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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 23 octobre 2025, n° 25/01078

AIX-EN-PROVENCE

Autre

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Maxime Jarry Plomberie Chauffage (SARL)

Défendeur :

Jalis (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cesaro-Pautrot

Conseillers :

Mme Combrie, Mme Brahic-Lambrey

Avocats :

Me Furet, Me Tari

T. com. Marseille, du 19 déc. 2024, n° 2…

19 décembre 2024

Exposé des faits et de la procédure

Faits constants

Le 19 juillet 2023, la société Jalis et la société Maxime Jarry plomberie chauffage (la société Maxime Jarry) ont signé un contrat de licence d'exploitation de site internet, pour une durée de 48 mois à compter de la signature du procès-verbal de livraison et de conformité d'un site internet fourni par la première à la seconde, moyennant le versement d'une mensualité de 250 euros HT (300 euros TTC.)

Le procès-verbal de livraison a été signé le 30 août 2023.

Le 22 mars 2024, la société Maxime Jarry a, par lettre recommandée avec avis de réception, déclaré résilier le contrat au motif que le fournisseur aurait exigé un moyen de paiement avant le délai de 7 jours en violation des dispositions de L. 221-10 du code de la consommation et invoqué les dispositions de ce code.

Les échéances n'ont plus été payées.

Les 16 juillet 2024 et 3 septembre 2024, la société Jalis a mis en demeure la société Maxime Jarry de procéder au règlement des échéances impayées.

Par lettre du 26 septembre 2024, la société Jalis a informé la société Maxime Jarry de la résiliation du contrat à ses torts exclusifs, et l'a mise en demeure de procéder au règlement du solde des sommes dues au titre du contrat, majoré des intérêts de retard conventionnels et d'une clause pénale de 10 % des sommes dues, soit 13 200 euros TTC.

Procédure

La société Jalis a saisi le président du tribunal de commerce de Marseille en référé aux fins notamment de constater la résiliation anticipée du contrat et de condamner la société Maxime Jarry à lui verser une somme provisionnelle de 13 200 euros TTC, majorée des intérêts conventionnels de retard ainsi qu'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé du 19 décembre 2024, le président de ce tribunal a :

- condamné la société Maxime Jarry à payer, en deniers ou quittance, à la société Jalis la somme provisionnelle de 13 200 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2024 ainsi que celle de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux dépens toutes taxes comprises de l'ordonnance tels qu'énoncés par l'article 695 du code de procédure civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction étaient liquidés à la somme de 38,65 euros;

- rejeté le surplus des demandes.

Le 28 janvier 2025, la société Maxime Jarry a interjeté appel de l'ordonnance, par voie électronique, en ce qu'elle l'a condamnée à verser une somme provisionnelle de 13 200 euros à la société Jalis avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2024, ainsi que la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens de l'instance en référé.

L'affaire a été orientée à bref délai le 11 février 2025 et la déclaration d'appel et l'avis d'orientation et de fixation signifiés le 18 février 2025.

La clôture de la procédure a été fixée par ordonnance du 11 septembre 2025 à cette date.

****

Vu les conclusions déposées le 10 mars 2025 par voie électronique et signifiées le 9 avril 2025, par lesquelles la société Maxime Jarry demande à la cour d'appel, sous le visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, L. 221-1 à L. 221-29 et L. 242-1 du code de la consommation, 1128 et 1182 du code civil, de :

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du tribunal de commerce de Marseille du 19 décembre 2024 en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la société Jalis 13 200 euros TTC outre 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les intérêts et dépens ;

Et statuant à nouveau :

- constater l'existence d'une contestation sérieuse au motif de la nullité du contrat dont il est demandé paiement ;

- se déclarer incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;

- condamner la société Jalis à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner la société Jalis aux entiers dépens ;

- débouter la société Jalis en toutes ses demandes, fins et conclusions.

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 6 juin 2025, par lesquelles la société Jalis demande à la cour d'appel, sous le visa des articles 1103 et 1212 du code civil, 700 et 873 et 906-1 du code de procédure civile, L. 221-1 et suivants du code de la consommation de :

- la recevoir dans sa demande et la déclarer bien fondée ;

En conséquence :

A titre liminaire,

- prononcer la caducité de la déclaration d'appel du 28 janvier 2025 de la société Maxime Jarry,

A titre subsidiaire,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue par le tribunal de commerce de Marseille du 19 décembre 2024, à savoir en ce qu'elle a condamné la société Maxime Jarry à lui payer la somme provisionnelle de 13 200 euros TTC au titre des impayés et de l'indemnité de résiliation anticipée du contrat, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2024, ainsi que celle de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

Y ajoutant :

- condamner la société Maxime Jarry à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en appel,

- la débouter de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner aux entiers dépens d'appel.

MOTIVATION

I. Sur la caducité de la déclaration d'appel

La société Jalis fait valoir à titre liminaire la caducité de la déclaration d'appel en application de l'article 906-1 du code de procédure civile, en l'état d'un avis de fixation à bref délai du 11 février 2025 et faute de signification de la déclaration d'appel et de l'avis de fixation à l'intimée.

Selon l'article 906-3 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable aux procédures introduites au 1er septembre 2024, in limine, 'le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président est seul compétent, jusqu'à l'ouverture des débats ou jusqu'à la date fixée pour le dépôt des dossiers des avocats, pour statuer sur:

1° L'irrecevabilité de l'appel ou des interventions en appel;

2° La caducité de la déclaration d'appel;

3° L'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application de l'article 906-2 et de l'article 930-1;

4° Les incidents mettant fin à l'instance d'appel.'

En conséquence, le président de chambre est compétent pour statuer sur la caducité de la déclaration d'appel, néanmoins, la cour d'appel peut s'en saisir d'office.

Selon l'article 906-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable aux instances d'appel introduites à compter du 1er septembre 2024 'lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les vingt jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le président de la chambre saisie ou le magistrat désigné par le premier président.

Si l'intimé constitue avocat avant la signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

Dans tous les cas, une copie de l'avis de fixation à bref délai est jointe.

À peine de nullité, l'acte de signification indique à l'intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné à l'article 906-2, il s'expose à ce que ses conclusions soient déclarées d'office irrecevables.'

L'avis de fixation de la procédure à bref délai date du 11 février 2025.

Le relevé dématérialisé de la procédure établit que la déclaration d'appel du 28 janvier 2025 a été signifiée avec lui le 18 février 2025 à la société Jalis.

Dès lors, la signification de la déclaration d'appel étant intervenue dans les vingt jours de la réception de l'avis de fixation adressé par le greffe, aucune caducité n'est encourue.

II. Sur la contestation sérieuse

La société Maxime Jarry, excluant dommage imminent et trouble manifestement illicite, fait valoir l'existence d'une contestation sérieuse, faute pour le contrat de respecter les dispositions des articles L. 221-1 à L. 221-9 du code de la consommation.

Elle estime que le contrat a été conclu, après démarchage, hors établissement, et qu'elle est une petite entreprise de 5 salariés, ce qui permet de l'assimiler à un consommateur profane.

L'obligation précontractuelle fournie ne serait dès lors pas régulière faute de mentionner le coût total du contrat et la possibilité pour le consommateur de recourir à un médiateur de la consommation.

Par ailleurs, un règlement immédiat aurait été irrégulièrement effectué par la remise d'un RIB et d'un mandat SEPA le jour de la signature, l'article 9.3 du contrat indiquant que le mandat SEPA serait signé ce même jour.

La nullité absolue qui en découlerait ne serait pas susceptible de confirmation. De surcroit, la confirmation par l'exécution de ses obligations par le débiteur ne remplirait pas en l'espèce les conditions des articles 1128 et 1182 du code civil.

Une contestation sérieuse s'opposerait ainsi à la décision prise en référé.

La société Jalis indique qu'elle était bien fondée à obtenir le règlement des sommes incontestablement dues en exécution du contrat par son cocontractant alors qu'elle même n'a commis aucune faute.

Elle réfute avoir manqué à une obligation précontractuelle d'information, l'ensemble des informations nécessaires figurant au contrat, et avoir manqué aux obligations résultant de l'article L. 221-2 du code de la consommation, le mandat de prélèvement SEPA ayant été remis postérieurement au délai de 7 jours prévu, le 28 août 2023, et sa seule remise ne pouvant en tout état de cause être considérée comme un paiement anticipé.

****

Aux termes de l'article 873 du même code, 'Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.'

A cet égard, l'obligation est non sérieusement contestable lorsque qu'elle ne peut raisonnablement faire de doute dans l'esprit des juges. Ainsi, dans cette hypothèse, le juge des référés, indépendamment de la saisine au principal, se voit conférer le pouvoir d'ordonner immédiatement les mesures nécessaires, conformément à l'article 484 du code de procédure civile.

En revanche, une contestation revêt un caractère sérieux lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse au contraire subsister un doute sur la décision susceptible d'être rendue par les juges du fond.

En l'espèce, les contestations tenant à l'interdiction, à peine de nullité, de procéder à un paiement avant l'expiration du délai de rétractation de 7 jours des articles L. 221-1 à L. 221-9 du code de la consommation, et tenant à la violation par la société Jalis de son obligation d'information quant à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation conformément aux dispositions du 6° de l'article L. 221-5 du code de la consommation, prescrites à peine de nullité, imposent de vérifier les conditions de signature du contrat et la situation de l'entreprise à cette date pour déterminer l'application éventuelle des dispositions du code de la consommation, ainsi que d'examiner les conditions générales de ce contrat et notamment les informations qu'elles portent à la connaissance du cocontractant, et l'article 9-3 de ce dernier qui indique que le mandat de prélèvement SEPA se trouve remis le jours de sa signature, lequel doit être examiné au regard de la date de ce mandat, le 28 août 2023, ainsi les conditions de remise du dit mandat.

Ainsi, la contestation excède les pouvoirs de la juridiction des référés, juge de l'évidence, et il n'y a, dès lors, pas lieu à référé. En conséquence, l'ordonnance doit être infirmée en toutes ses dispositions.

III. Sur les frais du procès

La société Jalis, partie perdante, sera tenue aux entiers dépens de première instance et d'appel et sera tenue de payer à la société Maxime Jarry la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Dit n'y avoir lieu de prononcer la caducité de la déclaration d'appel de la société Maxime Jarry Plomberie chauffage du 28 janvier 2025;

Infirme l'ordonnance rendue le 19 décembre 2024 par le juge des référés du tribunal de commerce de Marseille ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes formées par la société Jalis,

Déboute la société Jalis de ses demandes tendant à la condamnation de la société Maxime Jarry Plomberie chauffage à payer une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens,

Condamne la société Jalis aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société Jalis à payer à la société Maxime Jarry plomberie chauffage la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

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