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Décisions

CA Douai, 8e ch. sect. 4, 7 mars 2019, n° 18/00661

DOUAI

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Sci Sarcas

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pecqueur

Conseiller :

Mme Theetten

Conseiller :

Mme Bimba Amaral

Avocat :

Me Thomas

Avocat :

Me Sion

CA Douai n° 18/00661

6 mars 2019

Vu le jugement rendu le 8 janvier 2018 par le tribunal d'instance de Roubaix ;

Vu l'appel formé le 30 janvier 2018 pour M. Rosario V. ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 août 2018 pour M. V. ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 7 décembre 2018 pour la société civile immobilière (SCI) Sarcas ;

Vu l' article L 632-1 du code de la construction et de l'habitation dans sa version applicable à la date de signature du bail , l' article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dans sa version applicable à la cause, 1302 du code civil et 9, 696 et 700 du code de procédure civile ;

Attendu que suivant acte sous seing privé du 1er septembre 2009, la SCI Sarcas a donné à bail à Mme Laurence M. un logement qualifié de meublé situé [...], moyennant paiement d'un loyer mensuel de 390 euros, indexé, outre une provision pour charges ; que M. V. s'est porté caution solidaire en garantie du paiement du loyer et des charges pour une durée de six années ;

Attendu que par ordonnance de référé en date du 7 février 2013, le juge des référés du tribunal d'instance de Roubaix a condamné solidairement Mme M. et M. V. à payer à la SCI Sarcas la somme de 5287,36 euros au titre du solde des loyers, provisions sur charges et indemnités d'occupation échus impayés arrêté au 31 décembre 2012, autorisé Mme M. à s'acquitter du paiement de cette somme par vingt-trois versements mensuels de 100 euros et un dernier correspondant au solde de la dette, suspendu les effets de la clause résolutoire pendant le cours du délai ainsi accordé sous réserve du respect des délais de paiement, condamné in solidum Mme M. et M. V. au paiement d'une somme de 600 euros sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile , rejeté les autres demandes et condamnés Mme M. et M. V. aux dépens ;

Attendu que par actes des 9 août et 6 septembre 2013, la SCI Sarcas a fait dénoncer à M. V. un commandement de payer aux fins de saisie vente pour le recouvrement de la somme de 9 846,47 euros et un procès verbal de saisie attribution ;

Attendu que le juge de l'exécution de Lille a, par jugement du 4 août 2014, ordonné la mainlevée de la saisie attribution à hauteur de 693.82 €, débouté M. V. de ses demandes de mainlevées pour le surplus et lui a accordé des délais de paiement ;

Attendu que par un second jugement du 21 mars 2016, le juge de l'exécution de Lille a rejeté la demande de mainlevée de nouveaux actes d'exécution et accordé des délais de paiement à M. V. ;

Attendu que par acte d'huissier en date du 11 janvier 2017, M. V. a fait assigner la SCI Sarcas devant le tribunal d'instance de Roubaix afin d'obtenir la requalification du bail en bail meublé, l'annulation de l'acte de cautionnement et la condamnation de la SCI Sarcas à lui restituer la somme de 9867,17 euros au titre de la répétition de l'indu ;

Attendu que le jugement entrepris, auquel il convient de se référer pour le rappel de la procédure antérieure, a débouté M. V. de ses demandes et l'a condamné aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme 500 euros sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que M. V. demande à la cour d'infirmer le jugement, d'annuler l'acte de cautionnement et de condamner la SCI Sarcas à lui restituer la somme de 12874,64 euros ;

Attendu que la SCI Sarcas demande à la cour de confirmer le jugement et de débouter M. V. de toutes ses demandes ;

Attendu que M. V. soutient que le bail de Mme M. n'était pas meublé, de sorte qu'il relevait des dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et que l'acte de cautionnement, qui n'est pas conforme à l'article 22-1 de ladite loi est nul ;

Attendu que la SCI Sarcas rappelle que le bail est qualifié de meublé et qu'elle ne loue que des biens meublés ou des locaux commerciaux ainsi qu'il en est justifié par sa déclaration aux services fiscaux, l'attestation de son expert comptable et les états des lieux versés aux débats ;

Attendu qu'un bail meublé suppose que les parties aient eu l'intention de souscrire un contrat de location meublé et que le logement soit garni de meubles en nombre suffisant pour permettre au locataire de vivre convenablement ou normalement ;

Attendu que le bail est intitulé "bail meublé" ;

Attendu que ni l'état des lieux d'entrée, ni la liste relative à l'équipement du logement dans le cadre du bail signé avec Mme M. ne sont versés aux débats ; que le bail est muet sur la contenance des meubles mis à disposition de la locataire ;

Attendu que la copie de la déclaration d'imposition sur les revenus de l'année 2000 ne porte aucune signature ni aucune référence des immeubles appartenant à la société, de sorte qu'elle n'a aucune valeur probante quant au caractère meublé ou non du logement loué à Mme M. ; que l'attestation établie par l'expert comptable est également dénuée de toute force probante quant au caractère meublé de l'appartement en cause ;

Attendu que l'attestation de M. Philippe B., qui énonce que le logement "était refait à neuf et meublé lors de la prise de la possession des lieux" par Mme M. est insuffisamment circonstanciée pour caractériser que l'immeuble était garni de meubles en nombre suffisant pour permettre au locataire de vivre convenablement ou normalement ;

Attendu que pour le surplus, le procès verbal de constat "Reprise des lieux- expulsion" établi par huissier le 23 septembre 2013 est muet sur les meubles et équipements en place dans le logement ; que les photographies qui y sont jointes ne font apparaître qu'une table, sans chaise ni autre élément de nature à caractériser le caractère meublé du logement ;

Attendu que pour démontrer le caractère meublé du logement loué, la SCI Sarcas produit enfin divers états des lieux relatifs à d'autres logements ou à d'autres dates que le logement concerné pour la période à laquelle il a été loué à Mme M. ; que le seul état des lieux relatif au logement occupé par Mme M. date du 28 juin 2016 soit près de trois ans après la restitution des lieux et mentionne qu'il convient de 'rajouter un petit frigo, deux plaques électriques et quatre chaises' ; qu'il est donc dénué de toute force probante quant au caractère meublé du logement lors de sa prise à bail par Mme M. ;

Attendu, en conséquence, qu'il n'est pas établi que le logement donné à bail comportait les meubles suffisants pour caractériser la location meublée ; que la location en cause relevait donc de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

2 - Sur le cautionnement

Attendu que l'acte de cautionnement signé par M. V. ne reprend pas les mentions exigées à peine de nullité par l' article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dans sa version applicable à la cause de sorte qu'il est nul ;

Attendu que les paiements réalisés par M. V. ont tous été causés par des actes d'exécution forcée de sorte qu'ils ne valent pas ratification volontaire de l'acte de caution ou reconnaissance de dette ;

Attendu que M. V. rapporte la preuve des versements en exécution de l'acte de caution et de l'ordonnance de référés à hauteur de 12 874,64 euros par la production des actes de saisie, des encaissements de chèques et des ordres de virements réalisés ; que la SCI Sarcas reconnaît dans ses conclusions avoir perçu ces sommes ;

Attendu, en conséquence, que le jugement sera infirmé et que la SCI Sarcas sera condamnée à payer à M. V. la somme de 12 874,64 euros à titre de répétition de l'indu ;

3 - Sur les dépens et l' article 700 du code de procédure civile

Attendu que la solution du litige conduit à infirmer le jugement en ses dispositions relatives à l' article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Attendu que partie perdante, la SCI Sarcas sera condamnée aux dépens de première instance et en cause d'appel, et déboutée de ses demandes sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile ;

Attendu qu'elle sera en outre condamnée à payer à M. V. la somme de 2000 euros sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Annule l'acte de cautionnement signé par M. Rosario V. le 1er septembre 2009 en garantie du paiement des loyers et charges dus par Mme Laurence M. ;

Condamne la SCI Sarcas à payer à M. Rosario V. la somme de 12874,64 euros ;

Condamne la SCI Sarcas à payer à M. Rosario V. la somme de 2000 euros sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la SCI Sarcas aux dépens de première instance et d'appel.

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