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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 12 avril 2012, n° 11/02297

VERSAILLES

Arrêt

Autre

PARTIES

Défendeur :

SA CIC (CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Besse

Conseiller :

M. Testut

Conseiller :

Mme Vaissette

Avocats :

Me Lafon, Me Petreschi

Avocats :

Me Jullien, Me Sallin

CA Versailles n° 11/02297

11 avril 2012

Par acte sous seing privé en date du 24 décembre 2004, son dirigeant, Monsieur Gérard POROUX, s'est porté caution solidaire au profit de la SA Crédit Industriel et Commercial (CIC) de tous les engagements de la société POROUX.

Le montant maximum de ce cautionnement est, selon l'interprétation des parties, de 720.000 € ou de 1.000.000 €.

Le 2 décembre 2008, le Tribunal de commerce de Versailles a placé la société POROUX en redressement judiciaire. Le CIC a déclaré sa créance au passif de la société POROUX pour un montant de 947.807,57 euros au titre du solde débiteur du compte.

Le 15 décembre 2008, le CIC a mis en demeure Monsieur Gérard POROUX d'honorer sa caution pour le montant de 947.807,57 euros. En l'absence de réponse de sa part, le CIC a assigné Monsieur Gérard POROUX, le 16 mai 2009, en paiement de sa caution.

Depuis l'assignation, la situation a connu les évolutions suivantes :

- suite à la réalisation d'une autre garantie, la créance initiale du CIC a été réduite à la somme de 707.859,43 euros,

- le 24 novembre 1998, le CIC s'était porté caution à hauteur de 686.020,57 euros des engagements de la société POROUX, au profit de FORD CREDIT EUROPE PLC, devenue FCE BANK PLC. Cette dernière a déclaré une créance d'un montant de 12.183.305,40 euros dans le cadre de la procédure judiciaire. Début 2009, FCE BANK a mis en demeure le CIC d'honorer sa caution, ce qui a été fait le 13 mai 2009. FCE BANK PLC a alors remis en contrepartie au CIC une quittance subrogative.

Par jugement en date du 26 octobre 2010, le tribunal de commerce de Chartres a :

- condamné Monsieur Gérard POROUX à payer au CIC la somme principale de 720.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2009 sur la somme de 707.859,43 euros, et à compter du 13 mai 2009 sur le surplus,

- constaté que l'inscription faite par le CIC dans l'acte de cautionnement du 24 décembre 2004 ne dénaturait pas la portée de la mention manuscrite de Monsieur Gérard POROUX,

- rejeté la demande en nullité de l'acte de cautionnement formulée par Monsieur Gérard POROUX,

- condamné le CIC et Monsieur Gérard POROUX, aux entiers dépens pour moitié chacun.

Par déclaration au greffe de la Cour d'appel de Versailles en date du 23 mars 2011, Monsieur Gérard POROUX, a interjeté appel du jugement entrepris.

Par conclusions signifiées en date du 2 septembre 2011, Monsieur Gérard POROUX demande à la cour de :

- prononcer la nullité de l'acte de cautionnement du 24 décembre 2004,

- débouter le CIC de l'ensemble de ses demandes,

A TITRE SUBSIDIAIRE,

- constater la faute du CIC en ce qu'il a payé la caution n°9808727 pourtant annulée,

- déduire du montant mis à la charge de Monsieur Gérard POROUX, la somme de 686.020,57 euros correspondant au paiement fautif de la caution n°9808727,

- constater l'absence de prise en compte dans la somme réclamée à Monsieur Gérard POROUX du montant reçu par le CIC au titre des véhicules gagés pour un montant du 270.833,19 euros,

- déduire la somme de 270.833,19 euros du montant mis à sa charge,

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE,

- confirmer partiellement le jugement du tribunal de commerce de Chartres en ce qu'il limite la condamnation de Monsieur Gérard POROUX à la somme de 720.000 euros,

- octroyer à ce dernier un délai de 24 mois pour s'acquitter de sa dette,

EN TOUTES HYPOTHESES,

- condamner le CIC à verser à Monsieur Gérard POROUX la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il rappelle et fait valoir :

- que l'acte de cautionnement du 24 décembre 2004, est nul puisque :

- non conforme aux prescriptions de l'article L341-2 du code de la consommation, du fait que le CIC a intégré dans cet acte un (2) précisant "Montant en euros, en chiffre et en lettres égal au capital majoré de 20%" et

- qu'il existe une discordance majeure dans l'acte de cautionnement puisque le montant indiqué en page 1 de 720.000 euros, diffère du montant de 1.000.000 euros indiqué dans la mention manuscrite de Monsieur Gérard POROUX,

- que le CIC a commis une faute en payant , au titre de son engagement de caution en date du 24 novembre 1998, la somme de 686.020,57 euros à FCE BANK, puisque cette caution avait été annulée et remplacée par la caution n°200105139 du 17 avril 2001 d'un montant de 457.351,93 euros,

- que le CIC n'a pas tenu compte de la somme reçue à la suite de la vente de véhicules visés dans une requête d'une valorisation de 270.833,19 euros dont le montant doit être déduit de la dette,

Par conclusions signifiées le 6 juillet 2011, le CIC, formant appel incident, demande à la cour de :

- réformer le montant de la condamnation principale prononcée contre Monsieur Gérard POROUX,

- infirmer le jugement en ce qu'il déboute le CIC de sa demande d'indemnité procédurale,

STATUANT A NOUVEAU,

- condamner Monsieur Gérard POROUX à payer au CIC la somme principale de 1.000.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2011 sur la somme de 664.440,90 euros, et à compter du 13 mai 2009 sur le surplus,

- débouter Monsieur POROUX de toutes ses demandes,

- condamner Monsieur Gérard POROUX à verser au CIC la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Il rappelle et fait valoir :

- que la mention manuscrite apposée par Monsieur Gérard POROUX est strictement conforme à celle requise par les article L341-2 et L341-3 du code de la consommation,

- que la caution du 17 avril 2001, parce qu'elle n'a pas été transmise par la société POROUX à FCE BANK, n'a pu se substituer à celle du 24 novembre 1998,

- que FCE BANK, créancier déclarant et admis, bénéficiait bien d'une garantie, de sorte qu'en l'honorant, le CIC bénéficie d'une subrogation légale à l'encontre de Monsieur Gérard POROUX,

- qu'il n'a jamais perçu un montant de 270.833,19 euros correspondant à la prétendue vente de véhicules,

- que Monsieur Gérard POROUX a plafonné, de sa main, son cautionnement à hauteur de 1.000.000 d'euros,

- que le mention manuscrite prime sur le corps de l'acte de cautionnement, qu'en conséquence, Monsieur Gérard POROUX s'est porté caution à hauteur de 1.000.000 d'euros et non à hauteur de 720.000 euros.

- que Monsieur Gérard POROUX ne justifie ni de sa situation financière actuelle, ni de ce que l'évolution prévisible de celle-ci lui permettrait de s'acquitter de sa dette à l'issue des délais sollicités

DISCUSSION

Considérant que, sur l'acte de cautionnement du 24 décembre 2004, la mention écrite de la main de Monsieur POROUX reproduit exactement les formules des articles L.341-2 et L.341-3 ;

Considérant que les explications dactylographiées se trouvant à la suite de l'espace laissé pour la mention manuscrite, sont sans effet sur le contenu et la régularité de cette mention ;

Considérant que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en annulation du cautionnement au motif que sous un renvoi numéro 2 il est marqué 'le montant en euros ... égal au capital majoré de 20 %' ;

Considérant que sur la première page de l'acte de cautionnement du 24 décembre 2004, il est écrit de façon manuscrite, dans le cadre prévu à cet effet, que le montant du cautionnement est de 720.000 €, tandis que Monsieur POROUX a écrit de sa main qu'il se portait caution à hauteur de 1.000.000 € ;

Considérant que cette circonstance ne justifie pas l'annulation du cautionnement, mais seulement sa limitation à la somme la plus faible de 720.000 €, car dans le doute, la convention s'interprète en faveur de celui qui a contracté l'obligation, par application de l'article 1162 du Code civil ;

Considérant que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a statué en ce sens ;

Considérant que le CIC soutient que la SAS POROUX lui doit :

- 664.440,90 € au titre du solde débiteur du compte,

- 686.020,57 € au titre du cautionnement donné le 24 avril 1998 à la Société FORD CREDIT EUROPE PLC, en garantie des sommes dues à cette dernière par la SAS POROUX.

Considérant que Monsieur POROUX conteste le solde débiteur du compte au motif qu'il ne tient pas compte de la vente de véhicules autorisée par le juge-commissaire par ordonnance en date du 23 novembre 2009, pour un montant de 270.833,19 € ;

Mais considérant que l'ordonnance versée aux débats par Monsieur POROUX ne fait état que de 8 véhicules, d'une valeur totale de 100.894,96 € ; que par ailleurs cette ordonnance ne démontre pas que la vente a produit le montant attendu ;

que le CIC prétend que le solde de 664.440,90 € tient compte de tous les produits des ventes de véhicules, et qu'ainsi il a été déduit la somme de 32.765,65 € le 28 février 2011, et la somme de 24.395,07 € le 22 mars 2011 ;

Considérant qu'ainsi Monsieur POROUX ne démontre pas, comme il lui incombe, le paiement qu'il allègue ; qu'il convient de retenir une créance du CIC sur la SAS POROUX d'un montant de 664.440,90 € au titre du solde débiteur du compte ;

Considérant que Monsieur POROUX verse aux débats le cautionnement en date du 17 avril 2001donné par le CIC à la Société FCE BANK PLC pour un montant de 457.347,05 € et qui annule expressément le cautionnement établi le 24 novembre 2008 pour un montant de 686.020,57 € ;

Considérant que le CIC a dû payer à la Société FCE BANK PLC la somme de 686.020,57 €, sur présentation de l'original du cautionnement du 24 novembre 2008, resté en possession du créancier ;

Considérant que le CIC a confié à la SAS POROUX le soin d'opérer l'échange des cautionnements ; qu'il lui appartenait de vérifier que cet échange avait été exécuté et ne peut exiger le remboursement par Monsieur POROUX des sommes versées au vu du premier cautionnement qui aurait dû être remplacé ;

Considérant que de son côté, Monsieur POROUX ne peut prétendre que le second cautionnement a remplacé le premier, et en même temps que ce second cautionnement est nul ; qu'il ne peut pas plus considérer que le CIC a commis une faute alors que la SAS POROUX a négligé d'adresser le second cautionnement qui diminuait son crédit auprès du créancier ; que le CIC ne pouvait faire autrement qu'exécuter l'acte de cautionnement dont l'original se trouvait entre les mains de la Société FCE BANK PLC, et n'a commis aucune faute ;

Considérant qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il reconnu les droits acquis par subrogation par le CIC en raison du paiement adressé à la Société FCE BANK PLC, en les limitant à la somme de 457.347,05 € ;

Considérant que la SAS POROUX doit au CIC une somme supérieur à la limite retenue pour le cautionnement de Monsieur POROUX à hauteur de 720.000 € ;qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur POROUX à payer au CIC la somme de 720.000 € ;

Considérant que les intérêts au taux légal courent à compter du 29 juin 2011 sur la somme de 664.440,90 €, date de l'arrêté du solde débiteur du compte, et à compter du 13 mai 2009 sur le solde, date du paiement effectué par le CIC en exécution du cautionnement ;

Considérant que Monsieur POROUX ne justifie ni de sa situation financière actuelle, ni de ce que l'évolution prévisible de celle-ci lui permettrait de s'acquitter de sa dette à l'issue d'un délai de paiement ; que par ailleurs la première réclamation du CIC remonte au 15 décembre 2008 ; qu'il convient dans ces conditions de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de délais de paiement ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 26 octobre 2010 par le Tribunal de commerce de Chartres, sauf en ce qui concerne les intérêts,

Statuant à nouveau sur les intérêts, condamne Monsieur POROUX à payer au CIC la somme de 720.000 €, avec les intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2011 sur la somme de 664.440,90 € et à compter du 13 mai 2009 sur le surplus,

Déboute Monsieur POROUX de la demande qu'il forme sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et le condamne sur ce fondement à payer au CIC la somme de 3.000 €,

Condamne Monsieur POROUX aux dépens d'appel, et accorde aux avocats à la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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