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Décisions

CA Aix-en-Provence, Pôle 3 ch. 4, 27 février 2020, n° 17/11151

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

FONDS COMMUN DE TITRISATION HUGO A C

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bourrel

Conseiller :

Mme Fillioux

Conseiller :

Mme Farssac

Avocat :

Me Rede Tort

Avocat :

Me Scandolera

CA Aix-en-Provence n° 17/11151

26 février 2020

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL Bouc location aménagement (ci après B. L.A.) a ouvert en 2000 un compte courant dans les livres de la SA Crédit Lyonnais.

Suivant acte sous seing privé du 2 janvier 2009, M. X Y s'est porté caution solidaire des engagements de la SARL B. L.A. envers la SA Crédit Lyonnais, dans la limite de 14 300 euros, pour une durée de10 ans.

Le 16 janvier 2009, la SA Crédit Lyonnais a consenti à la SARL B. L.A. un prêt de 10 000 euros pour l'achat de matériel, remboursable au taux de 5,90 % par an, en 60 mensualités de 195,33 euros.

Le 21 avril 2009 la banque lui a, aux mêmes fins, consenti un prêt de 6 000 euros, au taux de 5,20 % par an, remboursable en 60 mensualités de 115,25 euros.

La SA Crédit lyonnais a par lettres recommandées avec demande d'avis de réception en date du 21 septembre 2010 mis en demeure la SARL B. L.A. de couvrir sous huitaine le solde débiteur de son compte courant de 12 546,41 euros et de régulariser les échéances impayées de prêts, sous quinzaine, à peine de déchéance du terme. Elle a, le même jour et dans les mêmes formes, mis en demeure M. Y, en sa qualité de caution, de payer les sommes dues et rendues exigibles, dans la limite de la somme de 14 300 euros sous un délai de quinzaine.

Suivant jugement en date du 6 janvier 2011 le tribunal de commerce d'Aix En Provence a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la société B. L.A.. Cette procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par jugement en date du 4 novembre 2011.

La SA Crédit lyonnais a, le 27 janvier 2011, déclaré entre les mains du liquidateur :

- une créance de 8 384,43 euros au titre des échéances impayées, du capital restant dû et de l'indemnité forfaitaire du prêt de 10 000 euros,

- une créance de 5 271,82 euros au titre des échéances impayées, du capital restant dû et de l'indemnité forfaitaire du prêt de 60 000 euros,

- une créance de 12 546,41 euros au titre du solde débiteur du compte courant.

Elle a, le même jour, mis en demeure M. Y de lui régler ces sommes dans la limite de son engagement de caution de 14 300 euros.

La SA Crédit lyonnais a, suivant bordereau de cession de B contenant cession d'un portefeuille de B sous seing privé en date du 6 juillet 2012, dont une expédition a été déposé au rang des minutes d'un office notarial le même jour, notamment cédé les B détenues sur la société B. L.A. au Fonds commun de titrisation 'Hugo B C' représenté par la société de gestion GTI Asset management.

M. Y a été informé de cette cession par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 11 décembre 2013.

Le Fonds commun de titrisation 'Hugo B C' représenté par la société de gestion GTI Asset management, venant aux droits de la SA Crédit lyonnais a, par exploit en date du 31 octobre 2016 fait assigner M. X Y devant le tribunal de commerce pour le voir condamné à lui payer, avec exécution provisoire, les sommes de :

- au titre du solde débiteur du compte, la somme de 12 911,30 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016, outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement,

- au titre du prêt de 10 000 euros à l'origine, la somme de 8 628,28 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016 outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement,

- au titre du prêt de 6 000 euros à l'origine, la somme de 5 425,14 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016 outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement, soit au total la somme de 26 964,72 euros, dans la limite de la somme de 14 300 euros conformément à son engagement souscrit le 02 janvier 2009, ainsi qu'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 22 mai 2017 le tribunal de commerce d'Aix En Provence a :

- prononcé la nullité de l'engagement de caution souscrit le 2 janvier 2009 par M. X Y au profit du Fonds commun de titrisation 'Hugo B C',

- rejeté, en conséquence, l'ensemble des demandes du Fonds commun de titrisation 'Hugo B C',

- condamné le Fonds commun de titrisation 'Hugo B C' à payer à M. X Y une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de l'instance, qui comprennent notamment le coût des frais de greffe liquidés à la somme de 66,70 euros.

L'organisme Fonds commun de titrisation 'Hugo B C' représenté par la société de gestion GTI Asset management a relevé appel de cette décision par déclaration du 13 juin 2017.

Aux termes de ses uniques conclusions remises au greffe et notifiées le 11 août 2017 le Fonds commun de titrisation 'Hugo B C' demande à la cour de :

Vu les articles 1134 et suivants du Code Civil,

Vu l'article 1153 du Code Civil,

Vu la jurisprudence visée,

- réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu en date du 22 mai 2017 par le tribunal de commerce d'Aix en Provence,

- dire et juger que le cautionnement solidaire souscrit par M. X Y conserve sa pleine validité avec toutes les conséquences de droit qui s'y rattachent,

- débouter M. X Y de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence :

- condamner M. X Y, en sa qualité de caution solidaire de la SARL Bouc location aménagement « BLA » à payer au Fonds commun de titrisation « Hugo B C», représenté par sa société de gestion GTI asset management, venant aux droits de la société le Crédit lyonnais les sommes suivantes :

- au titre du solde débiteur du compte, la somme de 12 911,30 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016, outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement,

- au titre du prêt de 10 000 euros à l'origine, la somme de 8 628,28 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016 outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement,

- au titre du prêt de 6 000 euros à l'origine, la somme de 5 425,14 euros, selon décompte de créance arrêté au 26 octobre 2016 outre intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement, soit au total la somme de 26 964,72 euros, dans la limite de la somme de 14 300 euros conformément à son engagement souscrit le 02 janvier 2009,

Subsidiairement, condamner M. X Y à payer au Fonds commun de titrisation « Hugo B C», représenté par sa société de gestion GTI asset management les sommes suivantes :

- pour le prêt de 10 000 euros : 8 384,43 euros en principal, correspondant au montant figurant sur la déclaration de créance, outre intérêts de 243,85 euros au taux légal depuis la mise en demeure par lettre recommandée avec AR du 27 janvier 2011, soit au total la somme de 8 628,28 euros arrêtée au 26 octobre 2016,

- pour le prêt de 6 000 euros: 5 271,82 euros en principal, correspondant au montant figurant sur la déclaration de créance, outre intérêts de 153,32 euros au taux légal depuis la mise en demeure par lettre recommandée avec AR du 27 janvier 2011, soit au total la somme de 5 425,14 euros arrêtée au 26 octobre 2016,

- pour le compte courant, eu égard à l'engagement de caution limité à 14 300 euros: la couverture très partielle à hauteur de 246,58 euros ( soit 14 300 euros - 8 628,28 euros - 5 425,14 euros ) pour une créance réclamée de 12 911,30 euros, selon décompte arrêté au 26 octobre 2016,

En tout état de cause,

- condamner M. X Y à payer au Fonds commun de titrisation « Hugo B C», représenté par sa société de gestion GTI asset management la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. X Y aux entiers dépens distraits au profit de Me Nadine Chagnaud Borrelli avocat sur ses affirmations de droit (article 699 du code de procédure civile ).'

Aux termes de ses unique conclusions remises au greffe et notifiées le 21 août 2017 M. X Y demande à la cour de :

Vu l'article 1134 et suivants du code civil dans leur rédaction applicable lors des faits,

Vu les articles L.341-2 et L.341-3 du code de la consommation dans leur rédaction applicable lors des faits,

Vu la jurisprudence versée,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

A titre principal

- constater la nullité de l'acte de cautionnement à objet personnel et solidaire du 02/01/2009,

En conséquence,

- débouter le fonds commun de titrisation « Hugo B » de son appel,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

A défaut, réduire l'engagement de cautionnement aux intérêts de retard,

Dans l'hypothèse où la cour viendrait à considérer que l'acte de cautionnement n'est pas nul, il ne pourra qu'écarter les demandes formulées à l'égard de M. X Y et ne pourra que retenir la responsabilité de la banque au titre de son devoir de mise en garde ou de son devoir de conseil et d'information et de bonne foi,

- constater que M. X Y est un client non averti,

- constater que la banque ne justifie pas avoir rempli ses obligations au titre de son devoir de mise en garde,

- condamner le fonds commun de titrisation « Hugo B » à verser la somme de 14 300 euros à titre de dommages et intérêts à M. X Y qui viendront en compensation avec les sommes dues au titre de son cautionnement,

Dans l'hypothèse où la cour considérerait que M. X Y est un client averti,

- constater que la banque n'a rempli ses obligations au titre de son devoir de conseil et d'information,

- constater que la banque n'a rempli ses obligations au titre de son obligation de bonne foi contractuelle,

- condamner la banque à verser la somme de 14 300 euros à titre de dommages et intérêts à M. X Y qui viendront en compensation avec les sommes dues au titre de son cautionnement.

- constater que la banque n'a respecté son obligation d'information annuelle de la caution,

- prononcer la déchéance des intérêts échus,

En tout état de cause,

- condamner le fonds commun de titrisation « Hugo B » au paiement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2019.

MOTIFS

Sur la demande de nullité du cautionnement

L'article L.341-2 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de la conclusion du cautionnement en litige, et devenu L. 331-1 du même code, dispose :

'Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle ci :

"En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui même."'

Aux termes de l'article L.341-3 devenu L.331-2 du même code, lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : 'En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X ..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...'

Le fonds commun de titrisation 'Hugo B C' fait grief aux premiers juges d'avoir annulé l'engagement de caution de M. Z D maladresse dans le report de la mention manuscrite n'a, selon lui, pas affecté la compréhension que M. Y a eu lorsqu'il s'est engagé solidairement avec la société B. L.A.. qu'il dirigeait, pour lui permettre de bénéficier des concours bancaires qu'il avait sollicités. Il fait valoir que M. Y a entendu de manière non équivoque garantir à hauteur de 14 300 euros les engagements existants ou à venir de la société B. L.A.. Il estime invraisemblable que la caution ait pu comprendre ou cherché à exprimer que son engagement pouvait se limiter au paiement des seuls intérêts.

M. Y soutient au contraire que la mention manuscrite ne respecte pas le formalisme imposé par les dispositions du code de la consommation et que des mentions portées il ne ressort pas qu'il ait eu conscience de l'engagement pris, puisque la mention essentielle 'paiement du principal' fait défaut. Il fait valoir qu'il appartenait à la banque de s'assurer de la bonne compréhension de ses engagements par la caution et de vérifier le formalisme. Il soutient, subsidiairement, que si la nullité de l'acte n'était pas prononcée son engagement de caution devrait être limité au paiement des intérêts tel que cela ressort explicitement des mentions rédigées.

La mention manuscrite apposée le 2 janvier 2009 par M. X Y dans l'acte de caution est la suivante :

'En me portant caution de la SARL B. L.A. dans la limite de la somme de 14 300 euros couvrant le principal des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de 10 ans je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dus sur mes revenus et mes biens si la SARL B. L.A. ne se satisfait pas elle même.

En renonçant au bénéfice de discution défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec la SARL B. L.A. je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la SARL B. L.A.'

Les mentions manuscrites exigées par les articles L.341-2 et L. 341-3 du code de la consommation précitées sont destinées à assurer la protection et le consentement éclairé de la caution. Elles doivent être littéralement reproduites.

La nullité encourue, en cas de reproduction incomplète ou de différences textuelles, n'est écartée que si les irrégularités, résultant d'une erreur matérielle, ne modifient pas le sens et la portée des engagements de la caution.

Or, comme le fait valoir M. Y il ne résulte pas de la mention portée qu'il se soit engagé au 'paiement du principal'. Il ne peut être déduit de la seule présence du mot 'principal' dans la mention manuscrite que M. Y avait la conscience et l'intention de s'engager au remboursement du capital, comme allégué par le fonds commun de titrisation. Au contraire, comme le relève l'appelant lui même, l'expression 'principal des intérêts' n'est pas dotée de sens commun, et ne recouvre aucune réalité au plan juridique ni comptable, de sorte que la phrase écrite par M. Y n'a pas de sens.

Les omissions des mots 'paiement du' ainsi que de virgules, notamment entre 'principal' et 'des intérêts', et les erreurs affectant la phrase telle que rédigée par rapport à la mention exigée par les dispositions légales, ne sont pas purement matérielles. Elles démontrent l'absence de compréhension par M. Y du sens et de la portée de son engagement, ce que confirme l'expression 'si la SARL B. L.A. ne se satisfait pas elle même' figurant à la fin de la phrase.

C'est en conséquence à juste titre que le tribunal de commerce a annulé l'engagement de caution de M. Y et débouté le fonds commun de titrisation 'Hugo B C' de l'ensemble de ses prétentions. Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le fonds commun de titrisation 'Hugo B C', qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel. Ses prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront pour ce motif rejetées.

Il serait inéquitable que M. Y conserve la charge des frais non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel. Le fonds commun de titrisation 'Hugo B C' sera condamné à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité au paiement de laquelle il avait été condamné en première instance, qui sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement rendu le 22 mai 2017 par le tribunal de commerce d'Aix En Provence en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne le fonds commun de titrisation 'Hugo B C', représenté par la société de gestion GTI Asset management à payer à M. X Y la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le déboute de ses prétentions au même titre,

Condamne le fonds commun de titrisation 'Hugo B C', représenté par la société de gestion GTI Asset management aux dépens d'appel.

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