CA Montpellier, 1re ch. B, 2 novembre 2010, n° 09/07164
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
SAS UNIPERSONNELLE CLARINS FRANCE
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Desaint-Denis
Conseiller :
Mme Bresdin
Conseiller :
M. Andrieux
Avocats :
SCP SALVIGNOL - GUILHEM, Me Nougaret
Avocats :
SCP JOUGLA - JOUGLA, Me De La Grange
FAITS ET PROCEDURE
Par contrat en date du 24 SEPTEMBRE 2004, la S.A.S. CLARINS FRANCE a accordé à la SARL ALPHA représentée par son gérant, M. ARNAL, une aide financière de 40.000 €, destinée à financer son développement. La convention contenait une clause de restitution au plus tard au 31 décembre 2006 si le montant cumulé des commissions et remises était inférieur à 40.000 €et aussi si M. ARNAL n'était plus le gérant, auquel cas la somme devenait immédiatement exigible.
M. Michel ARNAL a cessé ses fonctions de gérant à compter du 29 octobre 2004.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 12 décembre 2006, la Société ALPHA et M. ARNAL ont été mis en demeure de payer la somme de 40.000 € par la Société CLARINS FRANCE.
Par lettre du 15 décembre 2006, M. ARNAL rappelait ses relations personnelles avec M. BERCERON de la Société CLARINS FRANCE ayant conduit à la signature du contrat du 24 septembre 2004 et lui demandait d'agir par priorité à l'encontre de la Société ALPHA toujours in bonis.
Après une procédure en recouvrement de créance devant le Tribunal de commerce et une tentative d'exécution infructueuse à l'encontre de la Société ALPHA, par acte d'huissier en date du 31 octobre 2007, la Société CLARINS FRANCE a fait citer M. ARNAL aux fins de le voir condamner à lui payer la somme de 40.000 € augmentée des intérêts au taux légal, outre une somme de € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par le jugement entrepris en date du 7 octobre 2009, le Tribunal de grande instance de MONTPELLIER a : Condamné M. Michel ARNAL à payer à la S.A.S. CLARINS FRANCE la somme de 40.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2006, date de la réception de la mise en demeure.
Par déclaration en date du 23 octobre 2009, M. Michel ARNAL a interjeté appel à l'encontre de cette décision. Par conclusions en date du 24 septembre 2010, il demande à la Cour de : Débouter la Société CLARINS FRANCE de sa demande et de la condamner à lui payer 10.000 € à titre de dommages-intérêts, outre 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conclusions en date du 10 mai 2010, la S.A.S. CLARINS FRANCE, intimée, demande à la Cour de : Confirmer le jugement entreprise et de lui allouer une somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Selon le contrat en date du 24 septembre 2004, la Société CLARINS FRANCE a consenti une avance sur commissions de 40.000 € à la Société ALPHA représentée par M. ARNAL, gérant et associé majoritaire qui devait être impérativement prélevée par CLARINS FRANCE au plus tard le 31 décembre 2006.
Il était expressément convenu en termes clairs et dépourvus de toute équivoque dans l'article 3 que 'Dans l'éventualité où le montant cumulé des commissions et remises ne permettant pas d'opérer le remboursement de l'avance la société ALPHA et M. Michel ARNAL s'engagent conjointement et solidairement à rembourser à CLARINS les sommes restant éventuellement dues au titre de l'avance sur commissions, consentie et ce, au plus tard le 31 décembre 2006 ...; Et à l'article 4 que 'Il est expressément arrêté entre les parties que dans le cas où M. ARNAL ne serait plus le dirigeant d'ALPHA, le remboursement intégral de la somme consentie à l'article 1 sera immédiatement exigible dans les conditions de l'article 3 et si ALPHA tenait à faire l'objet d'une procédure collective, M. Michel ARNAL sera personnellement tenu à rembourser à CLARINS la somme due, ce à quoi il s'engage.'
Après la cessation de ses fonctions de gérant par M. Michel ARNAL et malgré le terme prévu à la convention pour au plus tard le 31 décembre 2006, la Société CLARINS FRANCE n'a pas obtenu le remboursement de sa créance à la suite de sa lettre de mise en demeure adressée à la Société ALPHA et à M. ARNAL le 12 décembre 2006 ; elle a donc fait citer la Société ALPHA devant le Tribunal de commerce de NANTERRE en remboursement de la somme de 40.000 € augmentée des intérêts au taux légal, ainsi que l'y invitait M. ARNAL dans sa lettre du 15 décembre 2006 sans remettre en cause son engagement à paiement consenti en faveur de la Société CLARINS FRANCE représentée par M. BARCELON,
directeur général qui lui avait accordé cette aide en considération de leurs relations personnelles.
Par ordonnance du 10 avril 2007, signifiée le 27 avril 2007, la Société ALPHA a été condamnée à payer à la Société CLARINS FRANCE la somme de 40.000 francs avec les intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2005, outre une somme de 700 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Cependant, les mesures d'exécution ont été vaines : le commandement aux fins de saisie vente signifié le 3 mai 2007 s'est avéré infructueux et le procès-verbal de saisie vente a été transformé en procès-verbal de carence, les locaux étant en cours de déménagement le 30 juillet 2007.
La Société CLARINS FRANCE admet ne pas avoir déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la Société ALPHA, procédure collective ouverte par un jugement du Tribunal de commerce de NANTERRE du 15 septembre 2008, mais ce défaut de déclaration de créances n'emporte plus extinction de la créance de la Société CLARINS FRANCE au regard des dispositions de l'article L. 622-26 nouveau du Code de commerce ; M. Michel ARNAL ne rapporte pas la preuve en l'espèce de l'existence d'un préjudice en lien de causalité avec ce défaut de déclaration de la créance.
Le recouvrement à l'encontre de la Société ALPHA en liquidation judiciaire s'avérant infructueux, la Société CLARINS FRANCE a dirigé les poursuites à l'encontre de M. Michel ARNAL solidairement tenu au paiement de la dette selon les termes exprès du contrat du 24 septembre 2004 qu'il a signé, et plus particulièrement des articles 3 et 4 ci-dessus rapportés où il s'est expressément personnellement engagé à payer la somme avancée par la Société CLARINS à la Société ALPHA.
Même si l'acte ne mentionne pas expressément le terme 'caution', M. Michel ARNAL a manifesté clairement sa volonté de garantir le paiement de la dette: les mentions expresses de l'acte où, par deux fois, il s'est engagé personnellement au remboursement de la dette de la Société ALPHA, sont corroborées par les éléments extrinsèques à l'acte : sa qualité de gérant lui permettant de connaître parfaitement la situation de la société débitrice principale, son intérêt à la dette en tant qu'associé fondateur et détenteur de plus de 33% du capital social ; il s'est engagé librement et en toute connaissance de cause pour la garantie de la somme empruntée par la Société ALPHA en tant que caution solidaire ainsi qu'il est établi dans les conditions des dispositions de l'article 1326 du Code civil.
Par ailleurs, l'appelant ne peut pas remettre en cause la validité du cautionnement qu'il a souscrit en invoquant les dispositions des articles L. 341-2 et suivants du Code de la consommation : la Société CLARINS FRANCE, professionnel de la cosmétique, n'a consenti cette aide financière qu'isolément et à titre exceptionnel, en considération des relations personnelles existant entre M. BARCELON son directeur général et M. ARNAL, gérant de la
Société ALPHA : ce fort intuitu personae se traduit par le terme anticipé du contrat expressément convenu par les parties dans le cas où M. ARNAL quitterait ses fonctions de gérant. Dans sa lettre du 15 décembre 2006, ce dernier a d'ailleurs rappelé les relations personnelles ayant présidé à la signature de la convention et a remercié M. BARCELON pour son aide.
Dès lors M. ARNAL n'est pas fondé à solliciter l'annulation de son engagement motif pris de l'absence du respect du formalisme prescrit à l'article L. 341-2 du Code de la Consommation qui ne s'imposait pas pour la Société CLARINS FRANCE qui n'est pas un créancier professionnel.
Pas plus qu'en première instance, l'appelant ne démontre une inexécution de bonne foi de ses obligations par la Société CLARINS: l'attestation d'un seul franchisé, Mme BRES, n'est pas suffisamment circonstanciée ni étayée par des pièces justificatives, elle est inopérante à établir un refus qu'aurait opposé CLARINS FRANCE pour accorder des agréments aux adhérents du réseau ALPHA BEAUTE ; de même les doubles de courriers sans en-tête ni signature de la Société ALPHA, produits par l'appelant qui ne peut pas se constituer une preuve à lui-même, ne sont pas de nature à expliquer le défaut de paiement et la carence de la Société ALPHA et de M. ARNAL dans l'exécution de la convention faisant la loi des parties.
Il apparaît ainsi que la Société CLARINS FRANCE justifie à l'encontre de M. ARNAL pris en sa qualité de caution solidaire de la Société ALPHA en liquidation judiciaire, d'une créance liquide, certaine et exigible à la suite de la cessation de ses fonctions de gérant et de la mise en demeure de payer qu'il a reçue le 15 décembre 2006 ; sur le quantum de la créance, il y a lieu de rejeter la demande de production de documents complémentaires formée par l'appelant, la Cour s'estimant suffisamment informée pour statuer sur le litige qui lui est soumis au vu des éléments d'appréciation qui sont au débat, notamment avec la condamnation de la débitrice principale au paiement de la somme de 40.000 € en principal et intérêts, antérieurement à la liquidation judiciaire, par ordonnance du Président du Tribunal de commerce de MONTPELLIER en date du 10 avril 2007 non frappée d'appel.
En conséquence, le jugement attaqué est confirmé en ce qu'il condamne M. Michel ARNAL à payer à la Société CLARINS FRANCE la somme de 40.000 € en principal et intérêts à compter du 15 décembre 2006, date de la réception de la mise en demeure de payer du 12 décembre 2006.
M. Michel ARNAL qui succombe en son appel, est débouté de sa demande de dommages-intérêts.
L'équité commande d'allouer à la Société CLARINS FRANCE la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
REÇOIT l'appel interjeté par M. Michel ARNAL,
Le DIT mal fondé,
CONFIRME le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
CONDAMNE M. Michel ARNAL à payer à la S.A.S. CLARINS FRANCE la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
REJETTE toutes autres demandes des parties,
CONDAMNE M. Michel ARNAL aux dépens avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.