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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 21 octobre 2020, n° 18/03764

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

SCI SANMI

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Penavayre

Vice-président :

M. Arriudarre

Conseiller :

Mme. Martin De La Moutte

Avocat :

Me Peyclit

Avocat :

Me Egea - SELARL LEVI - EGEA - LEVI

CA Toulouse n° 18/03764

20 octobre 2020

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié du 1er octobre 2010 passé en l'étude de Maître GARRIGOU notaire associé à Colomiers, la SCI SANMI a donné à bail commercial à la SARL LE COCHON VOLANT un local situé [Adresse] Moulin à Plaisance du Touch pour une durée de neuf ans, destiné à l'exploitation d'un fonds de commerce de restaurant, moyennant un loyer de 2500 € hors taxes et hors charges par mois.

Aux termes de cet acte, Monsieur L E et son épouse Madame K E associés uniques de la société locataire se sont portés cautions solidaires et indivisibles du preneur, pour le paiement du loyer, des charges, de tous intérêts de retard, frais, indemnités et autres accessoires dus en vertu du bail.

Par acte sous seing privé du 29 avril 2011 enregistré le 9 mai 2011, Monsieur et Madame E ont cédé l'intégralité des parts sociales de la SARL LE COCHON VOLANT à Madame H X épouse G et à Madame Z X pour un prix total de 5000 €. La dénomination sociale de la société locataire a été modifiée pour s'appeller désormais la SARL AMIRA.

Par actes du 14 et 15 octobre 2015, la SCI SANMI a fait notifier à la SARL LE COCHON VOLANT et aux cautions solidaires, un commandement de payer la somme de 32 531,42 € puis, par acte d'huissier du 17 juin 2015, a assigné la SARL AMIRA et les époux E devant le juge des référés afin de faire constater la résolution du bail commercial par l'effet de la clause résolutoire et obtenir le paiement des loyers et charges demeurés impayés.

Par ordonnance réputée contradictoire du 24 juillet 2015, le juge des référés a constaté la résiliation du bail avec effet au 15 novembre 2014, constaté le départ volontaire du preneur à cette date et condamné solidairement la SARL AMIRA, Monsieur et Madame E en leur qualité de cautions solidaires de la SARL LE COCHON VOLANT à payer par provision à la SCI SANMI la somme de 60 747, 28 € à valoir sur les arrérages de loyers et des charges au 15 novembre 2014 et la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, y compris le coût du commandement de payer.

L'ordonnance de référé a été signifiée le 28 septembre 2015.

La SARL AMIRA a cessé son activité et a été radiée d'office du registre du commerce et des sociétés le 18 août 2015.

Le 2 février 2016, un commandement de payer aux fins de saisie vente a été signifié aux époux E et le 12 février 2016 une saisie attribution a été pratiquée sur leur compte bancaire domicilié à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE qui s'est révélée fructueuse à hauteur de 21'722,51 euros et de 70,61 euros.

Par ordonnance du juge de l'exécution du 1er juin 2016, les époux E ont été déboutés de l'ensemble de leurs contestations formées à l'encontre de la procédure d'exécution et demandes de délais.

Par acte d'huissier du 16 mars 2016, Monsieur L E et Madame K A épouse E ont fait assigner la SCI SANMI devant le tribunal de Grande instance de Toulouse aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, notamment la déchéance de tous les accessoires de la dette principale, frais et pénalités , la somme due devant ainsi être ramenée au montant des loyers dus en principal, à l'exclusion de tout autre somme.

Par jugement du 31 mai 2018, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- déclaré recevables les conclusions récapitulatives, moyens et prétentions développés par les demandeurs

- réputé non écrite la clause de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion de l'engagement souscrit par Monsieur L E et Madame K A épouse E dans le contrat de bail commercial du 1er octobre 2010 (et a en conséquence retenu que l'engagement des époux E était un engagement de caution simple pour être contraire aux dispositions de l'article L341-5 du code de la consommation devenu L331-3)

- déclaré irrecevable le bénéfice de discussion soulevé trop tardivement par les cautions à l'encontre du créancier

- débouté Monsieur L E et Madame K A épouse E de leurs demandes de dommages et intérêts

- déchu la SCI SANMI de son droit aux indemnités accessoires, frais et pénalités afférents à sa dette principale à l'encontre de Monsieur L E et Madame K A épouse E en vertu de leur engagement de caution du 1er octobre 2010

- rejeté toutes demandes autres ou plus amples formées par les parties

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire .

Par déclaration enregistrée au greffe le 27 août 2018, les consorts E ont interjeté appel du jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable le bénéfice de discussion soulevé trop tardivement par les cautions à l'encontre du créancier, les a déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts , a rejeté leurs autres demandes et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 18 juillet 2019, Monsieur et Madame D demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Toulouse le 31 mai 2018 en ce qu'il a déclaré irrecevable le bénéfice de discussion comme ayant été soulevé trop tardivement par les cautions à l'encontre du créancier, débouté les époux E de leurs demandes de dommages et intérêts, rejeté toutes demandes autres ou plus amples, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile et dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens,

Et, statuant de nouveau :

A titre principal,

- de déclarer recevable le bénéfice de discussion,

- de constater que la SCI SANMI ne justifie pas de poursuites à l'égard du débiteur principal la SARL AMIRA,

- de constater que la SCI SANMI a commis une faute en n'informant pas les cautions dès le premier incident de paiement et en laissant augmenter la dette locative, faute qui a causé un préjudice aux époux E,

- de constater que les cautions sont déchargées dans la mesure où la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opéreren faveur des cautions,

En conséquence':

- de dire et juger que la SCI SANMI a engagé sa responsabilité contractuelle,

- de dire et juger que les époux E ne sont pas redevables des arriérés de loyer et des accessoires,

- de condamner la société SANMI à payer à Monsieur et Madame E la somme de 64.062,45 € à titre de dommages et intérêts,

- d'ordonner la compensation entre les sommes dues par chacune des parties à la partie adverse et d'ordonner éventuellement la restitution des sommes trop versées à la société SANMI,

A titre subsidiaire':

- de déclarer recevable la demande des époux E tendant à voir leur engagement de caution jugé inopposable,

- de dire et juger que l'engagement de caution contracté par Monsieur et Madame E est disproportionné,

En conséquence,

- de dire et juger que l'engagement de caution contracté par Monsieur et Madame E ne peut être opposé par la SCI SANMI,

- de dire et juger que Monsieur et Madame E ne sont pas redevables des arriérés de loyer et des accessoires,

- de condamner la société SANMI à rembourser à Monsieur et Madame E les sommes indûment perçues en exécution de la décision du Juge des référés,

- de condamner la société SANMI à verser à Monsieur et Madame E la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la présente instance outre 2.000 € pour la première instance ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, les appelants font valoir que :

- que la clause de renonciation au bénéfice de discussion est réputée non écrite de sorte que les cautions peuvent opposer son bénéfice au créancier

- que les cautions ne sont pas tenues solidairement avec le débiteur principal

- qu'en s'abstenant de poursuivre au préalable le débiteur principal, la bailleresse a engagé sa responsabilité

- que le créancier n'a pas rempli son obligation d'information envers les cautions en cas de défaillance du débiteur principal et que si cette information avait été dispensée elle aurait permis d'éviter l'augmentation de la dette

- que le bailleur a commis une faute en se montrant négligent dans le recouvrement de la dette locative

- qu'en vertu de l'article 2314 du code civil, la caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en sa faveur de la caution et que tel est le cas en l'espèce, la bailleresse ayant privé la caution d'un droit préférentiel

- que le défaut d'information et l'action tardive de la société SANMI constituent des fautes ayant causé d'importants préjudices financiers aux consorts E

- qu'il y a lieu conformément à l'article 1289 du code civil de prononcer la compensation entre les sommes dues par les époux E à la société SANMI et les dommages intérêts dus par la société SANMI aux consorts E

- à titre subsidiaire, que l'engagement de caution est disproportionné et donc inopposable.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 09 octobre 2019, la société SCI SANMI demande à la cour:

- de rejeter toutes les conclusions adverses, comme injustes et mal fondées,

- de confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE du 31 mai 2018 en toutes ses dispositions.

- de déclarer irrecevable l'action de Monsieur et Madame E aux fins de faire juger inopposable leur engagement de caution.

- de dire et juger que Madame K B M E et Monsieur L

E ne rapportent pas la preuve du caractère manifestement disproportionné de leur engagement de caution lors de sa souscription

- de débouter Madame K B M E et Monsieur L E de l'ensemble de leurs demandes

- de condamner Madame B M E et Monsieur L E à verser à la SCI SANMI la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

L'intimée fait valoir pour l'essentiel:

- qu'au visa de l'article 2299 du code civil, le créancier n'est obligé de discuter le débiteur principal que lorsque la caution le requiert, sur les premières poursuites dirigées contre elle ; or les époux D n'ont pas demandé à la SCI SANMI de discuter la dette auprès du débiteur principal lors des premières poursuites engagées contre eux

- que le bailleur ne tient ni de la loi ni du contrat l'obligation d'assigner son preneur en résiliation du bail pour non paiement des loyers dans le mois qui suit la première défaillance

- que le bail prévoit qu'en cas de défaillance du preneur, le temps de la résiliation du bail est laissé à l'appréciation du bailleur en sorte qu'il n'y a aucune inexécution ou mauvaise exécution justifiant l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société SANMI

- que la demande relative à la disproportion de leur engagement de caution est nouvelle en cause d'appel et que l'action est prescrite

- que les époux D échouent à démontrer le caractère disproportionné de l'engagement de caution.

Il y a lieu de se reporter expressément aux conclusions susvisées pour plus ample informé sur les faits de la cause, moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 27 juillet 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l' engagement de caution des époux E':

Il n'est pas contesté que les époux E sont demeurés cautions du preneur en vertu du bail commercial conclu avec la SCI SANMI le 1er octobre 2010 nonobstant la cession de parts sociales intervenue en faveur de Mesdames G et X par acte sous seing privé du 29 avril 2011, le bailleur s'étant opposé par lettre recommandée du 3 avril 2014 à la cession tant que les loyers en retard qui s'élevaient à 32'262,34 euros au 28 février 2014 ne seraient pas réglés.

Les appelants demandent de dire que la clause de solidarité stipulée à l'acte notarié du 1er octobre 2010 est réputée non écrite dès lors qu'elle ne respecte pas les dispositions de l'article L341-5 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2003 devenu l'article L331-3 du même code qui dispose que' «'les stipulations de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion figurant dans un contrat de cautionnement consenti par une personne physique au bénéfice d'un créancier professionnel sont réputées non écrites si l'engagement de la caution n'est pas limité à un montant global, expressément et contractuellement déterminé, incluant le principal, les intérêts, les frais et accessoires'».

Ces dispositions s'appliquent à tous les cautionnements solidaires consentis par des personnes physiques au profit d'un créancier professionnel, peu important qu'ils soient constatés par acte authentique.

Il n'est pas contesté par la SCI SANMI qu'elle est un créancier professionnel au sens de ce texte.

L'action tendant à voir déclarer une clause non écrite n'est pas susceptible de prescription et peut être soulevée en tout état de cause par la partie qui y a intérêt .

Dès lors c'est à bon droit que le Premier juge, après avoir constaté que l'engagement n'était limité à aucun montant déterminé, a déclaré non écrite la clause de solidarité et de renonciation au bénéfice de division et de discussion stipulée dans l'acte notarié du 1er octobre 2010 et en conséquence, a dit que les cautions n'étaient tenues que d'un cautionnement simple, conformément à l'article 2298 du code civil qui prescrit dans ce cas de discuter préalablement les biens du débiteur principal .

Cependant conformément à l'article 2299 du Code civil, le créancier n'est obligé de discuter le débiteur principal que lorsque la caution le requiert sur les premières poursuites dirigées contre elle. Elle doit agir dès les premières poursuites faute de quoi elle s'expose à ce que sa demande soit écartée lorsqu'elle intervient avec retard.

Il y a lieu d'approuver la décision déféré en ce qu'elle a considéré qu'en l'espèce les cautions qui n'avaient pas opposé le bénéfice de discussion dès les premières poursuites formées à leur encontre, c'est-à- dire dès l'assignation délivrée devant le juge des référés à la suite du commandement de payer du 15 octobre 2014 et avaient attendu l'instance engagée sur l'assignation du 16 mars 2016 pour invoquer ce moyen, avaient agi tardivement.

Il y a lieu de constater que les appelants se sont également abstenus d'invoquer le bénéfice de discussion dans l'instance les opposant au créancier poursuivant devant le juge de l'exécution à la suite de la saisie attribution pratiquée sur leur compte le 12 février 2016.

Dès lors ils ne sont pas fondés à reprocher à la SCI SANMI de ne pas avoir tenté de discuter préalablement la dette auprès de la société cessionnaire et le jugement du 31 mai 2008 sera confirmé de ce chef sauf à dire qu'il y a lieu d'écarter le bénéfice de discussion au lieu de déclarer la demande irrecevable.

Sur les manquements reprochés à la SCI SANMI':

En vertu de l'article L341-6 du code de la consommation (dans sa rédaction applicable en la cause), le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique au plus tard avant le 31 mars de chaque année le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie ainsi que le terme de l'engagement. À défaut la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la première information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.


De même l'ancien article L341-1 du code de la consommation prévoit que toute personne physique qui s'est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement. Si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle a n'a été informée.

La SCI ne conteste pas avoir manqué à ses obligations légales puisque le premier incident de paiement remonte au mois de mai 2013 et qu'elle a attendu le 14 octobre 2014 pour délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire. De même elle n'a délivré aucune information sur l'évolution annuelle de l'engagement de caution.

Dès lors il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il l'a déchue du paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis le premier incident de paiement, la créance étant fixée au montant des loyers impayés en principal sans pouvoir être majorée des accessoires, frais et pénalités de retard.

Les manquements du créancier professionnel aux dispositions protectrices du droit de la consommation envers les cautions personnes physiques, comme aux dispositions de l'article 2293 du Code civil lorsque le code de la consommation n'est pas applicable, sont sanctionnés par les dispositions précitées et ne sauraient engager la responsabilité de la SCI SANMI sur le fondement du droit commun sauf à établir l'existence d'une faute distincte.

Il est prétendu en l'espèce que la SCI SANMI aurait tardé à les informer de l'évolution de la dette locative qui s'est aggravée pendant plusieurs mois puisque le premier commandement de payer n'a été délivré que les 14 et 15 octobre 2014.

Cependant la société bailleresse n'a été informée de la cession qu'en avril 2014 ( alors que la cession est intervenue par acte sous seing privé du 29 avril 2011) en sorte que jusqu'à cette date elle pouvait légitimement penser que les cautions, en leur qualité d'associés uniques et de dirigeants de la société preneuse, étaient informés de la situation d'impayé. Elle les a, par courrier du 3 avril 2014 dûment informé de l'existence de l'arriéré en fournissant l'attestation de son expert comptable arrêtée au 26 mars 2014.

Il sera rappelé que les cautions dirigeantes sont à l'origine de la perte de garantie dont disposait le bailleur sur le fonds de commerce du fait de la cession de parts sociales intervenue au profit d'un tiers sans qu'il en soit avisé. Dans ce contexte particulier où les appelants ont volontairement diminué les garanties du bailleur, ils doivent établir le lien de causalité qui existe entre le retard de dénonciation de l'arriéré de loyers et le préjudice qu'ils invoquent.

Or en l'espèce, ils ne rapportent nullement la preuve d'avoir été en mesure de s'acquitter des échéances de loyer s'ils avaient été informés plus tôt de la défaillance du preneur puisque dans leur courrier du 20 avril 2014, ils rappellent qu'ils se sont retrouvés «'au chômage pour l'un et auto entrepreneur pour l'autre, tout en étant fichés à la banque de France'» en sorte qu'ils ne justifient pas de leur capacité à se substituer au preneur pour le paiement des loyers qui s'établissent à 2500 € hors taxes et hors charges par mois.

Dès lors il y a lieu d'approuver les motifs du premier juge qui a retenu à juste titre que la faute intentionnelle de la SCI SANMI n'était pas caractérisée et qu'en outre la preuve d'un préjudice certain lié au comportement du bailleur n'était pas non plus rapportée puisque rien ne permettait de garantir qu'une information en temps utile aurait eu une incidence sur le montant de la dette.

Monsieur et Madame E seront donc déboutés de leur demande de dommages intérêts.

Sur le caractère disproportionné de l'engagement de caution':

Les appelants soutiennent que leur engagement était manifestement disproportionné à leurs biens et revenus et demandent à en être déchargés sur le fondement de l'ancien article L341-4 du code de la consommation.

Les époux E sont demandeurs à l'action pour être à l'initiative de la procédure engagée par acte d'huissier du 16 mars 2016. Leur prétention n'est pas un moyen de défense au sens de l'article 71 du code de procédure civile puisqu'elle ne tend pas à faire rejeter une prétention adverse, aucune demande de condamnation n'étant formée par le créancier dans le cadre de la présente instance.

La demande est recevable au sens de l'article 565 du code de procédure civile en ce qu'elle tend aux mêmes fins que celles soumises au Premier juge même si, son fondement juridique est différent puisque l'action vise à faire juger qu'ils ne sont redevables ni des arriérés de loyers ni de ses accessoires.


L'action doit être engagée dans un délai de prescription de cinq ans et il leur appartient d'établir, conformément à l'article 2224 du Code civil, qu'ils ont pu légitimement ignorer le caractère disproportionné de leur engagement au moment où il a été souscrit et qu'il y a lieu de reporter le point de départ du délai au jour où ils ont eu connaissance ou auraient dû avoir connaissance des faits permettant d'exercer leur action.

C'est au jour où il leur a été notifié le commandement de payer des 14 et 15 octobre 2014 (après en avoir été préalablement informé par le bailleur le 3 avril 2014) qu'ils ont eu connaissance du fait que les obligations résultant de l'engagement allaient être mises à exécution du fait de la défaillance du débiteur principal.

Dès lors il y a lieu de retenir cette date comme point de départ du délai de prescription.

En formant leur demande pour la première fois dans leurs conclusions notifiées le 22 novembre 2018, il y a lieu de constater qu'ils ont agi dans le délai de cinq ans et que leur action n'est pas prescrite.

En application de l'article 1315 du Code civil, il appartient à la caution qui entend opposer au créancier les dispositions de l'article L341-4 ancien du code de la consommation devenu l'article L332-1 de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement lors de sa conclusion, par rapport à ses biens et ses revenus.

Par contre c'est au créancier qu'il appartient de rapporter la preuve qu'au moment où la caution est appelée, le patrimoine de cette caution lui permet de faire face à ses obligations.

En l'espèce, les appelants indiquent que leurs revenus s'établissaient en 2010 à 1100 € par mois pour Madame E et à 1600 € pour Monsieur E, qu'ils étaient propriétaires d'un bien immobilier donné en location mais que les loyers ne couvraient pas les mensualités du contrat de prêt s'y rapportant. Au jour où ils sont appelés, ils déclarent n'être plus propriétaires d'aucun bien, l'immeuble ayant été détruit à la suite d'un incendie et percevoir pour l'un, une somme de 700 € par mois et pour l'autre 1200 € à titre d'allocation (revenus 2014).

Ils ne produisent toutefois aucun justificatif de leur situation personnelle à la date de l'engagement de caution ni même leur avis d'imposition afférent à l'année 2010. Quant à leur situation patrimoniale elle n'est pas plus justifiée et aucune estimation de l'immeuble dont ils étaient propriétaires n'est fournie.

La cour ne pouvant se contenter de simples allégations, il y a lieu de constater qu'ils sont défaillants dans la charge de la preuve qui leur incombe . En conséquence ils seront déboutés de leur demande.

Sur les autres demandes':

Compte tenu des circonstances, il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI SANMI partie des frais irrépétibles par elle exposés pour assurer sa représentation en justice.

Il y a lieu de lui allouer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel.

La partie qui succombe ne peut se voir allouer aucune indemnité au titre des frais irrépétibles et doit supporter les dépens de l'instance.


PAR CES MOTIFS

La cour statuant après en avoir délibéré,

Confirme le jugement du 31 mai 2018 en toutes ses dispositions, sauf à dire qu'il y a lieu d'écarter le bénéfice de discussion invoqué par les cautions au lieu de déclarer leur demande irrecevable,

Y ajoutant,

Déclare Monsieur et Madame E recevables en leur demande fondée sur le caractère disproportionné de leur engagement de caution,

Dit que l'action n'est pas prescrite,

Au fond, les déboute de leur demande,

Condamne solidairement Monsieur L E et Madame K B M E à verser à la SCI SANMI la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel,

Rejette le surplus des demandes et les prétentions contraires',

Condamne Monsieur L E et Madame K B M E aux dépens de l'instance.

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