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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 4, 1 octobre 2013, n° 11/20942

PARIS

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lambling

Conseiller :

Mme Kermina

Conseiller :

Mme Leblanc

Avocats :

Me Vincent RIBAUT - SCP RIBAUT, Me Ngafaounain

Avocats :

Me Chalut Natal, Me Bernardi

CA Paris n° 11/20942

30 septembre 2013

Par acte sous seing privé du 11 mars 2006 à effet au 13 mars, Mme Scavelli a loué à M. et Mme Trotier pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction un appartement situé à [...].

Par acte sous seing privé du 7 mars 2006, Mme Moreau (épouse Trotier) s'est constituée caution solidaire des engagements des locataires.

Par acte d'huissier de justice du 17 février 2010 dénoncé le 1er mars 2010 à la caution, Mme Scavelli a signifié à M. et Mme Trotier un commandement de payer une certaine somme au titre de loyers et charges restant dus, visant la clause résolutoire figurant dans le bail.

Les 25 et 26 octobre 2010, Mme Scavelli a assigné M. et Mme Trotier ainsi que Mme Moreau devant le tribunal d'instance aux fins, notamment, de les voir condamner solidairement au paiement d'un arriéré locatif arrêté au 11 octobre 2010 et d'indemnités d'occupation à compter de cette date.

Par jugement du 30 août 2011 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de Melun a :

- condamné solidairement M. et Mme Trotier et Mme Moreau à payer à Mme Scavelli la somme de 226, 24 euros avec intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2010 au titre des loyers impayés arrêtés au 6 juin 2011,

- autorisé M. et Mme Trotier à se libérer de cette somme en quatre versements de 50 euros en sus du loyer courant, le premier versement devant intervenir le 10 du mois suivant la signification du jugement puis tous les 10 de chaque mois, et en un cinquième versement devant solder la dette en principal, intérêts et frais,

- dit que si l'obligation est respectée, les effets de la résiliation de plein droit seront suspendus pendant ce délai puis réputés ne pas avoir joué à l'issue du délai,

- dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance ou du loyer courant, la clause résolutoire prendra effet après mise en demeure restée infructueuse pendant huit jours, le solde restant dû étant alors immédiatement exigible,

- dit que dans ce cas :

.le bail sera résilié au 18 avril 2010,

.Mme Scavelli sera autorisée à défaut de libération spontanée des lieux à faire procéder à l'expulsion de M. et Mme Trotier ainsi que celle de tous occupants de leur chef au besoin avec l'assistance de la force publique à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance du commandement de quitter les lieux,

.M. et Mme Trotier et Mme Moreau seront solidairement condamnés à payer à Mme Scavelli une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant charges comprises, soit actuellement 653, 25 euros outre les charges, à compter du 18 avril 2010 jusqu'à la libération des lieux par remise des clés au bailleur ou à son mandataire,

- condamné solidairement M. et Mme Trotier et Mme Moreau à payer à Mme Scavelli la somme de 500 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile ,

- condamné solidairement M. et Mme Trotier et Mme Moreau aux dépens incluant le coût d'un commandement de payer de 155, 57 euros et de sa dénonciation à la caution pour un montant de 81 euros.

Mme Moreau a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions signifiées à Mme Scavelli et déposées le 4 décembre 2012, Mme Moreau demande à la cour, réformant le jugement, de débouter Mme Scavelli de ses demandes dirigées à son encontre et de la condamner à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile .

Par conclusions remises le 24 mai 2013 dont la notification à Mme Moreau est justifiée et qui ont été signifiées le 28 mai 2013 à M. et Mme Trotier, Mme Scavelli demande à la cour de confirmer le jugement sauf à condamner solidairement M. et Mme Trotier et Mme Moreau à lui payer la somme de 2 908, 83 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation actualisés avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt et la somme de 1 275, 46 euros au titre de frais d'huissier de justice, de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur l'acquisition de la clause résolutoire et sur l'expulsion et de condamner Mme Moreau à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile .

M. et Mme Trotier ont été assignés à comparaître devant la cour par acte d'huissier de justice du 1er mars 2012 délivré selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile .

M. et Mme Trotier n'ont pas constitué avocat.

Les conclusions de Mme Moreau du 4 décembre 2012 n'ont pas été signifiées à M. et Mme Trotier.

Mme Moreau n'a signifié à M. et Mme Trotier que ses conclusions du 23 février 2012, dont le dispositif est toutefois identique à celui des conclusions du 4 décembre 2012.

SUR CE, LA COUR :

Considérant que les pièces versées aux débats par Mme Scavelli ne permettent pas de vérifier si M. et Mme Trotier ont respecté le moratoire prévu par le premier juge ;

Que toutefois, Mme Scavelli demandant expressément qu'il ne soit pas statué sur la clause résolutoire et sa créance ne comportant pas d'indemnités d'occupation, il y a lieu de tenir pour acquis, en l'absence de procès-verbal d'expulsion et en l'état de la formulation employée par la bailleresse dans ses conclusions, que le bail, tacitement renouvelé pour trois ans le 13 mars 2009, n'a été résilié que le 6 mars 2012, date non contestée du constat d'état des lieux de sortie ;

Considérant que l'engagement de cautionnement de Mme Moreau porte notamment sur le loyer, les charges, les impôts et taxes et les réparations locatives ; qu'il n'inclut pas les frais de procédure ;

Que le décompte actualisé au 6 mars 2012 (pièce n° 12-1 de l'intimée) fait état d'une somme globale de 4 864, 75 euros due au titre de loyers (4 751, 15 euros), taxes d'ordures ménagères (17, 60 euros) et ramonage (96 euros), dont doit être déduit le dépôt de garantie (1 306, 50 euros), soit un solde débiteur de 3 298, 22 euros ;

Que Mme Moreau ne conteste pas le quantum de ces sommes dont il n'est pas discuté qu'elles sont devenues exigibles lors de la période du renouvellement du bail ;

Considérant que pour soutenir que la somme réclamée n'entre pas dans le champ des obligations cautionnées, Mme Moreau soutient que son engagement a expiré le 13 mars 2009 à l'issue de la période contractuelle initiale de trois ans, aux motifs qu'elle a repris à la main dans l'acte de cautionnement l'énoncé de la durée initiale de trois ans du bail et n'a pas reproduit le paragraphe dactylographié stipulant 'ce bail pouvant être reconduit tacitement, légalement ou conventionnellement, pour une durée déterminée, cet engagement de cautionnement sera valable par dérogation à l' article 1740 du code civil jusqu'à l'extinction des obligations dudit locataire sans pouvoir dépasser la durée dudit bail, renouvelé ou tacitement reconduit deux fois pour la même durée.' ;

Considérant que si la mention manuscrite rédigée par la caution doit seule permettre d'apprécier la nature et l'étendue de son engagement, encore faut-il que son intention puisse s'en déduire de manière précise et non équivoque ;

Considérant qu'en déclarant à la main se porter caution solidaire des sommes dues par son beau-frère ' (..) en vertu du bail qui lui a été consenti pour une durée de trois ans à compter du 14 mars 2006 pour les locaux situés (..) bail dont j'ai pris connaissance et dont un exemplaire m'a été remis', alors que le bail stipule qu'il est renouvelable par tacite reconduction par période de trois ans, que l'engagement de caution le rappelle et prévoit que le cautionnement ne peut pas dépasser la durée du bail, renouvelé ou tacitement reconduit deux fois pour la même durée, que la caution a recopié à la main les dispositions de l'article 22-1 précité relatives aux conditions de résiliation du cautionnement dépourvu de durée stipulée, notamment quant à l'effet de la résiliation au regard du contrat de bail initial, reconduit ou renouvelé, Mme Moreau, qui a en outre retenu une date d'effet du bail initial erronée, n'a pas exprimé de façon explicite et non équivoque son intention de s'engager pour une durée de trois ans ;

Que sa volonté de s'engager de manière limitée pour trois ans ne saurait résulter, par défaut, de la seule absence de reproduction à la main de l'article de l'acte de cautionnement relatif à sa validité au regard de la durée du bail ;

Considérant que Mme Moreau sera en conséquence condamnée avec M. et Mme Trotier, solidairement entre eux, à payer à Mme Scavelli la somme de 898, 22 euros déduction faite des versements effectués par M. et Mme Trotier entre le 5 juin 2012 et le 6 mai 2013 (3 298, 22 euros - 2400 euros, pièce n° 15-3 de Mme Scavelli) avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, conformément aux termes de la demande bien que la somme due soit de nature contractuelle ; que le jugement sera réformé en ce sens ;

Considérant que Mme Scavelli ne demandant plus la résiliation du bail, le jugement sera réformé en ce qu'il a constaté la résiliation, suspendu les effets de la clause résolutoire et statué sur les conséquences du non-respect du délai accordé ;

Que le jugement sera en revanche confirmé en ses dispositions relatives à l' article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Considérant que Mme Scavelli produit un état de frais de justice en date du 3 avril 2012 (sa pièce n° 12-2) de 1 101, 79 euros dont il convient d'exclure le coût du commandement du 17 février 2010 (155, 57 euros) et de l'assignation du 25 octobre 2010 (81 euros) déjà inclus dans les dépens de première instance supportés par Mme Moreau et M. et Mme Trotier, mais auquel sera ajouté le coût d'un acte du 26 avril 2012 de 82, 43 euros pris en compte dans l'état ultérieur du 24 mai 2013 (sa pièce n° 15-2) ;

Que M. et Mme Trotier seront en conséquence solidairement condamnés à payer à Mme Scavelli la somme de 955, 65 euros au titre des frais de procédure ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application de l' article 700 du code de procédure civile au profit de Mme Scavelli à la charge de Mme Moreau dans les termes du dispositif ci-après ;

Considérant que Mme Moreau, qui succombe, supportera les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions à l'exception de la condamnation solidaire de M. et Mme Trotier et de Mme Moreau au titre de l' article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Statuant à nouveau sur les chefs de dispositif réformés :

Condamne solidairement M. et Mme Trotier et Mme Moreau à payer à Mme Scavelli la somme de 898, 22 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt au titre de l'arriéré ;

Condamne solidairement M. et Mme Trotier à payer à Mme Scavelli la somme de 955, 65 euros au titre des frais d'huissier de justice ;

Déboute Mme Moreau de sa demande au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme Moreau à payer à Mme Scavelli la somme de 1 500 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme Moreau aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l' article 699 du code de procédure civile.

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