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Décisions

CA Rennes, 5e ch., 27 mars 2013, n° 12/00065

RENNES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

SCI LE COUEDIC

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Laurent

Conseiller :

Mme Le François

Conseiller :

Mme D'ardailhon Miramon

Avocat :

SCP BREBION CHAUDET

Avocats :

Me Daugan, Me Hamon

CA Rennes n° 12/00065

26 mars 2013

Par acte sous seing privé du 2 mai 2006 les consorts LE COUEDIC ont consenti à la SARL L.B.L.G. un bail commercial portant sur un local situé dans le bâtiment n° 1 d'un ensemble immobilier sis [...] pour une durée de 9 années entières à compter du 2 mai 2006, moyennant un loyer annuel initial hors taxes de 13.800 €.

M. Alain Le Brusq, gérant de la société preneuse, a apposé au bas de la dernière page du bail la mention suivante : 'Bon pour caution solidaire à concurrence de 30.000 euros trente mille euros pour toutes les sommes dues par le preneur'.

Par jugement du 18 avril 2010 la SARL L.B.L.G. a été placée en liquidation judiciaire, la SCP Gérard Bodelet étant désignée mandataire à la liquidation judiciaire.

Les consorts Le Couedic ont déclaré leur créance constituée de loyers impayés, taxes foncières et pénalités de retard à hauteur de 11 194,88 euros.

Par ordonnance du 9 décembre 2010 le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes a condamné le liquidateur à payer la somme de 10 501,39 euros au titre des loyers dus après le prononcé de la liquidation judiciaire.

Par jugement réputé contradictoire du 22 novembre 2011 le tribunal de grande instance de Vannes a condamné M. Le Brusq, au titre du cautionnement, à payer aux consorts Le Couedic la somme de 11 194,88 euros et in solidum M. Le Brusq et la SCP Bodelet celle de 15 053,96 euros à titre de loyers et indemnité d'occupation.

M. Le Brusq, qui n'avait pas comparu en première instance, a fait appel de cette décision.

Il a intimé l'ensemble des parties outre la SCI Le Couedic.

En dehors de questions de procédure il fait valoir au fond que le cautionnement ne respecte pas les dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation alors que les consorts Le Couedic sont des bailleurs professionnels et conclut à la nullité du cautionnement et au débouté.

Subsidiairement il demande un délai de paiement de deux ans.

Les conclusions déposées et les pièces communiquées après la clôture par les consorts Le Couedic sans qu'aucune cause grave soit invoquée sont irrecevables.

Ils font valoir que l' appel formé contre la SCI qui n'était pas partie en première instance est irrecevable.

Ils soutiennent que le cautionnement est valable dès lors qu'il ne sont pas des créanciers professionnels et ne sont pas des prêteurs de deniers de sorte que les textes invoqués par M. Le Brusq ne s'appliquent pas à eux.

Subsidiairement ils demandent que l'acte de cautionnement solidaire soit requalifié en cautionnement simple.

Ils demandent la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts.

La SCP Bodelet, à qui la déclaration d' appel et les conclusions de M. Le Brusq ont été signifiées à personne habilitée le 5 avril 2012, n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties la cour renvoie au jugement attaqué et aux dernières écritures reçues le 4 décembre 2012 pour l'appelant et le 3 décembre 2012 pour les intimés.

SUR CE

Considérant que l'article 547 du code de procédure civile dispose qu'en matière contentieuse, l' appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties en première instance ;

Que la SCI Le Couedic n'était pas partie en première instance ;

Que l' appel dirigé contre elle est irrecevable ;

Que, dès lors que c'est elle cependant qui a fait signifier le jugement par acte du 8 décembre 2011, il était justifié que M. Le Brusq l'intime par précaution ;

Qu'elle conservera la charge de ses dépens ;

Que pour ces mêmes raisons les consorts Le Couedic qui ont fait signifier le jugement qui leur profitait par la SCI Le Couedic seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts pour avoir fait naître l'ambiguïté dont ils se plaignent ;

Considérant que la demande de M. Le Brusq de voir prononcer la nullité de l'acte de cautionnement ne constitue pas une prétention mais un moyen tendant à faire écarter les prétentions adverses comme tel recevable ; qu'en outre, M. Le Brusq n'ayant pas comparu devant le premier juge, n'a formé aucune demande en première instance et ne peut donc former de demande nouvelle en appel ;

Considérant que le bail enregistré a été conclu entre M. et Mmes Rémy, Anne-Marie, Françoise et Isabelle Le Couedic et la société LBLG ;

Qu'on doit supposer que le gérant de cette dernière connaît le nom de ses bailleurs même s'ils ont, par erreur, fait signifier le jugement par la SCI dont ils sont également membres ;

Considérant que les articles L. 341-2 et L. 341-3 disposent que :

Article L. 341-2

Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même" ;

Article L341-3

Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X..." ;

Considérant que toute personne physique, qu'elle soit ou non avertie, doit, dès lors qu'elle s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel, faire précéder sa signature, à peine de nullité de son engagement, qu'il soit commercial ou civil, des mentions manuscrites exigées par les textes susvisés ;

Qu'il est admis que le créancier professionnel n'est pas seulement le prêteur de deniers mais s'entend de tout créancier dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n'est pas principale ;

Qu'en l'espèce il résulte du plan annexé au bail que le local qui a été loué fait partie d'un ensemble de quatre bâtiments appartenant aux consorts Le Couedic loués à usage industriel ou commercial ;

Que M. Rémy Le Couedic, copropriétaire et usufruitier, est inscrit au registre du commerce et des sociétés depuis le 1er janvier 1978 sous la forme juridique d'une affaire personnelle avec une mention d'activité de location de terrains et d'autres biens immobiliers, son siège social étant situé à la même adresse que le bien litigieux ;

Qu'il importe peu qu'il exerce une activité exclusivement civile de mise en location de locaux nus, ne louant pas de locaux meublés, n'étant pas soumis à l'impôt sur les sociétés, n'octroyant pas de crédit et n'effectuant aucun acte réputé acte de commerce ;

Que, seul bénéficiaire des revenus des locations en sa qualité d'usufruitier, les autres consorts Le Couedic étant seulement nus-propriétaires, M. Rémy Le Couedic doit être considéré comme un créancier professionnel ;

Considérant que le cautionnement de M. Le Brusq rédigé comme rappelé ci-dessus 'Bon pour caution solidaire à concurrence de 30.000 euros trente mille euros pour toutes les sommes dues par le preneur' est contraire aux dispositions d'ordre public de code de la consommation et ne peut valoir ni à titre de cautionnement solidaire ni à titre de cautionnement simple ;

Que c'est à bon droit que M. Le Brusq en demande la nullité ; PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt réputé contradictoire en audience publique,

Dit irrecevables les conclusions et pièces déposées et communiquées le 24 décembre 2012.

Dit irrecevable l' appel formé par M. Alain Le Brusq à l'encontre de la SCI Le Couedic.

Met les dépens de cet appel à la charge de la SCI Le Couedic.

Infirme le jugement.

Déboute les consorts Le Couedic de leurs demandes.

Y ajoutant les déboute de leur demande de dommages-intérêts.

Vu l'article 700 du code de procédure civile dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure.

Condamne les consorts Le Couedic aux dépens autres que ceux laissés à la charge de la SCI Le Couedic.

Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

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