CA Caen, 2e ch. civ. et com., 16 janvier 2014, n° 12/02812
CAEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT MARITIME MUTUEL BRETAGNE NORMANDIE
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Christien
Conseiller :
Mme Beuve
Conseiller :
Mme Boissel Dombreval
Avocat :
SCP CREANCE FERRETTI HUREL
Avocat :
Me Baugas
Monsieur Sadi Ozdamar s'est, par acte sous seing privé du 29 mai 2009, porté caution solidaire à hauteur de 15 000 € des engagements de l'EURL Annem résultant d'un prêt professionnel de 30 000 € consenti par la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie.
Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 11 mai 2011 à l'égard de l'EURL Annem, la liquidation judiciaire étant prononcée le 22 juin 2011.
La Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie a, par acte du 22 avril 2011, fait assigner monsieur Sadi Ozdamar aux fins de condamnation, en qualité de caution solidaire, au paiement de la somme de 15 000 € outre les intérêts.
Ce dernier, à titre principal, a excipé de la nullité du cautionnement.
Vu le jugement rendu le 24 juillet 2012 par le tribunal de grande instance de Caen faisant droit aux prétentions de la banque et rejetant les demandes reconventionnelles de monsieur Sadi Ozdamar.
Vu les conclusions déposées au greffe pour :
- monsieur Sadi Ozdamar, appelant, le 29 mars 2013
- la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie, intimée, le 13 septembre 2013
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 16 octobre 2013.
MOTIFS
- Sur la validité du cautionnement
L'appelant soutient que la mention manuscrite comportant un
ajout ayant une incidence sur la compréhension de l'acte et son engagement, le cautionnement est nul en application de l'article L341-2 du Code de la consommation.
L'ajout dont fait état l'appelant porte sur le montant du cautionnement, la mention manuscrite étant à cet égard la suivante 'en me portant caution de l'EURL Annem dans la limite de la somme de 15.000 € quinze mille euros couvrant 50 % du paiement du prêt du principal des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard '.
Il y est donc précisé que le montant du cautionnement, soit 15 000 €, correspond à 50% du principal du prêt.
Le premier juge a, par des motifs pertinents que la Cour adopte, retenu que cette indication n'affectait ni le sens ni la portée de la mention manuscrite.
Il suffit de relever en outre que cet ajout, cohérent et non sujet à interprétation, n'altère pas la compréhension de la mention.
Les dispositions ayant rejeté la demande d'annulation sont donc confirmées.
- Sur la demande de décharge
L'appelant reproche au premier juge de ne pas avoir fait droit
au moyen tiré des dispositions de l'article L341-4 du Code de la consommation alors que son engagement était manifestement disproportionné par rapport à ses revenus eu égard à ses charges.
Monsieur Sadi Ozdamar et son épouse, gérante de l'EURL Annem, ont signé, en vue de l'obtention du prêt et de l'engagement de caution, une fiche patrimoniale dont l'appelant ne conteste pas qu'elle est la transcription de ses déclarations.
Il y est notamment indiqué que les époux Sadi Ozdamar ont un patrimoine immobilier d'une valeur de 670 000 € avec une charge d'emprunt de 170 000 € et des liquidités pour 50 000 €.
Il résulte suffisamment de ces seuls éléments, indépendamment des revenus annuels déclarés par monsieur Sadi Ozdamar pour 48 000 €, que l'engagement de caution à hauteur de 15 000 € n'est pas disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution.
L'appelant fonde également sa demande de décharge sur les dispositions de l'article 2314 du Code civil.
Il est constant que la banque qui bénéficiait d'un nantissement sur le fonds de commerce n'a pas déclaré sa créance.
Il appartient à la banque de démontrer que la perte par la caution des droits pouvant lui être transmis par subrogation n'a pas causé de préjudice à monsieur Sadi Ozdamar.
En l'espèce, la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie produit un courrier circonstancié émanant de maître Lize, mandataire liquidateur de l'EURL Annem, en date du 4 juin 2013, faisant état des éléments suivants :
- à la date d'ouverture de la procédure collective, le fonds de commerce n'existait plus suite à la résiliation du bail plusieurs mois auparavant
- le matériel retrouvé, constituant le seul actif, a été vendu pour 1 112 €
- le superprivilège des salaires était bien supérieur à l'actif qui n'a pas même permis de régler les frais de procédure.
Monsieur Sadi Ozdamar qui est l'époux de la dirigeante de l'EURL Annem, ne conteste pas précisément ces éléments.
Le manquement imputé à la banque n'ayant causé aucun préjudice à la caution du fait de l'inefficacité de la subrogation à raison de l'irrecouvrabilité de la créance de la banque, la demande de monsieur Sadi Ozdamar fondée sur l'article 2314 du Code civil a été à juste titre rejetée.
- Sur la créance de la banque
L'appelant critique la décision déférée qui l'a condamné au
paiement de la somme de 15 000 € en faisant valoir qu'il ne peut être tenu qu'à hauteur de 50% des sommes payées au titre du prêt ou à tout le moins 50% des sommes restant dues.
Il ajoute qu'en tout état de cause, la banque est déchue de son droit aux intérêts et pénalités.
Ces moyens sont les mêmes qu'en première instance
Le premier juge qui a exactement écarté les interprétations erronées de monsieur Sadi Ozdamar et rappelé que la dette de l'EURL Annem s'élevait au 1er février 2012 à 30 433,20 € dont 24 656,72 € en capital, a, par des motifs pertinents que la Cour adopte, à juste titre rejeté les moyens de la caution et l'a condamné au paiement de la somme de 15 000 € outre les intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2010.
- Sur la demande reconventionnelle
Monsieur Sadi Ozdamar conteste les dispositions ayant
rejeté sa demande en paiement d'une somme équivalente à celle restant due à la banque.
Il soutient que celle-ci a manqué à son obligation de mise en garde en accordant un prêt destiné à créer un fonds de commerce dont les conditions financières d'exploitation n'étaient pas viables.
Monsieur Sadi Ozdamar qui exploitait à la date de l'engagement de caution une entreprise de maçonnerie et dont il n'est pas justifié qu'il ait eu des connaissances particulières concernant le secteur de la restauration n'était pas une caution avertie.
Mais le premier juge qui a exactement déduit des pièces produites par l'EURL Annem à l'appui de sa demande de prêt que le projet de création du fonds de commerce était économiquement viable, a, par des motifs pertinents que la Cour adopte, retenu que la banque n'avait pas accordé à la société un crédit excessif ou inadapté.
Monsieur Sadi Ozdamar, en l'absence de faute de la banque dans l'octroi du crédit et de risque d'endettement, est infondé à se prévaloir d'un manquement au titre de l'obligation de mise en garde.
Les dispositions ayant rejeté sa demande indemnitaire sont donc confirmées.
- Sur les autres demandes
La demande de délais fondée sur l'article 1244-1 du Code
civil, a été à juste titre rejetée, les revenus dont fait état monsieur Sadi Ozdamar ne lui permettent pas de régler sa dette dans le délai de deux années et aucune perspective d'évolution à court terme n'étant évoquée.
Partie succombante, monsieur Sadi Ozdamar supporte les dépens d'appel et ne peut bénéficier des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Il doit, en revanche, régler sur ce fondement à la Caisse
Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie qui a exposé des frais irrépétibles en cause d'appel, une indemnité complémentaire qu'il est équitable de fixer à la somme de 1000 €.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement.
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions.
Y AJOUTANT
Condamne monsieur Sadi Ozdamar à régler à la Caisse Régionale de Crédit Maritime Mutuel Bretagne Normandie une indemnité complémentaire de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Déboute monsieur Sadi Ozdamar de sa demande présentée sur ce même fondement.
Condamne monsieur Sadi Ozdamar aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.