CA Aix-en-Provence, 8e ch. c, 16 mai 2012, n° 10/03012
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
BPCA BANQUE POPULAIRE COTE D'AZUR
Défendeur :
S.A. OSEO GARANTIE
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bergez
Conseiller :
M. Acquaviva
Conseiller :
Mme Chizat
Avocats :
Me Cherfils - SELARL BOULAN / CHERFILS / IMPERATORE, SCP BLANC-CHERFILS, Me Manceau Gilbert, Me Manceau Patrice
Avocats :
SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, SCP DE ST FERREOL ET TOUBOUL, Me Legond, Me Jauffres
La Banque populaire de la Côte d'Azur (la banque) a consenti le 2 septembre 2005 à la Compagnie financière de l'olivier, société holding venant d'être constituée, un prêt de 340 000 € sur 7 ans destiné à financer l'acquisition de 51% des parts de la Société technique du bâtiment.
Le 8 septembre 2005, M. Jean-Louis Terreaux, dirigeant de la société Compagnie financière de l'olivier, s'est porté caution solidaire du prêt pour une durée de 9 ans, dans la limite de 204 000 € couvrant le paiement du principal, des intérêts et des pénalités de retard.
Le prêt bénéficiait de la garantie de la société Oseo garantie, laquelle avait été subordonnée à diverses conditions dont 'le cautionnement solidaire de M. Jean-Louis Terreaux à concurrence de 50 % de l'encours du crédit'.
La société Compagnie financière de l'olivier a été placée sous le régime d'une procédure de sauvegarde, le 10 décembre 2007, convertie en liquidation judiciaire le 26 mai 2008.
Au titre du prêt, la banque a déclaré au passif une créance de 288 617,46 € en principal, outre intérêts conventionnels.
Après avoir mis en demeure M. Terreaux, le 12 juillet 2008, la banque l'a fait assigner en paiement.
M. Terreaux a fait assigner la société Oseo garantie en intervention forcée pour qu'elle soit condamnée à garantir la moitié de la créance.
Par jugement du 7 décembre 2009, le tribunal de commerce de Fréjus :
- a condamné M. Terreaux à payer la somme de 141 038,52 €, avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2008 ;
- a rejeté, dans les motifs du jugement, la demande formée par M. Terreaux à l'encontre de la société Oseo garantie ;
- a partagé les dépens par moitié entre la banque et M. Terreaux et a rejeté les demandes formées au titre de leur lien d'instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- a condamné M. Terreaux à payer à la société Oseo garantie la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La banque a relevé appel en intimant M. Terreaux. Ce dernier a formé un appel provoqué à l'encontre de la société Oseo garantie.
Vu les conclusions déposées le 15 novembre 2010 par la société Oseo garantie ;
Vu les conclusions déposées le 25 février 2011 par la banque ;
Vu les conclusions déposées le 16 mai 2011 par M. Terreaux ;
Vu l'ordonnance de clôture du 28 février 2012 ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
M. Terreaux est infondé à demander, à titre principal, la révocation de l'ordonnance de clôture du 28 février 2012 pour répliquer à des pièces communiquées par la banque le 23 février précédant, subsidiairement, leur rejet, puisqu'il déclare que ces pièces ne sont 'd'aucune utilité aux débats'.
Les conclusions déposées par M. Terreaux le 5 mars 2012, postérieurement au prononcé de l'ordonnance de clôture, sont irrecevables.
La banque soutient que la limite de l'obligation de caution est représentée par la somme de 204 000€, fixée dans l'acte de prêt et dans l'acte de cautionnement, alors que M. Terreaux se prévaut de la limite de 50% de l'encours du crédit prévue dans la notification de l'accord de financement et dans les conditions particulières de la garantie donnée par la société Oseo garantie.
Il résulte de l'article 2015 du code civil, devenu l'article 2292, selon lequel le cautionnement doit être exprès, que la caution doit avoir, au jour de l'acte, une connaissance explicite et non équivoque de l'étendue de son engagement.
Par lettre du 29 juin 2005 , la banque a fait connaître à M. Jean-Louis Terreaux son accord pour le financement qu'il avait sollicité en précisant les modalités du prêt et les garanties exigées, lesquelles consistaient, notamment, dans le 'cautionnement solidaire de M. Jean-Louis Terreaux à concurrence de 50% de l'encours du crédit' et la 'contre-garantie Oseo Sofaris à hauteur de 50 %'.
L'acte du 11 août 2005 portant notification de la garantie de la société Oseo stipule un taux de garantie de 50 % consenti à certaines conditions dont le 'cautionnement solidaire de M. Jean-Louis Terreaux à concurrence de 50% de l'encours du crédit'
Dans l'acte de prêt du 2 septembre 2005 puis dans l'acte de cautionnement du 8 septembre suivant, la limite de l'obligation de caution a été fixée en des termes différents puisque le premier acte stipule, au titre des garanties, le 'cautionnement solidaire de M. Jean-Louis Terreaux...à hauteur de 204 000 €, pour la durée du prêt augmentée de deux ans' et que dans le second, M. Terreaux s'est engagé 'dans la limite de la somme de 204 000 €, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités et intérêts de retard et pour la durée de 108 mois (durée du prêt + 2 ans)...'.
En l'absence d'information spécifique de la banque, M. Terreaux n'a pas eu nécessairement conscience, lorsqu'il s'est engagé, que la fixation de la limite du cautionnement à un montant chiffré de 204 000 €, sans référence à une variation de cette limite dans la proportion de '50% de l'encours du crédit', étendait son obligation au delà de ce qui avait été initialement convenu.
Il en est résulté une situation équivoque qui doit être analysée en faveur de la caution en fixant l'étendue de son obligation dans la double limite de la somme de 204 000€ et de 50 % de l'encours du crédit.
Dès lors, M. Terreaux n'est tenu qu'au paiement de la somme de 138 680,49 €, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 juillet 2008, l'application des intérêts au taux conventionnel, demandée par la banque, ne pouvant être accueillie puisqu'elle aurait pour effet d'étendre l'obligation au delà de cette limite.
Les dispositions de l'article 1154 du code civil n'étant pas mises en échec par la circonstance que la banque aurait retardé le jugement au fond de la contestation, M. Terreaux est infondé à contester leur application.
Le jugement attaqué est infirmé.
En considération des succombances, la banque et M. Terreaux conservent la charge des frais et dépens qu'ils ont exposés.
M. Terreaux supporte la charge des dépens exposés par la société Oseo garantie.
L'équité commande de confirmer la condamnation prononcée en première instance au profit de la société Oseo garantie au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La banque n'ayant pas fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice, M. Terreaux est débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Rejette la demande en révocation de l'ordonnance de clôture,
Déclare irrecevables les conclusions déposées le 5 mars 2012 par M. Jean-Louis Terreaux,
Rejette la demande tendant à écarter des débats les pièces communiquées le 23 février 2012,
Infirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il a condamné M. Jean-Louis Terreaux à payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. Jean-Louis Terreaux à payer à la Banque populaire de la Côte d'Azur la somme de 138 680,49 €, avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2008, se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Rejette la demande en paiement de dommages-intérêts formée par M. Jean-Louis Terreaux,
Dit que la Banque populaire de la Côte d'Azur et M. Jean-Louis Terreaux conservent la charge des frais et dépens qu'ils ont exposés, en première instance et en appel,
Condamne M. Jean-Louis Terreaux aux dépens exposés par la société Oseo Sofaris, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.