CA Aix-en-Provence, ch. 1-9, 23 octobre 2025, n° 25/01542
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 23 OCTOBRE 2025
N° 2025/427
N° RG 25/01542 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BOLAE
[D] [R]
S.C.I. ELONI
C/
S.D.C. [Adresse 12]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Alain CURTI
Me Emmanuel VOISIN-MONCHO
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de [Localité 8] en date du 27 Janvier 2025 enregistré au répertoire général sous le n° 24/00690.
APPELANTS
Monsieur [D] [R]
né le 5 Juillet 1962 à [Localité 10],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Alain CURTI, avocat au barreau de NICE
S.C.I. ELONI, située [Adresse 11], immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 450 661 996 ; prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [Y] [T], domicilié [Adresse 13].
représentée par Me Alain CURTI, avocat au barreau de NICE
INTIMÉE
Syndicat des Copropriétaires de la résidence [5], située [Adresse 4] ; pris en la personne de son Syndic en exercice, la SARL CABINET IMMOBILIER [G] COMBET exerçant sous l'enseigne CABINET JEC IMMO , immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le n° 791 226 889, elle-même prise en la personne de son gérant en exercice, domiciliée [Adresse 2]
représentée par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, substituée et plaidant par Me Sabrina PIERINI, avocats au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Pascale BOYER, conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président
Monsieur Ambroise CATTEAU, conseiller
Mme Pascale BOYER, conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Nicolas FAVARD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025
Signé par Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président et Monsieur Nicolas FAVARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement du 10 juillet 2023 a condamné Monsieur [R] et la SCI Eloni, sous astreinte de'1000 euros par infraction constatée':
- à n'utiliser les resserres dont ils sont propriétaires au sein de la copropriété Beau Réveil qu'à usage d'entrepôt de biens, à l'exclusion de tout usage à titre d'habitation
- à supprimer tout raccordement aux réseaux communs du syndicat des copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité, d'alimentation en eau et d'évacuation des eaux usées) autres que ceux existant à l'origine.
Le jugement a été signifié à Monsieur [R] le 11 août 2023 et à la SCI Eloni le 16 août 2023. Ils en ont interjeté appel pendant devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Selon acte de commissaire de justice en date du 29 janvier 2024, le [Adresse 14] a fait attraire Monsieur [R] et la SCI Eloni devant le juge de l'exécution du tribunal de Grasse aux fins d'obtenir la liquidation des astreintes et le prononcé d'une nouvelle astreinte définitive.
Par jugement du 27 janvier 2025 auquel le présent se réfère pour plus ample exposé des faits et de la procédure, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grasse a':
- Débouté la SCI Eloni et Monsieur [R] de leur demande de bâtonnage des conclusions du syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) ;
- Débouté la SCI Eloni et Monsieur [R] de leur demande de nullité et d'inopposabilité des procès-verbaux de constat des 24 octobre 2023, du 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 ;
- Liquidé l'astreinte ordonnée à l'égard de Monsieur [R], par le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement en date du 10 juillet 2023, à la somme de 2000 euros ;
- Condamné Monsieur [R] à payer cette somme au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à [Localité 7] ;
- Liquidé l'astreinte ordonnée à l'égard de la SCI Eloni, par le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement en date du 10 juillet 2023, à la somme de 4 000 euros ;
- Condamné la SCI Eloni à payer cette somme au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) ;
- Débouté le syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à [Localité 7] de sa demande de fixation d'une astreinte définitive ;
- Condamné in solidum la SCI Eloni et Monsieur [R] à payer au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) la somme de 2200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- Condamné in solidum la SCI Eloni et Monsieur [R] aux dépens de la procédure ;
- Rejeté tous autres chefs de demandes.
Monsieur [R] et la SCI Eloni ont formé appel contre de cette décision par déclaration du 8 février 2025.
Le 13 février 2025, le greffe de la cour a avisé le conseil des appelants de la fixation de l'affaire à plaider, selon la procédure de bref délai, à l'audience du 12 septembre 2025 avec clôture au 12 août 2025.
L'intimé a constitué avocat le 21 février 2025.
Le 24 février 2025, les appelants ont notifié au conseil de l'intimé la déclaration d'appel et l'avis de fixation.
Selon leurs conclusions du 4 mars 2025, les appelants demandent à la cour de':
- Déclarer recevable leur appel
- Réformer le jugement en toutes ses dispositions,
- Sauf en ce qui concerne le débouté de la demande d'astreinte définitive, qui sera confirmé - Annuler les constats d'huissier en date 12 septembre 2023 et 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 produits par la copropriété pour violation des droits de propriété et violation de la loi sur la protection de la vie privée
- Déclarer inopposable à leur encontre les constats d'huissier en dates des 12 septembre 2023 et 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 produits par la copropriété pour violation du principe du contradictoire
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation au titre de la liquidation d'une astreinte de 1.000 euros à l'encontre de la SCI Eloni ainsi que de 2.000 euros à l'encontre de Monsieur [R] en l'absence de preuve de la violation par ces derniers de la décision ordonnant l'astreinte,
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande d'astreinte définitive à hauteur de 1.000 euros par jour, astreinte totalement disproportionnée et que rien ne justifie en l'espèce.
- Condamner le syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 3000 euros au titre
de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.
Ils dénoncent l'acharnement procédurier du syndicat des copropriétaires contre eux alors qu'il laisse d'autres propriétaires occuper les resserres à des fins d'habitation.
Ils contestent être des «marchands de sommeil», indiquant qu'il ne s'agit pas de locaux insalubres mais de studettes équipées selon les normes en vigueur bénéficiant d'un accès à des toilettes
Ils soutiennent que le constat du 12 septembre 2023 doit être annulé car le commissaire de justice, dépourvu d'une autorisation judiciaire de pénétrer dans une partie privative, a fait pression sur la personne se trouvant dans la resserre appartenant à la SCI Eloni pour forcer l'accès sans son accord.
Ils indiquent que la prise de photographies de l'intérieur d'un local privé par une fenêtre est une violation du droit à la vie privée.
Ils ajoutent que le commissaire de justice a outrepassé ses pouvoirs en matière de constat en demandant l'identité de la personne présente.
Ils ajoutent que, le 24 octobre 2023, le commissaire de justice a poursuivi ses constatations à l'intérieur du même local malgré le refus de l'occupant de le laisser entrer, de sorte qu'elles ont été obtenues par violation de domicile et entrée sans autorisation dans un local privé. Ils invoquent aussi l'atteinte à la vie privée.
Ils ajoutent que le commissaire de justice a procédé par déductions et non par constatations en indiquant que la fenêtre observée était celle du local dans lequel il a pénétré.
Ils soutiennent que le constat du 15 novembre 2023 ne permet pas d'identifier le propriétaire de la resserre photographiée. Ils demandent également son annulation en précisant qu'il ne contient aucun élément de nature à prouver une infraction de leur part.
Ils indiquent que le constat du 4 juin 2024 a été effectué sur des parties communes mais qu'il n'établit pas que les resserres observées sont habitées. Ils rappellent que les propriétaires de ces locaux peuvent les éclairer et y accéder à leur gré. Ils ajoutent que le constat ne permet pas de déterminer si la resserre observée appartient à l'un d'eux.
Ils soutiennent que le principe du contradictoire n'a pas été respecté car les constats ont été pratiqués sans qu'ils soient invités à assister aux opérations.
Ils concluent au rejet de la demande de liquidation d'astreinte au motif que les constats d'huissier de justice ne prouvent pas une violation des termes du jugement.
Ils ajoutent qu'ils rapportent la preuve que les resserres leur appartenant ne sont pas occupées à titre d'habitation.
La SCI Eloni fait valoir qu'elle a prêté une resserre à Monsieur [E], un ami, pour se reposer au calme après une intervention chirurgicale. Elle ajoute qu'elle a fait constater, le 21 février 2024, que les deux resserres lui appartenant étaient vides de toute occupation. Elle indique que l'occupation précaire y est permise par le règlement de copropriété.
Monsieur [R] indique que ses deux resserres ont été occupées uniquement provisoirement et à titre gratuit, l'une par un ami qui a quitté les lieux le 25 février 2024 et l'autre par un entrepreneur individuel pratiquant dans ce local la conciergerie de luxe.
Ils précisent que le constat du 15 novembre 2023 révèle que les raccordements d'eau sont d'origine, de même que le raccordement électrique qui a toujours donné lieu à facturation de l'électricité par le syndicat des copropriétaires.
Par ses conclusions du 1er avril 2025, le [Adresse 14] demande à la cour de':
- le Recevoir en son appel Incident,
- Confirmer la condamnation de la SCI Eloni à 4.000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte du jugement du 10 juillet 2023 du tribunal judiciaire de Grasse,
- Compléter la décision de première instance en condamnant Monsieur [R] à 6.000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte du jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 10 juillet 2023,
- Fixer en exécution dudit jugement, une astreinte définitive à compter de la décision à intervenir, de 1.000 euros par jour à titre de sanction de l'obligation faite par ledit jugement tant à la SCI Eloni qu'à Monsieur [R], à utiliser les resserres dont ils sont propriétaires au sein de la Copropriété Beau Réveil à un usage autre qu'entrepôt de biens et ce à l'exclusion de tout usage à titre d'habitation, ainsi qu'à supprimer tout raccordement aux réseaux communs du Syndicat des Copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité et alimentation en eau et évacuation des eaux usées autres que ceux existant à l'origine),
- Modifier la décision de première instance en condamnant in solidum au titre des frais de première instance, Monsieur [R] et la SCI Eloni à 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais des procès-verbaux de constat des 12 septembre 2023, 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 janvier 2024,
- les Condamner in solidum à lui verser la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
- les Condamner à lui payer 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure d'appel abusive et vexatoire.
Il soutient que les constats prouvent quatre infractions au jugement de 2023, soit deux occupations de resserres établies par les constatations du commissaire de justice lorsque les occupants ont ouvert leur porte et deux raccordements à l'aide de serflex aux réseaux communs.
Il soutient que le jugement ne précise pas que l'interdiction d'occupation à usage d'habitation est limitée à celle à titre onéreux.
Il réplique que le commissaire de justice a accompli sa mission dans le respect des règles et en recueillant notamment l'accord des occupants pour pénétrer à l'intérieur et prendre des photographies.
Il fait valoir que les conclusions des appelants contiennent la reconnaissance que les resserres ont été occupées à titre d'habitation. Il ajoute que les occupants ont pu se montrer agressifs et violents.
Il soutient que l'attitude des appelants et le contenu de leurs conclusions démontrent un refus d'exécuter la décision de 2023, de sorte qu'une astreinte définitive par jour de retard est nécessaire.
Par ses dernières conclusions du'30 juillet 2025, les appelants maintiennent leurs prétentions.
Ils ajoutent que la copropriété a reconnu l'absence d'occupation illicite lors de la dernière assemblée générale et tente de racheter les resserres litigieuses.
L'intimé a conclu le 4 août 2025 et a communiqué 5 nouvelles pièces. Il n'a pas modifié ses prétentions.
La clôture a été prononcée le 12 août 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Or, les appelants font état, dans les motifs de leurs conclusions, d'une demande de réformation de la décision concernant le refus de bâtonnage des conclusions du syndicat des copropriétaires. Cependant, cette demande n'est pas contenue dans le dispositif des conclusions communiquées. La cour n'en est donc pas saisie.
Sur les demandes d'annuler et de déclarer inopposables les constats de commissaire de justice
En application des dispositions de l'article 1 de l'ordonnance numéro 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice': «'(') II. - Les commissaires de justice peuvent en outre : (')
2° Effectuer, lorsqu'ils sont commis par justice ou à la requête de particuliers, des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter. Sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, ces constatations font foi jusqu'à preuve contraire (')';'»
Le commissaire de justice lorsqu'il est mandaté par un particulier, peut effectuer toutes constatations dans un lieu public ou les lieux auxquels son requérant ou le titulaire du droit de propriété ou d'occupation lui autorise l'accès. Il ne peut pénétrer dans un lieu privé constituant le domicile de tiers qu'avec l'accord de ces derniers.
En l'espèce, les deux commissaires de justice dont les constats sont produits ont été mandatés par le syndic de la copropriété dans le cadre de l'exécution du jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 10 juillet 2023, afin d'apporter des éléments concernant la persistance de la violation par Monsieur [R] et la SCI Eloni des interdictions et injonctions posées par le tribunal.
Afin de mener à bien leur mandat, ils étaient habilités à solliciter l'ouverture des portes des resserres par leurs occupants et à s'informer de leur identité et de leur titre d'occupation.
Il ne ressort pas des constats produits que les commissaires de justice ont réalisé un contrôle de l'identité de l'occupant interrogé dans la mesure où ils n'ont pas demandé de justifier de l'identité déclarée ni du titre d'occupation indiqué.
Maître [N], ayant réalisé le constat du 12 septembre 2023, mentionne qu'il a reçu l'accord de l'occupant de la resserre visitée, ayant déclaré se nommer Monsieur [E], pour y pénétrer et y prendre des photographies. Il s'agit d'une constatation de ce que le commissaire de justice a entendu qui fait foi jusqu'à preuve contraire.
L'attestation de Monsieur [E] versé aux débats ne permet pas d'apporter la preuve contraire. En effet, il ne précise pas la date à laquelle s'est produite la visite de l'huissier de justice qu'il aurait refusée, alors qu'il ressort des constats réalisés qu'il a accepté le 12 septembre 2023 que le commissaire de justice pénètre dans le local alors qu'il l'a refusé par la suite et qu'il ressort des constats postérieurs que le commissaire de justice n'a pas outrepassé ce refus.
En ce qui concerne les trois autres constats, le commissaire de justice note qu'après avoir décliné son identité et l'objet de sa visite, il a sollicité l'autorisation de pénétrer dans les resserres litigieuses et qu'ayant essuyé un refus, il n'a pas forcé'le passage. Ces faits ne sont pas contredits par des preuves contraires.
Les constatations de ce qui était visible depuis le couloir du sous-sol de l'immeuble et depuis l'extérieur, soit depuis des parties communes dans lesquelles il avait l'autorisation de pénétrer, ne portent pas atteinte au principe de l'inviolabilité du domicile privé.
La décision de première instance sera donc confirmée en ce que le tribunal a rejeté la demande d'annulation des constats des 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024.
En outre, la demande d'annulation du constat du 12 septembre 2023 qui n'avait pas été formellement soumise au premier juge, sera rejetée.
Sur les demandes de liquidation d'astreinte
La SCI Eloni et Monsieur [R] concluent au rejet de cette demande.
Le syndicat des copropriétaires demande confirmation de la liquidation contre la SCI et une augmentation de la liquidation contre Monsieur [R] à 6000 euros.
Il ressort des constats de commissaires de justice produits que l'occupant de la resserre sur la porte de laquelle est apposée une plaque contenant le mot «'CABIN'» et un drapeau canadien, a déclaré se nommer Monsieur [E] et occuper le local à titre d'habitation en vertu d'un bail consenti par la SCI Eloni gérée par Monsieur [T].
Les commissaires de justice successifs ont constaté par trois fois, les 12 septembre 2023, 24 octobre 2023 et 15 novembre 2023 que cette resserre était aménagée en studio et qu'une personne y était logée.
En revanche, le constat réalisé le 4 juin 2024 ne contient pas la précision que sur la première porte à laquelle le commissaire de justice a frappé, il était apposé le mot «'Cabin'» et un drapeau canadien. Il ressort de cet acte qu'elle n'est pas situé dans le couloir à l'emplacement où les constatations précédentes ont été réalisées.
En ce qui concerne Monsieur [R],' il n'a pas contesté être propriétaire de la resserre située au bout du couloir à droite, voisine du WC et de la douche qui sont communs. Les commissaires de justice ont pu constater à deux reprises, les 15 novembre 2023 et 4 juin 2024, qu'elle était occupée par un homme possédant un chien.
Lors des premières constatations, il a déclaré au commissaire de justice qu'il devait s'adresser à Monsieur [R] pour avoir des renseignements. Lors de la visite suivante, le commissaire de justice, par la fenêtre que l'occupant a ouverte après sollicitation, a constaté la présence d'une cuisine équipée, d'un lit et d'une télévision.
Les deux appelants n'ont jamais contesté au cours des procédures menées à leur encontre par le syndicat des copropriétaires que les resserres qu'ils possédaient étaient aménagées en chambres de services et occupées en tant que logements.
Les constats établissent que les resserres étaient toujours aménagées et occupées en tant que studettes équipées.
Ils permettent de retenir trois infractions concernant la SCI Eloni et deux infractions de la part de Monsieur [R] à l'interdiction d'occuper en tant que logement prononcée par le tribunal.
Le jugement du 10 juillet 2023 a assorti d'une astreinte par infraction constatée la condamnation à «supprimer tout raccordement aux réseaux communs du syndicat des copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité, d'alimentation en eau et d'évacuation des eaux usées) autres que ceux existant à l'origine».
Le premier juge a relevé, à juste titre, que le titre exécutoire ne définit pas la date de l'origine dont il fait état et qu'il ne contient pas de précision sur les raccordements à supprimer.
En conséquence, les constats faisant état de la présence de câbles reliés à un panneau électrique commun ne prouvent pas d'infraction à la condamnation exécutoire.
La décision de première instance sera donc confirmée sur le principe de la liquidation de l'astreinte à l'encontre de la SCI Eloni et à l'encontre de Monsieur [R].
En ce qui concerne le montant des astreintes liquidées, le juge de l'exécution a fait une juste appréciation des circonstances de la cause en fixant l'astreinte liquidée pour deux infractions constatées à la somme de 2000 euros, soit le montant prononcé en l'absence de difficulté d'exécution invoquée.
Le montant de l'astreinte liquidée concernant la SCI Eloni sera réduit à 3000 euros, dans la mesure où les pièces ne permettent de retenir que trois infractions à l'obligation de n'utiliser les resserres qu'à titre d'entrepôt à l'exclusion de l'habitation. La SCI n'invoque, en effet, aucune difficulté d'exécution pour faire cesser l'habitation qui ne dépend que de son fait. Il est justifié d'appliquer le taux de l'astreinte fixé par le tribunal.
Sur la demande de prononcé d'une astreinte définitive
Le tribunal a assorti la condamnation de cesser l'utilisation des resserres à titre d'habitation et de supprimer les liaisons aux réseaux d'eau et d'électricité d'une astreinte par infraction constatée.
Le juge de l'exécution a refusé de prononcer une astreinte journalière définitive au motif que l'astreinte par infraction constatée n'était pas limitée dans le temps.
Le syndicat des copropriétaires demande une astreinte journalière définitive.
L'article L. 131-1 alinéa 2 code des procédures civiles d'exécution dispose que «'Le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.»
Les photographies produites aux débats par le syndicat des copropriétaires n'ont pas date certaine et ne permettent pas de déterminer une occupation d'une des resserres des appelants à usage d'habitation.
Les courriels de 2025 d'autres copropriétaires ou de membres du conseil syndical faisant état d'une persistance de telles occupations dans la resserre de Monsieur [R] et de soupçons de trafic qui s'y déroulerait ne constituent pas des attestations probantes, ni des constatations ayant force probante.
Le constat du 21 février 2024 permet d'établir qu'à cette date les deux premières resserres situées dans le couloir au pied des escaliers sont vides d'occupants.
Le syndicat des copropriétaires n'établit par aucune pièce probante que ces resserres ainsi que celles de Monsieur [R] sont toujours occupées à titre d'habitation principale.
L'astreinte par infraction constatée prononcée par le tribunal est toujours applicable. Le syndicat des copropriétaires ne démontre pas une persistance de l'occupation des resserres à titre d'habitation postérieurement au mois de juin 2024. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision du premier juge ayant rejeté la demande de prononcé d'une astreinte définitive.
Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires
Elle est fondée sur l'abus de procédure d'appel en raison de la mauvaise foi des appelants qui ont formé appel malgré la reconnaissance des infractions reprochées.
Toutefois, l'appel a permis de réduire le montant de l'astreinte mise à la charge de la SCI Eloni et le rejet de la demande d'astreinte définitive a été confirmé. Les éléments du litige ne révèlent pas un abus de procédure de la part des appelants qui n'ont fait que mettre en 'uvre le droit au recours qui leur était ouvert. La demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il convient de confirmer les chefs du jugement critiqués en ce qui concerne la charge des dépens et la condamnation au titre des frais irrépétibles de procédure.
Ajoutant au jugement, il convient de condamner la SCI Eloni et Monsieur [R] à supporter in solidum les dépens d'appel.
Ils seront aussi condamnés in solidum à verser au [Adresse 14] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure qu'il est inéquitable de laisser à leur seule charge.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort :
RÉFORME le jugement en ce qui concerne le montant de l'astreinte liquidée à l'encontre de la SCI Eloni';
Statuant à nouveau,
LIQUIDE l'astreinte due par la SCI Eloni pour trois infractions à l'interdiction d'utiliser la resserre lui appartenant à usage d'habitation à la somme de 3000 euros';
CONDAMNE la SCI Eloni à payer cette somme au [Adresse 14]';
CONFIRME le jugement en ses autres dispositions,
Y ajoutant,
REJETTE la demande d'annulation du constat de commissaire de justice Maître [N] du 12 septembre 2023';
REJETTE la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires de la résidence [5] pour abus de procédure d'appel';
CONDAMNE la SCI Eloni et Monsieur [D] [R] in solidum aux dépens d'appel';
CONDAMNE la SCI Eloni et Monsieur [D] [R] in solidum à verser au [Adresse 14] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 23 OCTOBRE 2025
N° 2025/427
N° RG 25/01542 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BOLAE
[D] [R]
S.C.I. ELONI
C/
S.D.C. [Adresse 12]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Alain CURTI
Me Emmanuel VOISIN-MONCHO
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de [Localité 8] en date du 27 Janvier 2025 enregistré au répertoire général sous le n° 24/00690.
APPELANTS
Monsieur [D] [R]
né le 5 Juillet 1962 à [Localité 10],
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Alain CURTI, avocat au barreau de NICE
S.C.I. ELONI, située [Adresse 11], immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 450 661 996 ; prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [Y] [T], domicilié [Adresse 13].
représentée par Me Alain CURTI, avocat au barreau de NICE
INTIMÉE
Syndicat des Copropriétaires de la résidence [5], située [Adresse 4] ; pris en la personne de son Syndic en exercice, la SARL CABINET IMMOBILIER [G] COMBET exerçant sous l'enseigne CABINET JEC IMMO , immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le n° 791 226 889, elle-même prise en la personne de son gérant en exercice, domiciliée [Adresse 2]
représentée par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, substituée et plaidant par Me Sabrina PIERINI, avocats au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Pascale BOYER, conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président
Monsieur Ambroise CATTEAU, conseiller
Mme Pascale BOYER, conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Nicolas FAVARD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2025
Signé par Madame Cécile YOUL-PAILHES, Président et Monsieur Nicolas FAVARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement du 10 juillet 2023 a condamné Monsieur [R] et la SCI Eloni, sous astreinte de'1000 euros par infraction constatée':
- à n'utiliser les resserres dont ils sont propriétaires au sein de la copropriété Beau Réveil qu'à usage d'entrepôt de biens, à l'exclusion de tout usage à titre d'habitation
- à supprimer tout raccordement aux réseaux communs du syndicat des copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité, d'alimentation en eau et d'évacuation des eaux usées) autres que ceux existant à l'origine.
Le jugement a été signifié à Monsieur [R] le 11 août 2023 et à la SCI Eloni le 16 août 2023. Ils en ont interjeté appel pendant devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Selon acte de commissaire de justice en date du 29 janvier 2024, le [Adresse 14] a fait attraire Monsieur [R] et la SCI Eloni devant le juge de l'exécution du tribunal de Grasse aux fins d'obtenir la liquidation des astreintes et le prononcé d'une nouvelle astreinte définitive.
Par jugement du 27 janvier 2025 auquel le présent se réfère pour plus ample exposé des faits et de la procédure, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grasse a':
- Débouté la SCI Eloni et Monsieur [R] de leur demande de bâtonnage des conclusions du syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) ;
- Débouté la SCI Eloni et Monsieur [R] de leur demande de nullité et d'inopposabilité des procès-verbaux de constat des 24 octobre 2023, du 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 ;
- Liquidé l'astreinte ordonnée à l'égard de Monsieur [R], par le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement en date du 10 juillet 2023, à la somme de 2000 euros ;
- Condamné Monsieur [R] à payer cette somme au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à [Localité 7] ;
- Liquidé l'astreinte ordonnée à l'égard de la SCI Eloni, par le tribunal judiciaire de Grasse, dans son jugement en date du 10 juillet 2023, à la somme de 4 000 euros ;
- Condamné la SCI Eloni à payer cette somme au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) ;
- Débouté le syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à [Localité 7] de sa demande de fixation d'une astreinte définitive ;
- Condamné in solidum la SCI Eloni et Monsieur [R] à payer au syndicat des copropriétaires Beau Réveil sis [Adresse 3] à Cannes (06400) la somme de 2200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- Condamné in solidum la SCI Eloni et Monsieur [R] aux dépens de la procédure ;
- Rejeté tous autres chefs de demandes.
Monsieur [R] et la SCI Eloni ont formé appel contre de cette décision par déclaration du 8 février 2025.
Le 13 février 2025, le greffe de la cour a avisé le conseil des appelants de la fixation de l'affaire à plaider, selon la procédure de bref délai, à l'audience du 12 septembre 2025 avec clôture au 12 août 2025.
L'intimé a constitué avocat le 21 février 2025.
Le 24 février 2025, les appelants ont notifié au conseil de l'intimé la déclaration d'appel et l'avis de fixation.
Selon leurs conclusions du 4 mars 2025, les appelants demandent à la cour de':
- Déclarer recevable leur appel
- Réformer le jugement en toutes ses dispositions,
- Sauf en ce qui concerne le débouté de la demande d'astreinte définitive, qui sera confirmé - Annuler les constats d'huissier en date 12 septembre 2023 et 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 produits par la copropriété pour violation des droits de propriété et violation de la loi sur la protection de la vie privée
- Déclarer inopposable à leur encontre les constats d'huissier en dates des 12 septembre 2023 et 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024 produits par la copropriété pour violation du principe du contradictoire
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de condamnation au titre de la liquidation d'une astreinte de 1.000 euros à l'encontre de la SCI Eloni ainsi que de 2.000 euros à l'encontre de Monsieur [R] en l'absence de preuve de la violation par ces derniers de la décision ordonnant l'astreinte,
- Débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande d'astreinte définitive à hauteur de 1.000 euros par jour, astreinte totalement disproportionnée et que rien ne justifie en l'espèce.
- Condamner le syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 3000 euros au titre
de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.
Ils dénoncent l'acharnement procédurier du syndicat des copropriétaires contre eux alors qu'il laisse d'autres propriétaires occuper les resserres à des fins d'habitation.
Ils contestent être des «marchands de sommeil», indiquant qu'il ne s'agit pas de locaux insalubres mais de studettes équipées selon les normes en vigueur bénéficiant d'un accès à des toilettes
Ils soutiennent que le constat du 12 septembre 2023 doit être annulé car le commissaire de justice, dépourvu d'une autorisation judiciaire de pénétrer dans une partie privative, a fait pression sur la personne se trouvant dans la resserre appartenant à la SCI Eloni pour forcer l'accès sans son accord.
Ils indiquent que la prise de photographies de l'intérieur d'un local privé par une fenêtre est une violation du droit à la vie privée.
Ils ajoutent que le commissaire de justice a outrepassé ses pouvoirs en matière de constat en demandant l'identité de la personne présente.
Ils ajoutent que, le 24 octobre 2023, le commissaire de justice a poursuivi ses constatations à l'intérieur du même local malgré le refus de l'occupant de le laisser entrer, de sorte qu'elles ont été obtenues par violation de domicile et entrée sans autorisation dans un local privé. Ils invoquent aussi l'atteinte à la vie privée.
Ils ajoutent que le commissaire de justice a procédé par déductions et non par constatations en indiquant que la fenêtre observée était celle du local dans lequel il a pénétré.
Ils soutiennent que le constat du 15 novembre 2023 ne permet pas d'identifier le propriétaire de la resserre photographiée. Ils demandent également son annulation en précisant qu'il ne contient aucun élément de nature à prouver une infraction de leur part.
Ils indiquent que le constat du 4 juin 2024 a été effectué sur des parties communes mais qu'il n'établit pas que les resserres observées sont habitées. Ils rappellent que les propriétaires de ces locaux peuvent les éclairer et y accéder à leur gré. Ils ajoutent que le constat ne permet pas de déterminer si la resserre observée appartient à l'un d'eux.
Ils soutiennent que le principe du contradictoire n'a pas été respecté car les constats ont été pratiqués sans qu'ils soient invités à assister aux opérations.
Ils concluent au rejet de la demande de liquidation d'astreinte au motif que les constats d'huissier de justice ne prouvent pas une violation des termes du jugement.
Ils ajoutent qu'ils rapportent la preuve que les resserres leur appartenant ne sont pas occupées à titre d'habitation.
La SCI Eloni fait valoir qu'elle a prêté une resserre à Monsieur [E], un ami, pour se reposer au calme après une intervention chirurgicale. Elle ajoute qu'elle a fait constater, le 21 février 2024, que les deux resserres lui appartenant étaient vides de toute occupation. Elle indique que l'occupation précaire y est permise par le règlement de copropriété.
Monsieur [R] indique que ses deux resserres ont été occupées uniquement provisoirement et à titre gratuit, l'une par un ami qui a quitté les lieux le 25 février 2024 et l'autre par un entrepreneur individuel pratiquant dans ce local la conciergerie de luxe.
Ils précisent que le constat du 15 novembre 2023 révèle que les raccordements d'eau sont d'origine, de même que le raccordement électrique qui a toujours donné lieu à facturation de l'électricité par le syndicat des copropriétaires.
Par ses conclusions du 1er avril 2025, le [Adresse 14] demande à la cour de':
- le Recevoir en son appel Incident,
- Confirmer la condamnation de la SCI Eloni à 4.000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte du jugement du 10 juillet 2023 du tribunal judiciaire de Grasse,
- Compléter la décision de première instance en condamnant Monsieur [R] à 6.000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte du jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 10 juillet 2023,
- Fixer en exécution dudit jugement, une astreinte définitive à compter de la décision à intervenir, de 1.000 euros par jour à titre de sanction de l'obligation faite par ledit jugement tant à la SCI Eloni qu'à Monsieur [R], à utiliser les resserres dont ils sont propriétaires au sein de la Copropriété Beau Réveil à un usage autre qu'entrepôt de biens et ce à l'exclusion de tout usage à titre d'habitation, ainsi qu'à supprimer tout raccordement aux réseaux communs du Syndicat des Copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité et alimentation en eau et évacuation des eaux usées autres que ceux existant à l'origine),
- Modifier la décision de première instance en condamnant in solidum au titre des frais de première instance, Monsieur [R] et la SCI Eloni à 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais des procès-verbaux de constat des 12 septembre 2023, 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 janvier 2024,
- les Condamner in solidum à lui verser la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
- les Condamner à lui payer 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure d'appel abusive et vexatoire.
Il soutient que les constats prouvent quatre infractions au jugement de 2023, soit deux occupations de resserres établies par les constatations du commissaire de justice lorsque les occupants ont ouvert leur porte et deux raccordements à l'aide de serflex aux réseaux communs.
Il soutient que le jugement ne précise pas que l'interdiction d'occupation à usage d'habitation est limitée à celle à titre onéreux.
Il réplique que le commissaire de justice a accompli sa mission dans le respect des règles et en recueillant notamment l'accord des occupants pour pénétrer à l'intérieur et prendre des photographies.
Il fait valoir que les conclusions des appelants contiennent la reconnaissance que les resserres ont été occupées à titre d'habitation. Il ajoute que les occupants ont pu se montrer agressifs et violents.
Il soutient que l'attitude des appelants et le contenu de leurs conclusions démontrent un refus d'exécuter la décision de 2023, de sorte qu'une astreinte définitive par jour de retard est nécessaire.
Par ses dernières conclusions du'30 juillet 2025, les appelants maintiennent leurs prétentions.
Ils ajoutent que la copropriété a reconnu l'absence d'occupation illicite lors de la dernière assemblée générale et tente de racheter les resserres litigieuses.
L'intimé a conclu le 4 août 2025 et a communiqué 5 nouvelles pièces. Il n'a pas modifié ses prétentions.
La clôture a été prononcée le 12 août 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Or, les appelants font état, dans les motifs de leurs conclusions, d'une demande de réformation de la décision concernant le refus de bâtonnage des conclusions du syndicat des copropriétaires. Cependant, cette demande n'est pas contenue dans le dispositif des conclusions communiquées. La cour n'en est donc pas saisie.
Sur les demandes d'annuler et de déclarer inopposables les constats de commissaire de justice
En application des dispositions de l'article 1 de l'ordonnance numéro 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice': «'(') II. - Les commissaires de justice peuvent en outre : (')
2° Effectuer, lorsqu'ils sont commis par justice ou à la requête de particuliers, des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter. Sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, ces constatations font foi jusqu'à preuve contraire (')';'»
Le commissaire de justice lorsqu'il est mandaté par un particulier, peut effectuer toutes constatations dans un lieu public ou les lieux auxquels son requérant ou le titulaire du droit de propriété ou d'occupation lui autorise l'accès. Il ne peut pénétrer dans un lieu privé constituant le domicile de tiers qu'avec l'accord de ces derniers.
En l'espèce, les deux commissaires de justice dont les constats sont produits ont été mandatés par le syndic de la copropriété dans le cadre de l'exécution du jugement du tribunal judiciaire de Grasse du 10 juillet 2023, afin d'apporter des éléments concernant la persistance de la violation par Monsieur [R] et la SCI Eloni des interdictions et injonctions posées par le tribunal.
Afin de mener à bien leur mandat, ils étaient habilités à solliciter l'ouverture des portes des resserres par leurs occupants et à s'informer de leur identité et de leur titre d'occupation.
Il ne ressort pas des constats produits que les commissaires de justice ont réalisé un contrôle de l'identité de l'occupant interrogé dans la mesure où ils n'ont pas demandé de justifier de l'identité déclarée ni du titre d'occupation indiqué.
Maître [N], ayant réalisé le constat du 12 septembre 2023, mentionne qu'il a reçu l'accord de l'occupant de la resserre visitée, ayant déclaré se nommer Monsieur [E], pour y pénétrer et y prendre des photographies. Il s'agit d'une constatation de ce que le commissaire de justice a entendu qui fait foi jusqu'à preuve contraire.
L'attestation de Monsieur [E] versé aux débats ne permet pas d'apporter la preuve contraire. En effet, il ne précise pas la date à laquelle s'est produite la visite de l'huissier de justice qu'il aurait refusée, alors qu'il ressort des constats réalisés qu'il a accepté le 12 septembre 2023 que le commissaire de justice pénètre dans le local alors qu'il l'a refusé par la suite et qu'il ressort des constats postérieurs que le commissaire de justice n'a pas outrepassé ce refus.
En ce qui concerne les trois autres constats, le commissaire de justice note qu'après avoir décliné son identité et l'objet de sa visite, il a sollicité l'autorisation de pénétrer dans les resserres litigieuses et qu'ayant essuyé un refus, il n'a pas forcé'le passage. Ces faits ne sont pas contredits par des preuves contraires.
Les constatations de ce qui était visible depuis le couloir du sous-sol de l'immeuble et depuis l'extérieur, soit depuis des parties communes dans lesquelles il avait l'autorisation de pénétrer, ne portent pas atteinte au principe de l'inviolabilité du domicile privé.
La décision de première instance sera donc confirmée en ce que le tribunal a rejeté la demande d'annulation des constats des 24 octobre 2023, 15 novembre 2023 et 4 juin 2024.
En outre, la demande d'annulation du constat du 12 septembre 2023 qui n'avait pas été formellement soumise au premier juge, sera rejetée.
Sur les demandes de liquidation d'astreinte
La SCI Eloni et Monsieur [R] concluent au rejet de cette demande.
Le syndicat des copropriétaires demande confirmation de la liquidation contre la SCI et une augmentation de la liquidation contre Monsieur [R] à 6000 euros.
Il ressort des constats de commissaires de justice produits que l'occupant de la resserre sur la porte de laquelle est apposée une plaque contenant le mot «'CABIN'» et un drapeau canadien, a déclaré se nommer Monsieur [E] et occuper le local à titre d'habitation en vertu d'un bail consenti par la SCI Eloni gérée par Monsieur [T].
Les commissaires de justice successifs ont constaté par trois fois, les 12 septembre 2023, 24 octobre 2023 et 15 novembre 2023 que cette resserre était aménagée en studio et qu'une personne y était logée.
En revanche, le constat réalisé le 4 juin 2024 ne contient pas la précision que sur la première porte à laquelle le commissaire de justice a frappé, il était apposé le mot «'Cabin'» et un drapeau canadien. Il ressort de cet acte qu'elle n'est pas situé dans le couloir à l'emplacement où les constatations précédentes ont été réalisées.
En ce qui concerne Monsieur [R],' il n'a pas contesté être propriétaire de la resserre située au bout du couloir à droite, voisine du WC et de la douche qui sont communs. Les commissaires de justice ont pu constater à deux reprises, les 15 novembre 2023 et 4 juin 2024, qu'elle était occupée par un homme possédant un chien.
Lors des premières constatations, il a déclaré au commissaire de justice qu'il devait s'adresser à Monsieur [R] pour avoir des renseignements. Lors de la visite suivante, le commissaire de justice, par la fenêtre que l'occupant a ouverte après sollicitation, a constaté la présence d'une cuisine équipée, d'un lit et d'une télévision.
Les deux appelants n'ont jamais contesté au cours des procédures menées à leur encontre par le syndicat des copropriétaires que les resserres qu'ils possédaient étaient aménagées en chambres de services et occupées en tant que logements.
Les constats établissent que les resserres étaient toujours aménagées et occupées en tant que studettes équipées.
Ils permettent de retenir trois infractions concernant la SCI Eloni et deux infractions de la part de Monsieur [R] à l'interdiction d'occuper en tant que logement prononcée par le tribunal.
Le jugement du 10 juillet 2023 a assorti d'une astreinte par infraction constatée la condamnation à «supprimer tout raccordement aux réseaux communs du syndicat des copropriétaires Beau Réveil (réseau d'électricité, d'alimentation en eau et d'évacuation des eaux usées) autres que ceux existant à l'origine».
Le premier juge a relevé, à juste titre, que le titre exécutoire ne définit pas la date de l'origine dont il fait état et qu'il ne contient pas de précision sur les raccordements à supprimer.
En conséquence, les constats faisant état de la présence de câbles reliés à un panneau électrique commun ne prouvent pas d'infraction à la condamnation exécutoire.
La décision de première instance sera donc confirmée sur le principe de la liquidation de l'astreinte à l'encontre de la SCI Eloni et à l'encontre de Monsieur [R].
En ce qui concerne le montant des astreintes liquidées, le juge de l'exécution a fait une juste appréciation des circonstances de la cause en fixant l'astreinte liquidée pour deux infractions constatées à la somme de 2000 euros, soit le montant prononcé en l'absence de difficulté d'exécution invoquée.
Le montant de l'astreinte liquidée concernant la SCI Eloni sera réduit à 3000 euros, dans la mesure où les pièces ne permettent de retenir que trois infractions à l'obligation de n'utiliser les resserres qu'à titre d'entrepôt à l'exclusion de l'habitation. La SCI n'invoque, en effet, aucune difficulté d'exécution pour faire cesser l'habitation qui ne dépend que de son fait. Il est justifié d'appliquer le taux de l'astreinte fixé par le tribunal.
Sur la demande de prononcé d'une astreinte définitive
Le tribunal a assorti la condamnation de cesser l'utilisation des resserres à titre d'habitation et de supprimer les liaisons aux réseaux d'eau et d'électricité d'une astreinte par infraction constatée.
Le juge de l'exécution a refusé de prononcer une astreinte journalière définitive au motif que l'astreinte par infraction constatée n'était pas limitée dans le temps.
Le syndicat des copropriétaires demande une astreinte journalière définitive.
L'article L. 131-1 alinéa 2 code des procédures civiles d'exécution dispose que «'Le juge de l'exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.»
Les photographies produites aux débats par le syndicat des copropriétaires n'ont pas date certaine et ne permettent pas de déterminer une occupation d'une des resserres des appelants à usage d'habitation.
Les courriels de 2025 d'autres copropriétaires ou de membres du conseil syndical faisant état d'une persistance de telles occupations dans la resserre de Monsieur [R] et de soupçons de trafic qui s'y déroulerait ne constituent pas des attestations probantes, ni des constatations ayant force probante.
Le constat du 21 février 2024 permet d'établir qu'à cette date les deux premières resserres situées dans le couloir au pied des escaliers sont vides d'occupants.
Le syndicat des copropriétaires n'établit par aucune pièce probante que ces resserres ainsi que celles de Monsieur [R] sont toujours occupées à titre d'habitation principale.
L'astreinte par infraction constatée prononcée par le tribunal est toujours applicable. Le syndicat des copropriétaires ne démontre pas une persistance de l'occupation des resserres à titre d'habitation postérieurement au mois de juin 2024. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision du premier juge ayant rejeté la demande de prononcé d'une astreinte définitive.
Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires
Elle est fondée sur l'abus de procédure d'appel en raison de la mauvaise foi des appelants qui ont formé appel malgré la reconnaissance des infractions reprochées.
Toutefois, l'appel a permis de réduire le montant de l'astreinte mise à la charge de la SCI Eloni et le rejet de la demande d'astreinte définitive a été confirmé. Les éléments du litige ne révèlent pas un abus de procédure de la part des appelants qui n'ont fait que mettre en 'uvre le droit au recours qui leur était ouvert. La demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il convient de confirmer les chefs du jugement critiqués en ce qui concerne la charge des dépens et la condamnation au titre des frais irrépétibles de procédure.
Ajoutant au jugement, il convient de condamner la SCI Eloni et Monsieur [R] à supporter in solidum les dépens d'appel.
Ils seront aussi condamnés in solidum à verser au [Adresse 14] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure qu'il est inéquitable de laisser à leur seule charge.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort :
RÉFORME le jugement en ce qui concerne le montant de l'astreinte liquidée à l'encontre de la SCI Eloni';
Statuant à nouveau,
LIQUIDE l'astreinte due par la SCI Eloni pour trois infractions à l'interdiction d'utiliser la resserre lui appartenant à usage d'habitation à la somme de 3000 euros';
CONDAMNE la SCI Eloni à payer cette somme au [Adresse 14]';
CONFIRME le jugement en ses autres dispositions,
Y ajoutant,
REJETTE la demande d'annulation du constat de commissaire de justice Maître [N] du 12 septembre 2023';
REJETTE la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires de la résidence [5] pour abus de procédure d'appel';
CONDAMNE la SCI Eloni et Monsieur [D] [R] in solidum aux dépens d'appel';
CONDAMNE la SCI Eloni et Monsieur [D] [R] in solidum à verser au [Adresse 14] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE