Me Hélain
- FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:
Dans le cadre d'un démarchage à domicile selon bon de commande en date du 1er février 2017, M. [C] [U] a conclu avec la SARL GROUPE DBT un contrat afférent à la fourniture et la pose d'un système photovoltaïque destiné à produire de l'électricité à des fins domestiques d'une valeur de 20.000 euros selon bon de commande n°33198.
Pour financer cette installation, M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V] ont souscrit le 1er février 2017 un contrat de crédit auprès de la SA COFIDIS d'un pareil montant.
Par jugement en date du 9 janvier 2020, le tribunal de commerce de Marseille, a prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. GROUPE DBT et a désigné la SCP [O] [S] & [Z] [K] prise en la personne de Maître [O] [S] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par jugement en date du 8 octobre 2020, la liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif et le 9 octobre 2020, la S.A.R.L. GROUPE DBT a fait l'objet d'une radiation d'office pour ce même motif.
Par ordonnance en date du 26 octobre 2021, le président du tribunal de commerce de Marseille, a, à la demande de M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V], désigné Maître [O] [S] de la SCP [O] [S] & [Z] [K] en qualité de mandataire ad hoc de la S.A.R.L. GROUPE DBT afin que celle-ci soit représentée dans l'instance que devaient initier subséquemment les époux [U].
Par acte d'huissier en date du 31 janvier 2022, M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V] ont fait assigner en justice la SA COFIDIS et Maître [O] [S] de la SCP [O] [S] & [Z] [K] en qualité de mandataire ad hoc de la S.A.R.L. GROUPE DBT aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement en date du 18 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mise en cause du mandataire ad hoc de la S.A.R.L. GROUPE DBT,
- déclaré M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] recevables à agir,
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. [C] [U] et la S.A.R.L. GROUPE DBT sous bon de commande n°22198,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la SA COFIDIS d'une part et M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] d'autre part, le 1er février 2017,
- condamné par conséquent solidairement M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 9.311,44 euros selon décompte arrêté à la date du 26 février 2022 avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
- dit que M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] disposent d'une créance à l'encontre de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. GROUPE DBT au titre de la restitution du prix de vente,
- dit que compte tenu de la clôture de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. GROUPE DBT, M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] peuvent disposer du matériel, objet du bon de commande n°33198,
- condamné la SA COFIDIS à payer à M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] la somme de 850 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens de l'instance à la charge de la SA COFIDIS,
- rejeté le surplus des demandes,
- dit que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 11 janvier 2023, M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] ont interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a condamné par conséquent solidairement M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 9.311,44 euros selon décompte arrêté à la date du 26 février 2022 avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision.
Par arrêt avant dire droit en date du 19 décembre 2024, la 8ème chambre civile section 1 de la cour d'appel de Douai, a:
- prononcé la réouverture des débats,
- révoqué l'ordonnance de clôture,
- invité M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V] à assigner régulièrement en intervention dans le cadre de la présente procédure d'appel, Maître [O] [S] de la SCP [O] [S] & [Z] [K] es qualité mandataire ad hoc de la S.A.R.L. GROUPE DBT,
- dit que dans l'attente de cette assignation en intervention il y avait lieu de surseoir à statuer sur tous les chefs de demandes ,
- renvoyé l'affaire pour qu'elle soit jugée au fond à l'audience rapporteur de plaidoiries de la 8ème chambre civile section 1 de la Cour d'appel de Douai du 21 mai 2025,
- réservé les dépens d'appel.
Vu les dernières conclusions de M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V] en date du 28 avril 2025, et tendant à voir :
- Déclarer irrecevable, la demande d'infirmation du jugement portant sur la recevabilité de l'action des époux [U]
- Confirmer purement et simplement le jugement entrepris, sauf en ce qu'il rejette la demande des époux [U] de voir privée la société COFIDIS de sa créance de restitution et en ce qu'il rejette leurs demandes indemnitaires.
Statuant à nouveau de ces seuls chefs et y ajoutant:
- Constater que la société COFIDIS a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux ;
- Condamner la société COFIDIS à verser à Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] l'intégralité des sommes suivantes:
- 20 000,00 euros correspondant au montant du capital emprunté ;
- 10 671,52 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] à la société COFIDIS en exécution du prêt souscrit ;
- 5 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
- 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
A titre subsidiaire,
- Débouter la société COFIDIS de l'intégralité de ses prétentions, fins et conclusions contraires ou plus amples aux présentes ;
- Condamner la société COFIDIS à supporter les dépens de l'instance, tant de 1ère instance que d'appel.
Vu les dernières conclusions de la SA COFIDIS en date du 7 mai 2025, et tendant à voir :
- Infirmer le jugement sur la recevabilité des demandes de Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U].
Statuant à nouveau,
- Déclarer Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] irrecevables en leurs demandes, fins et conclusions, en l'absence de désignation d'un administrateur ad hoc tant en première instance qu'en appel, et les en débouter.
- Déclarer la SA COFIDIS recevable et bien fondée en ses demandes et fins et conclusions,
Y faisant droit,
- Condamner solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] à poursuivre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement.
A titre subsidiaire :
- Déclarer Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,
- Déclarer la SA COFIDIS recevable et bien fondés en ses demandes, fins et conclusions,
Y faisant droit, Condamner solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] à poursuivre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement.
A titre infiniment subsidiaire :
- Infirmer le jugement sur les fautes de COFIDIS.
- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] au remboursement du capital d'un montant de 9.311,44 euros, mais cette fois ci en l'absence de faute de COFIDIS et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité.
En tout état de cause :
- Infirmer le jugement sur la condamnation de COFIDIS à payer à Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
- Condamner solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- Condamner solidairement Monsieur [C] [U] et Madame [H] [V] épouse [U] aux entiers dépens.
Pour sa part la SCP [O] [S] & [K] prise en la personne de Maître [L] [S] es qualité de mandataire ad hoc de la société GROUPE DBT a été assignée devant la cour par acte de commissaire de justice en date du 29 janvier 2025 signifié à personne morale étant précisé que cet acte extrajudiciaire a été réceptionné par une assistante qui selon toute vraisemblance avait qualité pour la recevoir. Toutefois subséquemment cette intimée n'a pas constitué avocat ni conclu en cause d'appel.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu devant la cour, il convient de se référer à leurs écritures respectives.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 mai 2025.
- MOTIFS DE LA COUR:
- Sur la recevabilité des demandes des époux [U]:
Dans le cas présent la SA COFIDIS excipe de l'irrecevabilité des demandes des consorts [U].
Elle fait valoir que le tribunal n'a pas remarqué que l'ordonnance de désignation d'un administrateur ad hoc a été prise par le tribunal de commerce de Marseille pour une procédure qui devait initialement être dirigée devant le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Narbonne.
La SA COFIDIS argue de ce que l'administrateur ad hoc a été désigné pour une procédure devant le tribunal judiciaire de Narbonne et non pour une procédure par devant le tribunal judiciaire de Lille . Ainsi, aucun administrateur ad hoc n'a été valablement désigné dans la présente procédure, tant en première instance qu'en appel. Par suite, selon la SA COFIDIS l'emprunteur qui ne met pas en cause le vendeur est irrecevable à prétendre ne pas avoir obtenu pleinement satisfaction pour faire échec au paiement de l'emprunt. Ainsi pour cette société intimée les consorts [U] sont irrecevables à solliciter la nullité des conventions tant sur le fondement d'un prétendu non respect des dispositions du code de la consommation que sur le fondement d'un prétendu dol.
Toutefois dans le cadre de la procédure d'appel, l'objectivité commande de constater que les appelants ont régulièrement appelé en la cause le mandataire ad hoc de la société GROUPE DBT qui a vocation à exercer de telles fonctions dans le cadre de la présente procédure contentieuse.
Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de mise en cause du mandataire ad hoc de la S.A.R.L. GROUPE DBT, et en conséquence déclaré M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] recevables à agir.
- Sur la nullité du contrat de vente pour non respect des dispositions du code de la consommation:
L'article L221-5-1° du code de la consommation s'agissant des contrats conclus hors établissement prévoit en substance que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues à l'article L. 111-1.
L'article L 111-1 du même code quant à lui dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose:
«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; 4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du
contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.
Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.»
De plus l'article L111-2 du code de la consommation dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et qui a vocation à s'appliquer au présent litige, dispose :
'Outre les mentions prévues à l'article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d'un contrat de fourniture de services et, lorsqu'il n'y a pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu'à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d'Etat.'
L'article L 221-9 du dit code dispose quant à lui:
«Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.»
Par ailleurs l'article L 242-1 du même code prévoit en ce qui le concerne que les dispositions de l'article L 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Au cas particulier la nature complexe de l'opération contractuelle en question implique impérativement que soit précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder - comme il peut légitimement en ressentir la nécessité - à une comparaison pertinente entre diverses offres de même nature proposées sur le marché afin d' opérer le choix qui lui paraît le plus judicieux.
En l'espèce le bon de commande s'agissant de la marque des panneaux photocovoltaïques n'en spécifie nullement la marque. Or, la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 24 janvier 2024 a considéré que la marque constituait une caractéristique essentielle de l'installation des panneaux photovoltaïques (Cass. 1ère civ, 24 janvier 2024,, n° pourvoi 21-20.691).
De plus au cas particulier le bon de commande, s'agissant du délai prévu d'installation, est totalement silencieux car il ne fournit strictement aucune précision sur ce point étant entendu que la rubrique afférente à la 'Date de livraison du bien' n'est nullement renseignée puisque ne figure que l'année '2017" sans autre précision (pièce n°1 de la SA COFIDIS qui est le bon de commande ). Ce document contractuel omet ainsi de spécifier tant le délai de livraison que le calendrier précis des travaux concernant la prestation fournie avec notamment la date des démarches administratives visant à obtenir l'autorisation de la mairie et la date du raccordement ERDF qui conditionne le fonctionnement effectif de l'installation.
Par ailleurs il convient de souligner que les conditions générales de ce bon de commande sont rédigés en très petits caractères et s'avèrent d'une lisibilité très perfectible.
Il ressort ainsi des observations qui précédent, que les consommateurs, M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V], n'ont pas été suffisamment informés sur la prestation qu'ils entendaient obtenir dans le cadre du contrat en cause - étant bien entendu que tant la marque des panneaux photovoltaïques que la date de livraison et le calendrier des travaux apparaissent comme des caractéristiques essentielles et même primordiales de la prestation en cause. Il est incontestable que le bon de commande en question ne satisfait pas aux exigences protectrices du consommateur résultant des dispositions précitées du code de la consommation sans qu'il soit besoin d'apprécier si ces éléments ont été déterminants du consentement s'agissant d'une nullité d'ordre public.
En outre il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que les consorts [U], même s'ils avaient connaissance des irrégularités du bon de commande, ait manifesté la volonté non équivoque de renoncer à la nullité qui en découle, étant entendu que leur acceptation de la livraison n'a pu avoir pour effet de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui a vocation à les sanctionner. Au regard de leur qualité de simples profanes ils devaient de toute évidence ignorer que le défaut des mentions obligatoires entachant le bon de commande était sanctionné par la nullité de cet acte juridique s'agissant d'une nullité relative dans le cadre protecteur du droit de la consommation. Il ne ressort par ailleurs d'aucun élément objectif du dossier que M. [C] [U] et Mme [H] [U] née [V] aient expressément confirmé cet acte nul en renonçant à la nullité qui en découle notamment en envoyant au vendeur un courrier explicite à ce sujet de renonciation à la nullité du contrat en cause.
Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. [C] [U] et la S.A.R.L. GROUPE DBT sous bon de commande n°22198.
- Sur la nullité du contrat de crédit affecté:
En application des dispositions de l'article L 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu, est lui même judiciairement résolu ou annulé.
Le contrat principal de vente ayant été annulé, il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la SA COFIDIS d'une part et M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] d'autre part, le 1er février 2017.
- Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente et du contrat de crédit:
Dans le cas présent l'annulation du contrat principal de vente et du contrat de crédit qui certes anéantit ces deux conventions, ne saurait toutefois conduire au rétablissement mécanique du statu quo ante. En effet dans certains cas la banque pourra se trouver privée de sa créance de restitution.
' Sur les conséquences de l'annulation du contrat principal de vente:
Dans les rapports entre le vendeur et son cocontractant consommateur, l'annulation de la vente commande en principe au mandataire ad hoc de la société GROUPE DBT de restituer le prix de vente aux consorts [U] (restitution du prix qui ne peut être effective car la société GROUPE DBT du fait sa faillite n'est pas in bonis), conséquence juridique normale de l'annulation du contrat de vente. Par ailleurs les consommateurs, les consorts [U] auraient dû restituer le matériel. Toutefois compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a dit que M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] disposent d'une créance à l'encontre de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. GROUPE DBT au titre de la restitution du prix de vente, et dit que compte tenu de la clôture de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. GROUPE DBT, M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] peuvent disposer du matériel, objet du bon de commande n°33198.
' Sur les conséquences de l'annulation du contrat de crédit affecté:
Il résulte d'une jurisprudence bien établie que commet une faute, la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s'assurant pas au moyen de toutes démarches utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.
Au cas particulier l'objectivité commande de constater que la SA COFIDIS a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle a débloqué les fonds du crédit affecté.
La banque peut ainsi être privée de sa créance de restitution quand l'emprunteur justifie d'un préjudice en lien de causalité avec cette faute.
Dans un arrêt de principe en date du 10 juillet 2024 la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal (Cass. Civ, 1ère 10 juillet 2024, n° du pourvoi 23-15.802).
La Cour suprême estime ainsi qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque a manqué à ses obligations, et que d'autre part, l'emprunteur a subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel. Elle en déduit que la banque dans ce cas doit être condamnée à restituer à l'emprunteur à titre de dommages et intérêts une somme correspondant au capital emprunté.
Au cas d'espèce force est de constater que la faillite du vendeur doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution. En effet du fait de cette déconfiture les consorts [U] se verront incontestablement dans l'impossibilité de récupérer le prix de vente auprès de la société placée en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente. Il convient de souligner que cette liquidation judiciaire suivie d'une clôture pour insuffisance d'actif rend absolument certaine et non pas seulement probable la non restitution du prix par cette société ayant fait l'objet d'une procédure collective.
La faute de la SA COFIDIS en l'espèce a causé aux consorts [U] un préjudice incontestable qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution. Il y a lieu en effet en l'espèce de faire application du principe fondamental dans la sphère de la responsabilité civile de la réparation intégrale du préjudice qui commande de réparer tout le préjudice mais rien que le préjudice.
Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la SA FRANFINANCE soit privée totalement de sa créance de restitution à hauteur de la somme de 24.500 euros.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné par conséquent solidairement M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 9.311,44 euros selon décompte arrêté à la date du 26 février 2022 avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision du premier juge. Il y a lieu par suite, statuant à nouveau, de condamner la SA COFIDIS à verser à M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] la somme de 20 000,00 euros correspondant au montant exact du capital emprunté en réparation du préjudice subi.
Le principe de réparation intégrale du préjudice commande de ne réparer que le préjudice et rien que le préjudice selon les modalités qui viennent d'être évoquées. Par suite, les autres demandes de dommages et intérêts des consorts [U] devront donc être rejetées.
- Sur les autres points déférés à la cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel:
Par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le premier juge dans la décision entreprise a:
' condamné la SA COFIDIS à payer à M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] la somme de 850 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' mis les dépens de l'instance à la charge de la SA COFIDIS,
' rejeté le surplus des demandes,
' dit que le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire.
Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.
- Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel:
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de à M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] les frais irrrépétibles exposés par eux devant la cour et non compris dans les dépens.
Il convient dès lors de condamner la SA COFIDIS à leur payer la somme de 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA COFIDIS les frais irrrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.
Il y a lieu en conséquence de débouter la SA COFIDIS de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
- Sur le surplus des demandes:
Au regard des considérations qui précédent, il convient de débouter les parties du surplus de leurs demandes.
- Sur les dépens d'appel:
Il convient de condamner la SA COFIDIS qui succombe, aux entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,
- Confirme le jugement querellé sauf en ce qu'il a condamné par conséquent solidairement M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] à payer à la SA COFIDIS la somme de 9.311,44 euros selon décompte arrêté à la date du 26 février 2022 avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
Statuant à nouveau sur le point infirmé, et y ajoutant,
- Condamne la SA COFIDIS à verser à M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] la somme de 20 000,00 euros correspondant au montant exact du capital emprunté en réparation du préjudice subi,
- Déboute M. [C] [U] et Mme [H] [V] épouse [U] de leurs autres demandes de dommages et intérêts,
- Condamne la SA COFIDIS à leur payer la somme de 850 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute la SA COFIDIS de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
- Condamne la SA COFIDIS aux entiers dépens d'appel.