CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 23 octobre 2025, n° 24/12734
PARIS
Autre
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Bnp Paribas Personal Finance (SA), Athena (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand
Conseillers :
Mme Arbellot, Mme Coulibeuf
Avocats :
Me Cros, Me Mendes Gil, Me Lhussier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 5 janvier 2021, Mme [C] [J] a signé un bon de commande avec la société Azur Solution Energie pour la livraison et l'installation d'un système photovoltaïque, d'un ballon thermodynamique, d'un pack GSE Led, d'un pack GSE e-connect, d'une pompe à chaleur air/eau et d'une VMC pour un montant total de 45 970 euros dans le cadre d'un démarchage à domicile.
Le 11 janvier 2021 et pour financer une partie de cette installation, elle a souscrit un contrat de crédit affecté auprès de la société BNP Paribas Personal Finance sous l'enseigne Cetelem pour un montant de 35 000 euros remboursable en 180 mensualités de'279,33 euros au taux d'intérêts contractuel de 4,84 % et un TAEG de 4,95 %.
La société Azur Solution Energie a été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce d'Angers du 2 février 2022 et la Selarl Athena représentée par Maître [G] [P] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la société.
Saisi par le 11 mars 2022 par Mme [J] d'une demande tendant à titre principal à l'annulation du contrat principal et du contrat de crédit affecté, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Ivry-sur-Seine, par un jugement contradictoire en date du 26 avril 2024 auquel il convient de se reporter,'a :
- rejeté la demande d'expertise formée par Mme [J],
- rejeté les demandes de nullité des contrats,
- condamné Mme [J] à payer la somme de 33 102,56 euros sans intérêts à la société BNP Paribas Personal Finance,
- rejeté le surplus des demandes,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [J] aux dépens.
Pour rejeter la demande de nullité du bon de commande pour irrégularité formelle, le juge a principalement retenu que si le bon de commande n'était pas très détaillé, Mme [J] avait le même jour signé des devis qui en constituaient la prolongation et qui comportaient toutes les caractéristiques détaillées des éléments d'installation. Il a souligné que le rendement était fonction de nombreux facteurs dont l'ensoleillement et ne pouvait être apprécié que sur le long terme et que le document produit intitulé « synthèse financière » n'était pas suffisant pour établir les promesses alléguées.
Il a écarté les allégations de dol formulées par Mme [J] en rappelant que ne constituait pas un dol le fait de ne pas révéler à son co-contractant son estimation de la valeur de la prestation. Il a considéré que Mme [J] ne démontrait pas une augmentation de sa consommation d'énergie.
Il a retenu que l'absence de VMC n'était pas établie alors que Mme [J] avait signé le 4 février 2021 une attestation de livraison des travaux sans réserve et que dans sa réclamation adressée le 1er juin 2021 au vendeur, elle n'évoquait pas cette absence.
Il a rejeté la demande d'expertise en relevant que la mesure d'instruction ne pouvait être ordonnée en vue de suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.
Les demandes en annulation du contrat principal ayant été écartées, il a rejeté les demandes tendant à l'annulation corrélative du contrat de crédit affecté.
Il a retenu une déchéance du droit aux intérêts contractuels faute pour la banque de produire l'original du contrat de prêt et de démontrer le respect du corps huit, de produire le double de la notice d'assurance, de justifier de l'envoi d'une mise en demeure préalable à la déchéance du terme. Il a donc déduit les sommes payées soit 1 897,44 euros du capital emprunté et pour assurer l'effectivité de la sanction, il a écarté tout droit à intérêt même légal.
Mme [J] a interjeté appel de ce jugement le 10 juillet 2024.
Aux termes de ses dernières conclusions (n° 3) remises le 30 mai 2025, Mme [J] demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
- avant dire droit de désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de donner son avis sur la rentabilité de l'opération compte tenu des matériels vendus et de l'installation fournie,
- sur le fond de prononcer l'annulation du contrat conclu avec la société Azur Solution Energie le 5 janvier 2021 et,
- en conséquence de prononcer l'annulation du contrat de crédit affecté conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance,
- d'ordonner les restitutions réciproques,
- de condamner la Selarl Athena, en qualité de liquidateur de la société Azur Solution Energie à reprendre possession du matériel installé en application du contrat dans un délai de 3 mois à compter de la signification de la décision à intervenir et à remettre les lieux dans leur état d'origine,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser toutes les échéances de crédit prélevées depuis la première échéance payée,
- et de juger que l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté déchoit la société BNP Paribas Personal Finance de son droit aux intérêts de ce contrat, et emporte obligation pour elle de lui restituer l'ensemble des mensualités du prêt déjà versées,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels,
- en tout état de cause, de condamner in solidum les sociétés BNP Paribas Personal Finance et Athena, en qualité de liquidateur de la société Azur Solution Energie à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle dénonce une violation des dispositions de l'article L. 111-1 du code de la consommation en ce que le bon de commande n'indique pas le rendement qui est une caractéristique essentielle puisqu'il est choisi une installation en autoconsommation, devant permettre des économies d'énergie, économies devant elles-mêmes permettre d'amortir le coût de l'installation et du crédit de financement.
Elle indique que le vendeur lui a remis une synthèse financière dite « autoconsommation » mais que ces documents ne lui permettaient pas d'apprécier au jour de la signature l'étendue de son engagement. Elle souligne qu'aucun calcul de la production d'énergie précise et escomptée opéré par un technicien après visite de celui-ci n'est porté dans ces documents, de même que le calcul de la consommation électrique de ces équipements, de sorte qu'elle était dans l'impossibilité de vérifier si cette installation assurerait son autoconsommation.
Elle affirme que l'installation vendue et installée ne permettait pas dès l'origine d'atteindre ces objectifs, et que cela ressort d'un rapport d'expertise établi le 21 mai 2025. Elle en déduit que le contrat doit être annulé sur ce fondement.
Elle fait encore valoir que le contrat est nul en raison du dol commis par le vendeur qui lui a sciemment présenté des informations mensongères afin d'obtenir son consentement. Elle se prévaut de la synthèse financière qu'elle affirme lui avoir été remise par le vendeur qui prévoyait un auto-financement. Elle soutient qu'il lui a ainsi été vendu une installation reposant sur une autoconsommation, permettant de générer des économies de l'ordre de 80 % sur ses factures d'électricité et financée pour 1/3 par des aides et primes diverses. Elle indique s'être vu refuser l'attribution des primes promises, à savoir la prime énergie d'EDF en raison du caractère non conforme du bon de commande du devis comprenant une date de signature dactylographiée et non manuscrite, et l'aide Ma Prime RENOV (Anah) faute d'installation de la VMC pourtant vendue.
Elle rappelle que l'annulation du contrat de vente entraîne celle du contrat de crédit en application des dispositions de l'article L. 312-55 du code de la consommation.
Elle souligne que la banque, prêteur professionnel, ne pouvait ignorer l'objet du contrat de vente et ses exigences formelles tenant au code de la consommation et considère que cette dernière a commis une faute en ne procédant pas aux vérifications élémentaires tenant notamment à vérifier si le bon de commande était régulier, se contentant de libérer les fonds sans se préoccuper de vérifier si les prestations réalisées par le vendeur avaient été entièrement exécutées.
Elle soutient qu'à aucun moment la banque ne s'est interrogée sur la réalité des travaux alors que l'attestation du 4 février 2021 ne précise pas en quoi ces travaux et prestations consistaient, se limitant à mentionner que la livraison et l'installation du bien financé étaient pleinement effectuées. Elle ajoute que la banque aurait dû être d'autant plus vigilante qu'elle savait que les installations de ce vendeur posaient difficulté.
Elle affirme que le contrat de crédit ne respecte pas le corps huit et que la déchéance du droit aux intérêts contractuels doit être confirmée.
Aux termes de ses dernières conclusions (n° 2) notifiées par RPVA le 2 juin 2025, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise formulée par Mme [J], rejeté la demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit, dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté Mme [J] des différentes demandes formulées dans son assignation,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [J] à payer la somme de 33 102,56 euros sans intérêts, car la déchéance du droit aux intérêts est infondée, en ce qu'il a rejeté le surplus de ses demandes qui portaient sur la somme de 37 812,98 euros avec les intérêts au taux contractuel à compter du 16 mai 2022,
- à titre principal, de déclarer irrecevable la demande de Mme [J] en nullité du contrat de vente et de déclarer, par voie de conséquence, irrecevable sa demande en nullité du contrat de crédit, à tout le moins de rejeter ses demandes de nullité des contrats,
- à titre reconventionnel, de constater que la déchéance du terme est acquise, et à défaut de prononcer judiciairement la résiliation du contrat de crédit avec effet au 16 mai 2022 du fait de la défaillance dans le remboursement et en conséquence et en tout état de cause'de condamner Mme [J] à lui payer la somme de 37812,98 euros outre les intérêts au taux contractuel à compter du 16 mai 2022,
- subsidiairement en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande de Mme [J] visant à être déchargée de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de l'en débouter et de la condamner, en conséquence, à lui payer la somme de 35 000 euros en restitution du capital prêté,
- en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande de Mme [J] visant à être déchargée de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de l'en débouter,
- très subsidiairement, de limiter la réparation qu'elle devrait eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice, et de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour Mme [J] d'en justifier,
- à titre infiniment subsidiaire en cas de privation de la créance de la banque, de condamner Mme [J] à lui payer la somme de 35 000 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable et de lui enjoindre de restituer à ses frais le matériel installé chez eux à la Selarl Athena, ès-qualités dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, et de dire qu'à défaut de restitution, elle restera tenue du remboursement du capital prêté, et subsidiairement, de priver Mme [J] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,
- en tout état de cause, de débouter Mme [J] de toutes autres demandes, fins et conclusions, comme de sa demande d'indemnité 700µ et de condamnation aux dépens,
d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,
en tout état de cause de condamner Mme [J] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil.
Elle relève que le recours à un expert n'est pas nécessaire à la solution du litige puisque la rentabilité de l'installation n'est jamais entrée dans le champs contractuel et ne peut, de fait, ni entraîner la nullité du contrat, ni être prise en compte dans le calcul du prétendu préjudice de Mme [J]. Elle fait valoir que Mme [J] ne développe en réalité aucun moyen sur les raisons pour lesquelles un expert serait nécessaire et qu'elle se contente d'en faire une brève mention dans le dispositif de ses écritures, sans la développer ni l'étayer. Elle conteste la nature de la mission proposée et souligne que le facteur déterminant n'est pas nécessairement la rentabilité. Elle considère que Mme [J] tente, en réalité, par ce moyen, de suppléer à sa propre carence dans l'administration de la preuve dès lors qu'elle ne produit pas l'intégralité de ses factures d'électricité et ne fournit pas le moindre commencement d'explication sur les raisons pour lesquelles sa consommation d'électricité aurait augmenté, de sorte qu'il est impossible d'évaluer la rentabilité de l'installation.
Elle soulève l'irrecevabilité des demandes ou leur caractère non-fondé au motif que l'annulation d'un contrat doit être exceptionnelle et répondre à une exigence de bonne foi.
Elle conteste les griefs émis à l'encontre du libellé du bon de commande et fait valoir que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient expressément fait entrer dans le champ contractuel et que tel n'est pas le cas. Elle relève que le fait que l'installation soit destinée à « l'autoconsommation », signifie simplement que l'énergie produite est destinée à la consommation personnelle de Mme [J] et non à la revente, mais ne constitue en aucun cas un engagement de rentabilité.
Elle ajoute que le défaut de rentabilité de l'installation n'est pas non plus démontré, souligne que le prétendu rapport n'est pas contradictoire, qu'il n'est établi que sur la base des informations orales données par Mme [J] et ne relève ni dysfonctionnement de l'installation, ni même aucune problématique de rentabilité et est écrit au conditionnel. Elle conteste que la VMC ait été prévue au bon de commande.
Elle souligne que l'acquéreur n'allègue aucun préjudice pouvant résulter d'une éventuelle irrégularité formelle du bon de commande.
A titre subsidiaire, elle indique que la nullité ne serait que relative s'agissant d'une nullité formelle et que Mme [J] a confirmé le contrat en laissant le vendeur procéder à l'installation des panneaux photovoltaïques, en réceptionnant l'installation sans réserves, en sollicitant de la banque qu'elle verse les fonds au vendeur puis en payant les mensualités et en ne contestant pas que le matériel commandé a effectivement été installé et qu'il n'est pas dysfonctionnel. Elle ajoute que postérieurement à l'introduction de son action, Mme [J] a poursuivi l'exécution des contrats en continuant à utiliser le matériel a minima pour sa consommation personnelle, et ce en pleine connaissance des moyens allégués.
Elle fait valoir que Mme [J] se contente d'allégations sans la moindre preuve et n'établit donc pas les man'uvres alléguées ni l'erreur commise. S'agissant des primes elle soutient que Mme [J] qui ne démontre pas ne pas les avoir perçues, ne justifie pas de man'uvres dolosives puisqu'elle était bel et bien éligible à ces deux dispositifs, mais d'un contentieux relatif à la bonne exécution du contrat d'achat de l'installation, qui n'aurait pas été intégralement exécuté.
En l'absence d'annulation du contrat de vente, elle indique que le contrat de crédit doit être maintenu et que Mme [J] ayant cessé de régler les échéances du crédit, la déchéance du terme a été prononcée le 16 mai 2022 et qu'elle doit le solde du crédit et qu'à défaut elle est fondée à solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire.
À titre subsidiaire, elle fait valoir que la nullité du contrat de crédit emporterait obligation pour l'emprunteur de restituer le capital emprunté et considère que la demande tendant à la voir privée de sa créance est irrecevable dès lors que Mme [J] a poursuivi l'exécution volontaire des contrats et les ont confirmés.
Elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, de l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds et souligne que toutes les demandes de Mme [J] à son encontre sont vaines dès lors qu'elle ne justifie pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.
Elle conteste tout lien de causalité entre la faute qui lui est imputée et l'absence de restitution du prix de vente du fait de la liquidation du vendeur. Elle considère que le préjudice ne consisterait qu'en une perte de chance pour l'emprunteur de ne pas souscrire le contrat affecté d'irrégularités et donc la perte de chance de ne pas pouvoir empêcher le déblocage des fonds dont la restitution est désormais compromise dans un contexte de procédure collective. Elle ajoute que dès lors que la prestation est achevée postérieurement, il n'y a pas plus de préjudice dans la mesure où le prêteur aurait dû en tout état de cause débloquer les fonds à ce moment-là.
Elle fait valoir que la carence du liquidateur judiciaire dans la récupération du matériel s'analyse comme un abandon de bien, de sorte que Mme [J] devient ainsi propriétaire du « res derelictae » par appropriation du bien abandonné et que la paralysie des restitutions doit être prise en compte des deux côtés : si l'acquéreur n'obtient pas restitution du prix de vente, il ne restitue pas non plus de son côté le matériel, et en conserve la détention matérielle et la jouissance de ses utilités.
Elle entend voir limiter sa condamnation au préjudice effectivement subi, à savoir la part de la prestation qui n'aurait pas été achevée, à charge pour l'acquéreur d'en justifier.
A titre subsidiaire elle oppose à Mme [J] la légèreté blâmable avec laquelle elle lui a demandé le déblocage des fonds.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels, elle soutient apporter la preuve du respect du corps huit par la production d'une copie fidèle et sincère du contrat de crédit. Elle relève que l'emprunteur produit lui-même la notice d'assurance ce qui prouve qu'elle la lui a remise. Enfin elle souligne que le défaut de production de la mise en demeure préalable à la déchéance du terme n'est pas une cause de déchéance du droit aux intérêts contractuels.
La déclaration d'appel et les conclusions de Mme [J] en leur premier état ont été signifiées au mandataire liquidateur du vendeur par acte du 18 septembre 2024 remis à personne morale. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance lui ont été signifiées en leur premier état par acte du 15 janvier 2025 remis à domicile. Il n'a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 juin 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 2 septembre 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour constate :
- que le contrat de vente souscrit le 5 janvier 2021 est soumis aux dispositions du code de la consommation dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile est soumis aux dispositions en leur version postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,
- que le contrat de crédit affecté conclu le 11 janvier 2021 est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction postérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Sur la recevabilité des demandes de Mme [J]
La banque soutient que la demande d'annulation du contrat de vente est irrecevable faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.
Ce faisant, l'appelante n'explique pas en quoi cette demande serait irrecevable.
Sur la demande avant dire droit d'expertise
Mme [J] sollicite une expertise sur la rentabilité de l'installation. Toutefois, elle ne demande que l'annulation des contrats pour cause de nullité formelle et pour dol. Elle ne sollicite pas la résolution du contrat pour inexécution ou mauvaise exécution. Dès lors l'expertise sollicitée est sans lien avec ses prétentions, étant observé que c'est à elle d'établir le dol qu'elle invoque et qu'une expertise ne peut avoir comme but de suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve. Cette demande doit donc être rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.
Sur la nullité des contrats de vente et de crédit
Sur le moyen tiré de la nullité formelle
En application de l'article L. 221-5 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.
L'article L. 221-9 du code de la consommation'dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5 et est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.
Selon l'article L. 111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence de toute restriction d'installation de logiciel, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
Selon l'article L. 242-1 du code de la consommation, les dispositions de l'article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Mme [J] conteste que le point 1 ait été respecté au seul motif que le rendement de l'installation n'a pas été mentionné.
La cour constate que la puissance de l'installation photovoltaïque et celle des onduleurs figure au contrat (300 Wc et 300 VA) de même que la puissance de la pompe à chaleur (14 KW). Elle semble considérer que l'auto consommation recouvre la notion d'autosuffisance ce qui n'est pas le cas. Le bon de commande ne comporte aucun engagement de cette nature. Il ne comprend pas non plus d'engagement de rentabilité financière au sens où elle l'entend à savoir in fine celle d'une gratuité de toute l'installation. Mme [J] n'a pas acquis un produit financier. Ses motivations ne sont pas entrées dans le champ contractuel et ne peuvent être considérées comme des caractéristiques essentielles des biens vendus.
Aucune nullité formelle n'est donc encourue de ce chef'.
Sur le moyen tiré du dol
Selon l'article 1130 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement été donné.
Aux termes de l'article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
L'article 1137 du même code définit le dol par le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges ou encore par dissimulation intentionnelle par l'un des cocontractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre.
Le dol ne se présume pas et doit être prouvé par celui qui l'invoque.
Mme [J] fait valoir que le vendeur lui a sciemment présenté des informations mensongères afin d'obtenir son consentement en lui remettant une synthèse financière présentant l'opération comme totalement autofinancée.
Toutefois rien ne permet de considérer que le document intitulé « synthèse financière » qu'elle produit lui ait été remise par le vendeur. Il ne comporte aucune en-tête, aucune date, aucune signature. Il ne permet donc pas de démontrer l'existence du dol invoqué.
Les autres moyens qu'elle développe ne relèvent pas du dol et elle ne demande pas la résolution du contrat pour mauvaise exécution.
Mme [J] doit dès lors être déboutée de sa demande d'annulation du contrat de vente comme de sa demande d'annulation du contrat de crédit, Mme [J] ne faisant valoir l'annulation de celui-ci que comme une conséquence de l'annulation de la vente. Le jugement doit donc être confirmé sur ces points.
Sur les demandes de la banque
Sur les fautes opposées par Mme [J]
Mme [J] oppose à la banque une faute pour avoir consenti un crédit accessoire à un contrat nul. Or les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que le bon de commande n'est pas annulé.
Elle soutient également que la banque a commis une faute dans la libération des fonds en ce qu'elle les a débloqués sans s'interroger sur la réalité des travaux alors que l'attestation signée par elle le 4 février 2021 ne précise pas en quoi ces travaux et prestations consistaient, se limitant à mentionner que la livraison et l'installation du bien financé étaient pleinement effectuées. Pour autant elle ne demande pas de dommages et intérêts et en l'absence d'annulation, la banque ne saurait être privée de son droit à solliciter le paiement des sommes qui lui sont dues.
En tout état de cause, le contrat a été signé le 5 janvier 2021. L'installation a été réalisée le 4 février 2021. Les fonds ont été débloqués le 4 mars 2021 et Mme [J] dispose des factures acquittées le 9 mars 2021. Les travaux ont été réalisés. Mme [J] soutient que la VMC n'a jamais été posée. Si cette VMC apparaît bien dans le récapitulatif de la commande contrairement à ce qu'affirme la banque, il reste que Mme [J] a elle-même sollicité le déblocage des fonds en attestant que tous les travaux avaient été effectués et qu'au surplus la banque ne finançait qu'une partie de l'installation (35 000 euros sur 45 970 euros), le surplus étant financé par Mme [J] de ses fonds propres. Or elle a elle-même payé le vendeur, toutes les factures ayant été acquittées le 9 mars 2021. Elle ne peut donc reprocher à la banque d'avoir débloqué les fonds et ce même en l'absence d'une VMC. La banque n'avait en effet aucun motif de mettre en doute l'affirmation signée par Mme [J] selon laquelle la livraison du bien et la fourniture de la prestation de service avaient été pleinement effectuée conformément au contrat.
Sur la résiliation du contrat de crédit
Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
En application de l'article 1224 du même code, lorsque l'emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l'existence d'une clause résolutoire soit en cas d'inexécution suffisamment grave. L'article 1225 précise qu'en présence d'une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution.
En matière de crédit à la consommation en particulier, il résulte des dispositions de l'article L. 312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
La banque qui entend voir constater que la déchéance du terme est acquise ne démontre toutefois pas avoir préalablement mis Mme [J] en demeure de payer en lui laissant un délai pour régulariser ce qu'elle admet dans ses écritures. Dès lors cette demande doit être rejetée.
Elle sollicite à titre subsidiaire le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat.
En application de l'article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.
En l'espèce, en sollicitant devant le premier juge le paiement du solde du prêt après déchéance du terme, la banque a manifesté clairement sa volonté de ne pas poursuivre le contrat alors que celui-ci n'était pas arrivé à son terme juridique.
Les pièces du dossier établissent que Mme [J] a définitivement cessé de s'acquitter du remboursement des mensualités du prêt à compter du mois de mars 2022 mettant ainsi en échec le paiement de son crédit.
Dès lors son inexécution est suffisamment grave pour justifier le prononcé de la résiliation du contrat.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels et les sommes dues
Mme [J] oppose la déchéance du droit aux intérêts contractuels faute pour le contrat de respecter le corps huit.
Aux termes de l'article R. 312-10 du code de la consommation auquel renvoie l'article L. 312-28, le contrat doit être rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure au corps huit et ce à peine de déchéance totale du droit aux intérêts conformément aux dispositions de l'article L. 341-4 du code de la consommation.
La cour rappelle que le corps 8 correspond à 3 mm en points Didot. S'il est exact qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne définit précisément le corps 8 ou n'exclut le point PICA, pour autant, lorsque le législateur français a légiféré le 24 mars 1978 dans le domaine du droit de la consommation, il s'est référé implicitement à la norme typographique française et donc au point Didot. Il ne peut être laissé aux seuls établissements bancaires le soin de déterminer quel point et quelle police permettrait de considérer que l'offre de prêt est suffisamment lisible alors qu'il s'agit d'appliquer des textes d'ordre public ayant trait à la protection des consommateurs. Le corps huit correspond à 3 mm en points Didot. Le point de référence à multiplier par 8 reste le point Didot (soit 0,375), d'où une police de caractères d'au moins trois millimètres (car : 0,375x8 = 3 mm). Par ailleurs, la taille de la police doit être considérée comme la hauteur maximale occupée par le dessin de tous les caractères, donc du bas des lettres descendantes au haut des lettres ascendantes y compris avec signes diacritiques), à laquelle s'ajoutent les talus de tête et de pied. Il suffit, pour s'assurer du respect de cette prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d'un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu'il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.
En l'espèce, cette vérification conduite sur la copie produite par la banque sur le paragraphe « condition d'acceptation ou de rétractation du contrat de crédit conclu à distance » permet de constater qu'il comporte après le titre 31 lignes occupant 73 mm soit par ligne 2,354 mm. Dès lors la déchéance du droit aux intérêts contractuels retenue par le premier juge doit être confirmée sauf à la préciser au dispositif.
Il résulte de l'article L. 341-8 du code de la consommation que lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital déduction faite des sommes versées. Il n'est pas justifié de versements supérieurs à ceux retenus par le premier juge et dès lors le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné Mme [J] à payer la somme de 33 102,56 euros à la banque.
La limitation légale de la créance du prêteur exclut qu'il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l'article L. 312-39 du code de la consommation. La banque doit donc être déboutée sur ce point.
Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l'article 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.
Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s'il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu'il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n'avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d'efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).
En l'espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d'intérêtS annuel fixe de 4,84 %.
Dès lors, les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal significativement inférieurs à ce taux conventionnel ne le seraient plus si ce taux devait être majoré de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l'article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de dire qu'il ne sera pas fait application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. La somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, le jugement étant infirmé en ses dispositions contraires.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement doit être confirmé en ces dispositions.
Mme [J] qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil.
Il apparaît équitable de lui faire supporter les frais irrépétibles de la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt réputé contradictoire,
Rejette la fin de non-recevoir ;
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit que la somme de 33 102,56 euros ne produirait pas intérêts ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la demande de constat d'acquisition de la clause résolutoire ;
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de crédit ;
Prononce la déchéance du droit aux intérêts contractuels ;
Dit que la somme de 33 102,56 euros au paiement de laquelle Mme [J] est condamnée produit intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
Ecarte la majoration de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier ;
Condamne Mme [C] [J] à payer la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [C] [J] aux dépens d'appel avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil ;
Rejette toute autre demande.