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CA Dijon, 1re ch. civ., 21 octobre 2025, n° 25/00165

DIJON

Autre

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CA Dijon n° 25/00165

21 octobre 2025

[E] [F]

[D] [M] épouse [F]

C/

[I] [Z]

[G] [S] divorcée [Z]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

1re chambre civile

ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2025

N° RG 25/00165 - N° Portalis DBVF-V-B7J-GTNQ

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : jugement du 04 mai 2021

rendu par le tribunal judiciaire de Besancon - RG : 18/01774 - après cassation d'un arrêt du 18 avril 2023 rendu par la cour d'appel de Besançon - RG : 21/01117 - par un arrêt du 17 octobre 2024 rendu par la Cour de cassation - Pourvoi n° U 23-17.796

APPELANTS :

Monsieur [E] [F]

né le 12 Octobre 1979 à [Localité 4] (25)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Madame [D] [M] épouse [F]

née le 12 Juin 1985 à [Localité 4] (25)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Assistés de Me Lucie TEIXEIRA avocat au barreau de BESANCON, plaidant, et représentés par Me Mohamed EL MAHI, membre de la SCP CHAUMONT- CHATTELEYN-ALLAM-EL MAHI, avocat au barreau de DIJON, postulant, vestiaire : 1

INTIMÉS :

Monsieur [I], [P], [X] [Z]

né le 18 Septembre 1965 à [Localité 4] (25)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Madame [G], [V], [Y] [S] divorcée [Z]

née le 17 Janvier 1964 à [Localité 4] (25)

[Adresse 1]

[Localité 5]

Assistés de Me Laure FROSSARD, avocat au barreau de BESANCON, plaidant, et représentés par Me Hirminia GARCIA, avocat au barreau de DIJON, postulant, vestiaire : 511

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Olivier MANSION, Président de chambre, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Michèle BRUGERE, Conseiller,

Bénédicte KUENTZ, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Aurore VUILLEMOT, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 21 Octobre 2025,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Aurore VUILLEMOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Exposé du litige :

Par acte du 9 février 2016, Mme [S] et M. [Z] (les vendeurs) ont vendu à Mme et M. [F] (les époux [F]) un appartement et deux garages sis à [Localité 5].

Après apparition de traces d'humidité et une expertise judiciaire ordonnée en référé, les époux [F] ont fait assigner les vendeurs devant le tribunal judiciaire pour obtenir, à titre principal, la résiliation de la vente et, à titre subsidiaire, le paiement d'une somme correspondant aux travaux de réfection des désordres affectant le bien vendu et des dommages et intérêts pour préjudice financier.

Par jugement du 4 mai 2021, le tribunal judiciaire de Besançon a rejeté toutes leurs demandes.

L'arrêt de la cour d'appel de Besançon du 18 avril 2023 a confirmé ce jugement.

Par arrêt du 17 octobre 2024, la Cour de cassation a cassé cet arrêt uniquement en ce qu'il confirme le jugement qui rejette la demande des époux [F] au titre des travaux de réfection des désordres.

La cour d'appel de céans, cour de renvoi, a été saisie le 5 février 2025.

Les époux [F] demandent l'infirmation partielle du jugement

et le paiement des sommes de :

- 64 988,12 € au titre des travaux de réfection des désordres affectant le bien immobilier objet de la vente,

- 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les vendeurs concluent à la confirmation du jugement et sollicite, chacun, le paiement de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties remises au greffe, par RPVA, les 4 et 9 septembre 2025.

MOTIFS :

Sur la réparation des désordres :

1°) Les époux [F] fondent leur action sur les dispositions des articles 1792 et 1792-1 du code civil en soutenant que les vendeurs sont réputés constructeur de l'ouvrage pour avoir fait réaliser des travaux de rénovation importants en 2008, 2010 et 2011 et que les désordres constatés sur les sols et murs sont couverts par la garantie décennale.

Les vendeurs répondent que les travaux effectués correspondent à un ravalement de façade en 2008 et 2011, la reprise des murs et du plafond de la salle à manger en 2010 et la pose d'un parquet flottant en 2011, soit des travaux ne permettant pas la qualification d'ouvrage.

De plus, ils affirment que les désordres constatés ne sont pas en lien avec les travaux qu'ils ont fait exécuter et qu'ils ne sont pas suffisamment graves pour compromettre la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à sa destination.

L'article 1792 du code civil dispose que : 'Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.'

La notion d'ouvrage n'est pas définie par la loi et la jurisprudence a eu l'occasion d'apporter des éléments de définition en retenant la qualification d'ouvrage, notamment, pour des travaux de rénovation lourde, ou l'application d'un enduit extérieur d'étanchéité.

L'article 1792-1 du même code précise que : 'Est réputé constructeur de l'ouvrage :

1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ;

2° Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ;

3° Toute personne qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage.'

Il est jugé que la garantie instituée à l'article 1792-4-1 du code civil s'applique au vendeur d'un immeuble dans lequel il a été procédé à des travaux de rénovation ayant entraîné des désordres, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un contrat de louage d'ouvrage ou de maîtrise d'oeuvre, dès lors que l'importance des travaux réalisés les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage.

En l'espèce, il est établi que les vendeurs ont fait effectuer des travaux dont les factures sont produites (pièces n°24 à 26) pour un total d'environ 14 000 euros et consistant dans un ravalement de la façade avec reprises de fissures, la réfection des sols, des murs et de l'isolation dans certaines pièces avec pose d'ossatures métalliques ce qui correspond à des travaux avec incorporation de matériaux à l'ouvrage et les assimile à des travaux de construction d'un ouvrage.

Il en résulte que les époux [F] peuvent rechercher la garantie dite décennale à l'encontre des vendeurs.

Sont produites l'expertise judiciaire et l'expertise non-contradictoire, effectuée par M. [H], le 9 octobre 2020.

Si une telle expertise peut valoir élément de preuve c'est à la condition qu'il ne s'agisse pas du seul élément probant.

Ici, l'expertise de M. [H] n'est confortée par aucun autre élément. Elle ne sera donc pas pris en considération.

L'expert nommé par le tribunal relève l'existence de remontées capillaires d'eau sur les murs d'une maison lesquels sont dépourvus de fondation et que ces remontées ont perduré en dépit du remplacement de la tuyauterie défectueuse.

Si l'expert mandaté par l'assureur des vendeurs indique que M. [F] a posé lui-même un parquet avec du film polyane ce qui a, selon lui, accentué l'effet d'humidité en empêchant l'assèchement du dallage, il convient de relever que le désordre existait déjà avant la vente.

De même, les diverses attestations produites par les vendeurs sont sans emport puisque contredites par les constations des différents experts et par l'existence des désordres qui perdurent.

Par ailleurs, il importe peu que les travaux effectués par les vendeurs soient ou non à l'origine des désordres dès lors que la mise en jeu de la responsabilité décennale n'exige pas la recherche de la cause des désordres.

L'expert relève que M. [F] ne fait pas état de l'impossibilité d'habiter dans ce logement et que l'humidité quasi-permanente dans certaines pièces ne rend pas l'habitation impropre à sa destination dès lors que les lieux ont été occupés par les vendeurs de 1995 à 2015 puis par les époux [F] depuis 2016.

Toutefois, la cour retient que la destination de l'immeuble est de fournir un logement d'habitation sain et que l'absence d'isolation contre l'humidité dans plusieurs pièces rend cet immeuble impropre à sa destination, peu important que les vendeurs s'en soient satisfaits ou que les époux [F] les subissent.

En conséquence, les époux [F] sont fondés à réclamer aux vendeurs l'indemnisation du préjudice avéré.

Le jugement qui a omis de statuer sur ce point, sera complété.

2°) L'expert a évalué les travaux de reprises à la somme de 22 542,61 euros TTC.

Les époux [F] demandent la somme de 64 998,12 euros sur la base du rapport de M. [H] qui critique les dispositifs électrochimiques proposés au regard de leur performance, alors que l'assèchement électronique laisse sceptique beaucoup de scientifiques et que le boîtier de type IPE utilisé dans cet assèchement expose les occupants à un champ électro-magnétique quasi-permanent ce qui risque d'avoir des effets négatifs sur la santé de ceux-ci.

Cependant, le rapport de M. [H] ne sera pas pris en compte et la critique apportée reste fondée sur des éléments dubitatifs ou incertains ce qui ne permet pas de remettre valablement en cause le coût proposé par l'expert judiciaire.

Les vendeurs seront condamnés à un paiement in solidum à hauteur de 22 542,61 euros TTC.

Sur les autres demandes :

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de Mme [S] et de M. [Z] et les condamne, in solidum, à payer à Mme [M] épouse [F] et M. [F] la somme de 2 000 euros ;

Les vendeurs supporteront les dépens visés à l'article 639 du code de procédure civile lesquels ne comprennent que la rémunération des techniciens et les débours tarifés, avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour la SCP Chaumont et associés et Me Garcia.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire et dans les limites de la cassation prononcée par arrêt du 17 octobre 2024 :

Réparant l'omission de statuer affectant le jugement du 4 mai 2021 :

- Condamne Mme [S] et M. [Z], in solidum, à payer à Mme [M] épouse [F] et M. [F] la somme de 22 542,61 euros au titre du coût des travaux de réfection des désordres affectant le bien immobilier objet de la vente du 9 février 2026 ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de Mme [S] et de M. [Z] et les condamne, in solidum, à payer à Mme [M] épouse [F] et M. [F] la somme de 2 000 euros ;

- Condamne Mme [S] et M. [Z] aux dépens visés à l'article 639 du code de procédure civile lesquels ne comprennent que la rémunération des techniciens et les débours tarifés, avec bénéfice des dispositions de l'article 699 du même code pour la SCP Chaumont et associés et pour Me Garcia ;

Le greffier Le président

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