Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 9, 22 octobre 2025, n° 25/10410

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/10410

22 octobre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2025

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/10410 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLQRC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2025 - Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2025P01030

APPELANTE

S.A.S.U. COURSE7 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le numéro 827 442 054

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assistée par Me Marjorie VEYGALIER, avocate au barreau de PARIS, toque : D1046

INTIMÉS

S.E.L.A.R.L. [W] MJ prise en la personne de Me [P] [W] ès qualités de mandataire liquidateur de la S.A.S. COURSE7

[Adresse 3]

[Localité 5]

Immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le numéro 821 325 941

Représentée par Me Jean-Marie HYEST de la SCP HYEST et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0311

Représentée par Me Frédéric DUBERNET, avocat au barreau de PARIS, toque : P311

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PARIS représentant le MINISTERE PUBLIC - Service Financier et commercial

Parquet de la Cour d'appel de Paris [Adresse 2]

[Localité 4]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Octobre 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :

Raoul CARBONARO, Président de chambre

Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère

Isabelle ROHART, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Yvonne TRINCA

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Raoul CARBONARO, président, et par Yvonne TRINCA, greffier présent lors de la mise à disposition.

Exposé des faits et de la procédure

Sur requête du ministère public, par jugement réputé contradictoire du 11 juin 2025, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la Sas Course 7, exerçant une activité de taxis et employant 44 salariés

Le tribunal a désigné la Selarl [V] MJ prise en la personne de Me [V] en qualité de liquidateur judiciaire.

La société Course 7 a interjeté appel le 19 juin 2025.

Le ministère public a interjeté appel le 26 juin 2025, son appel étant suspensif.

Par ordonnance du 11 juillet 2025 le délégataire du Premier Président a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement déféré.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 4 juillet 2025 de la société Course 7 par lesquelles elle demande à la cour de :

- annuler le jugement,

- à titre subsidiaire, infirmer le jugement et dire n'y avoir lieu à ouverture d'une liquidation judiciaire,

- à titre infiniment subsidiaire, ouvrir un redressement judiciaire,

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 8 octobre 2025, de la Selarl [V] MJ prise en la personne de Me [V] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Course 7 par lesquelles elle demande à la cour de :

- prendre acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice,

- condamner la Sas Course 7 à lui payer le montant du droit fixe et les honoraires d'avocat générés par la l'ouverture de la procédure collective, soit les sommes de 2.821,50 euros et 5.400 euros TTC.

Par conclusions notifiées par RPVA le 21 juillet 2025 , le ministère public déclare s'en rapporter à justice.

SUR CE,

Sur la demande d'annulation du jugement.

La société Course 7 considère que la convocation qui lui a été adressée n'est pas régulière au motif, qu'alors qu'elle aurait dû être convoquée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception par le greffe, elle ne l'a été que par lettre simple, ce qui lui a causé un grief puisqu'elle n'a pas comparu. Elle explique avoir écrit en vain au greffe du tribunal de commerce de Bobigny pour lui demander de lui envoyer un éventuel accusé de réception ainsi que l'assignation qui lui aurait été délivrée selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile et que celui-ci s'est abstenu de lui répondre. Elle demande la nullité du jugement.

Le ministère public, « dans l'attente des éléments demandés au greffe de la juridiction et notamment s'il a été procédé par lettre recommandée», s'en rapporte sur la demande de nullité.

Sur ce,

Selon l'article R 631-4 du code de commerce, lorsque le ministère public demande l'ouverture de la procédure par requête, le président du tribunal, par les soins du greffier, fait convoquer le débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Or, il résulte des termes mêmes du jugement que le greffe a adressé uniquement une lettre simple à la société Course 7.

Si par la suite, la société débitrice a, selon les termes du jugement, été convoquée selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, le procès verbal dressé n'a pas été communiqué et alors que le conseil de la société Course 7 a écrit au greffe pour lui demander de lui en adresser une copie, celui-ci s'est abstenu de lui répondre, ne permettant pas à la cour de vérifier la régularité de cet acte.

Il convient dès lors de constater que la société Course 7 n'a pas été régulièrement convoquée, ce qui lui cause un grief car elle n'a pas pu faire valoir ses moyens de défense, de sorte que le principe de la contradiction a été violé. En conséquence, le jugement sera annulé.

Cependant le tribunal ayant été saisi par la requête du ministère public, cette nullité n'affecte pas l'acte initial de saisine, de sorte que la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, statuera au fond.

Sur l'ouverture du redressement judiciaire.

La société Course 7 conteste être en état de cessation des paiements

S'agissant du passif exigible, la société Course 7 indique être à jour de l'ensemble de ses dettes et charges courantes.

Elle précise que la dette due à la Carcept qui s'élève à un montant de 44.164,60 euros, a fait l'objet d'un moratoire écrit.

Elle ajoute que les créances déclarées au titre des contrats en cours ont toutes été payées.

Elle explique que les créances déclarées Sixt France, Fraikin et Poles [Localité 8] Alternance sont contestées.

Pour la créance déclarée de l'Urssaf de 340.415,50 euros, elle souligne qu'il s'agit en premier lieu d'un rappel de cotisations à la suite d'un redressement contesté pour l'ensemble de ses chefs et dont la mise en demeure a été annulée par le tribunal judiciaire de Bobigny, en deuxième lieu d'une déclaration provisionnelle qui ne constitue pas un passif exigible et en troisième lieu de cotisations qui ont été payées. Elle précise devoir un reliquat de 441 euros.

Par ailleurs, elle précise que les condamnations prud'homales ont fait l'objet d'un accord de règlement écrit avec les créanciers.

Enfin s'agissant des créances déclarées Santander Consumer France, Franfinance, FCE Bank , Auxilease, Movivolt et Crédipar elle explique qu' il s'agit de créances d'indemnités de résiliation, c'est-à-dire de passif devenu exigible du fait de la liquidation judiciaire, qui ne constituent pas un passif exigible.

Elle fait valoir que son actif disponible au 30 septembre 2025 est composé d'un solde bancaire de 161.215,67 euros, auquel il convient d'ajouter les paiements imminents et certains de courses en taxi pour 127.701,55 euros. Elle en déduit qu'elle est donc en mesure de faire face à son passif exigible avec celui-ci.

De son côté, le liquidateur judiciaire indique que le passif déclaré est d'un montant de 1.066.848,14 euros et précise que pour une part importante il s'agit de créances provisionnelles et de créances ayant fait l'objet de moratoires. Il confirme que l'actif disponible est constitué de soldes bancaires de 161.215,67 euros.

Il déclare s'en rapporter sur le bien fondé de l'appel.

Le ministère public s'en rapporte également.

Sur ce,

Il résulte de l'article L. 631-1 du code de commerce que la cessation des paiements se définit comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, mais que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en état de cessation des paiements.

En l'espèce, la société Course 7 justifie que les créances de la société Carcept et celles issues de condamnations prud'homales ont fait l'objet de moratoires, que les créances déclarées concernant des contrats en cours ont été payées, que les créances déclarées par les banques et organismes qui finançaient les véhicules achetés en leasing sont des créances devenues exigibles du fait de la liquidation judiciaire et ne constituent pas un passif exigible.

Par ailleurs, il résulte des pièces au débat que la créance déclarée de l'Urssaf de 340.415,50 euros est constituée d'un rappel de cotisations à la suite d'un redressement contesté et dont la mise en demeure a été annulée par le tribunal judiciaire de Bobigny et qui n'est donc pas un passif exigible. Elle est également constituée d'une déclaration provisionnelle qui ne constitue pas un passif exigible. La société Course 7 justifie également que cotisations déclarées au passif ont été payées et qu'elle reste devoir un reliquat de 441 euros, lequel s'analyse en un passif exigible.

S'agissant des créances contestées, celle de la société Fraikin a été contestée de façon argumentée par le conseil de la société Course 7 par courrier officiel du 9 mai 2025, c'est-à-dire antérieurement au jugement d'ouverture. Il s'agit donc d'une créance sérieusement contestée.

En ce qui concerne la créance de 2.291,25 euros la société Pilliot Assurance, il résulte d'un courrier de la créancière du 31 juillet 2025 ( pièce 40), que «suite à des litiges internes» elle est dans l'incapacité de fournir une facture, de sorte que la créance n'apparaît pas certaine.

La créance de la société Molivolt a été sérieusement contestée de façon argumentée par le conseil de la société Course 7 par courrier officiel du 25 mars 2025 ( pièce 25), c'est-à-dire antérieurement au jugement d'ouverture.Il s'agit donc d'une créance sérieusement contestée.

Ainsi la société Course 7 est débitrice d'un passif exigible non sérieusement contesté de 441 euros et justifie de l'existence d'un actif disponible de 161.215,67 euros.

Il s'ensuit qu'étant dans la possibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, elle ne se trouve en état de cessation des paiements.

Il n'y a donc pas lieu à ouverture à son égard d'une procédure collective.

Le Trésor public sera condamné aux dépens.

Compte tenu de la nullité du jugement de liquidation judiciaire la demande de paiement du droit fixe et des honoraires d'avocat de la Selarl [V] MJ sera rejetée.

Par ces motifs,

Annule le jugement,

Statuant à nouveau par l'effet dévolutif de l'appel,

Constate que la société Course 7 n'est pas en état de cessation des paiements

,

Dit n'y avoir lieu à ouverture à son égard d'une procédure collective,

Condamne le Trésor public aux dépens,

Rejette la demande de la Selarl [V] MJ en paiement du droit fixe et des honoraires d'avocat.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site