CA Versailles, 1re ch. sect. 2, 29 mai 2018, n° 16/07930
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidents :
M. Portelli, Mme Brogly
Conseiller :
Mme Bonnet
FAITS ET PROCEDURE
Suivant acte sous seing privé à effet à compter du 11avril 2012, M. et Mme L. ont donné à bail à Mme Bouchra A., pour une durée de trois ans, un appartement à usage d'habitation situé [Adresse] moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 500 euros outre une provision mensuelle sur charges de 80 euros. Mme F. s'est portée caution solidaire du paiement du loyer, des charges, des réparations locatives, des frais de procédure, des indemnités d'occupation.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 septembre 2014, M. et Mme L. ont notifié à Mme Bouchra A. un congé pour le 10 avril 2015, congé motivé par la reprise du logement.
Puis, par acte d'huissier délivré les 8 septembre et 1er octobre 2015, ils ont assigné Mme Bouchra A. et Mme Fatima A. devant le tribunal d'instance de Boulogne Billancourt en validation de congé, expulsion de la locataire et condamnation solidaire de Mme Bouchra A. et de Mme Fatima A. en paiement de l'arriéré locatif et d'une indemnité mensuelle d'occupation.
Par jugement réputé contradictoire du 30 septembre 2016, le tribunal d'instance de Boulogne Billancourt a :
- constaté le non renouvellement du bail au 11 avril 2015,
- ordonné l'expulsion de la locataire et de tout occupant de son chef,
- condamné solidairement Mme Bouchra A. et Mme Fatima A. à payer à M. et Mme L. une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, charges en sus, à compter du 11 avril 2015 jusqu'à complète libération des lieux ,
- condamné solidairement Mme Bouchra A. et Mme Fatima A. à payer à Mme Fatima A. la somme de 3.480 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2015 au titre de loyers, charges et indemnités mensuelles d'occupation impayés terme juillet 2015 inclus,
- rejeté les demandes plus amples et contraires,
- rejeté la demande de M. et Mme L. au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme Bouchra A. et Mme Fatima A. aux dépens.
Par déclaration du 4 novembre 2016, Mme Fatima A. a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions transmises le 2 février 2017, elle demande à la cour de :
- lui donner acte qu'elle reconnaît devoir régler solidairement avec Mme Bouchra A. les impayés de loyers d'un montant de 1.353,33 euros,
- confirmer le rejet des demandes d'astreinte et d'indemnisation des époux L. au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement dont appel pour le surplus et statuant à nouveau,
- constater la cessation de ses obligations en sa qualité de caution à compter du 11 avril 2015, en raison du non renouvellement du contrat de bail du logement litigieux et objet de la caution,
- dire que seule Mme Bouchra A. est tenue au paiement des indemnités d'occupation dues à compter du 11 avril 2015 jusqu'à complète libération des lieux,
- dire que seule Mme Bouchra A. est tenue au paiement des dépens de première instance,
- condamner solidairement les époux L. au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 1240 du code civil,
- condamner solidairement les époux L. au paiement de la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement Mme Bouchra A. et les époux L. aux entiers dépens de la présente procédure.
Aux termes de leurs conclusions transmises le 30 mars 2017, M. et Mme L. demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris à l'encontre Mme Bouchra A. et de Mme Fatima A. sauf en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes au titre de l'article 700 à l'encontre de Mme Fatima A.,
A titre subsidiaire,
- condamner Mme Fatima A. à payer à M. et Mme L. la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,
- condamner Mme Fatima A. à leur payer la somme de 1 353,33 euros au titre de l'arriéré locatif.
La déclaration d'appel, les conclusions d'appelant et les conclusions de M. et Mme L. ont été signifiées à Mme Bouchra A. par acte d'huissier du 18 mai 2017 remis à étude d'huissier. De leur côté, M. et Mme L. ont également fait signifier à Mme Bouchra A. leurs conclusions par acte du 3 avril 2017 également remis à étude d'huissier.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 25 janvier 2018.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DECISION
1 ) sur l'appel de Mme Fatima A.
Seule la disposition du jugement relative à la condamnation de Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 11 avril 2015 jusqu'à la parfaite libération des lieux et par suite celle relative à la condamnation de Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. au paiement de la somme de 3 480 euros sont critiquées par l'appelante. Les autres dispositions non critiquées de la décision seront confirmées.
Mme Fatima A. indique avoir informé les bailleurs par courrier du 22 juillet 2014 de son souhait de se désengager en tant que caution de Mme Bouchra A. en cas de renouvellement du bail en avril 2015. Elle soutient que son engagement de caution s'est terminé automatiquement avec l'expiration ou la résiliation du contrat de bail et ce dès le 11 avril 2015, en application de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989. Elle estime qu'elle n'est nullement redevable des indemnités d'occupation dues par Mme Bouchra A. seule occupante du bien litigieux.
M. et Mme L. soutiennent que Mme Fatima A. est redevable de l'arriéré locatif dû au 10 avril 2015 soit la somme de 1 353,33 euros.
L'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit que lorsque le cautionnement d'obligations résultant d'un contrat de location ne comporte aucune indication de durée ou lorsque la durée du cautionnement est stipulée indéterminée, la caution peut le résilier unilatéralement. La résiliation prend effet au terme du contrat de location, qu'il s'agisse du contrat initial ou d'un contrat reconduit ou renouvelé, au cours duquel le bailleur reçoit notification de la résiliation.
En l'espèce, le cautionnement donné par Mme Fatima A. ne comportait aucune indication de durée ; par lettre du 22 juillet 2014, Mme Fatima A. a notifié aux bailleurs son intention de mettre fin à son engagement de caution au terme du bail. Le contrat de bail s'est trouvé résilié au 11 avril 2015 ; les bailleurs ne contestent pas que Mme Fatima A. n'est tenue du paiement des loyers et charges que jusqu'au terme du bail et qu'elle n'est pas tenue au paiement des indemnités d'occupation au delà de la résiliation du bail.
La décision entreprise en ce qu'elle a condamné Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 11 avril 2015 jusqu'à la parfaite libération des lieux et condamné Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. au paiement de la somme de 3 480 euros sera infirmée et la condamnation de Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. sera limitée à la somme de 1 353,33 euros.
2 ) sur les autres demandes
Mme Fatima A. prétend avoir subi un préjudice moral du fait des procédures judiciaires qui auraient pu être évitées par les bailleurs.
M. et Mme L. s'opposent à cette demande faisant valoir que Mme F. se reconnaît débitrice mais ne paie pas. Ils allèguent sa mauvaise foi.
Le juge peut condamner à des dommages intérêts celui qui introduit une procédure abusive. Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts pour procédure injustifiée de démontrer l'intention de nuire, la mauvaise foi ou simplement un comportement fautif de la partie adverse.
En l'espèce, Mme Fatima A., alors qu'elle se reconnaît débitrice d'une partie de la dette locative, se contente de conclure au caractère injustifié de la procédure initiée par M. et Mme L. mais ne caractérise nullement leur comportement fautif. Sa demande de dommages et intérêts ne peut donc prospérer. Elle est rejetée.
La décision sera encore confirmée en ce qui concerne les dépens mis à la charge de Mme Bouchra A. et de Mme Fatima A.. S'agissant de la procédure d'appel, M. et Mme L., partie perdante, en supporteront les dépens. L'équité ne commande pas de faire droit aux demandes des parties formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
3 ) sur la rectification de l'erreur matérielle affectant le jugement
Il y a lieu de rectifier d'office l'erreur matérielle affectant le dispositif du jugement en ce qui concerne l'adresse du logement litigieux selon les termes du dispositif qui suit.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, et par défaut,
Infirme le jugement en ce qu'il a condamné Mme Fatima A. au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 11 avril 2015 jusqu'à la parfaite libération des lieux et en ce qu'il a condamné Mme Fatima A. solidairement avec Mme Bouchra A. au paiement de la somme de 3 480 euros, statuant de nouveau de ces chefs,
- déboute M. et Mme L. de leur demande de condamnation de Mme Fatima A. au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 11 avril 2015 jusqu'à la parfaite libération des lieux,
- limite la condamnation solidaire de Mme Fatima A. avec Mme Bouchra A. au paiement du solde locatif à la somme de 1 353,33 euros,
Confirme le jugement pour le surplus,
Rectifie l'erreur matérielle affectant le dispositif du jugement en ce qui concerne l'adresse du logement donné à bail à Mme Bouchra A. et dit qu'il convient de lire : ordonne l'expulsion de
Mme Bouchra A. et de tous occupants de son chef des lieux loués sis 2ème étage, 6 bis (au lieu de 6), rue de la Belle Feuille à Boulogne Billancourt,
Y ajoutant,
Déboute Mme Fatima A. de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne M. et Mme L. aux dépens de la procédure d'appel,
Rejette la demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.