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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 10, 30 octobre 2025, n° 23/05413

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 23/05413

30 octobre 2025

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRET DU 30 OCTOBRE 2025

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/05413 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHKPB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Février 2023 - Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2021F00317

APPELANTS

Monsieur [I] [K]

Né le [Date naissance 2] 1987 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 6]

S.A.R.L. GROUPE SKY.M SECURITE

[Adresse 5]

[Localité 9]

N° SIRET 510 151 350

Représentés par Me Pierre LUMBROSO de la SELARL SELARL L&A, avocat au barreau de PARIS, toque : B0724

INTIMEES

S.A. CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL

[Adresse 1]

[Localité 7]

N° SIRET : 542 097 522

Représentée par Me Serena ASSERAF, avocat au barreau de PARIS, toque : B0489

S.E.L.A.R.L. JSA, Mandataire Judiciaire, prise en la personne de Maître [W] [T], agissant en qualité de Liquidateur de la société PCA MOTORS

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Nathalie CHEVALIER de la SELARL GRAVELLE AVOCATS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC143

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Xavier BLANC, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Xavier BLANC, Président de chambre

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Madame Solène LORANS, Conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Sonia JHALLI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Xavier BLANC, Président de chambre et par Madame Sonia JHALLI, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

1. Par un contrat du 2 janvier 2019, la société CA Consumer Finance a donné en crédit-bail pour une durée de 60 mois à la société Groupe Sky.M [Z] un véhicule de marque Maserati, modèle Levante 430 S V6, d'une valeur de 146 000 euros TTC, en contrepartie du paiement de 60 loyers mensuels d'un montant de 2 803,20 euros TTC, assurances comprises.

2. Par un acte du même jour, M. [I] [K], gérant de la société Groupe Sky.M [Z], s'est rendu caution solidaire du paiement des loyers, dans la limite de 170 528 euros et pour la durée de 60 mois.

3. Par un second contrat du 4 décembre 2019, la société CA Consumer Finance a donné en crédit-bail pour une durée de 60 mois à la société Groupe Sky.M [Z] un véhicule de marque Audi, modèle Q8, d'une valeur de 145 000 euros TTC, en contrepartie du paiement de 60 loyers mensuels d'un montant de 2 598,79 euros TTC.

4. Par un acte du même jour, M. [K] s'est rendu caution solidaire du paiement des loyers, dans la limite de 170 528 euros et pour la durée de 60 mois.

5. Par des lettres du 30 septembre 2020, faisant valoir que les loyers du premier contrat étaient demeurés impayés à compter du mois de mai 2020, la société CA Consumer Finance a notifié à la société Groupe Sky.M [Z] et à M. [K] la résiliation de ce contrat et les a mis en demeure de lui restituer le véhicule de marque Maserati et de lui payer la somme de 116 819,59 euros.

6. Les 1er et 9 février 2021, la société CA Consumer Finance a assigné aux mêmes fins, devant le tribunal de commerce de Créteil, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K].

7. Le 29 avril 2021, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] ont assigné en intervention forcée la société PCA-Motors, vendeur du second véhicule de marque Audi, en soutenant, notamment, que le véhicule de marque Maserati lui avait été remis, aux fins de revente, afin que le premier contrat de crédit-bail soit soldé avant la conclusion du second, en invoquant, en conséquence, une résiliation du premier contrat par l'effet de la conclusion du second ou, à défaut, du fait de manquements commis par le crédit-bailleur, en recherchant, à titre subsidiaire, la responsabilité de ce dernier et du vendeur et en opposant, enfin, au crédit-bailleur, la disproportion de l'engagement de caution de M. [K].

8. Le 20 octobre 2021, la société PCA-Motors a été mise en liquidation judiciaire et, le 18 mars 2022, la société Groupe Sky.M et M. [K] ont assigné son liquidateur en intervention forcée.

9. Par un jugement du 21 février 2023, le tribunal a statué comme suit :

« Condamne la société GROUPE SKY.M SECURITE et M. [I] [K] à payer à la société CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL, la somme de 116 819,59 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2020.

Condamne la société GROUPE SKY.M SECURITE à restituer à la société CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL, le véhicule de marque MASERATI modèle LEVANTE 430 S V6, et ce, à ses frais exclusifs, sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification du présent jugement et pour une durée de trente jours.

Se réserve la liquidation de l'astreinte.

Dit qu'à défaut de restitution volontaire du véhicule dans le délai de trente jours, à compter de la signification du présent jugement, la société CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL, sera fondée à appréhender ledit véhicule en quelques mains, ou en quelques lieux qu'il se trouve, avec l'assistance d'un serrurier, et de la force publique s'il y a lieu.

Donne acte a la société CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL de ce que, si le véhicule est récupéré et vendu, le prix de vente du véhicule sera porté au crédit du compte de la société GROUPE SKY.M SECURITE et de M. [I] [K].

Déboute la société SKY-M et M. [I] [K] de leur demande de nullité du contrat relatif au véhicule AUDI A8

Déboute la société SKY-M et M. [I] [K] de leur demande à l'encontre de la société JSA es qualités de liquidateur judiciaire de la société PCA MOTORS.

Rappelle que l'exécution provisoire est de droit.

Condamne solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et M. [I] [K] à payer à la société CA CONSUMER FINANCE - Département VIAXEL la somme de 2.500,00 euros au titre de l'article 700 du CPC et déboute la société GROUPE SKY.M SECURITE et M. [I] [K] de leur demande formée de ce chef.

Condamne solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et M. [I] [K] aux dépens.

Liquide les dépens à recouvrer par le Greffe e la somme de 109,74, euros TTC (dont 20% de

TVA). »

10. Par une déclaration du 20 mars 2023, M. [K] et la société Groupe Sky.M [Z] ont fait appel de ce jugement.

11. Aux termes de leurs uniques conclusions remises au greffe le 15 juin 2023, M. [K] et la société Groupe Sky.M [Z] demandent à la cour d'appel de :

«Vu les Articles 1224 et 1228 du Code civil ,'

Vu les articles 1128, 1130, I131 et 1137 du Code civil ,'

Vu les articles L. 332-1 et L. 343-6 du Code de la consommation ;[...]

- INFIRMER le jugement rendu par la 2ème chambre du Tribunal de commerce de CRETEIL le 21 février 2023 ;

Statuant à nouveau :

A TITRE PRINCIPAL

- JUGER que le contrat n°6l303864980 du 2 janvier 2019 afférent au véhicule MASERATI LEVANTE avait été résilié par la restitution du véhicule et la souscription du contrat de crédit-bail n°61304l38224 du 4 décembre 2019 relatif au véhicule AUDI Q8 ;

En conséquence,

- DEBOUTER la société CA CONSUMER FINANCE de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de la société SKY-M et de Monsieur [K] ;

A TITRE SUBSIDIAIRE

S'agissant de la société CA CONSUMER FINANCE :

- CONSTATER que la société CA CONSUMER FINANCE a commis des manquements graves ;

En conséquence, -

PRONONCER la résiliation judiciaire du contrat n°61303864980 du 2 janvier 2019 afférent au véhicule MASERATI LEVANTE ;

- A défaut, CONDAMNER la société CA CONSUMER FINANCE à payer à la société SKY-M la somme de l16.8l9,59 euros au titre des dommages et intérêts ;

S'agissant de la société PCA-MOTORS :

- CONSTATER que la société PCA-MOTORS a commis une faute engageant sa responsabilité en ne procédant pas au solde du premier contrat ;

En conséquence,

- CONDAMNER la SELARL JSA, mandataire liquidateur venant aux droits de la société PCA-MOTORS à payer à la société SKY-M la somme de 94.900 euros au titre des dommages et intérêts ;

- CONDAMNER la SELARL JSA à garantir la société PCA-MOTORS en sa qualité de liquidateur ;

A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE

- CONSTATER que le consentement de la société SKY-M au contrat de crédit-bail n°61304138224 du 4 décembre 2019 relatif au véhicule AUDI Q8 a été trompé par l'effet du dol ;

En conséquence, -

JUGER nul le contrat de crédit-bail n°61304l38224 du 4 décembre 2019 relatif au véhicule AUDI Q8 ; -

CONDAMNER solidairement la SELARL JSA, mandataire liquidateur venant aux droits de la société PCA-MOTORS et la société CA CONSUMER FINANCE à payer à la société SKY-M la somme de 100.000 euros au titre des dommages et intérêts ;

S'agissant de l'engagement de la caution

A TITRE PRINCIPAL

- CONSTATER que le cautionnement de Monsieur [K] est excessif et disproportionné par rapport à ses biens et revenus ;

En conséquence,

- JUGER inopposable le cautionnement à Monsieur [K] ;

- DEBOUTER la société CA CONSUMER FINANCE de l'ensemble des demandes dirigées contre Monsieur [K] ;

A TITRE SUBSIDIAIRE

- CONSTATER que la société CA CONSUMER FINANCE a manqué à son obligation de mise en garde de la caution ;

En conséquence,

- DEBOUTER la société CA CONSUMER FINANCE de sa demande en recherche de la garantie de caution souscrite par Monsieur [K] ;

A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE

- CONSTATER que la société CA CONSUMER FINANCE a manqué à son obligation d'information de la caution ;

En conséquence,

- DECHOIR la société CA CONSUMER FINANCE de son droit de réclamer les pénalités et intérêts de retard échus

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- CONDAMNER solidairement les sociétés CA CONSUMER FINANCE et la SELARL JSA, mandataire liquidateur venant aux droits dc la société PCA-MOTORS à payer à la société SKY-M la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER solidairement les sociétés CA CONSUMER FINANCE et la SELARL JSA, mandataire liquidateur venant aux droits de la société CA-MOTORS aux entiers dépens. »

12. Aux termes de ses uniques conclusions remises au greffe le 14 septembre 2023, la société CA Consumer Finance demande à la cour d'appel de :

« Vu les articles 1103 et 1104 nouveaux du Code Civil :

- Débouter la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de CRETEIL ' 2ème Chambre, le 21 février 2023 (RG N° 2021F00317) en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

- Condamner solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] aux entiers dépens,

- Condamner solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] au paiement d'une somme de 6 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile. »

13. Aux termes de ses uniques conclusions remises au greffe le 15 septembre 2023, le liquidateur de la société PCA Motors demande à la cour d'appel de :

« Vu les articles L.622-24 et R. 622-24 du code de commerce,

Vu les articles L.622-21 et L.622-22 du code de commerce,

- Dire et Juger la SELARL JSA agissant en qualité de liquidateur de la société PCA MOTORS recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Dire et juger la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] tant irrecevables que mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- Confirmer en son intégralité le jugement du 21 février 2023 du Tribunal de Commerce de CRETEIL,

- Constater que ni la société GROUPE SKY.M SECURITE et ni Monsieur [I] [K] n'ont déclaré de créances au passif de la liquidation judiciaire de la société PCA MOTORS au titre de dommages et intérêts, de l'article 700 du CPC et des dépens,

- Dire et juger inopposable à la liquidation judiciaire de la société PCA MOTORS toute créance à ces titres,

- Dire et juger irrecevables toutes demandes de la société GROUPE SKY.M SECURITE et de Monsieur [I] [K],

- Débouter la société GROUPE SKY.M SECURITE et de Monsieur [I] [K] de leurs demandes, fins et conclusions,

- Condamner solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC au profit de la SELARL JSA es qualité de liquidateur de la société PCA MOTORS,

- Condamner solidairement la société GROUPE SKY.M SECURITE et Monsieur [I] [K] aux entiers dépens. »

14. La clôture a été prononcée par une ordonnance du 30 juin 2025.

15. En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties visées ci-dessus quant à l'exposé du surplus de leurs prétentions et de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande tendant au constat de la résiliation du contrat de crédit-bail du 2 janvier 2019 du fait de la commune intention des parties

16. L'article 1193 du code civil dispose :

« Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise. »

17. En l'espèce, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] soutiennent que, lors de la conclusion du second contrat de crédit-bail portant sur le véhicule de marque Audi, la commune intention des parties était de mettre un terme au premier contrat portant sur le véhicule de marque Maserati, ce qui résulterait des mentions de l'acte de pré-acceptation du second crédit-bail par la société CA Consumer Finance et de la restitution, préalable, du véhicule de marque Maserati par la société Groupe Sky.M [Z].

18. Comme le font valoir les appelants, l'acte intitulé « pré-acceptation de location avec option d'achat » souscrit le 2 décembre 2019 par la société CA Consumer Finance, relatif au véhicule de marque Audi, comporte la mention suivante à la suite de l'énumération des documents exigés pour la conclusion du second contrat : « Solde dossier en cours 61303864890 », ce numéro étant celui du premier contrat portant sur le véhicule Maserati.

19. Si la société CA Consumer Finance admet, dans ses conclusions (p. 8), que cette mention doit être interprétée en ce sens qu'elle avait conditionné son acceptation du second contrat de crédit-bail à la résiliation du premier, il ne s'en déduit pas pour autant, contrairement à ce que soutiennent les appelants, que la société CA Consumer Finance ait consenti à ce que cette résiliation résulte de la seule conclusion de ce second contrat.

20. Il importe peu, à cet égard, qu'à la date de pré-acceptation du second contrat, le véhicule objet du premier contrat ait été en possession de la société PCA-Motors, vendeur du véhicule objet du second contrat, comme cela résulte de l'attestation établie par cette société, produite par les appelants, selon laquelle la société Groupe Sky.M [Z] avait « confié » ce véhicule à cette société le 12 octobre 2019. Rien n'indique, en effet, qu'il aurait été convenu avec la société CA Consumer Finance que cette remise, à cette date, du véhicule objet du premier contrat au concessionnaire pressenti pour la vente du second, vaudrait restitution du véhicule par le crédit-preneur, aux fins de résiliation de ce premier contrat.

21. De la même manière, il importe peu que la société Groupe Sky.M [Z] allègue que la location concomitante des deux véhicules, à compter du mois de décembre 2019 aurait été pour elle inutile ou « dangereuse financièrement », sans le démontrer au demeurant, cette circonstance n'étant pas plus de nature à établir, en tout état de cause, l'intention de la société CA Consumer Finance de tenir le premier contrat pour résilié à la date de conclusion du second.

22. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il déboute la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] de leurs demandes tendant à ce qu'il soit constaté que le premier contrat de crédit-bail, conclu le 2 janvier 2019, aurait été résilié par l'effet de la restitution du véhicule et la conclusion, le 4 décembre 2019, du second contrat de crédit-bail.

Sur la demande de résiliation du contrat du 2 janvier 2019 du fait de manquements reprochés à la société CA Consumer Finance et la demande d'indemnisation fondée sur de tels manquements

23. Les articles 1224 et 1231-1 du code civil, qui figurent dans la section de ce code relative à l'inexécution du contrat, disposent :

- article 1224 :

« La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »

- article 1231-1 :

« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »

24. En l'espèce, au soutien de leurs demandes de résiliation du premier contrat ou d'allocation de dommages et intérêts, fondés sur des manquements commis par la société CA Consumer Finance, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] reprochent à celle-ci, d'une part, d'avoir accepté de conclure le second contrat sans s'assurer que la condition tenant à la résiliation du premier était satisfaite et, d'autre part, d'avoir manqué à son obligation de mettre en garde la société Groupe Sky.M [Z] sur l'inadaptation des capacités financières de celle-ci à la souscription de deux crédits-baux en moins d'un an.

25. Cependant, en premier lieu, s'il est établi, comme cela a été énoncé au point 19, que la société CA Consumer Finance avait conditionné son acceptation du second contrat de crédit-bail à la résiliation du premier, il ne s'en déduit pas qu'elle avait contracté envers la société Groupe Sky.M [Z], pas plus qu'envers la caution de celle-ci, l'obligation de s'assurer que cette condition, qui impliquait notamment la restitution du véhicule objet du premier contrat, était satisfaite lors de la conclusion du contrat de crédit-bail du 4 décembre 2019, et encore moins qu'il puisse lui être imputé à faute de ne pas s'en être assurée avec la conclusion de ce contrat. Au surplus, un tel manquement ne pouvant être rattaché aux obligations souscrites par la société CA Consumer Finance au titre du premier contrat de crédit-bail, conclu le 2 janvier 2019, il ne serait pas susceptible, à le supposer même établi, de justifier la résiliation de ce contrat.

26. En second lieu, si le crédit-bailleur est tenu, envers un crédit-preneur non-averti, d'une obligation de mise en garde à raison des capacités financières de ce dernier et des risques de l'endettement né de la souscription du crédit-bail, il n'est pas établi que la société CA Consumer Financer aurait été tenue, en l'espèce, d'une telle obligation envers la société Groupe Sky.M [Z]. En effet, par la seule production des états financiers des exercices 2017 et 2018 de cette société, sans préciser en quoi ceux-ci révèleraient une inadaptation des capacités financières de celle-ci au montant des loyers stipulés aux contrats de crédit-bail, d'environ 2 800 euros mensuels pour le premier et 2 600 euros mensuels pour le second, les appelants ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, d'une telle inadaptation, ni pour ce qui concerne la souscription du premier contrat, ni pour ce qui concerne la souscription du second, étant observé, au demeurant, que la lecture de ces documents permet de constater que cette société a réalisé un chiffre d'affaires de près de 800 000 euros en 2017 et de plus de 210 000 euros en 2018.

27. Au surplus, le caractère averti d'une personne morale s'apprécie en la personne de son dirigeant. Or, il résulte de la fiche produite par la société CA Consumer Finance, dont le contenu n'est pas contesté, concernant les mandats exercés par M. [K] à l'époque de la souscription des crédits-baux que celui-ci était le gérant de deux sociétés en janvier 2019 et de deux sociétés supplémentaires en décembre 2019, dont une SCI, pour l'une d'elles depuis l'année 2016. Ainsi, sans que cela ne résulte de la seule qualité de dirigeant de M. [K] mais également de l'expérience acquise, s'agissant d'opérations de financement usuelles, par l'exercice de tels mandats sur plusieurs années, la société Groupe Sky.M [Z], dirigée par celui-ci, était un crédit-preneur averti lors de la souscription des contrats litigieux.

28. En conséquence, les sociétés Groupe Sky.M [Z] et M. [K] ne rapportant pas la preuve des manquements qu'ils reprochent à la société CA Consumer Finance, le jugement sera confirmé en ce qu'il les déboute de leurs demandes de résiliation du contrat conclu le 2 janvier 2019 et d'indemnisation fondées sur de tels manquements.

Sur la demande d'indemnisation fondée sur des manquements reprochés à la société PCA-Motors

29. Il résulte des dispositions de l'article L. 622-21, L. 622-22 et L. 641-3 du code de commerce que le jugement d'ouverture d'une liquidation judiciaire interrompt toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent au titre d'une créance née antérieurement à ce jugement, et qu'une telle action est interrompue jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance.

30. En l'espèce, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] ne justifient pas avoir déclaré la créance de responsabilité d'un montant de 94 400 euros, qui serait née antérieurement au jugement d'ouverture, qu'ils invoquent au titre du préjudice que leur aurait causé le manquement de la société PCA-Motors à l'engagement que celle-ci aurait pris de « solder » le premier contrat de crédit-bail ou la fausse indication que leur aurait donnée celle-ci quant à la résiliation de ce premier contrat, préalablement à la conclusion du second.

31. En application des dispositions précitées, la demande présentée à ce titre, tendant à la condamnation du liquidateur de la société PCA-Motors, ès qualités, à payer cette somme à la société Groupe Sky.M [Z] à titre de dommages et intérêts, quand bien même elle serait requalifiée en demande de fixation de cette créance au passif de la liquidation judiciaire de la société PCA-Motors, est donc irrecevable.

32. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il déboute la société Groupe Sky.M [Z] de cette demande, laquelle sera jugée irrecevable.

33. Au surplus, à supposer que cette demande d'indemnisation dirigée contre le liquidateur de la société PCA-Motors, ès qualités, soit recevable, elle ne pourrait qu'être rejetée, dès lors que rien n'établit que cette société se serait engagée à « solder » le premier contrat de crédit-bail, qui portait au demeurant sur un véhicule vendu par un autre concessionnaire, la société Paris Prestige Cars, ni qu'elle aurait indiqué à la société Groupe Sky.M [Z], lors de la conclusion du second contrat de crédit-bail, que le premier contrat aurait été résilié.

Sur la demande d'annulation du contrat de crédit-bail du 4 décembre 2019

34. Les articles 1109 et 1116 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, disposent :

- article 1109 :

« Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. »

- article 1116 :

« Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. »

35. En l'espèce, pour demander l'annulation du contrat de crédit-bail conclu le 4 décembre 2019, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] soutiennent que la société PCA Motors aurait menti en indiquant, pour déterminer la société Groupe Sky.M [Z] à conclure le second contrat, que le premier avait été résilié, que la société Groupe Sky.M [Z] n'avait aucune raison d'en douter, dès lors, d'une part, que la société CA Consumer Finance avait conditionné la conclusion de ce second contrat à la résiliation du premier et, d'autre part, qu'elle avait restitué le véhicule objet du premier contrat dès le 12 octobre 2019, et que la société CA Consumer Finance, qui n'a pas vérifié que le premier contrat avait effectivement été résilié, s'est rendue complice de ce dol.

36. Cependant, comme cela a été énoncé au point 33, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] ne démontrent pas que la société PCA-Motors leur aurait indiqué, lors de la conclusion du second contrat de crédit-bail, que le premier aurait été résilié, ni même qu'elle aurait été chargée de procéder à cette résiliation.

37. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il déboute la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] de leur demande d'annulation du contrat conclu le 4 décembre 2019 et de leur demande subséquente d'indemnisation.

Sur la créance de la société CA Consumer Finance et la demande de restitution du véhicule de marque Maserati

38. Par la production du contrat de crédit-bail conclu le 2 janvier 2019 avec la société Groupe Sky.M [Z], du procès-verbal de livraison de véhicule, d'un historique du compte de cette société au 20 septembre 2020, d'une lettre de mise en demeure du 7 juillet 2020 et d'une lettre de notification de la résiliation du contrat du 30 septembre 2020, la société CA Consumer Finance justifie du principe comme du montant de sa créance envers la société Groupe Sky.M [Z] pour un montant de 116 819,59 euros.

39. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il condamne solidairement la société Groupe Sky.M [Z] au paiement de cette somme, avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2020.

40. Dès lors qu'il résulte de l'attestation de la société PCA-Motors, produite par la société Groupe Sky.M [Z] et citée au point 20, que, si le véhicule de marque Maserati, objet du premier contrat de crédit-bail, a été confié à la société PCA-Motors le 12 octobre 2019, il a ensuite été restitué à la société Groupe Sky.M [Z] le 30 juin 2020, et que cette société ne verse aux débats aucun élément de nature à établir qu'elle ne serait plus en possession de ce véhicule, le jugement sera également confirmé en ce qu'il la condamne, sous astreinte dans les termes fixés par le jugement qu'il n'y a pas lieu de remettre en cause, à restituer ce véhicule à la société CA Consumer Finance, et en ce qu'il autorise celle-ci à appréhender le véhicule s'il ne lui est pas restitué.

41. Le jugement sera, enfin, confirmé en ce qu'il donne acte à la société CA Consumer Finance de ce que, si le véhicule est restitué et vendu, le prix de vente sera porté au crédit du compte de la société Groupe Sky.M [Z].

Sur la demande dirigée contre M. [K] en tant que caution des engagements de la société Groupe Sky.M [Z]

42. L'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 1er juillet 2016 au 1er janvier 2022, dispose :

« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. »

43. Par ailleurs, le crédit-bailleur est tenu, envers la caution non avertie du crédit-preneur, d'une obligation de mise en garde à raison des capacités financières de la caution et des risques de l'endettement né, pour le crédit-preneur, de la souscription du crédit-bail, ce risque résultant de l'inadaptation du crédit-bail aux capacités du crédit-preneur.

44. Enfin, les articles L. 333-2 et L. 343-6 du code de la consommation, dans leur version en vigueur du 1er juillet 2016 au 1er janvier 2022, disposent :

- article L. 333-2 :

« Le créancier professionnel fait connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. »

- article L. 343-6 :

« Lorsqu'un créancier ne respecte pas les obligations prévues à l'article L. 333-2, la caution n'est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. »

45. En premier lieu, si M. [K] justifie avoir déclaré des revenus d'un montant total de 25 879 euros pour l'année 2018, il ne verse aux débats aucun élément relatif au patrimoine qu'il détenait à l'époque de la souscription de l'engagement de caution du 2 janvier 2019, de sorte qu'il ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que le montant de son engagement de caution aurait été, à cette date, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

46. En deuxième lieu, il résulte des motifs énoncés au point 27 que, M. [K] étant une caution avertie, la société CA Consumer n'était tenue envers lui d'aucune obligation de mise en garde. Au surplus, il résulte des motifs énoncés au point 26 qu'il n'est pas établi que le montant des loyers du premier contrat de crédit-bail, souscrit le 2 janvier 2019, aurait été inadapté aux capacités financières de la société Groupe Sky.M [Z] et de ceux énoncés au point précédent, qu'en l'absence de tout élément relatif à son patrimoine versé aux débats par M. [K], il n'est pas plus établi que le montant de son engagement de caution aurait été inadapté à ses propres capacités financières.

47. En troisième lieu, c'est à juste titre que la société CA Consumer Finance fait valoir qu'en demandant le paiement de loyers échus impayés, d'une indemnité de résiliation égale au montant des loyers à échoir et de la valeur résiduelle du véhicule, telle que stipulée au contrat, elle ne demande pas le paiement de pénalités ou d'intérêts de retard, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 343-6, ancien, du code de la consommation.

48. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il condamne M. [K], solidairement avec la société Groupe Sky.M [Z], à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 116 819,59 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2020.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

49. Les articles 696 et 700 du code de procédure civile disposent :

- article 696 :

« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. [...] »

- article 700 :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; [...]

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. [...] »

50. En application du premier de ces textes, compte tenu du sens de la présente décision, le jugement sera confirmé en ce qu'il condamne la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] aux dépens de la procédure de première instance et ils seront condamnés in solidum aux dépens de la procédure d'appel.

51. En application du second, le jugement sera confirmé en ce qu'il déboute la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] de leur demande de remboursement des frais exposés dans le cadre de la procédure de première instance et non compris dans les dépens et en ce qu'il les condamne à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 2 500 euros à ce titre, la société Groupe Sky.M [Z] et M. [K] seront déboutés de leur demande de tels frais exposés dans le cadre de la procédure d'appel et ils seront condamnés in solidum, à ce titre, à payer à la société CA Consumer Finance la somme de complémentaire de 2 500 euros et à payer à la société JSA, ès qualités, la somme de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il déboute la société Groupe Sky.M [Z] et M. [I] [K] de leurs demandes dirigées contre la société JSA, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société PCA-Motors ;

Infirme le jugement de ce chef et, statuant à nouveau du chef infirmé,

Déclare irrecevables les demandes de la société Groupe Sky.M [Z] et de M. [I] [K] dirigées contre la société JSA, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société PCA-Motors ;

Y ajoutant,

Condamne la société Groupe Sky.M [Z] et M. [I] [K] aux dépens de la procédure d'appel ;

Déboute la société Groupe Sky.M [Z] et M. [I] [K] de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les condamne in solidum, sur ce fondement, à payer à la société CA Consumer Finance la somme complémentaire de 2 500 euros et à payer à la société JSA, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société PCA-Motors, la somme de 2 500 euros, au titre des frais exposés dans le cadre de la procédure d'appel et non compris dans les dépens ;

Rejette le surplus des demandes.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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