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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-4, 23 octobre 2025, n° 21/10372

AIX-EN-PROVENCE

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CA Aix-en-Provence n° 21/10372

23 octobre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 23 OCTOBRE 2025

N° 2025 / 224

Rôle N° RG 21/10372 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHY37

Compagnie d'assurance SMABTP*

S.A. ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE

C/

Société SHAM

Société SETEC BATIMENT

Compagnie d'assurance SMABTP*

SA MMA IARD

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Isabelle FICI

- Me Philippe KLEIN

- Me Françoise BOULAN

- Me Agnès ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 9] en date du 28 Mai 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 17/04889.

APPELANTES

Société SMABTP recherchée en sa qualité d€assureur de la SA « ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE » prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège social sis

demeurant [Adresse 5]

et

S.A. ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE SA à directoire au capital de 16.800.000,00 euros, inscrite au RCS de [Localité 7] sous le numéro 745.420.653 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège social sis

demeurant [Adresse 3]

représentées par Me Isabelle FICI de la SELARL CABINET LIBERAS-FICI & ASSOCIÉS, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Magatte DIOP, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et Me Laurent BELFIORE de la SCP ARTAUD BELFIORE CASTILLON GREBILLE-ROMAND, avocat plaidant au barreau de NICE

INTIMEES

Société SHAM

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON - KLEIN, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et Me Frédéric PIRAS de la SELARL PVBF, avocat plaidant au barreau de LYON

Société SETEC BATIMENT prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

demeurant [Adresse 4]

et

Société SMABTP prise en la personne de son représentant légal en exercice d

omicilié en cette qualité audit siège

demeurant [Adresse 5]

représentées par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rachid CHENIGUER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SA MMA IARD immatriculée au R.C.S. de [Localité 10] sous le numéro 440 048 882 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité au siège social sis

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat postulant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE Me Philippe BALON de la SELEURL CABINET BALON, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Mai 2025 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Madame Véronique MÖLLER, Conseillère

Monsieur Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Christiane GAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2025 prorogé au 23 octobre 2025.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURES, PRETENTIONS DES PARTIES :

Des travaux de rénovation et d'agrandissement ont été entrepris concernant le Centre hospitalier d'[Localité 6].

Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles (ci-après la SHAM).

Sont intervenues à l'opération, notamment :

- la société Setec Bâtiment, assurée par la SMABTP, au titre de la maîtrise d''uvre des lots techniques,

- la société Entreprise Générale Léon Grosse, assurée par la SMABTP, en qualité d'entreprise générale,

- la société [F], sous-traitant du lot n°4 « plomberie -protection incendie », assurée par la SA MMA IARD.

La société [F] s'est approvisionnée auprès de la société Richardson, grossiste, pour les vannes. Les vannes ¿ de tour ont été fournies par la société Sferaco. Les vannes Quitus ont été fournies par la société Danfoss.

Les travaux ont été reçus par procès-verbal de réception du 09 août 2007 pour l'extension et du 24 avril 2008 pour la restructuration.

Des fuites ont été déplorées en raison de la rupture d'une vanne de régulation posée par la société [F].

Plusieurs sinistres ont ainsi été déclarés à l'assureur dommages-ouvrage qui a versé diverses sommes pour la réalisation de travaux permettant de remédier aux désordres pour un montant total de 60.684,14 euros hors taxes.

C'est dans ce contexte que la société [F] et son assureur la MMA IARD ont obtenu, par ordonnance de référé du 25 juin 2019, la désignation d'un expert judiciaire au contradictoire de la SA MMA IARD, du Centre Hospitalier d'[Localité 6], de la SHAM, de la SAS Richardson, de la SA Assurances Générales de France (AGF), de la société Entreprise Générale Léon Grosse, de la SA Sferaco, de la SARL Danfoss.

Les opérations d'expertise ont ensuite été étendues à la SA Setec Bâtiment, à la SA GDF Suez Energie Services venant aux droits de la société COFATECH (COFELY) exploitant de l'installation, à la société Zhejiang Yonghe Co Ltd, le fabricant chinois des vannes, et à son assureur la société Federal Insurance [Localité 11] Branch Chubb.

Le rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 03 septembre 2012. Des fuites des vannes Quitus Danfoss ont été identifiées ainsi que la rupture des vannes Sferaco.

Par actes délivrés les 02, 03 août 2017, la SHAM a assigné les sociétés Entreprise Générale Léon Grosse, Setec Bâtiment et [F] ainsi que leurs assureurs la MMA IARD et la SMABTP, devant le tribunal judiciaire de Grasse aux fins d'obtenir le remboursement des sommes avancées.

Par jugement en date du 28 mai 2021, le tribunal judiciaire de Grasse :

DIT qu'il n'y a pas lieu d'écarter des débats des conclusions ou des pièces,

DECLARE irrecevables les demandes formulées à l'encontre de la SCP BTSG2, représentée par Maitre [G] [P], Mandataire Judiciaire, agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL [F] ou de 1a SARL [F] ;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'artic1e 1792 du Code Civil à verser à la société SHAM de la somme de 46.088,46 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code Civil d'une part et la MMA IARD SA sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil d'autre part à verser à la société SHAM la somme de l5.09l,53 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil.

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, d'une part et la MMA IARD SA d'autre part à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP de l'entière condamnation prononcée à son encontre,

CONDAMNE la MMA IARD SA à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la MMA IARD SA à hauteur dc 50 % des condamnations prononcées à son encontre,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SMABTP, son assureur, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, la SMABTP son assureur, ainsi que la MMA IARD SA à verser à la société SHAM une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, son assureur la SMABTP, ainsi que la MMA IARD SA aux entiers dépens,

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 09 juillet 2021, la SMABTP et la SA Entreprise Générale Léon Grosse ont intimé la société d'assurance SHAM, la société Setec Bâtiment, la SMABTP et la SA MMA IARD et interjeté appel de ce jugement aux fins de faire réformer ou annuler la décision entreprise, faire droit à toutes exceptions de procédure, annuler, sinon infirmer et à tout le moins réformer le jugement en ce qu'il a refusé de faire droit aux demandes de la SMABTP et de la société Léon Grosse, à savoir :

A titre principal :

Mettre purement et simplement hors de cause la société Léon Grosse dont la responsabilité n'est aucunement stigmatisée.

Débouter l'ensemble des parties de l'ensemble de leurs demandes de condamnations formulées à l'encontre de la société Léon Grosse et de son assureur la SMABTP.

A titre subsidiaire :

Si par extraordinaire une condamnation était prononcée à l'encontre de la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP :

Dire et juger que la société Setec Bâtiment, ayant assuré la maîtrise d''uvre technique et son assureur la SMABTP ainsi que la société [F] sous-traitant de la société Léon Grosse et son assureur les MMA seront condamnés in solidum à relever et garantir la société Léon Grosse son assureur la SMABTP, de toutes éventuelles condamnations prononcées à leur encontre.

Débouter toutes les parties de leurs plus amples demandes.

En tout état de cause :

Condamner tout succombant à la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

Et a en conséquence jugé :

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur, la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code civil à verser à la société SHAM la somme de 46.088,46 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation;

CONDAMNE in solidum la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, à hauteur de 50% de cette condamnation;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code civil d'une part et la MMA IARD SA sur le fondement de l'article 1240 du Code civil d'autre part à verser à la société SHAM la somme de 15.091,53euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SMABTP son assureur, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, la SMABTP son assureur, ainsi que la MMA IARD SA à verser à la société SHAM une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, son assureur la SMABTP, ainsi que la MMA IARD SA aux entiers dépens.

L'affaire était enregistrée au répertoire général sous le n°RG 21/10372.

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

La Société Mutuelle d'Assurances du Bâtiment et des Travaux Publics, SMABTP, société mutuelle à cotisations variables, recherchée en sa qualité d'assureur de la SA Entreprise Générale Léon Grosse, et la SA Entreprise Générale Léon Grosse sollicitent, selon des conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 26 janvier 2022, de :

Vu les articles 1792 et suivants du Code civil

Vu les articles 1231-1 et 1240 et suivants du Code civil

Vu les articles L. 125-12 et L. 242-1 du Code des assurances

SUR LE RAPPORT D'EXPERTISE JUDICIAIRE

JUGER que s'agissant du désordre n°1 relatif à la fuite des vannes QUITUS

DANFOSS, l'expert judiciaire en impute la responsabilité au fabricant la société DANFOSS.

JUGER que s'agissant du désordre n°2 à savoir la rupture des vannes SFERACO, l'expert judiciaire en impute la responsabilité à hauteur de 70% au fabricant chinois YONGHE ou à défaut son fournisseur SFERACO outre 15 % complémentaires à la société SFERACO en tant que fournisseur, 10 % à la société Setec Bâtiment au titre de la maîtrise d''uvre technique et 5 % la société [F]

JUGER qu'aucune part de responsabilité n'est imputée à la société Léon Grosse, par l'expert judiciaire dans son rapport, ni par l'expert Dommages-ouvrage.

JUGER que la société Léon Grosse est intervenue à l'opération de rénovation et d'agrandissement du Centre Hospitalier d'[Localité 6], ès qualités d'entreprise générale.

JUGER que la société Léon Grosse a sous-traité le lot plomberie à la société [F] assurée auprès des MMA IARD.

JUGER que la société [F] est débitrice envers la société Léon Grosse d'une obligation contractuelle de résultat en sa qualité de sous-traitant.

JUGER qu'indépendamment des éventuelles responsabilités des fournisseurs, la société [F], en sa qualité de sous-traitant et d'installateur des vannes litigieuses doit assumer la totale responsabilité de ses ouvrages.

JUGER au demeurant que le rapport d'expertise dommages ouvrage et la lettre d'accompagnement du cabinet SARETEC, expert dommages-ouvrage stigmatisent la responsabilité à hauteur de 100 % pour les deux dommages, de la société [F] en sa qualité de sous-traitants.

JUGER qu''il ressort du courrier de la SHAM en date du 30 décembre 2014 que la responsabilité incombe entièrement à la société [F] au titre des deux désordres objets de l'expertise dommages-ouvrage du cabinet SARETEC et du rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [J]

SUR LA CONFIRMATION DU JUGEMENT QUANT A LA MISE HORS DE CAUSE

DE LA SMABTP ASSUREUR DE Léon Grosse AU TITRE DU DESORDRE 2 :

CONFIRMER la mise hors de cause de la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP au titre du désordre n°2 ;

En tout état de cause,

REJETER toutes demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP au titre du désordre n°2 ;

CONDAMNER in solidum de la société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP et la MMA IARD en sa qualité d'assureur de la société [F] à les relever et garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre ;

SUR LA REFORMATION DU JUGEMENT QUANT A LA CHARGE FINALE DES SOMMES ALLOUEES AU TITRE DU DESORDRE 1 :

INFIRMER le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP à payer 50% des sommes allouées au titre des travaux de reprise du désordre n°1 sans condamnation in solidum de la société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP et la MMA IARD (assureur de [F]), à les relever et garantir de toutes éventuelles condamnations prononcées à leur encontre ;

REFORMER le jugement querellé et :

CONDAMNER in solidum la MMA IARD (assureur de [F]), à relever et garantir la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP de toutes les condamnations prononcées à leur encontre et notamment à les relever et garantir du paiement de 50% des sommes allouées au titre des travaux de reprise du désordre n°1 ;

En tout état de cause,

Mettre purement et simplement hors de cause la société Léon Grosse dont la responsabilité n'est aucunement stigmatisée ;

Débouter l'ensemble des parties de l'ensemble de leurs demandes de condamnations formulées à l'encontre de la société Léon Grosse et de son assureur la SMABTP,

CONDAMNER in solidum la société Setec Bâtiment, ayant assuré la maîtrise d''uvre technique et son assureur la SMABTP ainsi que la MMA assureur de la société [F] (sous-traitant de la société Léon Grosse) à relever et garantir la société Léon Grosse et son assureur la SMABTP, de toutes éventuelles condamnations prononcées à leur encontre.

Débouter toutes les parties de leurs plus amples demandes.

Condamner tout succombant à la somme de 3.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP reprochent au tribunal d'avoir condamné la MMA, recherchée en sa qualité d'assureur de la société [F] uniquement au titre du désordre n°2 relatif aux vannes Sferaco et d'avoir fait supporter le coût final de la condamnation à hauteur de 50% sur la société Setec Bâtiment et son assureur et 50% sur les appelantes pour le désordre n°1, alors que le rapport d'expertise judiciaire et le rapport d'expertise dommages-ouvrage indiquent que c'est la société [F] qui a posé les vannes Quitus Danfoss, qu'elle doit donc en assumer la responsabilité.

Elles concluent à la confirmation du jugement en ce qui concerne le désordre n°2 compte tenu des conclusions des rapports d'expertise judiciaire et dommages-ouvrage dont il ne résulte aucune responsabilité à l'encontre de la société Entreprise Générale Léon Grosse.

Pour les mêmes motifs, la société Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sollicitent la réformation du jugement. Elles font valoir que la MMA aurait dû être condamnée à les relever et garantir entièrement en sa qualité d'assureur de la société [F] sur le fondement de la responsabilité contractuelle de ce sous-traitant tenu d'une obligation de résultat d'exécution des travaux exempt de vices.

La société Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP recherchent également la responsabilité de la société Setec Bâtiment intervenue au titre de la maîtrise d''uvre technique du lot plomberie et présumé responsable sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

La société SHAM sollicite, selon des conclusions n°1 notifiées par RPVA le 1er décembre 2021, de :

Vu les articles L. 121-12 et L. 242-1 et suivants du Code des assurances,

JUGER recevable et bien fondé son recours subrogatoire en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage ;

JUGER que les sociétés Setec Bâtiment, ZAFALONE et Léon Grosse engagent leur responsabilité au titre des désordres constatés par l'expert judiciaire ;

En conséquence,

CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de GRASSE le 25 MAI 2021 ;

CONDAMNER in solidum les sociétés Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, Léon Grosse et son assureur la SMABTP et MMA IARD à lui régler la somme de 6.000 €

en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La SHAM expose avoir préfinancé à hauteur de 60.684,14 euros le remplacement des vannes Quitus et des vannes Sferaco et avoir indemnisé le Centre Hospitalier d'[Localité 6] de ses préjudices. Elle fait valoir qu'elle intervient en qualité d'assureur dommages-ouvrage au titre de la subrogation légale, sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Elle conclut que si l'expert retient une responsabilité à 100% de la société Danfoss pour le désordre n°1 (fuite sur les vannes Quitus Danfoss), ces vannes ont été mises en 'uvre par la société [F], sous-traitant de la société Entreprise Générale Léon Grosse, dont la responsabilité est de facto engagée, au même titre que celle de la société Setec Bâtiment en sa qualité de maître d''uvre, qu'il en va de même au titre du désordre n°2 (ruptures de vannes Sferaco).

La société Setec Bâtiment et la SMABTP sollicitent selon des conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 15 février 2022 de :

Vu les articles 1202, 1315, 1382 et 1792 du code civil

Les RECEVOIR en leur appel incident et les déclarer bien fondé

DEBOUTER la société Léon Grosse et son assureur de leur appel au titre du désordre n° 1,

DEBOUTER la société MMA IARD de son appel incident comme mal fondé,

REFORMER le jugement en ce qu'il :

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code Civil à verser à la société SHAM de la somme de 46 088, 46 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, à relever et garantir la SA Entreprise Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50 % de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, à hauteur de 50 % de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code Civil d'une part et la MMA IARD SA sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil d'autre part à verser à la société SHAM la somme de 15 091,53 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, d'une part et la MMA IARD SA d'autre part à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP de l'entière condamnation prononcée à son encontre,

CONDAMNE la MMA IARD SA à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la MMA IARD SA à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SMABTP son assureur, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, la SMABTP son assureur, ainsi que la MMA IARD SA à verser à la société SHAM une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse, son assureur la SMABTP, ainsi que la MMA IARD SA aux entiers dépens,

Et, ce faisant, statuant à nouveau

REJETER l'ensemble des demandes, moyens, fins et conclusions dirigées contre la société Setec Bâtiment et la SMABTP

A TITRE SUBSIDIAIRE,

DIRE ET JUGER que la responsabilité de la société Setec Bâtiment doit être limitée à 10 % des conséquences préjudiciables de la rupture des vannes SFERACO (désordre n° 2) et ce, par une stricte application du rapport d'expertise judiciaire.

REJETER toute autre demande adverse plus ample ou contraire comme mal fondée,

CONDAMNER tout succombant au paiement d'une somme de 3.000 € au bénéfice de la société Setec Bâtiment et de la SMABTP son assureur en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance, distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX [Localité 8], Avocats associés aux offres de droit.

La société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP reprochent au tribunal de les avoir condamnées sur le fondement de l'article 1792 du code civil in solidum avec la société Entreprise Générale Léon Grosse sans avoir recherché si l'imputabilité des désordres était établie à l'encontre de la société Setec Bâtiment, qu'en l'espèce, il ressort de l'expertise judiciaire que le désordre n°1 (fuite sur les vannes Quitus Danfoss) résulte d'un phénomène de corrosion intrinsèque exclusivement imputable au fabricant Danfoss, que les autres constructeurs, dont la société Sertec Bâtiment, ne pouvaient prévoir.

La société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP concluent qu'en admettant qu'une imputabilité soit caractérisée, aucune somme réparatoire n'aurait dû être laissée à sa charge et à celle de son assureur puisque le désordre n°1 n'était pas un défaut visible et n'était pas décelable, que le maître d''uvre n'est pas tenu à une présence journalière contrairement à l'entreprise titulaire du marché.

Elles font valoir qu'elles sont bien fondées à exercer une action récursoire contre la MMA, assureur de la société [F] compte tenu de sa qualité de professionnel de la construction et homme de l'art.

S'agissant du désordre n°2 (rupture des vannes Sferaco), la société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP rappellent que l'expert judiciaire l'impute au fabricant Yonghe sous réserve de la fabrication effective de ces vannes par ce dernier, qu'il retient, à tout le moins, l'imputabilité de ce désordre à la société Sferaco, le fournisseur des vannes. Cependant, elles contestent les conclusions de l'expert judiciaire qui considère que la société Setec Bâtiment aurait pu, lors du suivi des travaux, s'apercevoir de la faiblesse dans le dimensionnement des vannes, de même que la société [F], qui les a posées, alors que les contrôles de la société Setec Bâtiment reposent sur des fiches techniques et des références d'entreprises mais ne sont pas des contrôles qualité sur l'ensemble des pièces fournies. Elles contestent donc l'existence d'une faute dans l'exercice de sa mission de maîtrise d''uvre technique.

La société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP font valoir qu'à supposer que la faiblesse des vannes fut décelable, cela ne pouvait l'être que par la société [F] qui les a achetées et posées sans se soucier de leur solidité.

Subsidiairement, elles concluent qu'aucun élément probant ne justifie de mettre à leur charge 50% des sommes réparatoires alors que l'expert ne retient que 10%.

La SA MMA IARD recherchée en qualité d'assureur de la société [F] et la société d'assurance mutuelle à cotisations fixes MMA IARD Assurances Mutuelles, intervenante volontaire (ci-après les MMA), sollicitent, selon des conclusions notifiées par RPVA le 04 mars 2022, de :

Vu les articles 325 et 554 du code de procédure civile,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu l'article 1202 du code civil,

DECLARER RECEVABLE l'intervention volontaire dc MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES es-qualite d'assureur de la Société [F] ;

CONFIRMER LE JUGEMENT en ce qu'il :

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code civil à verser à la Société SHAM de la somme de 46.088,46 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 3 aout 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil ;

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la Société Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation ;

Condamne in solidum la Société Léon Grosse et son assureur la SMABTP à relever et garantit la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% ;

INFIRMER le jugement en ce qu'il :

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment, la Société Léon Grosse et leur assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 1792 du Code civil d'une part et la MMA IARD SA sur le fondement dc l'article 1240 du Code civil d'autre part à verser à la Société SHAM la somme de 15091,53 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil ;

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP d'une part et la MMA IARD SA d'autre part à relever et garantir la Société Léon Grosse et son assureur la SMABTP de l'entière condamnation prononcée à son encontre ;

Condamne la MMA IARD SA à relever ct garantir la SAS Setec Bâtiment à hauteur de 50% de cette condamnation ;

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la MMA IARD SA in hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre ;

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SMABTP at son assureur la Société Léon Grosse, la SMABTP et son assureur ainsi que la MMA IARD à verser à la Société SHAM une somme dc 3000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SMABTP et son assureur la Société Léon Grosse, la SMABTP et son assureur ainsi que la MMA IARD aux entiers dépens.

Statuant à nouveau :

A titre principal :

JUGER que la Société [F] n'est pas responsable des désordres allégués ;

JUGER infondées les demandes formulées par la Société SHAM à l'encontre de la MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ;

REJETER toute demande de condamnation solidaire formulées à l'encontre de la MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES es-qualité d'assureur de la Société [F];

DEBOUTER la Société Léon Grosse et son assureur la SMABTP, la Société SHAM, la Société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP et/ ou tout contestant de toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES es-qualité assureur de la Société [F] ;

A titre subsidiaire :

ENTERINER les termes du rapport en ce que l'Expert a retenu une part de responsabilité de 5% à l'égard de [F] s'agissant du désordre relatif à la rupture de vannes SFERACO;

CONDAMNER la Société Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à garantir et relever indemne la MMA IARD SA ct MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES dc toute condamnation qui serait prononcée à son encontre, en principal, frais et accessoires.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

CONDAMNER in solidum la Société Léon Grosse et son assureur la SMABTP et /ou tout

succornbant à verser à la MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise.

Sur le désordre n°1 (fuites des vannes Quitus Danfoss), les MMA font valoir que l'expertise judiciaire a permis d'établir que les vannes sont affectées d'un phénomène de corrosion ayant pour origine la composition des différents éléments notamment les billes entrant dans la fabrication des vannes, que l'expert judiciaire retient que la responsabilité est uniquement imputable au fabricant Danfoss, que la société [F] ne pouvait pas prévoir ce phénomène, et que toutes fautes ou erreurs de cette société dans la mise en 'uvre des vannes litigieuses sont écartées.

Les MMA soutiennent qu'en revanche, la société Entreprise Générale Léon Grosse et la société Setec Bâtiment ne peuvent pas invoquer la faute de leur fournisseur ou de leur sous-traitant ni un vice des matériaux pour se libérer de la présomption de responsabilité qui pèse sur elles en application des dispositions de l'article 1792 du code civil.

Quant au désordre n°2, les MMA soutiennent que l'expertise judiciaire a mis en évidence une fragilité intrinsèque comme étant la cause principale dans la rupture des vannes, ce qui exclut un partage de responsabilité entre le fournisseur des vannes, la société Sferaco, le maître d''uvre et la société [F], même à titre résiduel pour cette dernière.

Subsidiairement, il est demandé de limiter la part incombant à la société [F] à 5% conformément aux conclusions de l'expert judiciaire.

L'ordonnance de clôture est en date du 28 avril 2025.

L'affaire a été retenue à l'audience du 13 mai 2025 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 03 juillet 2025. La date du délibéré a été prorogé.

MOTIFS :

Sur l'intervention volontaire :

Il y a lieu de recevoir l'intervention volontaire de la MMA IARD Assurances Mutuelles en sa qualité de co-assureur avec la SA MMA IARD.

Sur l'origine et la qualification des désordres :

Selon l'article 1792 du code civil :

Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

En l'espèce, il résulte des éléments du dossier, en particulier des conclusions de l'expertise judiciaire, que la réalité des désordres allégués affectant le réseau d'eau chaude sanitaire des parties de l'hôpital, se manifestant par des fuites de plusieurs vannes d'équilibrage Quitus Danfoss en place et par la rupture de deux vannes Sferaco ¿ de tour, a été constatée par l'expert judiciaire.

Après analyses en laboratoire, l'origine des fuites des vannes Quitus Danfoss a pu être identifiée comme provenant de phénomènes de corrosion par existence d'un couple galvanique entre des matériaux de natures très différentes. A cette corrosion de type pile s'ajoute très secondairement une dézincification du laiton liée à l'agressivité et à la qualité de l'eau circulant dans les réseaux concernés pouvant être lié au phénomène de pile, étant précisé que les analyses de l'eau du réseau confirment des valeurs pH correctes et des valeurs de chlore libre conformes aux préconisations réglementaires et aux exigences du CH d'[Localité 6]. L'expert judiciaire considère donc que la valeur du chlore libre et la dézincification associée ne constituent pas une cause déterminante.

Quant à la rupture des vannes Sferaco, les analyses de laboratoire ont permis d'établir qu'elle résulte d'une « corrosion sous contrainte », consécutive à l'action conjuguée d'une contrainte mécanique et d'un milieu agressif vis-à-vis du matériau, qu'il y a une fragilité excessive des vannes due à des économies de matière lors de leur conception et de leur fabrication. L'expert judiciaire estime qu'au sein du phénomène de corrosion sous contrainte, c'est la contrainte anormale qui est la cause prépondérante des désordres. La corrosion n'est pas déterminante. Le caractère agressif de l'eau reste du domaine courant.

L'expert judiciaire conclut, par ailleurs, qu'il n'y a pas de défaut de conformité aux règles de l'art et aux documents contractuels mais que les vannes choisies étaient affectées de vices, à savoir une mauvaise constitution des vannes Quitus Danfoss susceptible de favoriser le phénomène dit de pile et une résistance insuffisante des vannes Sferaco.

Ces désordres sont apparus à l'usage, après réception.

Ils concernent un ouvrage sur existant, à savoir une opération de construction et de restructuration concernant le plateau technique, le service des urgences, la réanimation, l'IRM et le scanner de l'Hôpital.

Les désordres occasionnés, à savoir des fuites intervenues, notamment dans le local scanner, puis dans le secteur de la réanimation, ayant entrainé des dommages importants, rendent l'ouvrage impropre à sa destination. Ils relèvent donc des dispositions de l'article 1792 du code civil sus-énoncé.

Sur les responsabilités :

Selon la jurisprudence issue de l'article 1792 du code civil, les locateurs d'ouvrage ne peuvent s'exonérer de la présomption de responsabilité qui pèse sur eux, que par la preuve d'une cause étrangère : le vice du sol n'est pas une cause d'exonération puisque l'article 1792 oblige les constructeurs à y répondre, le vice du matériau ou d'une technique, même indécelable ou inconnu, n'est pas exonératoire, faute d'extériorité.

L'architecte étant investi d'une mission complète de maîtrise d''uvre, confiée par le maître de l'ouvrage, la défectuosité des matériaux livrés sur le chantier ne constitue pas pour ce maître d''uvre une cause étrangère de nature à l'exonérer de la présomption de responsabilité édictée par l'article 1792-1 du code civil. (Civ.,3 ème, 7 mars 1990, pourvoi n° 88-14.866, Bull. 1990, III, n° 69 ; Civ., 3 ème, 28 février 2001, pourvoi n°99-12.751, publié).

Le fait d'un tiers : Le locateur d'ouvrage ne peut invoquer le fait du sous-traitant ou du co-locateur d'ouvrage (le défaut de surveillance du maître n'est pas exonératoire), ni le vice des matériaux (les constructeurs sont garants des matériaux qu'ils utilisent), ni la décision d'un organisme tiers (voir Civ., 3 ème , 26 mars 1997, pourvoi n° 94-21.808, Bull. 1997, III, n° 69 ; Civ.,3 ème , 11 février 1998, pourvoi n° 95-17.199, diffusé).

En cas de sous-traitance, si les rapports maître d'ouvrage / entrepreneur principal et entrepreneur principal / sous-traitant sont soumis à la responsabilité contractuelle, les rapports du maître de l'ouvrage avec le sous-traitant sont de nature quasi-délictuelle (Ass. Plénière, 12 juillet 1991, pourvoi n° 90-13.602, Bull. AP, n° 5 qui a rejeté la théorie des groupes de contrats) ; il est dès lors nécessaire pour le maître de l'ouvrage qui recherche la responsabilité du sous-traitant de prouver sa faute (faute ordinaire, manquement aux règles de l'art, défaut de conformité des travaux à la réglementation en vigueur, manquement au devoir de conseil). Le délai de prescription est de dix ans. (article 1792-4-2 du code civil).

Chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage des responsabilités auquel les juges du fond ont procédé entre les divers responsables, qui n'affecte que les rapports réciproques de ces derniers et non l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée. Il en est ainsi même si l'un des responsables est demeuré inconnu.

En l'espèce, l'expert judiciaire considère que le désordre n°1, qui a pour origine la composition des différents éléments, notamment des billes entrant dans la fabrication des vannes Quitus Danfoss, est exclusivement imputable au fabricant Danfoss et que les autres intervenants, en particulier la société [F] et la société Setec Bâtiment ne pouvaient prévoir le phénomène. Il attribue ainsi 100% de responsabilité à la société Danfoss.

Le vice affectant les matériaux n'étant pas une cause exonératoire de la responsabilité décennale de la SAS Setec Bâtiment et de la SA Entreprise Générale Léon Grosse, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'artic1e 1792 du Code Civil à verser à la société SHAM de la somme de 46.088,46 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil, puis condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation, et a condamné in solidum la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation.

En revanche, l'expert judiciaire considère que le désordre n°2, à savoir la rupture des vannes Sferaco, est imputable au fabricant Yonghe, sous réserve de la fabrication effective des vannes par ce fabricant, sinon à la société Sferaco, le fournisseur des vannes, mais il attribue aussi une part résiduelle d'imputabilité à la société Setec Bâtiment (10%) qui, en tant que maître d''uvre technique, aurait pu s'apercevoir de la faiblesse des vannes lors du suivi des travaux, et à la société [F] (5%) qui a acheté les vannes.

Cependant, force est de constater que, pour parvenir à ces conclusions, des analyses en laboratoires poussées ont été nécessaires et ont permis de démontrer le rôle de l'agressivité de l'eau, la présence de points faibles dans les caractéristiques dimensionnelles des vannes Sferaco, en particulier l'épaisseur de matière en fond de filet, que l'agent corrosif est le fluide circulant dans le réseau qui est agressif, avec une forte dézincification intérieure. Il en résulte que le vice affectant les vannes Sferaco n'était pas décelable, même par des professionnels de la construction.

Par ailleurs, l'expert judiciaire conclut qu'il n'y a pas de défaut de conformité aux règles de l'art et aux documents contractuels.

En conséquence, si les vices affectant les matériaux ne sont pas exonératoires de la responsabilité décennale de la société Entreprise Générale Léon Grosse, intervenue dans l'opération immobilière en qualité d'entreprise générale et ayant sous-traité les travaux de plomberie, ni de la responsabilité décennale de la société Setec Bâtiment, intervenue en qualité de maître d''uvre technique, il en va autrement de la responsabilité de droit commun du sous-traitant (contractuelle à l'égard de la société Entreprise Générale Léon Grosse, quasi-délictuelle à l'égard du maître d'ouvrage et de la société Setec Bâtiment) dont la faute doit être prouvée.

Or, en l'espèce, compte tenu des analyses en laboratoire ayant été nécessaires afin de déterminer l'origine du désordre n°2 affectant les vannes Sferaco, il n'est pas possible de considérer, comme le fait l'expert judiciaire, que la société Setec Bâtiment et la société [F] auraient pu s'apercevoir du vice affectant les vannes, apparu à l'usage sous la contrainte particulière de l'eau chaude du centre hospitalier.

Le vice affectant les vannes Sferaco n'étant pas décelable, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de la société [F].

Dans leurs rapports entre elles pour la répartition de la dette, la SAS Setec Bâtiment et la SA Entreprise Générale Léon Grosse étant responsables de plein droit sur le fondement de l'article 1792 du code civil et dans la mesure ou aucune faute ne peut être retenue à leur encontre, elles seront condamnées à se relever et garantir réciproquement in solidum avec leur assureur commun la SMABTP à hauteur de 50% chacune.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la MMA IARD SA à indemniser la SHAM, en sa qualité d'assureur de la société [F], sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil, in solidum avec la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, et avec la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP, alors que la responsabilité de droit commun de son assuré ne pouvait pas être retenue, puis en ce qu'il a ensuite condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, d'une part et la MMA IARD SA d'autre part à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP de l'entière condamnation prononcée à son encontre, condamné la MMA IARD SA à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment à hauteur de 50% de cette condamnation, et a condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la MMA IARD SA à hauteur dc 50% des condamnations prononcées à son encontre.

Statuant à nouveau, compte tenu de ce qui précède et de la responsabilité décennale in solidum de la SAS Setec Bâtiment et de la SA Entreprise Générale Léon Grosse au titre du désordre n°2 (rupture des vannes Sferaco), il y a lieu de les condamner in solidum avec leur assureur la SMABTP à verser à la société SHAM la somme de l5.09l,53 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil.

La SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP seront ensuite condamnées in solidum à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation. Réciproquement, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP seront condamnées in solidum à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, seulement en ce qu'il a condamné la MMA IARD in solidum avec la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, et avec la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP, alors que la responsabilité de droit commun de son assuré la société [F] n'a pas été retenue.

La SAS Setec Bâtiment, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et la SMABTP, assureur de ces deux sociétés, qui succombent in fine, seront condamnées in solidum à payer à la SHAM et aux MMA une indemnité de 3.000euros chacune pour les frais qu'elles ont dû exposer en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

La charge finale des dépens et de cette indemnité sera répartie entre la SAS Setec Bâtiment in solidum avec son assureur la SMABTP, d'une part, et la SA Entreprise Générale Léon Grosse in solidum avec son assureur la SMABTP, d'autre part, à hauteur de 50% chacune.

Il est rappelé qu'en application de l'article 695 4° du code de procédure civile, les honoraires de l'expert entrent dans l'assiette des dépens.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe le 23 octobre 2025, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

RECOIT l'intervention volontaire de la MMA IARD Assurances Mutuelles en sa qualité de co-assureur avec la SA MMA IARD,

INFIRME le jugement en ce qu'il a :

- condamné la MMA IARD SA, en sa qualité d'assureur de la société [F], à indemniser la SHAM, sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil, in solidum avec la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, et avec la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP, alors que la responsabilité de droit commun de son assuré ne pouvait pas être retenue,

- condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, d'une part, et la MMA IARD SA, d'autre part, à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP de l'entière condamnation prononcée à son encontre,

- condamné la MMA IARD SA à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment à hauteur de 50% de cette condamnation,

- condamné in solidum la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à relever et garantir la MMA IARD SA à hauteur dc 50% des condamnations prononcées à son encontre,

- condamné la MMA IARD in solidum avec la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP, et avec la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et la SMABTP, en sa qualité d'assureur de ces deux sociétés, à verser à la société SHAM la somme de l5.09l,53 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, et capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du Code civil,

CONDAMNE, dans leurs rapports entre elles, au titre de la répartition finale de la dette, la SAS Setec Bâtiment in solidum avec son assureur la SMABTP à relever et garantir la SA Entreprise Générale Léon Grosse et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE la SA Entreprise Générale Léon Grosse in solidum avec son assureur la SMABTP à relever et garantir la SAS Setec Bâtiment et son assureur la SMABTP à hauteur de 50% de cette condamnation,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et la SMABTP, en sa qualité d'assureur de ces deux sociétés, à payer à la SHAM et aux MMA une indemnité de 3.000euros chacune pour les frais qu'elles ont dû exposer en cause d'appel,

CONDAMNE in solidum la SAS Setec Bâtiment, la SA Entreprise Générale Léon Grosse et la SMABTP, en sa qualité d'assureur de ces deux sociétés, à supporter les entiers dépens d'appel,

DIT que la charge finale des dépens et de l'indemnité versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera répartie entre la SAS Setec Bâtiment in solidum avec son assureur la SMABTP, d'une part, et la SA Entreprise Générale Léon Grosse in solidum avec son assureur la SMABTP, d'autre part, à hauteur de 50% chacune,

RAPPELLE qu'en application de l'article 695 4° du code de procédure civile, les honoraires de l'expert entrent dans l'assiette des dépens,

ACCORDE que le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Christiane GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

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