CA Lyon, 1re ch. civ. a, 30 octobre 2025, n° 21/03519
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 21/03519 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NSPE
Décision du Tribunal Judiciaire de lyon
Au fond du 11 mars 2021
( chambre 3C cab 03 C)
RG : 18/12422
[Z]
C/
S.C.I. LE CAP
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 30 OCTOBRE 2025
APPELANTE :
Mme [J] [Z]
née le 10 juillet 1959 à [Localité 5] (Isère)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Nadia DEBBACHE, avocat au barreau de LYON, toque : 221
INTIMEE :
S.C.I. LE CAP
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par la SELARL BUSSILLET POYARD, avocat au barreau de LYON, toque : 1776
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 07 juin 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 septembre 2025
Date de mise à disposition : 30 octobre 2025
Audience présidée par Julien SEITZ, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.
Composition de la ocur lors du délibéré :
- Christophe VIVET, président
- Julien SEITZ, conseiller
- Emmanuelle SCHOLL, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Christophe VIVET, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
EXPOSE
Mme [J] [Z] est titulaire depuis 1980 d'un bail commercial concernant un local à usage de salon de coiffure pour dames au rez-de-chaussée de l'immeuble situé [Adresse 2]), bail initialement consenti par M. [Y], aux droits duquel sont successivement venues des sociétés civiles immobilières, la SCI du Point puis la SCI Le Cap.
Par acte sous seing privé du 8 novembre 2000, la SCI Le Cap a consenti à Mme [Z] un nouveau bail commercial sur le même local, pour une durée de neuf ans courant à compter du 24 juin 2000.
Le loyer initial a été fixé à la somme annuelle de 2.225,76 euros, payable par trimestre, et d'avance, le preneur s'engageant en sus à acquitter 'sa part des charges générales évaluées à 70,13 euros par trimestre' et à ' rembourser au bailleur au prorata du prix de son loyer tous impôts ou taxes de toute nature qui viendraient en cours de bail remplacer, augmenter et s'ajouter aux charges dudit immeuble, y compris impôts fonciers, taxes municipales, vicinales et autres'.
Ce bail a été renouvelé à effet au 30 juin 2009, par l'effet d'un congé avec offre de renouvellement.
Par jugement du 02 novembre 2010, le juge des loyers commerciaux de [Localité 4] a rejeté une demande de déplafonnement du loyer formée par la société Le Cap et a fixé le montant du loyer annuel du bail renouvelé à la somme de 3.050 euros au 1er juillet 2010.
La société Le Cap a entrepris en parallèle des travaux d'extension au sein de l'immeuble, ensuite desquels un désaccord s'est fait jour entre les parties après que Mme [Z] a sollicité la révision de la clé de répartition des charges locatives et cessé de régler les sommes afférentes.
Par assignation signifiée le 4 juillet 2014, la société Le Cap a fait citer Mme [Z] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon, en résiliation du bail et paiement des loyers et charges en souffrance.
Par ordonnance du 12 janvier 2015, le juge des référés a rejeté ses demandes, motif tiré de l'existence de contestations sérieuses sur l'actualisation du loyer trimestriel et la répartition des charges locatives.
Par lettres recommandées des 4 novembre 2016 et 12 décembre 2016, la société Le Cap a mis Mme [Z] en demeure de régulariser ses loyers et charges pour le 4ème trimestre 2016 ainsi que les charges sur les années 2012 à 2015.
Les démarches entreprises devant la commission de conciliation relativement aux charges et accessoires de loyer n'ont pas abouti.
Par acte d'huissier du 18 mai 2018, Mme [Z] a sollicité le renouvellement de son bail.
Par acte d'huissier du 15 juin 2018, la société Le Cap a fait commandement à Mme [Z] de régler l'arriéré de charges constitué depuis l'année 2011.
Par acte d'huissier du 06 août 2018, la société Le Cap a notifié à Mme [Z] son refus de renouvellement du bail commercial pour motif grave lié au non règlement des charges.
Par acte d'huissier du 18 octobre 2018, la société Le Cap a fait citer Mme [Z] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de résiliation du bail et d'expulsion.
Par jugement réputé contradictoire du 11 mars 2021, Mme [Z] n'ayant pas constitué avocat, le tribunal devenu tribunal judiciaire de Lyon a statué comme suit:
- constate la résiliation du bail commercial au 15 juillet 2018 par l'effet de la clause résolutoire insérée au contrat de bail ;
- ordonne l'expulsion de Mme [Z] et de tous occupants de son chef ;
- condamne Mme [Z] à payer à la société Le Cap la somme de 2.611 euros au titre des charges impayées arrêtées au 8 octobre 2018 et une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer et charges courants de 389,30 euros à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à libération des lieux ;
- rejette la demande de dommages-intérêts formée par la société Le Cap au titre de la résistance de Mme [Z] ;
- condamne Mme [Z] à payer à la société Le Cap la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris le coût du commandement de payer délivré le 15 juin 2018, outre les dépens ;
- ordonne l'exécution provisoire.
Le tribunal a essentiellement retenu que le montant de l'arriéré de charges était suffisamment justifié par les décomptes versés aux débats et que l'absence de règlement passé le délai d'un mois à compter du commandement de payer avait entraîné la résolution du contrat par l'effet de la clause résolutoire y stipulée.
Ce jugement a été signifié le 12 avril 2021. Mme [Z] en a relevé appel par déclaration enregistrée le 04 mai 2021.
***
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 07 février 2022, Mme [J] [Z] présente les demandes suivantes à la cour, au visa de l'article 1353 du code civil et des articles R. 145-35 et R. 145-36 du code de commerce :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- constater qu'elle est fondée à soulever l'absence de justification des charges locatives et taxes réclamées par la société Le Cap faute de clé de répartition clairement définie,
- constater qu'elle a réglé la somme de 3.000 euros à la société Le Cap, au titre des arriérés de charges locatives dans l'attente de leur régularisation suite à la fixation de la clé de répartition,
- constater qu'elle a dû remettre les clés son local commercial et suspendre provisoirement son activité de coiffure,
- constater que le jeu de la clause résolutoire visée au commandement du 15 juin 2017 ne peut pas jouer en l'absence de clé de répartition des charges locatives,
- dire et juger que le bail commercial doit être maintenu,
- débouter la société Le Cap de sa demande d'expulsion,
- débouter la société Le Cap de de sa demande en paiement des charges locatives à hauteur de 2.611 euros, arrêtées au 8 octobre 2018,
- débouter la société Le Cap de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à la libération effective des lieux,
- ordonner la désignation d'un expert judiciaire aux fins de définir la clé de répartition des charges locatives et taxes imputables à son fonds, depuis les travaux d'extension effectuée par la société Le Cap et achevés en mars 2011,
- dire que l'expert désigné devra effectuer un métré de l'ensemble de la société civile immobilière Le Cap sis [Adresse 1], et pourra se faire communiquer tous documents nécessaires au calcul des charges locatives et taxes de celui-ci,
- lui accorder l'indemnisation de son préjudice commercial lié à la suspension forcée de son activité de coiffure due à la perte de son local professionnel (mémoire),
- débouter la société Le Cap du surplus de ses demandes,
- condamner la société Le Cap aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Z] fait valoir que la société Le Cap a entrepris en 2010 et 2011 des travaux d'agrandissement de l'immeuble avec l'extension du cabinet dentaire, de son salon de coiffure et de deux logements, ainsi que la création de deux nouveaux logements dans les combles.
Elle explique que ces travaux ont rendu sa part dans les charges de l'immeuble, fixée à 20/100, obsolète, mais que ses demandes réitérées de fixation d'une nouvelle clé de répartition se sont heurtées à l'opposition de la société Le Cap.
Elle conteste les métrés produits par la société Le Cap, en faisant valoir qu'ils ont été réalisés en amont de l'achèvement des travaux et ne correspondent pas à la configuration finale de l'immeuble. Elle reproche notamment à la société Le Cap de calculer ses charges sur la base d'une surface totale de l'immeuble de 319 mètres carrés alors que la surface réelle après travaux s'élève à près de 395 mètres carrés.
Elle ajoute que les travaux réalisés l'ont privée de tout accès aux parties communes depuis l'intérieur de son local, ce qui devrait avoir une incidence sur la clé de répartition des charges.
Elle reproche à la société Le Cap de s'être abstenue de produire un relevé de la valeur locative cadastrale de son local et de l'avoir privée ce faisant de toute possibilité d'apprécier la façon dont la taxe foncière a été répartie.
Elle lui reproche également de n'avoir pas transmis chaque année l'état récapitulatif annuel prévu à l'article R. 145-36 du code de commerce.
Elle estime y avoir lieu, dans ces circonstances, de désigner un expert dans le but de calculer un nouvel état de répartition des charges et taxes.
Elle explique que son état de santé a conduit à ce qu'elle ne défère pas aux causes du commandement délivré le 15 juin 2018, mais qu'elle a réglé la somme de 3.000 euros en septembre 2021.
Elle conclut en conséquence au maintien du bail commercial et indique se réserver la possibilité de solliciter l'indemnisation du trouble commercial né de l'impossibilité d'exploiter son salon de coiffure depuis qu'elle s'est trouvée contrainte de remettre les clefs à la bailleresse au mois de janvier 2022.
***
Par conclusions récapitulatives notifiées le 22 mai 2022, la SCI Le Cap présente les demandes suivantes à la cour, au visa de l'article 1353 du code civil et de l'article L.145-41 du code de commerce :
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la résiliation du bail commercial au 15 juillet 2018, ordonné l'expulsion de Mme [Z], condamné celle-ci à lui payer une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer et charges courants de 389,30 euros à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à libération des lieux, et la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance,
et y ajoutant déclarer irrecevables les demandes d'expertise et de dommages et intérêts présentées par Mme [Z], ou subsidiairement la débouter de ces demandes,
- condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La société Le Cap soutient en premier lieu que la demande d'expertise judiciaire et la demande de dommages et intérêts sont nouvelles en cause d'appel et doivent être déclarées irrecevables sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, quand bien même l'appelante n'a-t-elle pas comparu devant le tribunal.
Elle rappelle en second lieu que Mme [Z] se soustrait depuis l'année 2012 à son obligation conventionnelle de supporter une partie des charges générales de l'immeuble, malgré la transmission courant 2017 de l'ensemble des justificatifs afférents.
Elle précise que la part de Mme [Z] a été déterminée au prorata de la superficie de son local après agrandissement, sur la base de métrés réalisés après l'achèvement des travaux.
Elle ajoute que Mme [Z] ne saurait lui reprocher de n'avoir pas adressé de récapitulatif annuel des charges depuis l'année 2018, alors que l'obligation correspondante résulte de la loi Pinel et n'est pas applicable au bail litigieux.
Elle considère en conséquence qu'à la considérer même recevable, la demande d'expertise n'est pas fondée et que le jugement doit être confirmé, en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat par l'effet de la clause résolutoire y insérée, et ordonné l'expulsion de la locataire.
***
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 07 juin 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 03 septembre 2025, à laquelle la décision a été mise en délibéré au 30 octobre 2025.
MOTIFS
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande d'expertise et à la demande de reconnaissance du droit à indemnisation pour perte du fonds de commerce
L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Il est constant que, lorsqu'une partie n'a pas comparu en première instance, ses demandes ne sauraient être regardées comme nouvelles à hauteur de cour, sauf à anéantir la substance même de l'appel.
En conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la fin de non-recevoir soulevée par la SCI Le Cap.
Sur le fond
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile ;
Il est constant que le bail litigieux a été renouvelé en dernier lieu le 30 juin 2009.
Mme [Z] a sollicité qu'il soit renouvelé une nouvelle fois par acte d'huissier du 18 mai 2018, ce que la société Le Cap a refusé le 06 août 2018, en se prévalant de l'absence de règlement des causes du commandement de payer signifié le 15 juin 2018.
En l'absence de renouvellement postérieur à l'entrée en vigueur de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, la répartition des charges entre le bailleur et le preneur obéit au principe de la liberté contractuelle.
Le contrat de bail dispose que 'le preneur payera également sa part des charges générales évaluées à 460 francs (soit 70,13 euros par trimestre)'.
Mme [Z] ne conteste pas que les charges appelées par la société Le Cap depuis 2012 entrent dans la définition des charges générales au sens de ces dispositions conventionnelles.
Il ressort par ailleurs de la pratique des parties et de leurs écritures que la 'part' incombant à la locataire du local pris à bail correspond au rapport entre la surface de son local d'une part et la surface totale de l'immeuble.
Suite aux travaux réalisés en 2010, la société Le Cap a ramené la part de Mme [Z] dans les charges générales de 20/100èmes à 7/100èmes, selon une clef de répartition contestée par l'appelante.
Il convient en conséquence de vérifier si cette clef correspond au prorata des surfaces occupées ensuite des travaux d'extension.
La demande de permis de construire précise que l'immeuble se composait, avant travaux, de locaux consacrés à l'habitation de 166,4 mètres carrés de surface hors oeuvre nette et de locaux commerciaux ou professionnels de 133 mètres carrés de surface hors oeuvre nette.
Elle précise également que les travaux à réaliser s'entendent de l'agrandissement du cabinet dentaire en rez-de-chaussée, accompagné d'une extension minime du cabinet de coiffure, ainsi que de l'agrandissement des deux logements à l'étage, avec aménagement des combles afin que ces logements soient aménagés en duplex.
Elle précise enfin que les travaux porteront la surface hors oeuvre nette à 228,25 mètres carrés pour les logements et à 166,60 mètres carrés pour les locaux professionnels ou commerciaux.
Il résulte des métrés réalisés le 19 juillet 2010 que le logement A a été mesuré à 76,32 mètres carrés de surface habitable et 28,48 mètres carrés de surface non comptabilisée, tandis que le logement B a été mesuré à 101,72 mètres carrés de surface habitable et 23,53 mètres carrés de surface non comptabilisé, pour un total de 230,05 mètres carrés de surface hors oeuvre nette, correspondant manifestement aux 228,25 mètres carrés prévus à l'issue des travaux.
Il résulte des métrés réalisés les 09 août 2010 et 23 novembre 2010 que le salon de coiffure a été mesuré à 22,91 mètres carrés de surface habitable, tandis que le cabinet dentaire a été mesuré à 120,87 mètres carrés de surface utile brute. Ces surfaces ont été calculées en fonction de référentiels (surface habitable et surface utile brute) excluant une partie de la surface hors oeuvre nette. Elles sont donc nécessairement inférieures à celle-ci. Or, il apparaît que le cumul de ces surfaces s'établit à plus de 142 mètres carrés de surface habitable, ce qui implique une surface hors oeuvre nette plus grande encore, tandis que les locaux commerciaux et professionnels présentaient avant travaux une surface hors oeuvre nette de 133 mètres carrés.
Il s'ensuit que ces métrés correspondent aux surfaces après travaux, quand même ceux-ci n'auraient-ils pas été entièrement achevés.
Or, les surfaces habitables ainsi déterminées conduisent à retenir des surfaces proportionnelles de 24 % pour le logement A, 31,5 % pour le logement B, 7 % pour le salon de coiffure et 37 % pour le cabinet dentaire, correspondant exactement à la nouvelle clef de partage des charges appliquées par la société Le Cap depuis 2012, telle qu'elle résulte des états annuels de répartition.
Il s'ensuit que cette clef de partage des charges appliquée par la société Le Cap est conforme aux surfaces des différents locaux et correspond aux conventions des parties.
Le fait que le salon de coiffure dans sa configuration issue des travaux ne soit pas exactement conforme aux plans du permis de construire n'a pas d'incidence sur la répartition des charges.
De même, le fait que Mme [Z] n'a plus d'accès direct aux communs depuis son local n'est pas de nature à affecter cette répartition, dès lors que l'intéressée peut continuer d'accéder au couloir commun depuis l'entrée principale de l'immeuble.
Il n'est nul besoin par ailleurs de disposer de relevés de valeur locative cadastrale des différents locaux pour déterminer la part de la taxe foncière incombant à Mme [Z], en ce que le montant de la taxe a été valablement réparti au prorata des surfaces occupées, à l'instar des autres postes de charges.
La cour retient pour finir que le grief tiré de l'absence de transmission de l'état récapitulatif annuel des charges, prévu à l'article R.145-36 du code de commerce, se trouve dépourvu de portée, ce texte n'étant pas applicable aux baux renouvelés, comme en l'espèce, antérieurement à son entrée en vigueur, étant observé au surplus que la SCI Le Cap produit aux débats les tableaux annuels de répartition des charges établis selon la clef précédemment validée et les justificatifs afférents.
De l'ensemble de ce qui précède, la cour tire les conclusions suivantes :
- les charges appelées par la SCI Le Cap depuis 2012, dont l'absence de règlement a justifié la signification le 15 juin 2018 d'un commandement visant la clause résolutoire du contrat de bail, ont été liquidées sur la base d'une clef de répartition pertinente ; la bailleresse était donc bien fondée, en l'absence de versement dans le mois du commandement, à refuser le renouvellement du bail par exploit du 06 août 2018, sans que le versement de la somme de 3.000 euros, intervenue en septembre 2021, puisse avoir la moindre incidence à cet égard ;
- le premier juge a pu valablement constater la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire insérée au contrat, en l'absence de règlement des causes du commandement de payer du 15 juin 2018 dans le mois de sa délivrance, et a donc à bon droit ordonné l'expulsion et condamné Mme [Z] à payer la somme de 2.611 euros au titre des charges impayées, selon décompte arrêté au 08 octobre 2018, et à verser une indemnité d'occupation.
Il s'en déduit, d'une part, que le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions et, d'autre part, que doivent être rejetées la demande d'expertise présentée par Mme [Z], et sa demande de reconnaissance de son droit à indemnisation au titre de la perte de son fonds de commerce.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile ;
Le jugement étant confirmé sur le fond, sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Z] étant la partie perdante en appel, sera condamnée à en supporter les dépens, et sera donc déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI Le Cap ayant exposé en particulier des frais d'avocat pour faire valoir ses droits en appel, l'équité commande que Mme [Z] soit condamnée à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, s'ajoutant à la somme allouée à ce titre par le tribunal.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé en dernier ressort,
- Rejette les fins de non-recevoir soulevées par la SCI Le Cap,
- Déclare recevables les demandes de Mme [J] [Z] tendant au prononcé d'une mesure d'expertise et à la reconnaissance du droit à indemnisation de la perte de son fonds de commerce, et les rejette,
- Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement prononcé le 11 mars 2021 entre les parties par le tribunal judiciaire de Lyon sous le numéro RG 18-12422,
- Condamne Mme [J] [Z] aux dépens de l'instance d'appel,
- Rejette la demande présentée par Mme [J] [Z] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne Mme [J] [Z] à payer à la SCI Le Cap la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel.
Ainsi jugé et prononcé à [Localité 4] le 30 octobre 2025.
Le greffier Le président
S.Polano C. Vivet
Décision du Tribunal Judiciaire de lyon
Au fond du 11 mars 2021
( chambre 3C cab 03 C)
RG : 18/12422
[Z]
C/
S.C.I. LE CAP
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 30 OCTOBRE 2025
APPELANTE :
Mme [J] [Z]
née le 10 juillet 1959 à [Localité 5] (Isère)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Nadia DEBBACHE, avocat au barreau de LYON, toque : 221
INTIMEE :
S.C.I. LE CAP
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par la SELARL BUSSILLET POYARD, avocat au barreau de LYON, toque : 1776
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Date de clôture de l'instruction : 07 juin 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 septembre 2025
Date de mise à disposition : 30 octobre 2025
Audience présidée par Julien SEITZ, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.
Composition de la ocur lors du délibéré :
- Christophe VIVET, président
- Julien SEITZ, conseiller
- Emmanuelle SCHOLL, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Christophe VIVET, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE
Mme [J] [Z] est titulaire depuis 1980 d'un bail commercial concernant un local à usage de salon de coiffure pour dames au rez-de-chaussée de l'immeuble situé [Adresse 2]), bail initialement consenti par M. [Y], aux droits duquel sont successivement venues des sociétés civiles immobilières, la SCI du Point puis la SCI Le Cap.
Par acte sous seing privé du 8 novembre 2000, la SCI Le Cap a consenti à Mme [Z] un nouveau bail commercial sur le même local, pour une durée de neuf ans courant à compter du 24 juin 2000.
Le loyer initial a été fixé à la somme annuelle de 2.225,76 euros, payable par trimestre, et d'avance, le preneur s'engageant en sus à acquitter 'sa part des charges générales évaluées à 70,13 euros par trimestre' et à ' rembourser au bailleur au prorata du prix de son loyer tous impôts ou taxes de toute nature qui viendraient en cours de bail remplacer, augmenter et s'ajouter aux charges dudit immeuble, y compris impôts fonciers, taxes municipales, vicinales et autres'.
Ce bail a été renouvelé à effet au 30 juin 2009, par l'effet d'un congé avec offre de renouvellement.
Par jugement du 02 novembre 2010, le juge des loyers commerciaux de [Localité 4] a rejeté une demande de déplafonnement du loyer formée par la société Le Cap et a fixé le montant du loyer annuel du bail renouvelé à la somme de 3.050 euros au 1er juillet 2010.
La société Le Cap a entrepris en parallèle des travaux d'extension au sein de l'immeuble, ensuite desquels un désaccord s'est fait jour entre les parties après que Mme [Z] a sollicité la révision de la clé de répartition des charges locatives et cessé de régler les sommes afférentes.
Par assignation signifiée le 4 juillet 2014, la société Le Cap a fait citer Mme [Z] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon, en résiliation du bail et paiement des loyers et charges en souffrance.
Par ordonnance du 12 janvier 2015, le juge des référés a rejeté ses demandes, motif tiré de l'existence de contestations sérieuses sur l'actualisation du loyer trimestriel et la répartition des charges locatives.
Par lettres recommandées des 4 novembre 2016 et 12 décembre 2016, la société Le Cap a mis Mme [Z] en demeure de régulariser ses loyers et charges pour le 4ème trimestre 2016 ainsi que les charges sur les années 2012 à 2015.
Les démarches entreprises devant la commission de conciliation relativement aux charges et accessoires de loyer n'ont pas abouti.
Par acte d'huissier du 18 mai 2018, Mme [Z] a sollicité le renouvellement de son bail.
Par acte d'huissier du 15 juin 2018, la société Le Cap a fait commandement à Mme [Z] de régler l'arriéré de charges constitué depuis l'année 2011.
Par acte d'huissier du 06 août 2018, la société Le Cap a notifié à Mme [Z] son refus de renouvellement du bail commercial pour motif grave lié au non règlement des charges.
Par acte d'huissier du 18 octobre 2018, la société Le Cap a fait citer Mme [Z] devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de résiliation du bail et d'expulsion.
Par jugement réputé contradictoire du 11 mars 2021, Mme [Z] n'ayant pas constitué avocat, le tribunal devenu tribunal judiciaire de Lyon a statué comme suit:
- constate la résiliation du bail commercial au 15 juillet 2018 par l'effet de la clause résolutoire insérée au contrat de bail ;
- ordonne l'expulsion de Mme [Z] et de tous occupants de son chef ;
- condamne Mme [Z] à payer à la société Le Cap la somme de 2.611 euros au titre des charges impayées arrêtées au 8 octobre 2018 et une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer et charges courants de 389,30 euros à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à libération des lieux ;
- rejette la demande de dommages-intérêts formée par la société Le Cap au titre de la résistance de Mme [Z] ;
- condamne Mme [Z] à payer à la société Le Cap la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris le coût du commandement de payer délivré le 15 juin 2018, outre les dépens ;
- ordonne l'exécution provisoire.
Le tribunal a essentiellement retenu que le montant de l'arriéré de charges était suffisamment justifié par les décomptes versés aux débats et que l'absence de règlement passé le délai d'un mois à compter du commandement de payer avait entraîné la résolution du contrat par l'effet de la clause résolutoire y stipulée.
Ce jugement a été signifié le 12 avril 2021. Mme [Z] en a relevé appel par déclaration enregistrée le 04 mai 2021.
***
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 07 février 2022, Mme [J] [Z] présente les demandes suivantes à la cour, au visa de l'article 1353 du code civil et des articles R. 145-35 et R. 145-36 du code de commerce :
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- constater qu'elle est fondée à soulever l'absence de justification des charges locatives et taxes réclamées par la société Le Cap faute de clé de répartition clairement définie,
- constater qu'elle a réglé la somme de 3.000 euros à la société Le Cap, au titre des arriérés de charges locatives dans l'attente de leur régularisation suite à la fixation de la clé de répartition,
- constater qu'elle a dû remettre les clés son local commercial et suspendre provisoirement son activité de coiffure,
- constater que le jeu de la clause résolutoire visée au commandement du 15 juin 2017 ne peut pas jouer en l'absence de clé de répartition des charges locatives,
- dire et juger que le bail commercial doit être maintenu,
- débouter la société Le Cap de sa demande d'expulsion,
- débouter la société Le Cap de de sa demande en paiement des charges locatives à hauteur de 2.611 euros, arrêtées au 8 octobre 2018,
- débouter la société Le Cap de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à la libération effective des lieux,
- ordonner la désignation d'un expert judiciaire aux fins de définir la clé de répartition des charges locatives et taxes imputables à son fonds, depuis les travaux d'extension effectuée par la société Le Cap et achevés en mars 2011,
- dire que l'expert désigné devra effectuer un métré de l'ensemble de la société civile immobilière Le Cap sis [Adresse 1], et pourra se faire communiquer tous documents nécessaires au calcul des charges locatives et taxes de celui-ci,
- lui accorder l'indemnisation de son préjudice commercial lié à la suspension forcée de son activité de coiffure due à la perte de son local professionnel (mémoire),
- débouter la société Le Cap du surplus de ses demandes,
- condamner la société Le Cap aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Z] fait valoir que la société Le Cap a entrepris en 2010 et 2011 des travaux d'agrandissement de l'immeuble avec l'extension du cabinet dentaire, de son salon de coiffure et de deux logements, ainsi que la création de deux nouveaux logements dans les combles.
Elle explique que ces travaux ont rendu sa part dans les charges de l'immeuble, fixée à 20/100, obsolète, mais que ses demandes réitérées de fixation d'une nouvelle clé de répartition se sont heurtées à l'opposition de la société Le Cap.
Elle conteste les métrés produits par la société Le Cap, en faisant valoir qu'ils ont été réalisés en amont de l'achèvement des travaux et ne correspondent pas à la configuration finale de l'immeuble. Elle reproche notamment à la société Le Cap de calculer ses charges sur la base d'une surface totale de l'immeuble de 319 mètres carrés alors que la surface réelle après travaux s'élève à près de 395 mètres carrés.
Elle ajoute que les travaux réalisés l'ont privée de tout accès aux parties communes depuis l'intérieur de son local, ce qui devrait avoir une incidence sur la clé de répartition des charges.
Elle reproche à la société Le Cap de s'être abstenue de produire un relevé de la valeur locative cadastrale de son local et de l'avoir privée ce faisant de toute possibilité d'apprécier la façon dont la taxe foncière a été répartie.
Elle lui reproche également de n'avoir pas transmis chaque année l'état récapitulatif annuel prévu à l'article R. 145-36 du code de commerce.
Elle estime y avoir lieu, dans ces circonstances, de désigner un expert dans le but de calculer un nouvel état de répartition des charges et taxes.
Elle explique que son état de santé a conduit à ce qu'elle ne défère pas aux causes du commandement délivré le 15 juin 2018, mais qu'elle a réglé la somme de 3.000 euros en septembre 2021.
Elle conclut en conséquence au maintien du bail commercial et indique se réserver la possibilité de solliciter l'indemnisation du trouble commercial né de l'impossibilité d'exploiter son salon de coiffure depuis qu'elle s'est trouvée contrainte de remettre les clefs à la bailleresse au mois de janvier 2022.
***
Par conclusions récapitulatives notifiées le 22 mai 2022, la SCI Le Cap présente les demandes suivantes à la cour, au visa de l'article 1353 du code civil et de l'article L.145-41 du code de commerce :
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la résiliation du bail commercial au 15 juillet 2018, ordonné l'expulsion de Mme [Z], condamné celle-ci à lui payer une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer et charges courants de 389,30 euros à compter du 15 juillet 2018 jusqu'à libération des lieux, et la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance,
et y ajoutant déclarer irrecevables les demandes d'expertise et de dommages et intérêts présentées par Mme [Z], ou subsidiairement la débouter de ces demandes,
- condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La société Le Cap soutient en premier lieu que la demande d'expertise judiciaire et la demande de dommages et intérêts sont nouvelles en cause d'appel et doivent être déclarées irrecevables sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, quand bien même l'appelante n'a-t-elle pas comparu devant le tribunal.
Elle rappelle en second lieu que Mme [Z] se soustrait depuis l'année 2012 à son obligation conventionnelle de supporter une partie des charges générales de l'immeuble, malgré la transmission courant 2017 de l'ensemble des justificatifs afférents.
Elle précise que la part de Mme [Z] a été déterminée au prorata de la superficie de son local après agrandissement, sur la base de métrés réalisés après l'achèvement des travaux.
Elle ajoute que Mme [Z] ne saurait lui reprocher de n'avoir pas adressé de récapitulatif annuel des charges depuis l'année 2018, alors que l'obligation correspondante résulte de la loi Pinel et n'est pas applicable au bail litigieux.
Elle considère en conséquence qu'à la considérer même recevable, la demande d'expertise n'est pas fondée et que le jugement doit être confirmé, en ce qu'il a constaté la résiliation du contrat par l'effet de la clause résolutoire y insérée, et ordonné l'expulsion de la locataire.
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Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 07 juin 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 03 septembre 2025, à laquelle la décision a été mise en délibéré au 30 octobre 2025.
MOTIFS
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande d'expertise et à la demande de reconnaissance du droit à indemnisation pour perte du fonds de commerce
L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Il est constant que, lorsqu'une partie n'a pas comparu en première instance, ses demandes ne sauraient être regardées comme nouvelles à hauteur de cour, sauf à anéantir la substance même de l'appel.
En conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la fin de non-recevoir soulevée par la SCI Le Cap.
Sur le fond
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile ;
Il est constant que le bail litigieux a été renouvelé en dernier lieu le 30 juin 2009.
Mme [Z] a sollicité qu'il soit renouvelé une nouvelle fois par acte d'huissier du 18 mai 2018, ce que la société Le Cap a refusé le 06 août 2018, en se prévalant de l'absence de règlement des causes du commandement de payer signifié le 15 juin 2018.
En l'absence de renouvellement postérieur à l'entrée en vigueur de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, la répartition des charges entre le bailleur et le preneur obéit au principe de la liberté contractuelle.
Le contrat de bail dispose que 'le preneur payera également sa part des charges générales évaluées à 460 francs (soit 70,13 euros par trimestre)'.
Mme [Z] ne conteste pas que les charges appelées par la société Le Cap depuis 2012 entrent dans la définition des charges générales au sens de ces dispositions conventionnelles.
Il ressort par ailleurs de la pratique des parties et de leurs écritures que la 'part' incombant à la locataire du local pris à bail correspond au rapport entre la surface de son local d'une part et la surface totale de l'immeuble.
Suite aux travaux réalisés en 2010, la société Le Cap a ramené la part de Mme [Z] dans les charges générales de 20/100èmes à 7/100èmes, selon une clef de répartition contestée par l'appelante.
Il convient en conséquence de vérifier si cette clef correspond au prorata des surfaces occupées ensuite des travaux d'extension.
La demande de permis de construire précise que l'immeuble se composait, avant travaux, de locaux consacrés à l'habitation de 166,4 mètres carrés de surface hors oeuvre nette et de locaux commerciaux ou professionnels de 133 mètres carrés de surface hors oeuvre nette.
Elle précise également que les travaux à réaliser s'entendent de l'agrandissement du cabinet dentaire en rez-de-chaussée, accompagné d'une extension minime du cabinet de coiffure, ainsi que de l'agrandissement des deux logements à l'étage, avec aménagement des combles afin que ces logements soient aménagés en duplex.
Elle précise enfin que les travaux porteront la surface hors oeuvre nette à 228,25 mètres carrés pour les logements et à 166,60 mètres carrés pour les locaux professionnels ou commerciaux.
Il résulte des métrés réalisés le 19 juillet 2010 que le logement A a été mesuré à 76,32 mètres carrés de surface habitable et 28,48 mètres carrés de surface non comptabilisée, tandis que le logement B a été mesuré à 101,72 mètres carrés de surface habitable et 23,53 mètres carrés de surface non comptabilisé, pour un total de 230,05 mètres carrés de surface hors oeuvre nette, correspondant manifestement aux 228,25 mètres carrés prévus à l'issue des travaux.
Il résulte des métrés réalisés les 09 août 2010 et 23 novembre 2010 que le salon de coiffure a été mesuré à 22,91 mètres carrés de surface habitable, tandis que le cabinet dentaire a été mesuré à 120,87 mètres carrés de surface utile brute. Ces surfaces ont été calculées en fonction de référentiels (surface habitable et surface utile brute) excluant une partie de la surface hors oeuvre nette. Elles sont donc nécessairement inférieures à celle-ci. Or, il apparaît que le cumul de ces surfaces s'établit à plus de 142 mètres carrés de surface habitable, ce qui implique une surface hors oeuvre nette plus grande encore, tandis que les locaux commerciaux et professionnels présentaient avant travaux une surface hors oeuvre nette de 133 mètres carrés.
Il s'ensuit que ces métrés correspondent aux surfaces après travaux, quand même ceux-ci n'auraient-ils pas été entièrement achevés.
Or, les surfaces habitables ainsi déterminées conduisent à retenir des surfaces proportionnelles de 24 % pour le logement A, 31,5 % pour le logement B, 7 % pour le salon de coiffure et 37 % pour le cabinet dentaire, correspondant exactement à la nouvelle clef de partage des charges appliquées par la société Le Cap depuis 2012, telle qu'elle résulte des états annuels de répartition.
Il s'ensuit que cette clef de partage des charges appliquée par la société Le Cap est conforme aux surfaces des différents locaux et correspond aux conventions des parties.
Le fait que le salon de coiffure dans sa configuration issue des travaux ne soit pas exactement conforme aux plans du permis de construire n'a pas d'incidence sur la répartition des charges.
De même, le fait que Mme [Z] n'a plus d'accès direct aux communs depuis son local n'est pas de nature à affecter cette répartition, dès lors que l'intéressée peut continuer d'accéder au couloir commun depuis l'entrée principale de l'immeuble.
Il n'est nul besoin par ailleurs de disposer de relevés de valeur locative cadastrale des différents locaux pour déterminer la part de la taxe foncière incombant à Mme [Z], en ce que le montant de la taxe a été valablement réparti au prorata des surfaces occupées, à l'instar des autres postes de charges.
La cour retient pour finir que le grief tiré de l'absence de transmission de l'état récapitulatif annuel des charges, prévu à l'article R.145-36 du code de commerce, se trouve dépourvu de portée, ce texte n'étant pas applicable aux baux renouvelés, comme en l'espèce, antérieurement à son entrée en vigueur, étant observé au surplus que la SCI Le Cap produit aux débats les tableaux annuels de répartition des charges établis selon la clef précédemment validée et les justificatifs afférents.
De l'ensemble de ce qui précède, la cour tire les conclusions suivantes :
- les charges appelées par la SCI Le Cap depuis 2012, dont l'absence de règlement a justifié la signification le 15 juin 2018 d'un commandement visant la clause résolutoire du contrat de bail, ont été liquidées sur la base d'une clef de répartition pertinente ; la bailleresse était donc bien fondée, en l'absence de versement dans le mois du commandement, à refuser le renouvellement du bail par exploit du 06 août 2018, sans que le versement de la somme de 3.000 euros, intervenue en septembre 2021, puisse avoir la moindre incidence à cet égard ;
- le premier juge a pu valablement constater la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire insérée au contrat, en l'absence de règlement des causes du commandement de payer du 15 juin 2018 dans le mois de sa délivrance, et a donc à bon droit ordonné l'expulsion et condamné Mme [Z] à payer la somme de 2.611 euros au titre des charges impayées, selon décompte arrêté au 08 octobre 2018, et à verser une indemnité d'occupation.
Il s'en déduit, d'une part, que le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions et, d'autre part, que doivent être rejetées la demande d'expertise présentée par Mme [Z], et sa demande de reconnaissance de son droit à indemnisation au titre de la perte de son fonds de commerce.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile ;
Le jugement étant confirmé sur le fond, sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Z] étant la partie perdante en appel, sera condamnée à en supporter les dépens, et sera donc déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI Le Cap ayant exposé en particulier des frais d'avocat pour faire valoir ses droits en appel, l'équité commande que Mme [Z] soit condamnée à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, s'ajoutant à la somme allouée à ce titre par le tribunal.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé en dernier ressort,
- Rejette les fins de non-recevoir soulevées par la SCI Le Cap,
- Déclare recevables les demandes de Mme [J] [Z] tendant au prononcé d'une mesure d'expertise et à la reconnaissance du droit à indemnisation de la perte de son fonds de commerce, et les rejette,
- Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement prononcé le 11 mars 2021 entre les parties par le tribunal judiciaire de Lyon sous le numéro RG 18-12422,
- Condamne Mme [J] [Z] aux dépens de l'instance d'appel,
- Rejette la demande présentée par Mme [J] [Z] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne Mme [J] [Z] à payer à la SCI Le Cap la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel.
Ainsi jugé et prononcé à [Localité 4] le 30 octobre 2025.
Le greffier Le président
S.Polano C. Vivet