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Décisions

CA Rennes, 2e ch., 28 octobre 2025, n° 23/05701

RENNES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA), Preservation du Patrimoine Energie (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jobard

Conseillers :

M. Pothier, Mme Picot-Postic

Avocats :

Me Tallendier, Me Castres, Me Reinhard, Me Loheac

TJ Béziers, du 21 juil. 2023, n° 21-1337

21 juillet 2023

EXPOSE DU LITIGE

A la suite d'un démarchage à domicile, M. [F] [S] a, selon bon de commande du 30 juillet 2019, commandé à la société Préservation du Patrimoine Energie (la société PPE) la fourniture et l'installation d'un kit aérovoltaïque composé de 10 panneaux photovoltaïques, un système de pilotage et domotique et d'un ballon thermodynamique, moyennant le prix total de 34 500 TTC.

En vue de financer cette opération, la société BNP Paribas Personal Finance, exerçant sous l'enseigne Cetelem, (la BNP PPF) a, selon offre acceptée le 13 septembre 2019, consenti à M. [S] un prêt de 34 500 euros au taux de 4,84 % l'an, remboursable en 170 mensualités de 286,40 euros, hors assurance emprunteur, après un différé d'amortissement de 6 mois.

Les fonds ont été versés à la société PPE au vu d'une demande de financement-atttestation de livraison du 26 septembre 2019.

Prétendant que le bon de commande était irrégulier et avoir été trompé par le démarcheur sur la rentabilité de l'opération financée, M. [S] a, par actes des 8 et 13 juillet 2021, fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, la BNP PPF et la société PPE, en annulation des contrats de vente et de prêt, et en remboursement des sommes versées au titre du prêt.

Par jugement du 24 mai 2023, le premier juge a :

- débouté M. [F] [S] de ses demandes d'annulation du contrat principal de vente et d'annulation subséquente du contrat de crédit affecté,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- constaté l'exécution provisoire de droit du présent jugement,

- condamné M. [F] [S] aux dépens de l'instance.

M. [S] a relevé appel de ce jugement le 4 octobre 2023, par deux déclarations distinctes.

Par ordonnance du 26 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures.

Aux termes de ses dernières conclusions du 16 mai 2025, M. [S] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [S] [F] de ses demandes,

Et statuant a nouveau,

- annuler le bon de commande (marché) régularisé par M. [F] [S] avec la société PPE,

- annuler le contrat de prêt régularisé par M. [F] [S] avec la BNP PPF,

- prononcer la déchéance de BNP PPF de tout droit à recourir contre M. [S] pour le remboursement de l'emprunt et la débouter de toutes demandes a ce titre,

- condamner la BNP PPF à rembourser à M. [F] [S] toutes les sommes qui ont été versées en exécution du contrat depuis la première mensualité réglée en remboursement du prêt et ceci jusqu'au 'jugement' à intervenir,

- débouter la BNP PPF de sa demande reconventionnelle à titre subsidiaire visant à ce qu'en cas d'annulation des contrats, M. [S] soit débouté de sa demande visant à ce que BNP PPF soit privée de son droit à restitution et encore sollicitant la condamnation de M. [S] au paiement de la somme de 34 500 euros au titre du capital prêté outre intérêts au taux légal et enfin qu'il soit 'jugé' que BNP PPF restitue à M. [S] les échéances réglées sur justification de la restitution au Trésor Public des crédits d'impôts percus,

- débouter BNP PPF et PPE de toutes leurs demandes fins et conclusions plus amples ou contraires telles que dirigées contre M. [F] [S],

A titre subsidiaire,

- ordonner une vérification d'écritures des mentions manuscrites et des signatures sur l'attestation de livraison (piece n°6 adverse), celle-ci effectuée à la diligence de la cour, les parties dûment convoquées et l'original de l'attestation de livraison étant versé aux débats par BNP PPF,

En tout état de cause,

- décerner acte à M. [S] que l'installation est à l'entière disposition de l'installateur pour démontage aux frais de ce dernier et débouter la société PPE de toutes ses demandes fins et conclusions plus amples ou contraires telles que dirigées contre M. [F] [S] et notamment de restitution en capital en cas d'annulation du bon de commande,

- condamner solidairement BNP PPF et PPE à procéder sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision et à leurs frais exclusifs et avances au démontage de l'installation, tout en les condamnant solidairement à remettre en parfait état la toiture de tous les désordres causés à la toiture par le démontage et ceci encore à leurs frais exclusifs et avances,

- condamner solidairement BNP PPF et PPE au paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En l'état de ses dernières conclusions du 5 avril 2024, la BNP PPF conclut à la confirmation du jugement attaqué.

Subsidiairement, en cas d'annulation des contrats, elle demande à la cour de :

- débouter M. [S] de sa demande visant à voir la BNP PPF privée de son droit à restitution du capital prêté dès lors qu'elle n'a commis aucune faute et qu'il ne justifie pas de l'existence d'un préjudice actuel et certain ainsi que d'un lien de causalité à l'égard du prêteur,

Par conséquent,

- condamner M. [F] [S] à porter et payer à BNP PPF la somme de 34 500 euros, correspondant au montant du capital prêté, outre intérêts au taux légal,

- juger que BNP PPF devra restituer à M. [S] les échéances réglées, uniquement après justification de sa part de la restitution au Trésor Public des crédits d'impôt perçus,

- débouter M. [S] de toute autre demande, fin ou prétention,

- condamner la société PPE à garantir le remboursement de la somme de 34 500 euros, par M. [S], à la société BNP PPF,

En tout état de cause,

- condamner la partie succombant à porter et payer à BNP PPF une indemnité à hauteur de 2 600 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions du 12 mars 2024, la société PPE demande enfin à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 24 mai 2023 par le juge chargé du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc, en ce qu'il a débouté M. [F] [S] de ses demandes d'annulation du contrat principal de vente et d'annulation subséquente du contrat de crédit affecté,

- débouter M. [S] de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la société PPE,

- condamner M. [S] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre la charge des entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par les parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 22 mai 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité du contrat principal

Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'une commercialisation hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l'entreprise, l'adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,

le cas échéant, son numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

les informations relatives à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,

son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l'assureur ou du garant,

les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,

le prix du bien ou du service,

les modalités de paiement,

en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,

s'il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,

la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,

lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,

le numéro d'inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

s'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l'article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d'identification,

l'éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l'assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l'engagement.

En l'occurrence, M. [S] invoque à tort des irrégularités du bon de commande tirées de l'imprécision des informations relatives aux caractéristiques des biens vendus.

En effet, d'une part, le nombre (10) et la puissance (300 Wc) des panneaux sont bien mentionnés, de même que leur marque (Compasun), ainsi que le fonctionnement de l'installation (système de pilotage et domotique Smart connecté par gestion intégrale du système).

D'autre part, le prix indiqué pour chaque poste des travaux (27 400 euros pour l'installation photovoltaïque, 7 000 euros pour le ballon thermodynamique et 100 euros pour le forfait pose) correspond au montant total du crédit (34 500 euros), et satisfait donc à l'obligation de mentionner, à peine de nullité, le prix global de l'opération.

Par ailleurs, les conditions générales (article 16) mentionnent bien les garanties légales offertes au consommateur, au titre de la garantie légale du fabricant, la garantie légale de conformité, ainsi que la garantie des vices cachés de la chose vendue.

Il est exact, en revanche, que le bon de commande ne mentionne ni le délai de livraison, ni le délai d'exécution de la prestation accessoire de pose, le délai butoir de six mois stipulé aux conditions générales de vente à défaut d'indication d'un délai précis dans le bon de commande est trop vague et ne saurait pallier l'absence d'indication d'un calendrier précis de livraison et d'exécution des travaux d'installation exigé par le 3° de l'article L. 111-1 du code de la consommation.

Le contrat est donc irrégulier.

La BNP PPF soutient que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que M. [S] aurait renoncé à invoquer en acceptant la livraison et la pose des matériels, en réglant les échéances du crédit, en utilisant les matériels pendant plusieurs mois et en n'émettant aucune contestation sur les caractéristiques des matériels, leur prix ou leur délai de livraison.

Cependant, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l'époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Or, en l'occurrence, aucun acte ne révèle que, postérieurement à la conclusion du contrat, M. [S] a eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, l'absence d'opposition à la livraison du matériel et à la réalisation des travaux, de même que le règlement des échéances du prêt ne suffisant pas à caractériser qu'il a, en pleine connaissance de l'irrégularité du bon de commande, entendu renoncer à la nullité du contrat en résultant et qu'il aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.

Par ailleurs, la seule reproduction des dispositions du code de la consommation au verso du bon de commande énonçant les conditions générales de vente ne suffisent pas à démontrer que l'acquéreur avait pleine connaissance de cette réglementation et, de surcroît, que le contrat de vente la méconnaissait.

Dès lors, rien ne démontre que M. [S] avait connaissance de ces vices du bon de commande lorsqu'il a laissé la société PPE intervenir à son domicile, signé l'attestation de livraison et réglé les échéances de remboursement du prêt.

Il n'est donc pas établi que le consommateur ait, en pleine connaissance des irrégularités de ce contrat de vente concernant les délais de livraison et d'exécution du contrat, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu'il aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.

Il convient donc d'écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, après réformation du jugement attaqué, de prononcer la nullité du contrat conclu le 30 juillet 2019 entre M. [S] et la société PPE.

Cette annulation a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

Il convient par conséquent de condamner la société PPE à rembourser à M. [S] le prix de l'installation de 34 500 euros.

Il y a lieu par ailleurs de condamner la société PPE, après restitution du prix, à reprendre à ses frais l'ensemble des matériels posés au domicile de M. [S] et à remettre la toiture en état, et ce, dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt.

Il n'y a toutefois pas matière à assortir en l'état l'injonction de reprise du matériel et de remise en état de la toiture d'une astreinte.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la BNP PPF est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société PPE emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la BNP PPF.

La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre, c'est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par l'emprunteur.

M. [S] demande à cet égard à la cour de le dispenser de restituer le capital emprunté de 34 500 euros, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds sans vérifier la régularité formelle du bon de commande, sans vérifier le sérieux de la société à laquelle elle a confié des exemplaires des contrats de prêt à placer auprès des particuliers, et sans avoir pris la précaution de s'aviser si l'installation donnait entière satisfaction au regard de la promesse de l'autoconsommation, et, enfin, sans s'assurer de l'exécution complète du contrat principal, au vu d'une attestation de livraison dont il conteste sa signature.

La BNP PPF fait valoir quant à elle qu'elle s'est, sans commettre de faute, dessaisie des fonds sur autorisation expresse de M. [S] qui a signé l'attestation de livraison, sa signature étant à cet égard similaire à celle figurant sur les autres documents contractuels et qu'il ne lui appartient pas à réception de ce document, à procéder à une vérification d'écriture pour s'assurer qu'elle a bien été apposée par l'emprunteur, et, d'autre part, qu'elle n'est tenue qu'à un simple contrôle de la régularité formelle du bon de commande lui permettant de détecter les causes de nullité flagrantes, et que celui-ci avait l'apparence de régularité.

En premier lieu, la banque dispensatrice de crédit n'est pas tenue d'un devoir de conseil relativement au succès de l'opération financée, mais seulement d'un devoir de mise en garde sur les risques nés de l'endettement, en l'occurence non invoqué.

A supposer ensuite que M. [S] ne soit pas l'auteur de la signature figurant sur l'attestation de livraison, il ressort cependant de la comparaison avec les signatures figurant sur le bon de commande, l'offre de prêt, la fiche de renseignement, la fiche explicative, qu'il existe une grande similitude avec celles-ci, et qu'en l'absence de différence notable avec la signature figurant sur l'attestation de livraison, la banque ne pouvait déceler la falsification alléguée, et partant, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise graphologique pour effectuer une vérification d'écriture, devenue sans objet.

Le prêteur, qui n'a pas à assister l'emprunteur lors de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu'il libère les fonds au vu d'une attestation de livraison qui lui permet de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal.

Or, en l'occurrence, l'attestation de livraison signée par M. [S] le 26 septembre 2019 faisait ressortir sans ambiguïté que celui-ci'(reconnaissait) en signant la présente attestation sans réserve :

- que la livraison du bien et /ou la fourniture de la prestation de service ci-dessus désignée a été pleinement effectuée conformément au contrat principal de vente préalablement conclu avec le vendeur ou le prestataire de service,

- que cette livraison de fourniture est intervenue le 26 septembre 2019,

- Il (reconnaissait) que conformément à l'article L. 312-48 du code de la consommation ses obligations au titre du contrat de 'crédit accessoire à une vente' (... prenaient) effet à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation de service (et) en conséquence il (demandait) au Prêteur, par la signature de la présente attestation et en sa qualité d'Emprunteur, de procéder à la mise à disposition des fonds au titre dudit contrat de 'crédit accessoire à une vente.'

La BNP PPF, qui n'est pas un professionnel de la pose des panneaux et ne disposait pas de moyens techniques pour évaluer le temps nécessaire à la réalisation de l'ensemble des prestations accessoires, pouvait donc légitimement en déduire que l'ensemble des biens commandés avaient été livrés et l'intégralité des prestations accessoires d'installation réalisées, en se fiant aux déclarations figurant dans un procès-verbal de réception non équivoque établi par l'emprunteur sous sa responsabilité.

Néanmoins, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement.

Or, il a été précédemment relevé que le bon commande conclu avec la société PPE, par l'intermédiaire de laquelle la BNP PPF faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de M. [S] qu'il entendait confirmer l'acte irrégulier, en dépit de l'absence d'un calendrier précis de livraison et d'exécution des travaux d'installation.

Le prêteur n'avait certes pas à assister l'emprunteur lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la BNP PPF a commis une faute susceptible de la priver du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.

Toutefois, la BNP PPF fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l'emprunteur de l'existence d'un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

Or, la société PPE étant condamnée à restituer le prix du marché annulé et à reprendre à ses frais l'ensemble des matériels posés au domicile de M. [S] et à remettre la toiture en l'état, il ne subsiste aucun préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

Au surplus, même en cas d'insolvabilité du fournisseur, M. [S] conserverait le bénéfice d'une installation livrée, posée et mise en service, ainsi qu'il ressort de ses propres écritures démontrant qu'en mai 2025, l'installation produit toujours de l'électricité.

D'autre part, s'il invoque une insuffisance de l'installation ne permettant pas de couvrir les échéances de remboursement du prêt, il n'établit nullement que la sociétés PPE lui aurait contractuellement promis que le niveau de rémunération de l'électricité produite par l'installation devait lui permettre de couvrir les mensualités de remboursement.

En toute hypothèse, cette prétendue insuffisance de performance, apparue postérieurement à la mise en service et au déblocage des fonds, serait sans lien causal avec la faute du prêteur.

Il n'y a dès lors pas lieu de le dispenser de rembourser les capitaux empruntés.

Il convient donc, après réformation du jugement attaqué, de condamner M. [S] à restituer à la BNP PPF le capital emprunté de 34 500 euros, sauf à déduire les sommes versées au prêteur au cours de l'exécution du contrat de prêt annulé.

Cette somme produira intérêts à compter de la demande formée par conclusions d'appel notifiées le 5 avril 2024.

Il est en effet de principe que les intérêts au taux légal courant sur les sommes dont le remboursement a été ordonné en conséquence d'une annulation de contrat ne peuvent avoir pour point de départ que le jour de la demande en justice.

A cet égard, la BNP PPF n'est nullement fondée à demander à la cour de subordonner cette restitution à la restitution des sommes perçues au titre des crédits d'impôt perçus au Trésor Public, alors que cette obligation de restitution des intérêts ne procède que de l'annulation de plein droit du contrat de prêt et des restitutions réciproques qui en découlent.

Sur les autres demandes

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande formée par la BNP PPF contre la société PPE en paiement, au titre de la garantie prévue par l'article L. 311-33 devenu L. 312-56 du code de la consommation, du capital emprunté de 34 500 euros, puisque M. [S] a été condamné à restituer cette somme au prêteur, et qu'elle est donc sans objet.

M. [S] demande par ailleurs la condamnation du prêteur, in solidum avec la société PPE, à procéder au démontage de l'installation et à la remise en état de la toiture.

Mais le prêteur, tiers au contrat principal, ne saurait se voir imputer les conséquences dommageables de l'exécution de sa prestation par le fournisseur puis de l'anéantissement du contrat principal annulé.

Cette demande sera donc rejetée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Devant être regardée comme partie principalement succombante, la société PPE supportera seule les dépens de première instance et d'appel.

Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de M. [S] l'intégralité des fais exposés à l'occasion des procédures de première instance et d'appel et non compris dans les dépens, en sorte que la société PPE sera condamnée à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les autres demandes d'application de l'article 700 du code de procédure civile plus amples ou contraires formées à hauteur d'appel seront quant à elles rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme en l'ensemble de ses dispositions le jugement rendu le 24 mai 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc ;

Prononce la nullité du contrat principal conclu entre M. [F] [S] et la société Préservation du Patrimoine Energie le 30 juillet 2019 ;

Constate la nullité du contrat de prêt conclu entre M. [F] [S] et la société BNP Paribas Personal Finance le 13 septembre 2019 ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine Energie à payer à M. [F] [S] la somme de 34 500 euros au titre de la restitution du prix ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine Energie à reprendre, à ses frais et après restitution du prix de vente, l'ensemble des matériels posés au domicile de M. [F] [S] et à remettre la toiture en l'état, et ce dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Condamne M. [F] [S] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 34 500 euros au titre de la restitution du capital emprunté, sauf à déduire l'ensemble des règlements effectués par l'emprunteur au prêteur au cours de la période d'exécution du contrat de prêt, avec intérêts au taux légal à compter du 5 avril 2024 ;

Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de son recours en garantie à l'encontre de la société Préservation du Patrimoine Energie ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine Energie à payer à M. [F] [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Préservation du Patrimoine Energie aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

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