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CA Lyon, 8e ch., 29 octobre 2025, n° 24/06910

LYON

Arrêt

Autre

CA Lyon n° 24/06910

29 octobre 2025

N° RG 24/06910 - N° Portalis DBVX-V-B7I-P33V

Décision du Tribunal de Grande Instance de VALENCE

au fond du 21 mai 2019

RG : 17/03230

S.A. ALLIANZ

C/

[G]

[K]

[F]

S.A.R.L. BIO BAT

Société QBE EUROPE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 29 Octobre 2025

APPELANTE :

ALLIANZ IARD, SA d'assurances immatriculée au RCS de [Localité 9] (92) sous le numéro 592 110 291, dont le siège est sis [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Valérie ORHAN-LELIEVRE de la SELARL SAINT-EXUPERY AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 716

Ayant pour avocat plaidant Me Matthieu DAYREM de la SCP DAYREM & CASTORI- DAYREM, avocat au barreau de la DRÔME

INTIMÉS :

M. [M] [G]

né le 07 Novembre 1979 à [Localité 11] (38)

[Adresse 8]

[Localité 3]

Appelant dans le RG 24/07413

Représenté par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547

Ayant pour avocat plaidant Me Chloé VINCENT-HYTIER, avocat au barreau de LYON

Madame [X] [K], née le 21 octobre 1964 à [Localité 10] (26), et Monsieur [V] [F], né le 23 juillet 1965 à [Localité 7] (83), demeurant ensemble [Adresse 4]

Représentés par Me Sandrine VARA de la SELARL CINETIC AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1041

Ayant pour avocat plaidant Me Delly BONNET de la SELAS ABOCAP CONSEIL, avocat au barreau de VALENCE

QBE EUROPE SA/NV, société de droit étranger venant aux droits de la société QBE INSURANCE (EUROPE) LIMITED, prise en son établissement en France sous la dénomination « QBE EUROPE » immatriculé au RCS de [Localité 9] sous le numéro B 842 689 556, et dont le siège est sis [Adresse 2], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés es-qualité audit siège

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

Ayant pour avocat plaidant Me Jérôme TERTIAN, avocat de la SCP TERTIAN ' BAGNOLI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL BIO BAT, immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le numéro B 508 803 970, dont le siège est sis [Adresse 12], prise en la personne de son gérant en exercice

Signification de la déclaration de saisine le 26 septembre 2025 en l'étude d'huissier

Défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 17 Septembre 2025

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Septembre 2025

Date de mise à disposition : 29 Octobre 2025

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Bénédicte BOISSELET, président

- Nathalie LAURENT, conseiller

- Olivier GOURSAUD, magistrat honoraire

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.

Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 21 janvier 2015, un incendie est survenu dans la maison d'habitation de Mme [X] [K] et de M. [V] [F], ci-après les consorts [K] et [F], sise à [Localité 6] (26) et dont la toiture a été intégralement détruite.

Une expertise diligentée par la société Allianz Iard, assureur habitation des consorts [K] et [F], a conclu que l'hypothèse la plus plausible était celle d'un incendie ayant pris naissance à l'intérieur du coffre contenant le conduit flexible d'évacuation des fumées d'un insert installé par la société Bio Bat.

Il est apparu au cours des opérations d'expertise que la société Bio Bat n'était pas assurée et qu'elle avait sous-traité les travaux d'installation du flexible d'évacuation des fumées à M. [M] [G], assuré auprès de la société QBE Insurance.

Dans un rapport déposé le 19 décembre 2016, M. [I], expert judiciaire désigné suivant ordonnance de référé du 26 mars 2015, a indiqué que les travaux exécutés par la société Bio Bat et par M. [G] étaient tout à fait inadaptés et ne pouvaient que provoquer un départ d'incendie dans la zone la plus haute du caisson.

La société Allianz Iard, assureur des consorts [K] et [F], a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Valence, la société Bio Bat, M. [G] et son assureur la société QBE Insurance Limited aux fins d'indemnisation des préjudices subis et de remboursement des sommes versées à ses assurés, action qu'elle a fondée sur les dispositions de l'article 1792, ou subsidiairement 1147 du code civil, à l'encontre de la société Bio Bat, et de l'article 1382 (ou 1240) du code civil à l'encontre de M. [G].

Les consorts [K] et [F] ont de leur côté sollicité auprès des mêmes parties l'indemnisation de leur préjudice pour lequel ils n'avaient pas été indemnisés.

Par jugement du 21 mai 2019, le tribunal de grande instance de Valence a :

rejeté les demandes formées à l'encontre de la société QBE Insurance Limited,

condamné in solidum la société Bio Bat et M. [M] [G] à rembourser à la société Allianz Iard la somme de 271.724,78 € outre intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017,

condamné in solidum la société Bio Bat et M. [M] [G] à payer à Mme [X] [K] et M. [V] [F] la somme de 73.761,53 € à titre de dommages et intérêts,

condamné in solidum la société Bio Bat et M. [M] [G] à payer à la société Allianz Iard une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum la société Bio Bat et M. [M] [G] à payer à Mme [X] [K] et M. [V] [F] une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

condamné in solidum la société Bio Bat et M. [M] [G] aux dépens comprenant ceux de l'instance en référé et les frais d'expertise judiciaire,

ordonné l'exécution provisoire de la décision.

M. [G] et la société Bio Bat ont interjeté appel de ce jugement et par un arrêt en date du 30 août 2022, la cour d'appel de Grenoble a confirmé ce jugement en toutes ses dispositions.

Plusieurs pourvois en cassation ont été formés à l'encontre de cette décision et par un arrêt en date du 11 juillet 2024, la Cour de cassation a :

cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société QBE Insurance Europe Limited, aux droits de laquelle vient la société QBE Europe, en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 30 août 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble,

remis, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Lyon,

condamné la société QBE Europe aux dépens,

en application de l'article 700 du code de procédure civile, condamné la société QBE Europe à payer à Mme [K] et M. [F] la somme globale de 3.000 € et à M. [G] la somme de 3.000 €, et rejeté les autres demandes.

La Cour de cassation, au visa de l'article 1134 devenu 1103 du code civil, a considéré qu'en estimant que M. [G] n'était pas assuré pour la pose du flexible de tubage sans rechercher comme cela lui était demandé si la pose d'un flexible de tubage d'un poêle à bois n'était pas comprise dans l'activité N° 31 'installations thermiques de génie climatique' déclarée par l'assuré, compte tenu de la définition de cette activité dans la nomenclature annexée aux conditions particulières du contrat d'assurance, soit la réalisation d'installations (production, distribution, évacuation) de chauffage et de refroidissement', la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision.

Par deux déclarations des 28 août et 25 septembre 2024, la société Allianz Iard et M. [M] [G] ont saisi la cour de renvoi.

Les deux instances ont été jointes.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 juillet 2025, la société Allianz Iard demande à la cour de :

réformer le jugement du 21 mai 2019 en ce qu'il a rejeté ses demandes dirigées contre la société QBE Europe SA/NV venue aux droits de la société QBE Insurance Europe Limited, assureur de M. [M] [G],

statuant à nouveau,

dire acquise la garantie de la société QBE Europe SA/NV dans l'incendie survenu le 21 janvier 2015 dont son assuré [G] et la société Bio Bat ont été définitivement déclarés responsables et condamnés, in solidum, à lui rembourser la somme de 271.724,78 € outre intérêts légaux à compter du 18 septembre 2017,

et en conséquence,

condamner la société QBE Europe SA/NV à la rembourser, in solidum avec son assuré [G] et la société Bio Bat, la somme de 217.724,78 €, outre les intérêts légaux à compter du 18 septembre 2017,

condamner la même à lui verser, in solidum avec la société Bio Bat et M. [G], la somme de 2.500 € allouée par le tribunal sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la même, et sous la même solidarité, aux entiers dépens de 1ère instance et de référé, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'aux dépens d'appel exposés devant la cour d'appel de Grenoble dont distraction au profit de Maître Dayrem pour ceux le concernant sur son affirmation de droit,

débouter la société QBE Europe SA/NV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,

y ajoutant,

condamner la société QBE Europe SA/NV, la société Bio Bat et M. [G] à lui verser in solidum la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

condamner, sous la même solidarité, la société QBE Europe SA/NV, la société Bio Bat et M. [G] aux entiers dépens d'appel exposés devant la présente juridiction, dont distraction au profit de Maître Orhan-Lelievre pour ceux la concernant sur son affirmation de droit.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 7 août 2025, M. [M] [G] demande à la cour de :

déclarer recevable l'appel de la société Allianz Iard,

déclarer recevable son appel incident sur renvoi,

le recevoir en ses prétentions et les dire bien fondées,

réformer le jugement rendu le 21 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Valence en ce qu'il a notamment :

- rejeté les demandes formées à l'encontre de la société QBE Insurance Limited,

- jugé que la société Bio Bat et lui même avaient commis des fautes graves dans l'exécution des travaux d'installation du poêle à bois à l'origine de l'incendie,

- condamné in solidum les mêmes à rembourser à la société Allianz Iard la somme de 271.724,78 € outre intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017,

- condamné in solidum les mêmes à payer à Mme [X] [K] et M. [V] [F] la somme de 73.761,53 € à titre de dommages et intérêts,

- condamné in solidum les mêmes à payer à la société Allianz Iard une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les mêmes à payer à Mme [K] M. [F] une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les mêmes aux entiers dépens,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.

statuant de nouveau,

déclarer qu'il était assuré pour les travaux réalisés selon contrat 83857-4081,

déclarer que l'activité d'installation d'insert poursuivie par lui était incluse dans son contrat d'assurance,

déclarer acquise la garantie de la société QBE Europe SA/NV dans l'incendie survenu le 21 janvier 2015 dont lui même, assuré, et la société Bio Bat ont été déclarés responsables et condamnés in solidum, à rembourser à la société Allianz Iard la somme de 271,724,78 € outre intérêts légaux à compter du 18 septembre 2017,

déclarer acquise la garantie de la société QBE Europe SA/NV dans l'incendie survenu le 21 janvier 2015 dont lui même, assuré, et la société Bio Bat ont été déclarés responsables et condamnés in solidum, à verser aux consorts [K] et [F] la somme de 73.761,78 € à titre de dommages-intérêts non couverts par leur assureur la société Allianz Iard,

réformer le jugement rendu le 21 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Valence en ce qu'il a rejeté la garantie de QBE Europe SA/NV en sa qualité d'assureur de lui même et débouter cet assureur de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

en conséquence,

condamner la société QBE Europe SA/NV à le relever et garantir en application du contrat d'assurance (police n °83857-4081) de toutes condamnations intervenues,

ce faisant,

condamner la société QBE Europe SA/NV à verser à la société Allianz Iard la somme de 217.724,78 € outre les intérêts légaux à compter du 18 septembre 2027,

tenir compte de l'exécution forcée engagée par les consorts [K] et [F] et condamner la société QBE Europe SA/NV à lui rembourser la somme totale de 23.439,19 € (à parfaire ' actualisée au 1er juill. 2025),

condamner la société QBE Europe SA/NV à verser aux consorts [K] et [F] la somme de 50.322,59 € à titre de dommages-intérêts non couverts par leur assureur la société Allianz Iard,

condamner la QBE Europe SA/NV à lui verser la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société QBE Europe SA/NV aux entiers dépens de 1ère instance et de référé, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, les dépens d'appel exposé devant la cour d'appel de Grenoble et ceux exposés devant la Cour de cassation, et ceux exposés devant la présente juridiction, distraits en application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Gaël Sourbe, avocat, sur son affirmation de droit.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 2 septembre 2025, Mme [X] [K] et M. [V] [F] demandent à la cour de :

déclarer recevable leur appel incident sur renvoi,

les recevoir en leurs prétentions, les dire bien fondées et rejeter, en conséquence, toute demande et prétention contraires,

réformer le jugement rendu le 21 mai 2019 par tribunal de grande instance de Valence en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes formées par eux à l'encontre de la société d'assurance QBE Europe SA/NV venant aux droits de la société QBE, assureur de M. [G],

et statuant de nouveau,

dire que la société d'assurance QBE Europe SA/NV doit garantie à M. [G] et doit donc assurer la réparation intégrale des dommages causés par ce dernier,

condamner, en conséquence, la société d'assurance QBE Europe SA/NV in solidum avec la société Bio Bat et M. [G] à leur verser la somme de 73 761,53 €, assortie des intérêts légaux frais et accessoires y liés,

condamner in solidum la société Bio Bat, M. [G] et son assureur, la société QBE, à leur régler la somme de 2.500 € allouée par le tribunal de grande instance de Valence, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de première instance et de référé, dont distraction au profit de Maître Bonnet pour ceux la concernant sur son affirmation de droit,

débouter la société QBE Europe SA/NV de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions,

y ajoutant,

condamner in solidum la société Bio Bat, M. [G] et son assureur, la société QBE Europe SA/NV à leur régler la somme complémentaire de 2.500 € allouée par la cour d'appel de Grenoble, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de ladite procédure d'appel, dont distraction au profit de Maître Bonnet pour ceux la concernant sur son affirmation de droit,

condamner in solidum la société Bio Bat, M. [G] et son assureur, la société QBE Europe SA/NV, à leur régler la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de la présente procédure dont distraction au profit de Maître Vara pour ceux la concernant sur son affirmation de droit.

Aux termes de ses conclusions en date du 27 décembre 2024, la société QBE Europe SA/NV demande à la cour de :

à titre principal,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté toutes les demandes formées à son encontre alors qu'elle n'a jamais assuré M. [G] pour ses activités de fumisterie,

constater que M. [G] n'a entendu s'assurer auprès d'elle qu'au titre des activités ''30. Plomberie ' Installations sanitaires'' et ''31. Installations thermiques de génie climatique'',

juger que l'activité ''32. Fumisterie'', régulièrement proposée à la souscription, n'a pas été déclarée par M. [G] à son assureur QBE,

la dire et juger fondée à opposer une non-assurance,

rejeter toutes demandes formées à son encontre,

la mettre hors de cause,

subsidiairement,

rejeter les demandes formées à son encontre au titre du préjudice moral et du préjudice de jouissance,

faire application des franchises et plafonds prévues au contrat d'assurance,

en tout état de cause,

condamner la société Allianz Iard et tout succombant à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Laffly, sur son affirmation de droit.

La déclaration de saisine a été signifiée à la société Bio Bat par la société Allianz Iard suivant exploit d'huissier du 26 septembre 2024 remis à domicile et par M. [G] suivant exploit d'huissier du 15 octobre 2024 remis à personne morale.

La société Bio Bat n'a pas constitué avocat devant la cour de ce siège.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 septembre 2025.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1° sur la portée de la cassation :

En application de l'article 624 du code de procédure civile, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce.

En l'espèce, l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble n'est cassé qu'en ce qu'il rejette les demandes formées à l'encontre de la société QBE Insurance et les dispositions de cet arrêt non atteintes par la cassation, à savoir la reconnaissance de la responsabilité de la société Bio Bat et de M. [G], le montant des dommages allouées aux victimes et la condamnation des co-responsables in solidum, sont désormais irrévocables, seul restant en litige la garantie de la société QBE Insurance, assureur de M. [G].

2° sur la garantie de la société QBE Europe SA/NV :

La société Allianz Iard fait valoir que :

telle que rédigée par la nomenclature annexée aux conditions particulières, l'activité 31 'installations thermiques de génie climatique' est garantie par le contrat qui n'exclut pas la réalisation d'une installation de chauffage, dont l'évacuation par poêle ou insert,

or, tel est bien le cas en l'espèce puisque M. [G] a effectué la pose d'un flexible de tubage et donc la réalisation d'une installation de chauffage, avec production et évacuation,

il ne peut donc être affirmé que la prestation défectueuse de M. [G] aurait relevé d'une autre activité professionnelle, indépendante et autonome de celle déclarée et les conditions de la garantie de l'assureur QBE sont réunies,

si toutefois, la cour estime que les travaux de M. [G] n'entraient pas dans l'activité garantie, elle ne pourra que constater le manquement de QBE à son obligation de conseil à l'égard de son client dès lors qu'il est patent qu'à la lecture de son contrat, il pouvait légitimement croire que la garantie lui était acquise lorsqu'il procédait à l'installation d'un insert,

enfin, en ayant pris la direction du procès en toute connaissance de cause, QBE a renoncé à soulever toute exception, dont celle de la non couverture du sinistre.

Les consorts [K] et [F] font valoir à leur tour que les juges de première instance ont considéré à tort que M. [G] n'était pas assuré pour la prestation réalisée.

Ils déclarent que :

les conditions particulières du contrat d'assurance couvrant l'activité professionnelle de M. [G] prévoient expressément que l'activité '31. Installations thermiques de génie climatique' comprend la réalisation d'installations (production, distribution, évacuation) de chauffage et même s'il fallait considérer que l'intervention de M. [G] se serait limitée à l'installation du flexible de tubage, il s'agit bien de la réalisation d'une évacuation de chauffage,

l'intervention de M. [G] entre donc bien dans l'activité pour laquelle il a entendu s'assurer, à savoir l'activité 31,

en outre, la société QBE qui a pris la direction du procès pour le compte de son assuré dès le stade de la procédure de référé et avait parfaitement connaissance des conditions d'intervention de son assuré, a renoncé en toute connaissance de cause à se prévaloir de l'absence de garantie de M. [G],

enfin, la société QBE n'est pas fondée à solliciter l'exclusion de la réparation de leur préjudice de jouissance et moral, faute de pouvoir justifier d'une clause d'exclusion de ces préjudices rédigée de manière formelle et limitée et en caractère apparent dans le contrat.

M. [G] fait valoir que :

le contrat détaille le contenu des activités couvertes par la police d'assurance et pour l'activité 'chauffage et installations thermiques', il stipule clairement que cette activité comprend celle de la réalisation d'installations de production de distribution et d'évacuation de chauffage et de refroidissement,

en l'espèce il a participé à la réalisation de l'installation thermique relevant de l'activité déclarée N° 31, en particulier l'évacuation du chauffage,

en outre, à la seule lecture des conditions particulières, il pouvait croire que la garantie lui était acquise en procédant au raccordement de l'insert de la cheminée, et en l'absence de précision explicite au contrat, il pourrait être considéré la société QBE Insurance a manqué à son égard à son obligation de conseil et d'information,

enfin, la société QBE qui avait une parfaite connaissance de l'existence de sa facture lors des opérations d'expertise amiable et qui n'a opposé que tardivement une non garantie, en prenant la direction du procès, a renoncé à se prévaloir de l'absence de garantie.

La société QBE Europe SA/NV déclare que :

les travaux réalisés sur le chantier par M. [G] qui a seulement posé un flexible de tubage, facturée 250 €, ont consisté en une prestation de fumisterie, laquelle se définit usuellement comme le secteur d'activité professionnelle relatif à l'installation et la réparation des conduits de cheminée, outre la réalisation des travaux concourant à l'évacuation des fumées de combustion,

M. [G] n'ayant pas déclaré exercer cette activité, ni acquitté la moindre prime à cet effet, ces travaux de fumisterie n'ont donc fait l'objet d'aucune assurance auprès d'elle,

par ailleurs, l'installation d'un flexible inoxydable de tubage destinée à l'extraction des fumées, description technique faite par l'expert judiciaire de la prestation confiée à M. [G] ne relève pas de la définition de l'activité ''31. Installations thermiques de génie climatique y compris ramonage et aérothermie, à l'exclusion de la pose de capteurs solaires'' telle qu'elle est définie dans le contrat d'assurance,

le contrat est dépourvu d'équivoque en ce que l'activité 'installations thermiques de génie climatique' y est contractuellement définie comme la réalisation d'installations de chauffage et de refroidissement, y compris VMC et si les parties ont convenu d'intégrer dans la liste proposée une activité distincte dénommée 'fumisterie', c'est précisément parce qu'elle renvoie à des prestations différentes tenant à la réalisation de systèmes d'évacuation des produits de combustion,

par ailleurs, elle n'a nullement manqué à son obligation de conseil et d'information et M. [G] était parfaitement informé tout à la fois des termes et limites des activités par lui souscrites et de la définition de l'ensemble des autres activités assurables qu'il n'a pas entendu déclarer exercer,

enfin, le moyen tiré de la direction du procès sans réserve valant acceptation doit être écarté alors même qu'il n'est pas démontré que la facture de M. [G] lui a été communiquée et qu'elle est intervenue à réception de l'assignation sous réserve de garantie.

A titre subsidiaire, elle oppose aux demandes les limites de garantie prévues au contrat en faisant valoir que les préjudices moral et de jouissance sollicités par les consorts [K] et [F] ne sont par couverts par le contrat et elle demande l'application des franchises et plafonds prévues au contrat.

sur ce :

Il est constant que la garantie de l'assureur ne concerne que le secteur d'activité professionnelle déclaré par le professionnel.

Il est stipulé dans les conditions particulières du contrat souscrit par M. [G] auprès de la société QBE Insurance que l'assuré déclare exercer les activités suivantes :

'30. Plomberie-installations sanitaires à l'exclusion de la pose de capteurs solaires,

31. Installations thermiques de génie climatique y compris ramonage et aérothermie, à l'exclusion de la pose de capteurs solaires...'

et ce 'Tel que défini dans la nomenclature QBE jointe en annexe.'

Il est précisé dans cette nomenclature que l'activité 31 'installations thermiques de génie climatique y compris ramonage et aérothermie, à l'exclusion de la pose de capteurs solaires' est définie comme suit :

'réalisation d'installations, (production, distribution, évacuation) de chauffage et de refroidissement, y compris de ventilation mécanique contrôlée (VMC), hors techniques de géothermie et pose de capteurs solaires intégrés...'

Il se déduit de ces définitions claires et précises que M. [G] est assuré auprès de la société QBE Insurance pour tout type d'installation de chauffage, autre que les capteurs solaires, comprenant la production, la distribution et/ou l'évacuation sans qu'il y ait lieu, en l'absence de précisions dans le contrat, de considérer que l'activité assurée devrait nécessairement être l'installation complète d'un système de chauffage.

Ainsi, la participation de l'assuré à une telle installation thermique est garantie du moment qu'elle vise, ne fut ce que pour partie, à assurer la production, la distribution ou l'évacuation des produits de combustion.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise établi par l'expert judiciaire que les consorts [K] et [F] ont fait installer un insert de chauffage à bois au rez-de-chaussée de leur maison, raccordé dans la souche de cheminée existante sur la toiture de l'étage.

L'expert indique en conclusion de son rapport que la société Bio Bat a fait effectuer la pose d'un poêle à bois et la pose d'un tubage flexible en acier inoxydable afin d'évacuer la fumée à partir de la sortie haute du poêle jusqu'en toiture par la souche maçonnerie existante.

Il précise que tous les matériels et matériaux ont été fournis par la société Bio Bat et posés par M. [G].

Ce dernier a indiqué dans une attestation figurant au rapport qu'il a effectué la mise en place du poêle et du tubage et qu'il a posé ce tubage en partant du rez-de-chaussée, en traversant les voutins et le plancher de l'étage, a ouvert le caisson de placo qui obstruait la souche et l'ancien conduit de cheminée et a guidé le tubage jusqu'à la souche et l'a fixé à l'aide d'un collier et l'a raccordé au poêle en bas.

Il est ainsi acquis aux débats que M. [G] a installé depuis le poêle du rez-de-chaussée et jusqu'au toit un flexible destiné à évacuer les fumées produites par le poêle et ce faisant, M. [G] a participé à une installation thermique, notamment dans sa fonction d'évacuation des fumées, de sorte qu'il doit être considéré que la prestation réalisée par celui-ci est bien couverte par le contrat d'assurance souscrit auprès de la société QBE Insurance.

La société QBE Insurance doit donc sa garantie à M. [G] et il convient, réformant le jugement de ce chef, de la condamner à le garantir des condamnations mises à sa charge et de la condamner, dans les limites de la garantie prévue au contrat, à indemniser les consorts [K] et [F] ainsi que la société Allianz, subrogée dans les droits de ses assurés.

S'agissant de cette dernière, le montant de sa créance ne fait pas l'objet de discussions et s'élève à 271.724,78 € correspondant aux frais de remise en état du bâtiment et de remplacement de mobilier.

La société QBE Insurance est donc condamnée, in solidum avec M. [G] et la société Bio Bat, à verser à la société Allianz Iard la somme de 271.724,78 € outre intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017.

La créance des consorts [K] et [F] n'est pas discutée par la société QBE Insurance à concurrence de 54.071,53 € se décomposant comme suit :

- solde facture société BPF non pris en charge par la société Allianz : 10.177,90 €

- achat matériaux pour travaux d'agencement et de finition : 3.615,70 €

- solde facture [P] non pris en charge par la société Allianz : 2.138,00 €

- complément d'indemnité remplacement meubles et effets personnels : 30.000,00 €

- frais d'électricité, d'eau, d'assurance et de déménagement : 2.345,00 €

- frais de séances de thérapie : 343,00 €

- préjudice financier (indisponibilité financière) : 1.000,00 €

- coût financier suspension du prêt immobilier : 3.855,85 €

- agios et frais solde débiteur du compte : 371,08 €

- franchise contrat Allianz : 225,00 €

La société QBE Insurance conteste par contre devoir indemniser le préjudice moral des consorts [K] et [F] retenu à hauteur de 10.000 € et leur préjudice de jouissance retenu à hauteur de 9.600 € considérant que le contrat ne garantit pas ces préjudices car ils ne correspondent pas à une perte financière.

Les consorts [K] et [F] contestent cette position au motif qu'elle ne justifie pas d'une clause d'exclusion de ces préjudices qui serait rédigée de manière formelle et limité, en caractère apparent dans le contrat.

Il convient toutefois de relever que la société QBE Insurance n'invoque pas une exclusion de garantie mais que sa contestation porte sur l'étendue de sa garantie de sorte que les dispositions de l'article L 112-4 du code des assurances invoquées par les consorts [K] et [F] sont sans application en l'espèce.

Aux termes des conditions particulières du contrat souscrit par M. [G] sont garantis les dommages matériels ou immatériels consécutifs et les dommages immatériels non consécutifs et il est précisé dans la définition des dommages immatériels consécutifs ou non consécutifs figurant aux conditions générales (article 2.11 et 2.12) qu'il s'agit de préjudices économiques.

Il n'est pas contestable en l'espèce que l'indemnisation du préjudice de jouissance des consorts [K] et [F] à hauteur de 9.600 € n'est pas destinée à les indemniser d'une perte financière, tel que des frais de loyer qu'ils auraient dû engager parce qu'ils n'auraient pu occuper la maison pendant les travaux, mais de la gêne à eux occasionnée dans l'occupation de leur logement du fait de l'exécution des travaux.

Il ne s'agit donc pas d'un préjudice économique.

Il en est de même du préjudice moral subi par Mme [K] en raison de la répercussion de l'incendie de sa maison sur son état de santé.

La société QBE Insurance est donc fondée en sa contestation sur ce point et sa condamnation au profit des consorts [K] et [F] est limitée à 54.071,53 €.

Il convient également, s'agissant d'une garantie ne relevant pas des garanties obligatoires, de dire que la société QBE Insurance est fondée à opposer la franchise prévue au contrat soit 1.000 € pour les dommages matériels et 1.000 € pour les dommages immatériels.

3. sur la demande de remboursement formée par M. [G] à l'encontre de son assureur :

M. [G] qui précise qu'il fait l'objet d'un recouvrement forcé de la part des consorts [K] et [F] demande à la cour de condamner la société QBE Europe SA/NV à lui rembourser la somme de 23.439,19 €, somme à parfaire.

Toutefois, la condamnation de la société QBE Insurance à le garantir des condamnations mises à sa charge dans la limite de ses garanties, se suffit par elle même sans qu'il y ait lieu à ce stade et alors qu'un compte entre les parties sera nécessaire, de procéder en sus à une condamnation chiffrée.

4. sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu'il a exclu la société QBE Insurance des condamnations aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile qui sont également mises à sa charge.

La société Bio Bat, M. [G] et la société QBE Europe SA/NV sont condamnés in solidum aux dépens afférents à la procédure devant la cour d'appel de Grenoble et à régler à ce titre aux consorts [K] et [F] la somme de 2.500 €, et la société Bio Bat et M. [G] sont garantis de cette condamnation par la société QBE Europe SA/NV.

Les dépens de la présente procédure sont à la charge de la société QBE Europe SA/NV qui succombe en ses prétentions et il est alloué aux consorts [K] et [F] à la société Allianz Iard et à M. [G] la somme de 2.500 € à chacun d'eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant dans les limites de sa saisine,

Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes formées à l'encontre de la société QBE Europe SA/NV ;

statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne la société QBE Europe SA/NV à garantir la société Bio Bat et M. [M] [G] des condamnations mises à leur charge et à indemniser les consorts [K] et [F] ainsi que la société Allianz, subrogée dans les droits de ses assurés, in solidum avec la société Bio Bat et M. [M] [G], et ce, dans les limites de la garantie prévue au contrat ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV, in solidum avec M. [M] [G] et la société Bio Bat, à payer à la société Allianz Iard la somme de 217.724,78 € outre intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017 ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV, in solidum avec M. [M] [G] et la société Bio Bat, à payer aux consorts [K] et [F] la somme de 54.071,53 € outre intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2017 ;

Dit que la société QBE Europe SA/NV est fondée à opposer les franchises prévues au contrat ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV, in solidum avec M. [M] [G] et la société Bio Bat, aux dépens de première instance, comprenant ceux de l'instance en référé et les frais de l'expertise judiciaire, et à payer aux consorts [K] et [F] la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure devant le tribunal de grande instance de Valence ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV, in solidum avec M. [M] [G] et la société Bio Bat, à payer aux consorts [K] et [F] la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure devant la cour d'appel de Grenoble.

Condamne la société QBE Europe SA/NV à garantir M. [M] [G] de ces condamnations aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV à payer aux consorts [K] et [F], à la société Allianz Iard et à M. [G] la somme de 2.500 € à chacun d'eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure ;

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;

Condamne la société QBE Europe SA/NV aux dépens de la présente procédure et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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