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Cass. 1re civ., 5 novembre 2025, n° 24-16.652

COUR DE CASSATION

Autre

Cassation

PARTIES

Défendeur :

Futura international (SAS), BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Champalaune

Rapporteur :

Mme Tréard

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, SARL Delvolvé et Trichet

Cass. 1re civ. n° 24-16.652

4 novembre 2025

Désistement

1. Il est donné acte à Mme [M] du désistement de son pourvoi.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 février 2024) et les productions, par un contrat conclu hors établissement le 16 octobre 2017, M. [M] (l'acquéreur) a commandé auprès de la société Futura international (le vendeur) la fourniture et l'installation d'une centrale photovoltaïque et d'une unité centrale de gestion de l'énergie, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société BNP Paribas Personal Finance, sous l'enseigne Cetelem (la banque). Le contrat d'achat incluait, outre la fourniture et l'installation des biens vendus, différentes démarches et formalités administratives à la charge du vendeur.

3. Le 31 juillet 2019, l'acquéreur a procédé au remboursement intégral anticipé du crédit affecté.

4. Les 25 septembre et 8 octobre 2019, invoquant des irrégularités du bon de commande, l'acquéreur et son épouse, Mme [M], ont assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté.

5. Par un jugement du 15 septembre 2021 le vendeur a été placé en liquidation judiciaire et un liquidateur a été désigné.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes et d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de prêt accessoire du 16 octobre, alors « qu'il résulte de l'article L 111-1, 6° du code de la consommation qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fournitures de services, le professionnel doit l'informer, de manière lisible et compréhensible, de la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI ; qu'il appartient au débiteur d'une obligation particulière d'information d'établir qu'il a satisfait à cette obligation ; que pour rejeter la demande d'annulation du bon de commande, l'arrêt retient que l'acquéreur ne démontre pas que le contrat qui lui a été remis ne respecterait pas l'article L 111-1, 6° du code de la consommation et ne mentionnerait pas la possibilité du recours au médiateur laquelle ne se trouve jamais sur les pages recto du bon de commande ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé les articles L 111-1 du code de la consommation et 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 111-1, 6°, L. 221-7 du code de la consommation dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et 1353 du code civil :

7. Il résulte de ces textes que la charge de la preuve de l'accomplissement par le professionnel des obligations légales d'information mises à sa charge à l'occasion de la conclusion d'un contrat hors établissement pèse sur celui-ci.

8. Il lui incombe dès lors de rapporter la preuve de la régularité d'un tel contrat au regard des mentions légales devant y figurer à peine de nullité.

9. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat de vente, l'arrêt relève que l'acquéreur ne produit qu'une copie du bon de commande qui ne comporte pas les conditions générales et ne démontre pas que le contrat qui lui a été remis ne mentionnerait pas la possibilité de recours au médiateur, laquelle ne se trouve jamais sur les pages recto du bon de commande.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes et d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de prêt accessoire du 16 octobre 2017, alors « qu'il résulte des articles L 221-9, L 221-5, L 111-1, 3° du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021, et de l'article L 242-1 du même code qu'un contrat conclu hors établissement doit, à peine de nullité, comporter, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; qu'après avoir relevé que selon les mentions du bon de commande, le contrat portait non seulement sur l'installation d'une centrale photovoltaïque mais également sur les "démarches administratives, déclaration préalable de Travaux (demande d'autorisation à la mairie) demande ERDF (électricité réseau distribution de France) demande de raccordement, Elaboration de la demande de contrat de rachat EDF AOA (Agence d'obligation d'achat)", l'arrêt retient, pour rejeter la demande d'annulation du bon de commande, que la date de livraison et d'installation a été mentionnée et respectée, le vendeur ne pouvant s'engager sur la date de raccordement qui ne dépend pas de lui ; qu'en statuant ainsi quand l'indication d'une "date de livraison : 16/11/2017" était insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3° du code de la consommation dès lors qu'il n'était pas distingué entre le délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens et celui d'exécution des autres prestations administratives et commerciales auxquelles le vendeur s'était s'engagé et qu'un tel délai global ne permettait pas à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 242-1, L. 221-9, alinéa 2, L. 221-5, 1°, et L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

12. Il résulte de ces textes que les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.

13. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat de vente, l'arrêt relève que la date de livraison et d'installation a été mentionnée au bon de commande, qu'elle a d'ailleurs été respectée et que le vendeur ne peut s'engager sur la date de raccordement qui ne dépend pas de lui.

14. En statuant ainsi, alors que cette indication était insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dès lors qu'il n'était pas distingué entre le délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens et celui d'exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s'était s'engagé et qu'un délai global ne permettait pas à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

15. l'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes, alors « que commet une faute le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal ; qu'en retenant, pour dire que la banque n'avait pas commis de faute dans la mise à disposition des fonds, qu'il ne saurait lui être reproché de n'avoir pas opéré de contrôle quant à des autorisations données par des organismes tiers, ni quant à la réalisation effective du raccordement au réseau électrique relevant d'ERDF, structure également tierce par rapport à l'ensemble contractuel quand il résulte de ses propres constatations que le bon de commande mentionne que l'installation porte également sur "les démarches administratives, déclaration préalable de travaux (demande d'autorisation à la mairie) demande ERDF (électricité réseau distribution de France) demande de raccordement, Elaboration de la demande de contrat de rachat EDF AOA (Agence d'obligation d'achat)", la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 312-48 du code de la consommation, 1103 et 1231-1 du code civil :

16. Pour écarter la faute de la banque dans la mise à disposition des fonds, l'arrêt relève que c'est au vu d'une fiche de réception des travaux sans réserve et d'une attestation de livraison et d'installation de panneaux photovoltaïques signées les 16 et 23 novembre 2017 par l'acquéreur que la banque a débloqué les fonds entre les mains du vendeur et que les éléments qui y figurent permettent d'identifier le dossier ainsi financé. Il ajoute qu'il ne saurait être reproché à la banque de n'avoir pas opéré de contrôle quant à des autorisations données par des organismes tiers, ni quant à la réalisation effective du raccordement au réseau électrique relevant d'ERDF.

17. En statuant ainsi, alors que le bon de commande signé le 16 octobre 2017 mettait à la charge du vendeur l'ensemble des démarches administratives, déclaration préalable de travaux en mairie (demande d'autorisation à la mairie), demande de raccordement au réseau de distribution électrique auprès du gestionnaire du réseau et élaboration de la demande de contrat de rachat de l'électricité produite, démarches administratives et frais de raccordement au réseau ERDF étant pris en charge à 100 % par le vendeur, et que l'attestation de livraison et d'installation des panneaux photovoltaïques et la fiche de réception des travaux sans réserve ne permettaient pas à la banque, comme il le lui incombait avant de verser les fonds, de s'assurer de l'exécution effective des prestations auxquelles le vendeur s'était engagé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le moyen relevé d'office

18. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu les articles L. 312-25 du code de la consommation et 6 du code civil :

19. Il résulte de ces textes que la méconnaissance des dispositions d'ordre public visées par le premier, sanctionnée par la nullité du contrat de crédit en vertu du deuxième, ainsi qu'au plan pénal conformément à l'article L. 341-12 du code de la consommation, ne peut être couverte par le remboursement anticipé du contrat par l'emprunteur. Par suite, cette circonstance ne peut faire obstacle à l'examen d'une telle demande.

20. Pour dire irrecevable la demande de l'acquéreur en annulation du contrat pour déblocage des fonds avant l'expiration du délai de sept jours et infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de prêt à ce titre, l'arrêt relève que le remboursement par anticipation du crédit litigieux par l'acquéreur lui interdit de se prévaloir de la nullité du contrat de crédit de manière autonome.

21. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit Mme [Y] [H], épouse [M], irrecevable en toutes ses demandes et dit M. [M] recevable en ses demandes, l'arrêt rendu le 15 février 2024, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société BNP Paribas Personal finance aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas Personal Finance et la condamne à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le cinq novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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