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Décisions

CA Rennes, 5e ch., 22 octobre 2025, n° 22/05738

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 22/05738

22 octobre 2025

5ème Chambre

ARRÊT N°- 223

N° RG 22/05738 - N° Portalis DBVL-V-B7G-TET7

(Réf 1ère instance : 12/09/2022)

S.A.R.L. VEGETAL BANLIAT

C/

M. [T] [X]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 22 OCTOBRE 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

Assesseur : Monsieur Benoit LHUISSET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Septembre 2025

devant Madame Virginie PARENTet Madame Virginie HAUET, magistrats rapporteurs, tenant seules l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Octobre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.R.L. VEGETAL BANLIAT

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Isabelle GERARD de la SELARL GERARD REHEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-MALO

INTIMÉ :

Monsieur [T] [X]

né le 26 Janvier 1966 à [Localité 6]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Laura LUET de la SELARL HORIZONS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Par acte authentique en date du 2 mars 2012, M. [T] [X] a cédé à la société Végétal Banliat son fonds de commerce d'horticulture.

Par acte authentique du même jour, M. [T] [X] et Mme [B] [S] ont donné à bail à la société Végétal Banliat deux parcelles, sises à [Localité 1] et cadastrées section I, n°[Cadastre 2] et n°[Cadastre 3], ainsi que les serres horticoles et maraîchères y étant situées, pour une durée de 9 ans.

Par acte d'huissier en date du 6 août 2020, M. [T] [X] a fait délivrer à la société Végétal Banliat un congé, visant la clause de refus de renouvellement du bail, sans offre de paiement d'une indemnité d'éviction.

Par acte d'huissier en date du 13 janvier 2021, la société Végétal Banliat a fait assigner M. [T] [X] devant le tribunal judiciaire de Saint-Malo.

Par jugement en date du 12 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Saint-Malo a :

- constaté que le bail liant les parties est arrivé à son terme et que la société Végétal Banliat est occupante sans droit ni titre depuis le 1er mars 2021,

- dit que la société Végétal Banliat devra quitter les lieux loués, sis au lieu-dit [Adresse 4] à [Localité 1] et cadastrés sous section I, n°[Cadastre 2] et n°[Cadastre 3], dans le mois suivant la signification du présent jugement,

- dit qu'à défaut de départ volontaire, son expulsion desdits lieux, ainsi que celle de tout occupant de son chef, si besoin avec le concours de la force publique, sera ordonnée, après signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux,

- rappelé que les meubles se trouvant dans les lieux devront être retirés par la société Végétal Banliat, et que le cas échéant ceux-ci pourront être vendus ou seront réputés abandonnés, à ses frais,

- condamné la société Végétal Banliat à payer à M. [T] [X] une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du dernier loyer, et ce à compter du 1er mars 2021, et jusqu'à parfaite libération des lieux et remise des clefs,

- débouté la société Végétal Banliat de sa demande de paiement de la somme de 255 000 euros au titre de l'indemnité d'éviction,

- débouté la société Végétal Banliat de sa demande de paiement de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

- condamné la société Végétal Banliat à payer la somme de 2 500 euros à M. [T] [X] au titre des frais irrépétibles,

- dit que la société Végétal Banliat supportera ses frais irrépétibles ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Le 28 septembre 2022, la société Végétal Banliat a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 27 décembre 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 12 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Saint-Malo en toutes ses dispositions,

- constater la nullité de la mise en demeure du 1er septembre 2014 et du congé avec refus de renouvellement du 6 août 2020,

- dire et juger mal fondé le congé avec refus de renouvellement sans versement d'indemnité d'éviction qui lui a été délivré le 6 août 2020 par M. [T] [X],

- en conséquence, condamner M. [T] [X] à lui verser une indemnité d'éviction fixée à la somme de 255 000 euros,

- condamner M. [T] [X] à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et du non respect de la clause de non concurrence stipulée au contrat de cession,

- condamner M. [T] [X] à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [T] [X] aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées le 26 janvier 2023, M. [T] [X] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Saint-Malo du 12 septembre 2022 dans toutes ses dispositions,

Y additant,

- condamner la société Végétal Banliat à lui régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 juin 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur le congé avec refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction

La société Végétal Banliat demande l'infirmation du jugement qui a considéré que le congé délivré le 6 août 2020 était régulier et qui a retenu trois des quinze motifs invoqués par le bailleur pour valider le congé sans indemnité d'éviction.

Elle considère que les conditions d'application de l'article L.145-14 du code de commerce ne sont pas remplies en la forme en ce que la mise en demeure prévue par les textes n'a pas été délivrée. Elle soutient que le courrier délivré par le bailleur le 1er septembre 2014 ne peut être considéré comme valant mise en demeure car il est demandé une remise en état des lieux avant le 1er mars 2021 soit après la date de délivrance du congé. Elle ajoute qu'il ne s'agit pas d'un acte extrajudiciaire exigé à peine de nullité. Elle fait également valoir que le jugement a ajouté au texte en indiquant que la mise en demeure n'est pas utile lorsque l'infraction commise est irréversible. Elle ajoute qu'en tout état de cause, les dégradations reprochées par M. [X] ne sont pas irréversibles puisqu'il est possible de remettre les lieux en leur état antérieur au jour du terme du bail par des démolitions et éventuellement des plantations. Elle argue que M. [X], dans son courrier du 1er septembre 2014, admettait lui-même le caractère réversible des dégradations invoquées en sollicitant une remise en état des parties communes avant la fin du bail.

Elle fait également valoir que l'acte d'huissier du 6 août 2020 valant congé est entaché d'une nullité pour vice de forme en ce qu'il ne comporte aucune mention des voies de contestation possible en indiquant uniquement que le locataire a un délai de deux ans pour saisir le tribunal sans préciser quelle juridiction ni sa compétence territoriale. Elle expose que le refus de renouvellement comporte, en outre, une erreur sur la date de fin du délai de recours en indiquant le 1er mars 2021 au lieu du 2 mars 2023 conformément aux dispositions de l'article L.145-9 du code de commerce.

Sur le fond, elle conteste l'ensemble des motifs graves invoqués par M. [X] pour justifier de son refus de renouvellement sans indemnité d'éviction. Elle rappelle que le jugement n'a retenu que trois motifs sur les quinze invoqués par le bailleur à savoir :

- les coupes de végétaux et la pose de gravillons dans l'allée et le parking : elle expose que la haie de thuya était très ancienne et en mauvais état, que l'ewoldi, le pin d'Autriche et le hêtre sont morts et ont dû être arrachés, ce qui relève, selon elle, d'un entretien normal du bien. Elle indique que seules les zones boueuses ont été gravillonnées de même que les parkings préexistants, ce qui constitue une amélioration et non une dénaturation des lieux. Elle conteste les trois attestations produites par le bailleur qui sont toutes identiques avec les mêmes fautes de frappe.

- les travaux d'aménagement sans l'accord du bailleur (agrandissement du petit chalet) : elle expose qu'il s'agit d'une ancienne serre qu'elle a agrandie avec l'accord du bailleur et qui correspond à un local commercial composé d'un magasin en grande partie en hangar ouvert outre un wc et l'installation d'un frigo pour les salariés qui ne nécessitait pas une demande préalable de permis de construire.

- l'installation de la fosse à graisse : elle rappelle que l'installation de cette fosse est obligatoire suite à l'installation des wc des salariés, le local commercial loué, dans son état initial, ne comportait pas de sanitaires. Elle argue que la société Veolia a considéré que l'installation de cette fosse était conforme et n'envoyait aucun rejet à l'extérieur en précisant que cette installation a été contrôlée postérieurement à son installation sans qu'aucune déclaration ni validation préalable ne soit nécessaire. Elle ajoute que la mairie n'a relevé aucune infraction au PLU.

La société Végétal Banliat sollicite une indemnité d'éviction au visa de l'article L.145-27 du code de commerce à hauteur de la somme de 255 000 euros au vu de l'évaluation de valeur réalisé par son expert-comptable.

En réponse, M. [X] sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Il expose que son refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction repose sur plusieurs motifs graves et légitimes :

- la réalisation de travaux sans autorisation en ce que le locataire a procédé à un agrandissement du hangar présent sur la parcelle sans son autorisation contrairement à ce que soutient la société Végétal Banliat. Il précise ne l'avoir autorisée qu'à détruire la serre plastique et non à agrandir le bâtiment existant. Il reproche au locataire de ne pas justifier de la régularité des travaux d'agrandissement effectués par un permis de construire ou une déclaration préalable de travaux et considère qu'il ne démontre pas la régularité administrative des travaux réalisés.

- l'empiétement d'une parcelle voisine par le mur érigé par le locataire.

- la disparition de coffres de terrain en retirant de la terre cultivable sur près d'un mètre de profondeur pour la combler avec du remblai et la recouvrir de graviers.

- l'installation d'une fosse à graisse sans autorisation et aux abords d'un étang. Il rappelle que la société Végétal Banliat reconnaît avoir fait procéder à cette installation de sa propre initiative sans autorisation du bailleur et soutient que cette installation a été faite sans autorisation administrative comme l'indique le procès-verbal de contrôle dressé par Veolia.

- la destruction de la serre en ce que la société Végétal Banliat a remplacé le verre cathédrale par des plaques de plastique et qu'il manque certains panneaux de verre en façade, ce qui constitue une transformation des lieux.

- la destruction d'arbres et arbustes en ce que le locataire a procédé au déboisement de parcelle et à des travaux de terrassement sans son autorisation. Il fait valoir que le bien donné en location a été dénaturé en faisant disparaître la haie de Thuya de 30 ans d'âge qui faisait office de brise vue et qui a été remplacée par une bâche plastique mais également un pin noir d'Autriche de 10 mètres et 20 ans d'âge, des bambous de 3 mètres de large et de hauteur, un prunus de 30 ans d'âge, un ewoldi de 5 mètres et plusieurs m2 de bois. Il expose que le terrassement a nécessairement pour effet de dénaturer un espace auparavant boisé.

Il en déduit que ces graves manquements aux obligations contractuelles qui ont dénaturé les parcelles louées sont graves et justifient le refus de renouvellement sans indemnité d'éviction.

S'agissant de la validité du congé, il rappelle les conditions de forme posées par l'article L.145-17 du code de commerce pour soutenir que la société Végétal Banliat rajoute au texte en affirmant que le congé est nul faute de préciser quel tribunal doit être saisi. Il précise que l'erreur sur le délai pour saisir le tribunal ne cause aucun grief puisque le locataire a saisi le tribunal de sa contestation dans le délai imparti.

Il ajoute que les manquements reprochés au locataire pour certains aux conséquences irréversibles, à savoir l'agrandissement d'un bâtiment sur plus de 40m2 sans autorisation administrative, la création d'une construction sur la parcelle voisine, la réalisation d'un terrassement, la destruction de déchets toxiques, l'installation d'une fosse à graisse, la destruction de 200m2 de couverture en verre cathédrale, la destruction de nombreux végétaux et l'installation électrique non conforme, justifient qu'il n'avait pas à faire précéder ce congé d'une mise en demeure préalable.

En tout état de cause, il rappelle que l'absence de mise en demeure adressée au locataire n'entraîne pas la nullité du congé avec refus de renouvellement du bail, que le congé subsiste et produit ses effets mais le locataire conserve son droit à indemnité d'éviction.

A titre subsidiaire sur le montant de l'indemnité d'éviction, il demande que le locataire produise ses 3 derniers bilans comptables outre les documents administratifs relatifs au bâtiment. Il lui reproche d'affirmer que le non-renouvellement du bail lui imposerait de cesser son activité alors qu'elle ne démontre pas l'impossibilité de retrouver une parcelle à proximité directe sur laquelle la production pourrait être reportée. A défaut de produire les pièces sollicitées, il demande de rejeter la demande d'indemnité d'éviction de la société Végétal Banliat.

Aux termes de l'article L. 145-14 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, il doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.

L'article L. 145-17 du code de commerce dispose que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit de l'inexécution d'une obligation, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa.

* Sur la régularité formelle du congé

L'article L.145-9 du code de commerce dispose notamment que le congé doit être donné par acte extrajudiciaire. Il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné et indiquer que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné.

M. [X] a délivré un congé de refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction le 6 août 2020 par acte extra-judiciaire en précisant les motifs pour lesquels il est donné ainsi que le délai de deux ans. S'il est exact que l'acte comporte une erreur en ce qu'il indique que le preneur doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans ' à compter de ce jour' au lieu de 'à compter de la date pour laquelle le congé est donné', il n'en demeure pas moins que la société Végétal Banliat a saisi la juridiction en contestation du congé et a été mise en mesure de faire valoir ses moyens au fond, et notamment de solliciter une indemnité d'éviction, de sorte qu'elle ne justifie pas d'un grief que lui aurait causé cette irrégularité.

En ce qui concerne le fait que le congé ne comporte aucune des voies de contestation en indiquant uniquement le délai de deux ans pour saisir le tribunal sans préciser quelle juridiction ni sa compétence territoriale, l'article L.145-9 précité ne mentionne pas cette précision. De surcroît, l'appelante ne justifie pas d'un quelconque grief en ce qu'elle a été en mesure de faire valoir ses moyens au fond devant la juridiction compétente dans le délai imposé par le texte précité.

En revanche, il est acquis que le congé délivré le 6 août 2020 par acte extra-judiciaire n'a pas été précédé d'une mise en demeure préalable telle qu'exigée par les dispositions de l'article L.145-17 précité. Toutefois, le tribunal a justement rappelé que la mise en demeure n'est pas exigée dans les cas d'infractions irréversibles et instantanées et ce sans rajouter au texte mais conformément à la jurisprudence constante en la matière. En effet, dans de tels cas, la mise en demeure devient inutile, puisqu'il n'est pas possible de faire cesser ou de réparer l'infraction définitivement commise.

Il convient, dès lors, d'examiner si les différents motifs invoqués par le bailleur à l'appui de son congé sont irréversibles ou non avant d'examiner s'ils sont graves et légitimes.

M. [X] a entendu, dans le congé délivré le 6 août 2020, se prévaloir des motifs graves et légitimes suivants :

'- non respect du contrat ;

travaux provoquant la dénaturation même du bien,

non-respect des lois sur l'environnement,

détérioration du bien par des travaux non autorisés (ainsi qu'il est stipulé dans le bail)

possible pollution et contamination du sol (expertises au cas où)

destruction partielle du bien

- provoquer un agrandissement du petit chalet, le tout dépassant les 40m2 donc soumis à un permis de construire puisqu'il est érigé sur une dalle en béton, avec électricité et pièce de vie,

- ériger une construction s'appuyant sur le mur du voisin, M. [W]

- brûler des déchets toxiques, plastiques, etc et ceci malgré la présence d'une benne,

- réaliser un nouveau terrassement qui a enlevé des centaines de m3 de terreau que vous avez transféré sur votre propriété,

- remblayer avec des déchets de construction et gravier,

- installer une fosse à graisse sans autorisation légale et ceci à moins de 30m de mon puit et de mon étang,

- destruction d'une haie de thuya zebrina de 5 mètres de haut sur 20 mètres (30 ans d'âge),

- destruction d'un pin noir d'Autriche de 10 mètres (20 ans d'âge)

- destruction d'arbres d'ornements de plus de 30 ans d'âge,

- destruction de gros bambous de 3 mètres de large sur 3 mètres de hauteur,

- destruction d'un prunus pissiflera de 60/80 cm de diamètres (30 ans d'âge),

- destruction d'un ewoldi de 5 mètres,

- élagage et disparition de plusieurs m3 de bois,

- destruction d'au moins 200m2 de couverture en verre cathédrale d'une serre en verre et remplacée par un simple PVC bas de gamme,

- installations électriques enterrées sans autorisation,

- traversée de route sans autorisation.'

Il résulte de ces motifs que notamment l'abattage d'arbres et de haies ainsi que la réalisation de terrassements sont par nature irréversibles de sorte que l'absence de mise en demeure préalable, par acte extra-judiciaire, est sans incidence sur la régularité du congé qui est ainsi régulier en la forme.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, M. [X] n'a jamais considéré que ces motifs étaient réversibles dans son courrier du 1er septembre 2014 puisqu'il écrit qu'il interdit au locataire de dénaturer son bien et déplore l'abattage d'arbres d'ornement et le fait qu'il ne va pas exiger de replanter un hêtre de 10m de haut.

Au fond, s'agissant des motifs graves et légitimes, le jugement entrepris a considéré que M. [X] n'apportait aucun élément au soutien des motifs allégués tendant à la pollution des sols, au non-respect de la législation environnementale, à la destruction de déchets toxiques sur le terrain, à la mise en place d'installations électriques, à la transformation des terres cultivables par l'adjonction de gravier, la disparition de terre ni la traversée de la route reliant les propriétés de chacun mais également la construction sur un fonds voisin et la transformation de terres cultivables. La cour constate que M. [X] n'apporte devant elle aucun élément à l'appui de ces différents motifs qui ont été justement écartés par les premiers juges sans que la cour n'y trouve matière à critique. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté lesdits motifs.

- Sur la destruction du vitrage de la serre

Le contrat de bail stipule notamment à la rubrique 'entretien - réparations' que le preneur a la charge des réparations concernant les réfections et remplacements des devantures, vitrines, glaces et vitres, volets ou rideaux de fermeture. Il devra maintenir en parfait état de fraîcheur les peintures intérieures et extérieures. Il devra aviser immédiatement et par écrit le bailleur des désordres de toute nature affectant les lieux loués. Il déclare avoir été informé des conséquences de sa carence éventuelle.

Il est constant que le preneur a remplacé les vitres par du PVC. S'il est d'évidence que cette modification ne peut être considérée ni comme de l'entretien ni comme un simple remplacement, le jugement a considéré, à bon droit, que ce non-respect du contrat de bail ne relevait pas d'un motif grave en ce que les modifications concernent l'aspect esthétique du bâtiment et non sa structure et sont, en tout état de cause, susceptibles d'être régularisées en fin de bail. Le jugement a justement écarté ce motif comme grave et légitime.

- Sur l'agrandissement d'un bâtiment sans autorisation

Le contrat de bail prévoit en page 5 à la rubrique 'transformations' que le preneur aura à sa charge exclusive toutes les transformations et réparations nécessitées par l'exercice de son activité et précise que 'ces transformations ne pourront être faites qu'après avis favorable et sous la surveillance et le contrôle de l'architecte du bailleur dont les honoraires et vacations seront à la charge du preneur'.

La société Végétal Banliat reconnaît avoir construit un 'petit local commercial' en ayant agrandi un petit chalet pour en faire un magasin, en grande partie en hangar ouvert sur l'extérieur avec une pièce comprenant un wc pour ses salariés et un frigo. Elle soutient avoir eu l'autorisation du bailleur pour réaliser cet agrandissement. Or le courrier de M. [X] qu'elle invoque ne peut être considéré comme valant acceptation de cet agrandissement puisque aux termes de ce courrier, le bailleur donne uniquement l'autorisation au locataire de 'détruire la serre plastique au vu de son état de vétusté sans être obligé de reconstruire ni dédommager' et autorise le preneur à construire sa serre et la démonter lors de son départ. Il ne fait nullement autorisation au preneur d'agrandir le chalet pour créer un local commercial.

Les travaux d'agrandissement ont ainsi été réalisés par le preneur sans l'autorisation du bailleur mais également sans l'avis favorable de son architecte et ce en violation des dispositions du bail précitées.

Le jugement a justement considéré que ces travaux d'agrandissement étaient d'une particulière gravité en ce qu'ils modifiaient la structure du bâti donné à bail.

- Sur l'installation d'une fosse à graisse

Le bailleur expose qu'il a installé cette fosse à graisse pour les besoins de son exploitation, ses salariés ayant besoin d'accéder à des sanitaires. Or il ne démontre pas avoir eu l'autorisation du bailleur ni l'avis favorable de l'architecte pour procéder à cette transformation conformément à la disposition précitée du bail.

Le fait que cette installation ait fait l'objet d'un contrôle de fonctionnement correct par Veolia sans pour autant avoir fait l'objet d'une autorisation administrative préalable est sans incidence, de même que le fait que la Mairie n'aurait pas relevé d'infractions au PLU dans la mesure où l'installation même de cette fosse à graisse constitue une violation d'un contrat de bail d'une particulière gravité en ce qu'elle modifie de manière substantielle le bien. Le jugement a justement relevé que le terrain se trouve grevé d'une construction au sol imposant une prise en charge technique et sanitaire pour s'assurer de son fonctionnement avec un risque de pollution des sols.

- Sur l'abattage d'arbres et le terrassement du terrain

La société Végétal Banliat reconnaît avoir enlevé la haie de Thuya, l'ewoldi, le pin d'Autriche et le hêtre en arguant de leur mauvais état. Toutefois, les photographies qu'elle produit sont insuffisantes à établir la nécessité d'arracher la haie et de couper lesdits arbres de sorte qu'il ne peut être retenu que cela a été effectué dans le cadre de l'obligation d'entretien du preneur.

Il est également établi que la société Végétal Banliat a procédé à des travaux de terrassements pour mettre du gravier sur les anciennes zones boueuses. Or il a été rappelé que les stipulations du bail relatives aux transformations prévoient qu'elles ne peuvent être réalisées qu'après avis favorable et sous la surveillance et le contrôle de l'architecte du bailleur. Il n'est pas contesté que le preneur n'a pas sollicité l'avis de l'architecte du bailleur pour faire procéder à ces travaux de terrassements.

Il résulte des photographies produites par les parties, confirmées par les attestations de M. [W], Mme [Z] et M. [G] que ces transformations réalisées en infraction au contrat de bail ont modifié la présentation du terrain et son aspect esthétique et ce de manière irréversible, ce qui caractérise un motif grave justement invoqué par le bailleur.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le jugement a retenu que le preneur avait gravement manqué à ses obligations contractuelles relatives à l'entretien du bien et à l'interdiction de procéder à des transformations du bien loué sans l'autorisation du bailleur et qu'il en a justement déduit que ces manquements cumulés relèvent d'une gravité suffisante pour être constitutifs de motifs légitimes au refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction. Le jugement sera confirmé.

- Sur la demande de dommages et intérêts de la société Végétal Banliat

La société Végétal Banliat reproche à M. [X] d'avoir voulu lui nuire par tous moyens possibles et d'avoir, pour cette raison, refusé de renouveler le bail commercial. Elle lui reproche d'avoir repris une activité de pépiniériste à proximité et d'avoir pris contact avec ses clients au mépris de la clause de non-concurrence. Elle sollicite une indemnisation à hauteur de 10 000 euros en raison de son préjudice moral et du préjudice lié au non-respect de la clause de non-concurrence.

M. [X] conclut au débouté de cette demande en l'absence de démonstration d'une quelconque faute commise par lui.

Le refus de renouvellement de bail sans indemnité d'éviction ayant été confirmé par la cour, il ne peut être reproché aucune faute à M. [X] à ce titre.

S'agissant du non-respect de la clause de non-concurrence, la société Végétal Banliat ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations.

Le jugement, qui a débouté la société Végétal Banliat de sa demande de dommages et intérêts, sera confirmé.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Succombant en son appel, la société Végétal Banliat sera condamnée à verser la somme de 2 000 euros à M. [X] au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel. Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute la société Végétal Banliat de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamne la société Végétal Banliat à payer la somme de 2 000 euros à M. [T] [X] au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la société Végétal Banliat aux entiers dépens d'appel.

Le greffier, La présidente,

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