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Décisions

CA Bourges, 1re ch., 24 octobre 2025, n° 24/01041

BOURGES

Arrêt

Autre

CA Bourges n° 24/01041

24 octobre 2025

SM/OC

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- SELARL AVARICUM JURIS

- SCP GERIGNY & ASSOCIES

EXPÉDITION TJ

LE : 24 OCTOBRE 2025

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2025

N° RG 24/01041 - N° Portalis DBVD-V-B7I-DWG6

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de BOURGES en date du 10 Octobre 2024

PARTIES EN CAUSE :

I - S.A.R.L. L'ATELIER DU [Adresse 7] agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social:

[Adresse 9]

[Adresse 3]

[Localité 4]

N° SIRET : 850 419 276

Représentée par la SELARL AVARICUM JURIS, avocat au barreau de BOURGES

Plaidant par la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 27/11/2024

INCIDEMMENT INTIMÉE

II - M. [M] [O]

né le 16 Décembre 1972 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 1]

- Mme [P] [O] épouse [O]

née le 04 Février 1975 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentés et plaidants par la SCP GERIGNY & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

INTIMÉS

INCIDEMMENT APPELANTS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CIABRINI, Conseillère chargée du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Odile CLEMENT Présidente de Chambre

M. Richard PERINETTI Conseiller

Mme Marie-Madeleine CIABRINI Conseillère

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant devis accepté le 6 juillet 2020, M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] ont commandé une cuisine aménagée et équipée auprès de la SARL [Adresse 8], moyennant un prix de 40 960,16 euros TTC.

Le 2 novembre 2020, M. et Mme [O] ont versé un acompte de 12 200 euros.

Les travaux se sont achevés le 23 décembre 2020.

Par courriel du 24 décembre 2020, M. et Mme [O] ont informé la société L'Atelier du [Adresse 7] de l'existence de plusieurs désordres.

Par courriel du 4 janvier 2021, la société L'Atelier du [Adresse 7] leur a indiqué son intention de se rendre sur place pour constater ces désordres et leur a adressé la facture du solde de la prestation, d'un montant de 27 748 euros TTC.

Le 29 janvier 2021, les parties ont établi un procès-verbal d'achèvement des travaux avec réserves.

Par courrier du 26 février 2021, la société L'Atelier du [Adresse 7] a mis en demeure M. et Mme [O] de lui régler le solde de sa facture.

Le 4 juin 2021, M. et Mme [O] ont procédé à un versement de 12 200 euros.

Par acte d'huissier de justice en date du 30 septembre 2021, la société [Adresse 8] a assigné M. et Mme [O] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bourges aux fins d'obtenir le paiement de la somme de 15 548 euros, correspondant au solde de sa facture.

Par ordonnance en date du 8 mars 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bourges a ordonné une mesure d'expertise, confiée à M. [N] [Y].

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 16 septembre 2022.

Par acte d'huissier de justice en date du 28 avril 2023, la société L'Atelier du Faubourg-Valmon a assigné M. et Mme [O] devant le tribunal judiciaire de Bourges en paiement de la somme de 10 515,86 euros, correspondant au solde de sa facture.

Par jugement contradictoire en date du 10 octobre 2024, le tribunal judiciaire de Bourges a :

' condamné solidairement M. et Mme [O] à verser à la société [Adresse 8] la somme de 7 748,85 euros au titre du paiement du solde des travaux,

' enjoint à la société L'Atelier du Faubourg-Valmon de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà, et pendant une période de six mois, à la restitution de l'étagère en remplacement du porte-torchon,

' rejeté la demande de la société [Adresse 8] de voir condamner M. et Mme [O] à des dommages-intérêts pour retard de paiement,

' condamné la société L'Atelier du Faubourg-Valmon à verser à M. et Mme [O] la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance,

' ordonné la compensation entre les sommes dues par chacune des parties, si bien que la créance de la société [Adresse 8] sur M. et Mme [O] doit être ramenée à la somme de 3 748,85 euros avant déduction des frais irrépétibles,

' condamné la société L'Atelier du Faubourg-Valmon aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de la procédure de référé, d'expertise judiciaire et de la présente procédure,

' condamné la société [Adresse 8] à payer à M. et Mme [O] une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' rappelé que l'exécution du jugement est de droit à titre provisoire.

Par déclaration en date du 27 novembre 2024, la société L'Atelier du Faubourg-Valmon a interjeté appel de ce jugement en l'ensemble de ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 24 juin 2025, la société [Adresse 8] demande à la cour de :

' juger recevable et fondé son appel,

' infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rappelé que l'exécution est de droit à titre provisoire,

' la juger recevable et fondée en ses demandes,

' condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 12.228 euros en règlement du solde de sa facture no F 210101 du 4 janvier 2021, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2021, date de la réception des travaux,

' condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts,

' déclarer M. et Mme [O] irrecevables en leur demande de condamnation au titre de la peinture de la porte d'entrée et de la rampe des spots, ou à défaut les en débouter,

' débouter M. et Mme [O] de leur demande de condamnation au titre de la reprise de la patte de fixation, le défaut d'accessoire du four et toute demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance,

' juger sans objet la demande portant sur le porte-torchon déjà restitué,

' débouter M. et Mme [O] de toutes leurs demandes,

' condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner M. et Mme [O] aux entiers dépens, dont les frais d'expertise,

' à défaut, juger que ces frais d'expertise seront pris en charge à 79 % par M. et Mme [O] et à 21 % par elle-même.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 23 mai 2025, M. et Mme [O] demandent à la cour de :

' dire et juger mal fondé l'appel interjeté par la société L'Atelier du Faubourg-Valmon,

' débouter la société [Adresse 8] de l'intégralité de ses demandes,

' infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

> les a condamnés solidairement à verser à la société L'Atelier du Faubourg-Valmon la somme de 7 748,85 euros au titre du paiement du solde des travaux,

> a condamné la société [Adresse 8] à leur verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance,

> a ordonné la compensation entre les sommes dues par chacune des parties, si bien que la créance de la société L'Atelier du Faubourg-Valmon doit être ramenée à la somme de 3 748,85 euros avant déduction des frais irrépétibles,

' condamner la société L'Atelier du [Adresse 7] à leur régler la somme de 22 139,75 euros au titre du coût de la reprise des désordres et de la surfacturation,

' après compensation avec le solde de la facture (15 548 euros TTC), condamner la société [Adresse 8] à leur payer la somme de 6 591,75 euros,

' condamner la société L'Atelier du Faubourg-Valmon à leur verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance,

' confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

' condamner la société [Adresse 8] à leur payer une indemnité de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

' condamner la société L'Atelier du Faubourg-Valmon aux entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 août 2025.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE

La société [Adresse 8] ayant restitué l'étagère appartenant à M. et Mme [O] depuis le prononcé du jugement de première instance, il y a lieu d'infirmer ce dernier en ce qu'il lui a enjoint de procéder, dans un délai d'un mois à compter de sa signification, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà, et pendant une période de six mois, à la restitution de l'étagère en remplacement du porte-torchon.

Sur la demande en paiement du solde de la facture

L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1231-1 du même code prévoit que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

En l'espèce, les parties font grief au jugement attaqué d'avoir condamné solidairement M. et Mme [O] à verser à la société L'Atelier du [Adresse 7] la somme de 7 748,85 euros au titre du paiement du solde des travaux.

La société appelante demande à la cour de condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 12.228 euros en règlement du solde de sa facture no F 210101 du 4 janvier 2021, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2021.

Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 29 janvier 2021.

Sur le rebouchage du trou au plafond

L'expert judiciaire a relevé l'existence d'un trou percé par erreur dans le plafond pour accueillir la fixation de la rampe de spots et a préconisé, pour y remédier, de boucher le trou ou d'ajouter une tige filetée et un collier pour fixer la rampe d'éclairage.

Les intimés sollicitent l'octroi d'une somme de 1 397,10 euros, se fondant sur le devis établi par la société SBPR.

Il apparait toutefois à l'examen de ce devis que ce dernier comprend le ratissage, le rebouchage, le ponçage et la peinture du plafond, ainsi que la protection et le nettoyage de fin de chantier, ce qui constitue des prestations très supérieures aux travaux préconisés par l'expert judiciaire.

Étant rappelé que le trou à reboucher est un simple trou de perçage d'un diamètre très réduit, qui ne nécessite donc aucunement de reprendre l'intégralité du plafond, il conviendra de ramener le coût des reprises à de plus justes proportions et de les fixer à la somme de 100 euros.

Sur la fourniture des accessoires du four

Il est constant que le four de la cuisine a été livré sans ses accessoires, à savoir notamment la lèchefrite et la plaque à pâtisserie.

Bien que s'agissant d'un modèle d'exposition, il ne saurait être déduit de cette seule circonstance que les parties ont convenu que le four serait vendu sans ses accessoires. Il doit être observé, au contraire, qu'il résulte de la notice d'utilisation que les accessoires font partie intégrante du four et que la mention portée sur la facture du 10 juin 2020 « four porte escamotable Neff réf. B58VT68N0 (show room) » ne permet aucunement de déduire que les parties ont eu la volonté d'exclure les accessoires du four de la vente.

La société appelante ne contestant pas le quantum de la demande, il sera retenu que M. et Mme [O] sont bien fondés à solliciter le paiement de la somme de 78,45 euros à ce titre.

Sur la reprise de la peinture de la porte d'entrée

L'article 1792-6, alinéa 2, du code civil dispose que la garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.

La demande de garantie de parfait achèvement n'est pas recevable en présence d'une simple notification écrite à l'entrepreneur, lorsque l'assignation formulant la demande a été introduite plus d'un an après la réception des travaux (en ce sens, cass. civ. 3e, 6 mai 1998, no 96-18.038).

L'assignation en référé-expertise a pour effet de faire courir un nouveau délai d'un an à compter de l'ordonnance ayant désigné l'expert, délai au cours duquel le maître de l'ouvrage doit mettre à exécution la garantie de parfait achèvement (en ce sens, cass. civ. 3e, 17 mai 1995, no 93-16.568).

En l'espèce, la société [Adresse 8] soulève l'irrecevabilité de la demande relative à la reprise de peinture de la porte d'entrée, au motif que M. et Mme [O] n'auraient pas notifié ce désordre et formé de demande en justice afférente dans le délai d'un an suivant la réception de travaux.

M. et Mme [O] ne développent aucun moyen relatif à la recevabilité de leur demande.

Il résulte des pièces de la société appelante que M. et Mme [O] lui ont adressé un courrier, en réponse au sien du 26 février 2021, dans lequel ils mentionnent que « de la peinture se décolle dans l'embrasure de la porte ». Si aucune date ne figure en en-tête du courrier, ce dernier comporte cependant la mention « aujourd'hui 4 mars 2021 » en avant-dernière page, ce qui permet de le dater avec une certitude suffisante au mois de mars 2021.

M. et Mme [O] ont donc bien notifié le désordre relatif à la peinture de la porte d'entrée à la société appelante, par écrit et dans un délai d'un an suivant la réception.

Leur assignation en référé-expertise, portant notamment sur le désordre relatif à la peinture de la porte d'entrée, est intervenue le 30 septembre 2021, soit moins d'un an après la réception des travaux, ce qui a eu pour effet d'interrompre le délai de la garantie de parfait achèvement et d'en faire courir un nouveau de même durée à compter du 8 mars 2022, date de prononcé de l'ordonnance de référé.

Force est toutefois de constater que leur assignation au fond, par laquelle ils ont entendu mettre à exécution la garantie de parfait achèvement, est intervenue le 28 avril 2023, soit plus d'un an après le prononcé de l'ordonnance de référé.

En conséquence, leur demande relative à la reprise de peinture de la porte d'entrée doit être déclarée irrecevable.

Sur la reprise de la peinture de la rampe de spots

La société appelante soutient que M. et Mme [O] n'ont formé aucune demande en justice dans l'année suivant la réception des travaux, de sorte que la demande relative à la reprise de peinture de la rampe de spots est irrecevable.

Pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés, il y a lieu de déclarer la demande relative à la reprise de la peinture de la rampe de spots irrecevable.

Sur la non-conformité du billot

M. et Mme [O] dénoncent la non-conformité du billot au devis du 6 juillet 2020, en ce que le plan de travail n'est pas constitué de bois massif, mais de cubes de bois sur champ de faible épaisseur, collé sur un panneau en bois aggloméré, et demandent indemnisation de leur préjudice résultant de la surfacturation de cette prestation.

L'expert judiciaire a relevé que « le plan de travail est un billot. Il s'agit d'un assemblage de tronçon[s] de billes de bois dur ['] Le plan de travail est composé de cubes de bois sur champ de faible épaisseur (2,5 cm) collés sur un panneau d'aggloméré et ceinturé d'un cadre de bois, dont les angles sont renforcés par des angles métalliques ['] La description dans le devis et la facture indique un plateau en lamellé hêtre massif de 100mm, ce qui n'est pas conforme au plateau posé ».

Il résulte des constatations expertales que la société appelante n'a pas fourni un billot conforme aux prévisions contractuelles. Il n'est pas contesté qu'un billot en lamellé massif de 10 cm d'épaisseur est plus onéreux qu'un plan de travail composé de cubes de bois de 2,5 cm d'épaisseur collés sur un panneau en bois aggloméré de même épaisseur.

M. et Mme [O] entendent explicitement fonder leur action relative à la non-conformité du billot sur la responsabilité contractuelle de droit commun de la société L'Atelier du [Adresse 7], invoquant un préjudice financier lié à la surfacturation du billot, plutôt que sur les règles relatives à l'inexécution du contrat.

Pour estimer le montant de leur préjudice résultant de la non-conformité du billot, ils considèrent, sur la base de la facture du 4 janvier 2021, que la réalisation du plan de travail a nécessité la totalité de la fourniture du bois, soit 1 510,50 euros HT, 80% de la main d''uvre pour fabrication, soit 8 640 euros HT et 50 % de la pose de l'ensemble, soit 1 800 euros HT. Ils chiffrent ainsi le montant de leur préjudice à la somme de 11 950,50 euros HT, soit 14 340,60 euros TTC.

Sans qu'il ne soit nécessaire de se prononcer sur la pertinence des calculs opérés par les intimés, il y a lieu de retenir que le préjudice lié à la surfacturation du billot ne saurait correspondre au prix complet du billot, mais uniquement à la différence de prix entre le billot tel qu'il a été réalisé et celui qui avait été prévu au contrat.

Or, force est de constater que M. et Mme [O] ne produisent aucun élément permettant de déterminer cette différence de prix.

Pour autant, le juge qui constate l'existence d'un préjudice ne peut débouter la victime de sa demande en indemnisation au motif qu'elle ne produit pas les éléments permettant de procéder à son estimation.

Ce préjudice sera donc estimé à la somme de 2000 €.

Sur la reprise du billot

L'expert judiciaire a constaté « différentes fissures allant de 1 à 2,5 mm sur le plan de travail, ainsi qu'une inflexion ['] Le panneau support, en aggloméré, résiste mal à la traction. Il a pu se déformer sans retrouver son état initial »

La société [Adresse 8] ne conteste pas l'existence des désordres relatifs au billot. Elle estime cependant que la seule solution pérenne est le remplacement du billot par un plan en céramique pour un coût de 2 694,85 euros TTC.

M. et Mme [O] sollicitent l'allocation de la somme de 3 320 euros au titre de la reprise du billot, conformément au devis qu'ils ont fourni lors de l'expertise.

L'expert judiciaire a considéré que « les désordres constatés sur le plan de travail semblent difficiles à reprendre, dans la mesure où le panneau support ['] a pu se déformer et qu'il n'y aura pas de garantie de tenue dans le temps. Il sera donc nécessaire de remplacer l'ensemble du plan. Cependant, un phénomène identique pourra de nouveau intervenir si l'ensemble des bois sur champs n'est pas correctement ceinturé ».

Le devis produit par M. et Mme [O], portant sur la dépose et le remplacement du plan de travail, est conforme aux travaux préconisés par l'expert judiciaire. L'avis non étayé de la société appelante, selon lequel cette solution ne serait pas pérenne, ou en tous les cas moins pérenne que la sienne, n'est pas de nature à exclure ce devis.

Il sera donc fait droit à la demande de M. et Mme [O] à hauteur de 3 320 euros au titre de la reprise du billot.

***

Au regard de l'ensemble de ces éléments, M. et Mme [O] restent à devoir à la société L'Atelier du [Adresse 7] la somme de 15 548 euros (solde de la facture réclamé par la société appelante et non contesté par les intimés) - 100 euros (rebouchage du trou au plafond) - 78,45 euros (accessoires du four manquants) - 2 000 euros (surfacturation du billot) - 3 320 euros (reprise du billot) = 10 049,55 euros.

Infirmant le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement M. et Mme [O] à verser à la société L'Atelier du [Adresse 7] la somme de 7 748,85 euros au titre du paiement du solde des travaux et ordonné la compensation entre les sommes dues par chacune des parties, si bien que la créance de la société L'Atelier du [Adresse 7] sur M. et Mme [O] a été ramenée à la somme de 3 748,85 euros avant déduction des frais irrépétibles, il convient de condamner les intimés à payer à la société appelante la somme de 10 049,55 euros au titre du solde des travaux, avec intérêts au taux légal à compter du 26 février 2021, date de la mise en demeure, jusqu'à la consignation complète du prix, puis à compter du prononcé du présent arrêt.

Sur la demande en dommages-intérêts pour préjudice de jouissance

Les parties font grief au jugement attaqué d'avoir condamné la société [Adresse 8] à verser à M. et Mme [O] la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance.

M. et Mme [O] demandent à la cour de condamner la société appelante à leur verser la somme de 5 000 euros à ce titre.

Ils soutiennent que plus de quatre ans après les travaux, ils ne peuvent toujours pas utiliser correctement leur cuisine, précisant que le plan de travail ne tient plus la plaque de cuisson, de sorte qu'ils sont contraints de cuisiner sur un seul feu.

Les intimés n'apportent aucune pièce pour démontrer le dysfonctionnement de la plaque de cuisson.

Il doit néanmoins être retenu qu'ils ne peuvent pas jouir aussi complètement de leur cuisine au regard de la déformation du plan de travail que si elle n'avait pas été affectée de désordres.

Contrairement à ce que tend à faire valoir la société L'Atelier du [Adresse 7], le fait que l'expert judiciaire n'ait pas mentionné l'existence d'un préjudice de jouissance dans son rapport n'empêche pas la cour de retenir son existence.

Au demeurant, il n'est pas démontré que M. et Mme [O] auraient commis une faute ayant contribué à la survenance de leur dommage en empêchant la résolution du litige par le refus d'accès à leur domicile.

Eu égard à la nature des désordres retenus et à la durée du préjudice de jouissance, il convient souverainement d'estimer ce dernier à la somme de 2 000 euros.

Infirmant le jugement entrepris de ce chef, la société L'Atelier du [Adresse 7] sera condamnée à payer cette somme à M. et Mme [O].

Il convient en outre d'ordonner la compensation judiciaire entre les sommes auxquelles les parties sont réciproquement tenues.

Sur la demande en dommages-intérêts au titre du retard de paiement

La société L'Atelier du [Adresse 7] fait grief au jugement attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant à condamner solidairement M. et Mme [O] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Elle soutient que le solde de la facture était dû dès la réception du chantier, soit le 21 janvier 2021, et que ce retard pris dans le paiement des sommes dues lui cause un préjudice constitué par une privation de trésorerie la mettant financièrement en difficulté.

La société appelante échoue cependant à démontrer l'existence d'un préjudice qui ne serait pas déjà réparé par l'allocation d'intérêts moratoires sur les condamnations prononcées, l'attestation de son expert-comptable relative à sa situation financière entre le 1er mars 2024 et le 28 février 2025 n'établissant au demeurant qu'une « situation financière ['] tendue » en raison de la baisse de la trésorerie « du fait de dettes financières à rembourser plus élévé[es] que la capacité d'autofinancement », sans mention d'un quelconque lien de causalité avec la facture impayée de janvier 2021.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société L'Atelier du [Adresse 7] de sa demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

L'expertise judiciaire ayant été rendue nécessaire par l'existence de désordres que la société [Adresse 8] s'est refusée à reprendre de manière amiable, il est équitable de laisser les frais d'expertise à son entière charge.

Le jugement entrepris est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance.

Les parties succombant partiellement en leurs demandes respectives, elles conserveront la charge de leurs propres dépens exposés en cause d'appel.

L'issue de la procédure et l'équité commandent de les débouter de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL L'Atelier du Faubourg-Valmon tendant à voir condamner M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] à des dommages-intérêts pour retard de paiement, et en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais de procédure,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] relative aux désordres affectant la peinture de la porte d'entrée,

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] relative aux désordres affectant la peinture de la rampe de spots,

CONDAMNE M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] à payer à la SARL L'Atelier du [Adresse 7] la somme de 10 049,55 euros au titre du solde des travaux, avec intérêts au taux légal à compter du 26 février 2021 jusqu'à la consignation complète du prix, puis de nouveau à compter du prononcé du présent arrêt,

CONDAMNE la SARL L'Atelier du [Adresse 7] à payer à M. [M] [O] et Mme [P] [C] épouse [O] la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

ORDONNE la compensation entre les sommes dues par chacune des parties,

LAISSE à chacune des parties la charge de ses propres dépens d'appel,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

L'arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président, et par S. MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

S. MAGIS O. CLEMENT

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