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Décisions

CA Colmar, 1re ch. A, 22 octobre 2025, n° 22/03684

COLMAR

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

C&B Patrimoine (SARL), CF et Associés (SARL)

Défendeur :

C&B Patrimoine (SARL), CF et Associés (SARL), MJ Air - DMJ (SELARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Walgenwitz

Conseillers :

M. Roublot, Mme Rhode

Avocats :

Me Wetzel, Me Chevallier-Gaschy, Me Azevedo

TJ Saverne, ch. civ., du 22 juill. 2022

22 juillet 2022

Vu l'assignation délivrée le 22'août 2018, par laquelle M.'[Z] [I] a fait citer la SARL C&B Patrimoine et Me [U] [H], aux droits duquel vient la SELARL MJ AIR - DMJ, ès qualités de mandataire judiciaire de ladite société, placée en redressement judiciaire, devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020, par application de l'article 95 de la loi n°'2019-222 du 23 mars 2019 et de ses décrets d'application n°'2019-965 et 2019-966 du 18'septembre 2019, le tribunal judiciaire de Saverne,

Vu les conclusions d'intervention volontaire de la SARL CF et Associés, datées du 24 avril 2019,

Vu le jugement rendu le 22 juillet 2022, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance et par lequel le tribunal judiciaire de Saverne a statué ainsi :

'DÉCLARE l'intervention volontaire de la S.A.R.L. CF ET ASSOCIES irrecevable ;

CONSTATE que les demandes reconventionnelles formées par Monsieur [Z] [I] contre la S.A.R.L. CF ET ASSOCIES sont devenues sans objet ;

ADMET en sa totalité la créance déclarée par Monsieur [Z] [I] contre la S.A.R.L. C&B PATRIMOINE à titre chirographaire pour un montant de soixante quinze mille neuf cent trente euros et soixante six centimes (75 930,66 euros), soit 74 774 euros en principal et 1'156,66 euros en intérêts ;

ORDONNE l'inscription de cette créance au passif de la S.A.R.L. C&B PATRIMOINE ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement ;

CONDAMNE in solidum la S.A.R.L. C&B PATRIMOINE et la S.A.R.L. CF ET ASSOCIES à payer à Monsieur [Z] [I] la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la S.A.R.L. C&B PATRIMOINE et la S.A.R.L. CF ET ASSOCIES aux dépens.'

Vu la déclaration d'appel formée par la SARL C&B Patrimoine et la SARL CF et Associés contre ce jugement et déposée le 30 septembre 2022 et la constitution d'intimé de M. [Z] [I] en date du 31 octobre 2022,

Vu l'assignation par acte du commissaire de justice délivrée à domicile le 3'janvier 2023 à la SELARL DMJ, prise en la personne de Maître [U] [H], ès qualités'de commissaire à l'exécution du plan de la SARL C&B Patrimoine, pour lui signifier la déclaration d'appel du 30 septembre 2022, le récapitulatif de la déclaration d'appel du 5 octobre 2022 et les conclusions d'appel avec bordereau de pièces du 28 décembre 2022,

Vu l'ordonnance rendue le 10'janvier 2024, sur requête de M.'[Z] [I] en date du 13'juillet 2023, par laquelle le président de chambre chargé de la mise en état a statué comme suit':

'- REJETTE la requête présentée le 13 juillet 2023 par Monsieur [Z] [I], en vue de voir déclarer irrecevable comme étant prescrite, la prétention émise par la société CF ET ASSOCIES à l'encontre de Monsieur [I], en vue d'obtenir sa condamnation à lui verser la somme de 43 266,50 euros,

- DIT que le sort des dépens de l'incident suivra celui de l'instance principale,

- REJETTE les demandes de Monsieur [Z] [I] et de la société CF ET ASSOCIES fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.'

Vu l'arrêt rendu par cette cour, sur déféré, le 23'octobre 2024 et ayant statué comme suit':

'Infirme l'ordonnance rendue le 10 janvier 2024 par le magistrat chargé de la mise en état, en ce qu'elle a :

- rejeté la requête présentée le 13 juillet 2023 par Monsieur [Z] [I], en vue de voir déclarer irrecevable comme étant prescrite, la prétention émise par la société CF ET ASSOCIES à l'encontre de Monsieur [I], en vue d'obtenir sa condamnation à lui verser la somme de 43 266,50 euros,

Et statuant à nouveau de ce chef de demande,

Dit que le magistrat de la mise en état, et partant la cour de céans saisie sur déféré, n'a pas le pouvoir juridictionnel pour connaître de la fin de non-recevoir présentée par M. [Z] [I],

Confirme l'ordonnance déférée pour le surplus,

Y ajoutant,

Dit que les dépens de l'instance de déféré suivront ceux de l'instance en principal,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice tant de M. [Z] [I], que de la SARL C&B Patrimoine, la SARL CF et Associés et la SELARL MJ AIR - DMJ, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL C&B Patrimoine,

Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du vendredi 8 novembre 2024.'

Vu les dernières conclusions en date du 18'janvier 2024, transmises par voie électronique le même jour, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties et par lesquelles la SARL C&B Patrimoine et la SARL CF et Associés demandent à la cour de':

'Vu les articles 1103 et 1188 du Code civil

Vu les articles 2355 à 2366 du Code civil,

Vu les pièces produites,

DIRE ET JUGER l'appel recevable et bien fondé ;

INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Saverne rendu en date du 22 juillet 2022 en ce qu'il a :

'DECLARE l'intervention volontaire de la SARL CF ET ASSOCIES irrecevable ;

ADMET en sa totalité la créance déclarée par Monsieur [Z] [I] contre la SARL C&B PATRIMOINE à titre chirographaire pour un montant de soixante-quinze mille neuf cent trente euros et soixante-six centimes (75 930,66 euros), soit 74 774 euros en principal et 1 156,66 euros en intérêts ;

ORDONNE l'inscription de cette créance au passif de la SARL C&B PATRIMOINE ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement ;

CONDAMNE in solidum la SARL C&B PATRIMOINE et la SARL CF ET ASSOCIES à payer à Monsieur [Z] [I] la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL C&B PATRIMOINE et la SARL CF ET ASSOCIES aux dépens.'

Et statuant à nouveau,

DECLARER les demandes formées par la société C&B PATRIMOINE et la société CF ET ASSOCIES dans leurs conclusions du 1er juin 2023 recevables ;

DECLARER l'intervention volontaire de la société CF ET ASSOCIES recevable ;

Statuant sur les prétentions de la société CF ET ASSOCIES

CONDAMNER Monsieur [Z] [I] en exécution de la garantie d'actif et de passif du 7 décembre 2011 à payer à la société CF ET ASSOCIES la somme en principal de 43.266,50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2021 date de sa demande formulée initialement par voie de conclusions devant le premier juge ('Créance garantie')

ATTRIBUER à la société CF ET ASSOCIES à hauteur de la Créance garantie, tout ou partie du solde créditeur du compte courant d'associé existant à la date de l'arrêt à intervenir, à due concurrence de celle-ci conformément à l'article ancien 2365 du Code civil

FIXER, par conséquence, au passif de la société C&B PATRIMOINE le montant de la Créance garantie de la société CF ET ASSOCIES et en présence d'un solde positif du compte courant d'associé de M. [I] la créance de ce dernier à hauteur dudit solde.

Statuant sur les prétentions de la société C&B PATRIMOINE

A titre principal,

REJETER l'admission au passif de la société C&B PATRIMOINE de la créance de Monsieur [Z] [I] pour un montant total de 75.930,66 € ou la limiter au solde créditeur disponible après attribution judiciaire au profit de la société CF ET ASSOCIES de tout ou partie dudit montant en compte courant d'associé ;

A titre subsidiaire,

ADMETTRE la créance de Monsieur [Z] [I] contre la société C&B PATRIMOINE à titre chirographaire pour un montant de 32.664,16 € ;

Sur l'appel incident subsidiaire

REJETER l'appel incident subsidiaire formé par Monsieur [I] contre la société CF ET ASSOCIES.

En toute hypothèse,

CONDAMNER Monsieur [Z] [I] à payer à la société C&B PATRIMOINE et à la société CF ET ASSOCIES la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure'

et ce, en invoquant notamment':

- la recevabilité de ses prétentions émises dans les conclusions du 1er juin 2023, ayant, comme les prétentions émises en première instance, pour finalité de faire reconnaître l'existence d'une créance au profit de la société CF et Associés née du contrat de cession, précisément de la convention de garantie d'actif et de passif, dont le solde du compte courant visait à garantir l'exécution, avec des conséquences juridiques sur la créance ainsi nantie, dès lors qu'en cas de reconnaissance de la créance garantie de la société CF et Associé, la société C&B Patrimoine ne pouvait régler la créance nantie à ce dernier et donc sa déclaration de créance devra être limitée au solde disponible, ces prétentions répondant en outre aux prévisions de l'article 910-4 du code de procédure civile, comme venant en réponse aux écritures de M.'[I], qui affirmait que la garantie de passif n'avait pas à entrer en compte dans l'appréciation du solde du compte courant d'associé,

- l'absence de prescription de son action en paiement, au regard de l'effet interruptif des conclusions en date du 25 novembre 2021, sollicitant du juge qu'il dise et juge la créance inscrite en compte courant d'associé au nom de M.'[I] renommée et créditée au nom de la société CF et Associés, le cas échéant, suivre les préconisations et obligations résultant du plan de redressement, ce qui constituait une prétention visant à la reconnaissance de sa créance,

- la recevabilité de la demande de la société CF & Associés, qui disposait d'un intérêt propre et personnel à intervenir volontairement et à titre principal à la procédure aux côtés de sa filiale, la société C&B Patrimoine, pour opposer au demandeur tous droits et moyens à cet effet, en ce compris en faisant valoir un droit de créance propre conformément à l'article 329 du code de procédure civile et relativement à la créance qu'elle détient sur celui-ci en exécution de ladite garantie d'actif et de passif, dont elle sollicite l'application à la suite d'un redressement fiscal définitivement jugé et ce alors qu'au titre de cette garantie, il avait été convenu entre les parties que la société C&B Patrimoine ne rembourserait à M.'[I] le solde de son compte courant d'associé, que si le contrôle fiscal n'entraînait aucune conséquence financière, à défaut de quoi les parties auraient convenu, à l'article 7, un système de 'compensation' entre les montants dus par le garant (M. [I]) au cessionnaire (la société CF et Associés), au titre de la garantie d'actif et de passif et les montants dus par la société C&B Patrimoine et M.'[I] au titre de la cession de parts sociales,

- le bien fondé de la demande de fixation, au profit de la société CF et Associés, d'une créance nantie correspondant au solde du compte courant d'associé, dans le cadre d'un mécanisme de compensation prévu par les parties et prévoyant, conformément à l'article 7 de l'acte de cession, que 'le cédant ne sera tenu que d'un pourcentage égal à 50 % des montants éventuellement dus au titre des réévaluations fiscales',

- par voie de conséquence, le rejet de l'appel incident formé à titre subsidiaire par M.'[I].

Vu les dernières conclusions en date du 6'novembre 2024, transmises par voie électronique le même jour, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties et par lesquelles M.'[Z] [I] demande à la cour de':

Déclarer l'appel principal de C&B Patrimoine, de la SARL CF et Associés mal fondé,

Confirmer l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de CF & Associés,

Déclarer irrecevables les demandes nouvellement formées par les appelants dans leurs conclusions du 1er juin 2023, en tant qu'elles sont contraires aux demandes formées par M.'[I], à savoir':

- admettre la créance de M.'[Z] [I] à l'encontre de la société C&B Patrimoine à titre chirographaire pour un montant de 32.664,16 euros,

- condamner M.'[Z] [I] à payer à la société CF & Associés la somme de 43.266,50 euros au titre de l'acte de cession conclu en date du 7'décembre 2011,

Déclarer irrecevables les nouvelles prétentions émises par les appelants dans leurs conclusions du 18'janvier 2024,

En tout état de cause :

Déclarer irrecevables, subsidiairement mal fondées, l'ensemble des fins et conclusions des appelants au principal,

Les en Débouter,

Sur appel incident subsidiaire si l'intervention volontaire de la société CF & Associés devait être déclarée recevable':

Infirmer le jugement entrepris en tant qu'il rejette les demandes de M.'[I],

Sur demande additionnelle et reconventionnelle de M.'[I],

Condamner la SARL CF & Associés au paiement d'un montant de 50.000 euros au titre du prix de cession des parts avec les intérêts légaux à compter de l'arrêt de la cour administrative d'appel du 23'juillet 2010 lesquels seront capitalisés dès lors qu'ils sont dus pour une année entière,

Condamner solidairement les sociétés C&B Patrimoine et CF & Associés aux entiers frais et dépens de la présente instance ainsi qu'à une indemnité de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.'

et ce, en invoquant notamment':

- l'irrecevabilité des prétentions nouvellement émises les 1er juin 2023 et 18'janvier 2024, s'agissant du paiement d'une somme de 43'266,50 euros, probablement au titre de la garantie de passif, au regard des demandes formées en première instance et qui tendaient au rejet de l'admission de la créance du concluant, à la recevabilité de l'intervention volontaire de la société CF & Associés, ou soit renommée et créditée sa créance concernant le compte courant d'associé, de même que serait irrecevable sa demande d'attribution de tout ou partie du solde créditeur du compte courant d'associé, aucune prétention n'ayant été émise antérieurement à ce titre, notamment dans les conclusions de première instance du 25'novembre 2021 qui se bornaient à demander de renommer une créance relative au compte courant d'associé (compte courant dont le cessionnaire n'était, d'ailleurs, pas investi, à défaut de convention en ce sens avec le cédant) et ne pouvaient, dès lors, avoir de valeur interruptive de prescription, la cour ayant, sur déféré, considéré que ces deux questions de nouveauté et de prescription étaient liées, et ce alors que les créances invoquées respectivement par les parties, bien qu'ayant leur origine dans le même acte, auraient des objets distincts, concernant des parties différentes, ou en tout cas pas prises en les mêmes qualités et ne pouvant se compenser,

- l'irrecevabilité, également, de la demande en paiement au regard de l'article 910-4 du code de procédure civile, cette dernière n'ayant pas été formulée en réplique à des prétentions du concluant qui se borne à solliciter l'admission de sa créance,

- l'irrecevabilité, enfin, pour prescription, de la demande en paiement, aucune action en ce sens n'étant intervenue avant le 1er juin 2023 et toute garantie reposant sur le compte courant d'associé étant contestée,

- l'irrecevabilité, par ailleurs, de l'intervention volontaire de la société CF et Associés et partant, de ses demandes, cette intervention ayant un caractère principal tendant à la mise en 'uvre de la garantie de passif prévue par l'acte de cession, sans lien avec la demande d'admission de créance de M.'[I] au titre de son compte courant d'associé, avec laquelle elle n'aurait pas vocation à se compenser,

- l'irrecevabilité pour absence réelle de prétention au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, en l'absence de chiffrage de la demande relative à l'application de la garantie de passif, la demande en renommage n'étant, par ailleurs, pas une prétention,

- le mal fondé des prétentions des parties adverses qui confondraient, pour l'application de la garantie de passif à la suite d'un redressement fiscal, deux entités juridiques différentes, opérant une dénaturation de la clause de garantie, l'acte de cession étant, en outre, muet quant à un éventuel nantissement du compte courant d'associé, outre que la demande de jeu de cette garantie serait en contradiction avec la demande de rejet de la prétention à l'admission de créance du concluant, dont seul l'accueil permettrait l'exercice du nantissement, si toutefois il existait,

- l'absence d'information du concluant par les parties adverses, quant à une demande de prise en charge de passif ou de paiement, de sorte que les conditions de mobilisation de la garantie ne seraient pas réunies, s'agissant de surcroît d'un redressement fiscal concernant des dépenses effectuées par la gérante des sociétés adverses.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2'juillet 2025,

Vu les débats à l'audience du 8'septembre 2025,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la société CF et Associés :

En vertu de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 325 du même code dispose que l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

La cour relève que la société CF et Associés est intervenue volontairement à l'instance introduite par M. [I], laquelle tendait à voir fixer au passif de la société C&B Patrimoine, le solde de son compte courant d'associé. Elle fonde cette intervention sur la garantie d'actif et de passif stipulée dans l'acte de cession de parts sociales conclu le 7 décembre 2011 entre M.'[I], cédant et la société CF et Associés, cessionnaire, en soutenant que les obligations nées de cette garantie seraient de nature à influer sur le sort de la créance revendiquée par le cédant.

Le litige principal porte exclusivement sur la créance que M. [I] tient de la société C&B Patrimoine, au titre du remboursement de son compte courant d'associé. Il oppose le cédant à la société débitrice du compte, sans que la société CF et Associés ne soit partie à ce rapport d'obligation. La garantie de passif invoquée par la société CF et Associés relève d'un rapport juridique distinct, né du contrat de cession conclu entre le cédant et la cessionnaire, dont la société C&B Patrimoine n'est pas signataire et qui n'affecte pas directement les obligations de cette dernière envers M. [I].

Le seul fait que les deux engagements figurent dans le même acte ne suffit pas à caractériser un lien procédural suffisant au sens de l'article 325 précité. Le lien d'origine contractuelle commune ne crée pas, à lui seul, une connexité entre les prétentions qui permettent à l'une d'influer sur le sort de l'autre. La créance de M. [I] et la garantie de la société CF et Associés ont des objets, des débiteurs et des régimes juridiques différents, la première tendant au remboursement d'une avance consentie à la société, tandis que la seconde viserait à garantir le cessionnaire contre un passif fiscal éventuel.

Les appelantes soutiennent que l'exécution de la garantie de passif pourrait réduire le montant du compte courant et qu'il existerait, ainsi, un lien économique et juridique entre les deux prétentions. Pour autant, aucune clause de l'acte de cession ne prévoit de mécanisme de compensation automatique entre la dette de la société C&B Patrimoine envers M. [I] et les obligations éventuelles de ce dernier envers la société CF et Associés.

L'intervention de la société CF et Associés n'est donc pas utile à la solution du litige principal, qui peut être tranché sans préjuger du bien fondé ou de l'étendue des droits qu'elle pourrait faire valoir à titre distinct contre M. [I], sur le fondement de la garantie de passif.

Il s'ensuit que l'intervention volontaire de la société CF et Associés doit être déclarée irrecevable, en confirmation du jugement entrepris sur ce point.

Sur la recevabilité des prétentions émises le 1er juin 2023 et le 18 janvier 2024':

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. En outre, il résulte des articles 565 et 566 du même code que les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent, les parties pouvant aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

L'article 910-4 du même code énonce': 'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

En l'espèce, il convient de rappeler que, devant le premier juge, il était sollicité par la partie, dorénavant appelante, que la créance inscrite en compte courant d'associé à la date du jugement au nom de M.'[I] soit renommée et créditée au nom de la SARL CF et Associés, les appelantes sollicitant désormais la condamnation de M.'[I], en exécution de la garantie d'actif et de passif du 7 décembre 2011, à payer à la société CF et Associés la somme en principal de 43'266,50 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2021, date de sa demande formulée initialement par voie de conclusions devant le premier juge.

Le seul fait que l'intervention volontaire de la société CF et Associés ait été déclarée irrecevable par le premier juge, confirmée par le présent arrêt, suffit à entraîner l'irrecevabilité de prétentions sollicitées au profit de la société CF et Associés, ainsi que des prétentions en découlant.

En tout état de cause, si les appelantes entendent faire valoir que la même finalité serait poursuivie entre cette demande et la demande en 'renommage' formulée devant le tribunal, à savoir la reconnaissance de l'existence d'une créance au profit de la société CF et Associés au titre de l'acte de cession du 7 décembre 2011, il n'en demeure pas moins que ces demandes, qui tendent à voir reconnaître à la société CF et Associés une créance envers M.'[I] sur le fondement de la garantie de passif, n'ont pas été soumises au premier juge, lequel était saisi, comme cela a été rappelé en substance sous l'angle de l'examen de la recevabilité de l'intervention volontaire, de la question de la fixation de la créance de M.'[I] à l'encontre de la société C&B Patrimoine.

Certes, en première instance, les sociétés C&B Patrimoine et CF et Associés ont demandé 'de dire et juger que la créance inscrite en compte-courant d'associé au nom de M. [I] devra être renommée et créditée au nom de la société CF et Associés'. Toutefois, le tribunal a relevé l'absence de tout fondement juridique à une telle demande et l'a rejetée, faute d'élément à l'appui et de base légale identifiée.

À ce titre, la cour considère qu'une telle demande ne constitue pas, à elle seule, une véritable prétention au sens des articles 4 et 768 du code de procédure civile : 'renommer' une créance de compte courant n'est ni une opération prévue par la loi, ni l'accessoire d'une action en paiement, en attribution ou en compensation. Le compte courant d'associé est, par nature, attaché nominativement à l'associé créancier ; il ne peut être 'transféré' qu'en vertu d'un mécanisme juridique déterminé (cession de créance, subrogation, attribution judiciaire, nantissement avec réalisation), absent des écritures de première instance.

En cause d'appel, les appelantes ont d'abord repris cette demande de 'renommage', avant de formuler dans des écritures ultérieures, de véritables prétentions nouvelles : d'une part, la condamnation de M. [I] au profit de la société CF et Associés au titre de la garantie de passif ; d'autre part et par voie de conséquence, l'attribution à la société CF et Associés, à due concurrence, de tout ou partie du solde créditeur du compte courant sur le fondement de l'ancien article 2365 du code civil. Ces demandes, apparues pour la première fois le 1er juin 2023, puis complétées le 18 janvier 2024, modifient l'objet du litige en introduisant une action en paiement et une mesure d'attribution de gage qui n'avaient jamais été soumises au premier juge. Elles sont, partant, irrecevables comme nouvelles au sens de l'article 564 précité, à défaut d'être justifiées par la demande initiale de 'renommage', laquelle n'avait pas la nature d'une prétention et ne tendait pas aux mêmes fins. Elles le sont, également, en application de l'article 910-4 précité, pour n'avoir pas été formulées dès les conclusions initiales des appelantes, ni en réplique à la partie adverse, qui persiste à solliciter l'admission de sa créance. Les demandes qui en découlent, à savoir la mise en compte d'intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 25 novembre 2021, l'attribution à la société CF et Associés à hauteur de la créance garantie de tout ou partie du solde créditeur du compte courant d'associé existant à la date de l'arrêt à intervenir, à due concurrence de celle-ci conformément à l'article ancien 2365 du Code civil et la fixation, par conséquent, au passif de la société C&B Patrimoine, du montant de la créance garantie de la société CF et Associés et en présence d'un solde positif du compte courant d'associés de M. [I], la créance de ce dernier à hauteur dudit solde, sont dès lors sans objet et en tout état de cause irrecevables, elles aussi, en vertu de l'article 910-4 précité, pour avoir été formulées pour la première fois dans les conclusions datées du 18'janvier 2024.

Sur la demande principale de M.'[I] :

Ainsi que l'a justement indiqué le premier juge, l'article 4 de l'acte de cession du 7'décembre 2011 stipule que la SARL C&B Patrimoine remboursera à M.'[I] le montant de son compte courant d'associé, soit 344 774 euros et prévoit que la somme de 240 000 euros sera versée au plus tard le 20'janvier 2012 et le solde, soit 104'774 euros, au plus tard le 31 mars 2012 et que, passé cette date, cette somme produira intérêts au taux légal.

M.'[I] ayant perçu, comme l'a rappelé le premier juge, les sommes de 240 000 euros le 20'janvier 2012 et 30 000 euros le 16 avril 2012, il n'est pas contesté que le solde du compte courant d'associé, soit 74 774 euros, lui restait dû.

Au regard des conclusions auxquelles la cour est parvenue, s'agissant des prétentions des parties appelantes, le bien fondé de cette créance n'est pas davantage remis en cause à hauteur d'appel, que devant la juridiction de première instance.

Aussi, la cour entrera en voie de confirmation du jugement entrepris, en ce qu'il a été fait droit à cette demande, dans les termes susvisés.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les appelantes, succombant pour l'essentiel, seront tenues, in solidum, des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, ceux-ci devant être au passif de la SARL C&B Patrimoine, en redressement judiciaire, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.

L'équité commande, en outre, de mettre à la charge de la société CF et Associés une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 3'000 euros au profit de M.'[Z] [I], tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de ce dernier, ainsi que de la SARL C&B Patrimoine, en redressement judiciaire et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Déclare irrecevables les demandes tendant à voir':

'CONDAMNER Monsieur [Z] [I] en exécution de la garantie d'actif et de passif du 7 décembre 2011 à payer à la société CF ET ASSOCIES la somme en principal de 43 266,50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2021 date de sa demande formulée initialement par voie de conclusions devant le premier juge ('Créance garantie')

ATTRIBUER à la société CF ET ASSOCIES à hauteur de la Créance garantie, tout ou partie du solde créditeur du compte courant d'associé existant à la date de l'arrêt à intervenir, à due concurrence de celle-ci conformément à l'article ancien 2365 du Code civil

FIXER, par conséquence, au passif de la société C&B PATRIMOINE le montant de la Créance garantie de la société CF ET ASSOCIES et en présence d'un solde positif du compte courant d'associé de M. [I] la créance de ce dernier à hauteur dudit solde'

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 22'juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Saverne,

Y ajoutant,

Dit que la SARL C&B Patrimoine et la SARL CF et Associées seront tenues in solidum des dépens de l'appel,

Précise que les dépens d'appel seront inscrits au passif de la SARL C&B Patrimoine,

Condamne la SARL CF et Associés à payer à M.'[Z] [I] la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SARL C&B Patrimoine et la SARL CF et Associés et à la charge de la SARL C&B Patrimoine, en redressement judiciaire.

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