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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-2, 30 octobre 2025, n° 25/05951

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Keromes

Conseillers :

Mme Vassail, Mme Miquel

Avocats :

Me Bernardi, Me Cardona, Me Testini

T. com. Cannes, du 3 déc. 2019

3 décembre 2019

EXPOSE DU LITIGE

La société [Adresse 15] a été créée par la société [23], société anonyme chypriote. Elle exerçait une activité de : « acquisition et exploitation de tous domaines immobiliers et notamment propriété, administration, gestion, utilisation, location, concession, exploitation commerciale de ressources naturelles ou touristiques ainsi que les activités de promoteur immobilier et au marchand de biens ».

Par acte notarié du 29 décembre 2006, la société [Adresse 12] [Adresse 5] a acquis de la société [19], plusieurs terrains sis sur les communes d'[Localité 18] et [Localité 25] constituant un domaine de chasse moyennant le prix de 2 320 000 euros, outre le versement d'un complément de prix en cas d'obtention par l'acquéreur d'un permis de construire devenu définitif avant le 28 février 2008.

La société [23] a cédé la totalité de ses actions à Monsieur [N] [O], cette opération ayant donné lieu à :

- un acte sous seing privé en date du 08 février 2017 procédant à la cession des actions détenues par la société [22] au bénéfice de Monsieur [O] soit la totalité des 5.000 actions pour l'euro symbolique ;

- un acte sous seing privé en date du 8 février 2017 procédant à la cession du compte-courant d'associé détenu par [22] au bénéfice de Monsieur [O] pour un montant de 1.840.000 euros ;

- un acte sous seing privé en date du 8 février 2017 procédant à la cession de la créance détenue par Monsieur [E] sur la SAS [Adresse 15] d'un montant de 297 502,66 euros pour un montant de 104 000 euros.

Par acte notarié du 1er juin 2018, la société [Adresse 12] [Adresse 5] a cédé le bien immobilier acquis en 2006 à la SCI [24], société de droit monégasque dirigée par Monsieur [N] [O] pour le prix de 1.840 000 euros.

Durant la même année 2018, le compte courant associé de Monsieur [O] a été remboursé à hauteur de 1.798.945,30 euros.

***

Suite à l'acquisition par la SAS [Adresse 12] [Adresse 5] des biens situés [Localité 25] et [Localité 18], un contentieux est né du refus de la commune de délivrer un certificat d'urbanisme.

Par jugement en date du 13 novembre 2013, le tribunal judiciaire de Digne a condamné le vendeur, la société [19], à régler à la société [Adresse 15], la somme de 70 851 euros.

Selon arrêt en date du 22 janvier 2019, la cour de céans a infirmé la décision rendue par le tribunal judiciaire de Digne et condamné la société [14] au paiement de la somme de 400.000 euros à la société [19], au titre du complément de prix prévu initialement à l'acte.

Par arrêt en date du 5 mars 2020, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi élevé à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel.

***

Selon jugement rendu le 3 décembre 2019 par le tribunal de commerce de Cannes, saisi par le [19] par assignation en date du 20 août 2019, la SAS [Adresse 15] a été placée en redressement judiciaire.

Selon jugement rendu le 4 février 2020 par le tribunal de commerce de Cannes, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire. Maître [G] [J] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Selon jugement rendu le 16 avril 2024, le tribunal de commerce de Cannes, saisi par le liquidateur, a condamné M. [L] [O] à'combler le passif de la SAS [13] [Adresse 5] pour un montant de 465.722,16 euros et à payer au liquidateur la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

Monsieur [O] a interjeté appel de cette décision selon déclaration en date du 7 mai 2024.

Selon ordonnance de référé en date du 19 septembre 2024, le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a débouté M. [O] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

Selon ordonnance en date du 27 février 2025, l'appel a été radié en raison de l'inexécution de la décision querellée.

M. [O] a justifié de l'exécution de la décision et sollicité le ré enrôlement de l'affaire selon conclusions notifiées par la voie du RPVA le 12 mai 2025.

Selon conclusions d'appelant récapitulatives notifiées par la voie électronique le 6 août 2025, M. [O] demande à la cour de':

Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 16 avril 2024 en ce qu'il a':

- condamné M. [L] [O] à'combler le passif de la SAS [Adresse 15] pour un montant de 465.722,16 euros';

- condamné M. [L] [O] à payer au liquidateur la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision';

- ordonné au greffe la communication de la décision au procureur de la République conformément à l'article R.651-3 du code de commerce';

- ordonné au greffe de procéder aux formalités de signification de la présente décision aux personnes sanctionnées conformément à l'article R.662-1 1° du code de commerce';

- condamné M. [L] [O] aux dépens et dit qu'ils seront payés en priorité sur les sommes versées pour combler le passif';

Et statuant à nouveau :

Déclarer qu'il n'est pas démontré que Monsieur [N] [O] a commis une ou des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la SAS [Adresse 15]';

Déclarer que la responsabilité de Monsieur [N] [O] n'est pas engagée';

Débouter Me [J] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [14] de sa demande de comblement de passif à l'égard de Monsieur [N] [O]';

Débouter toute demande à l'encontre de Monsieur [N] [O]';

Condamner Me [J] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Adresse 16]à payer à Monsieur [N] [O] la somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'appui de ses demandes, M. [O] affirme qu'aucune faute de gestion qui ne relèverait pas de la simple négligence ne peut être retenue à son encontre.

Il fait valoir, en réponse au grief d'une activité déficitaire depuis 2009, qu'il n'est le dirigeant de la société liquidée que depuis courant 2017.

En réponse au grief de l'absence de dépôt de bilan suite à la condamnation de la SAS [Adresse 15] par la cour d'appel le 22 janvier 2019, il objecte qu'il avait formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt rendu par la Cour et que le litige n'était donc pas terminé au moment de l'assignation en ouverture d'une procédure collective par le créancier.

M. [O] affirme ensuite que le liquidateur ne démontre pas que l'absence de dépôt de bilan ait eu une incidence sur la situation financière de la société liquidée dont le passif ne s'est pas aggravé du fait de l'absence de déclaration de cessation des paiements'; il fait valoir que la créance de la [9] correspond à la cotisation foncière des entreprises due à compter du 1er janvier 2019, soit avant le jugement condamnant la société [Adresse 15].

M. [O] fait ensuite valoir que son compte courant d'associé a été partiellement remboursé suite à la cession de juin 2018 et que l'actif disponible sur les comptes de la SAS [13] [Adresse 5] était suffisant pour régler la créance de la [8], ainsi que les autres créanciers alors connus.

Compte tenu de la fixation de la date de cessation des paiements au 3 décembre 2019, M. [O] soutient qu'il ne peut lui être reproché une déclaration tardive de l'état de cessation des paiements.

Il estime que par sa gestion, le déficit de la société a été largement amélioré entre 2017 et 2018 et réfute toute poursuite d'activité déficitaire.

Il fait également valoir que la personnalité morale de la société a perduré pour les besoins des procédures en cours entre la société [19] et la SAS [Adresse 15].

M. [O] réfute toute comptabilité irrégulière puisque les comptes de la SAS [14] ont été régulièrement déposés sous sa gérance et notamment ceux au titre de l'exercice 2019, déposé le 30 juillet 2020, dans les délais, malgré les retards et les suspensions des délais dus à la crise [6].

Enfin, s'agissant du grief de dissimulation de l'actif et de gestion contraire à l'intérêt social,M. [O] indique qu'à la date de l'acquisition des actions de la société [Adresse 11] [Adresse 21] le 28 février 2017, il n'avait aucune idée des ennuis judiciaires à venir et ne pouvait imaginer faire l'objet d'une condamnation inverse'; que c'est avant le revirement de position de la cour d'appel qu'il a vendu l'ensemble immobilier à la SCI [24], la SAS [Adresse 15] ne pouvant pas exploiter commercialement le domaine de chasse, devant faire face à de nombreuses charges de fonctionnement et d'entretien et rencontrant des difficultés financières'; que la différence de prix a été justifiée par l'impossibilité d'exploitation commerciale du domaine et par les investissements nécessaires et donc la valeur du domaine'; que la SCI [24] a engagé plus de 5 millions d'euros dans le domaine'; que ne pouvant anticiper une condamnation de 400.000 euros, et alors que cette créance n'existait pas, la SAS [Adresse 15] a procédé au remboursement d'une partie de son compte courant d'associé et non de la totalité du prix, la société conservant une somme suffisante pour désintéresser les créanciers existants à ce moment-là.

Selon conclusions notifiées le 18 juillet 2025 par la voir électronique, le liquidateur judiciaire demande à la cour de':

Confirmer le jugement de 1ère instance rendu par le tribunal de commerce de Cannes en date du 16 avril 2024 en toutes ses dispositions ;

Au besoin statuant de nouveau,

Retenir la responsabilité de Monsieur [N] [O], au titre des fautes de gestion commises ayant contribué à l'insuffisance d'actif ;

Condamner Monsieur [N] [O] à supporter la totalité de l'insuffisance d'actif à hauteur de 465.576,18 euros ;

Condamner subsidiairement Monsieur [N] [O] à supporter l'insuffisance d'actif à hauteur de telle somme qu'il plaira à la cour dans le cadre de son appréciation souveraine ;

Dans tous les cas,

Condamner Monsieur [O] à verser entre les mains du liquidateur judiciaire ès qualités, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile relatif à la procédure d'appel ;

Condamner Monsieur [O] aux entiers dépens d'appel ;

Débouter Monsieur [O] de toutes demandes, fins et prétentions plus amples et contraires.

A l'appui de ses demandes, le liquidateur judiciaire fait tout d'abord grief à M.'[O] d'avoir dissimulé/dissipé l'actif de la société [Adresse 15] dans son intérêt et dans celui d'une autre société qu'il dirige, de l'avoir vidé de sa substance et d'avoir soustrait cet actif aux créanciers de la procédure collective :

- en organisant la vente du bien de ladite société à son autre société, la SCI [24], pour le prix de 1.840.000 euros, montant correspondant exactement au montant du compte-courant d'associé de la société [22] précédemment acquise par lui';

- en réduisant l'actif disponible en liquidité de la société [Adresse 15] en remboursant en 2018 son compte courant associé à hauteur de 1.798.945,30 euros.

Le liquidateur reproche également à M. [O] d'avoir laissé la société en déshérence durant près de 7 mois sans prendre de mesures adéquates et, notamment, sans déposer le bilan alors que la société [Adresse 15] avait été condamnée par la cour d'appel, que le pourvoi formé n'était pas suspensif'et d'avoir en réalité organisé la dissipation de son actif': le liquidateur judiciaire soutient que, par sa carence, M. [O] a causé une aggravation du passif, la [8] ayant déclaré une créance pour l'exercice 2019.

Le liquidateur lui reproche ensuite d'avoir laissé se poursuivre une activité déficitaire lors des exercices 2017 et 2018.

Il fait également grief à M. [O] de n'avoir remis aucune comptabilité au titre de l'année 2019, alors que le redressement Judiciaire a été prononcé le 03 décembre 2019.

Le liquidateur ajoute que, contrairement à ce qu'affirme Monsieur [O], le fait que le passif ait été aggravé, ne serait-ce qu'en partie avant son entrée en fonction, à considérer que cela soit démontré, ce qui n'est pas le cas, importe peu.

Selon avis communiqué le 1er juillet 2019, le procureur général sollicite la confirmation du jugement querellé sur le fondement des moyens du mandataire qu'il fait siens.

Les parties ont été avisées le 3 juin 2025 de la fixation de l'affaire à bref délai à l'audience du 3 septembre 2025 et de la date prévisible de la clôture.

La clôture a été prononcée le 3 septembre 2025.

'

MOTIFS DE LA DECISION

L'article L.651-2 du code de commerce dispose que : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée.»

En application du texte susvisé, pour que l'action initiée par la Me [J] ès-qualités puisse prospérer il faut que soient établis :

1. une insuffisance d'actif,

2. une ou plusieurs fautes de gestion, excédant la simple négligence, imputables à Monsieur [O]

3. un lien de causalité entre la ou les fautes commises et l'insuffisance d'actif.

Sur l'insuffisance d'actif

L'insuffisance'd'actif''correspond à la'différence entre le passif'antérieur à l'ouverture de la'procédure'collective'et l'actif. Il n'est pas nécessaire qu'elle soit chiffrée'ni définitive ; il suffit qu'elle soit certaine. L'existence et le montant de l'insuffisance'd'actif sont appréciés au moment où statue la juridiction saisie de l'action.

L'actif s'élève à la somme de 4 128,01 euros.

Le passif admis s'élève à la somme de 469 704,19 euros.

L'insuffisance d'actif est d'un montant de 465.576,18 euros.

Sur l'existence de fautes de gestion imputables à M. [O]

Le liquidateur reproche à M. [O] les fautes suivantes':

- la dissimulation/ dissipation d'actif dans l'intérêt du dirigeant et d'une autre société qu'il dirige,

- une inaction fautive dans la gestion sociale,

- la poursuite d'une activité déficitaire,

- l'absence de remise de comptabilité au titre de l'année 2019.

- Sur la poursuite d'une activité déficitaire':

L'exploitation déficitaire consiste pour l'entreprise à ne plus faire de bénéfices et au contraire à développer des pertes.

La'poursuite'd'une'activité'déficitaire'ne peut résulter du seul constat d'une augmentation du montant des dettes ou d'une persistance des dettes.

Il résulte des éléments comptables versés aux débats que':

Exercice 2017 : - 676.600,07 €

Exercice 2018 : - 17.001,77 €.

Compte tenu de cette évolution bilantielle, et en l'absence d'autres éléments produits par le liquidateur qui a la charge de la preuve, il n'est pas établi que la poursuite de l'activité de la société par M. [O] courant 2018 ait contribué à l'aggravation du passif.

Ensuite, le passif a été considérablement aggravé par la condamnation de la société [Adresse 15] au paiement de la somme de 400.000 euros à la société [19] par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 22 janvier 2019 mais cette augmentation de passif est sans lien avec la poursuite d'une activité déficitaire puisqu'elle trouve son origine dans un contentieux né de l'exécution de l'acte notarié du 29 décembre 2006.

A défaut d'autres éléments produits par le liquidateur qui a la charge de la preuve, la faute de gestion consistant dans la poursuite d'une activité déficitaire n'est pas établie à l'encontre de M. [O].

- Sur l'inaction fautive dans la gestion sociale

Le liquidateur reproche en réalité à M. [O] de n'avoir pas lui-même déclaré l'état de cessation des paiements après la condamnation de sa société par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 22 janvier 2019 et d'avoir attendu d'être assigné le 20 août 2019 et soutient qu'il s'agit d'une inaction fautive.

Cependant, il échet d'observer que le tribunal de commerce, par décision irrévocable, a fixé la date de cessation des paiements à la date du jugement, le 3 décembre 2019.

Le liquidateur soutient que le défaut de dépôt de bilan dès la condamnation par la cour d'appel de céans a aggravé le passif de la société [Adresse 15] dès lors que la [8] a déclaré une créance pour 2019 de 1 271 euros.

L'état du passif au 3 octobre 2022 (pièce 15 du liquidateur) mentionne au sujet de cette créance l'observation suivante': CFE 01/01/19 au 31/12/19.

Or la [4], c'est-à-dire la contribution foncière des entreprises, est due pour l'année entière par le redevable qui exerce son activité au 1er janvier en application de l'article 1478 du code général des impôts. Il résulte en outre des conclusions du liquidateur que le Trésor public a remboursé la somme de 1271 euros à la société [Adresse 15], ce dont il se déduit qu'il a tenu compte de la vente du domaine à la SCI [24] dès l'année 2018.

Il ne peut dès lors être soutenu comme le fait le liquidateur que l'inaction de M. [O] a eu pour effet d'aggraver le passif.

Cette faute de gestion n'apparaît donc pas caractérisée.

- Sur le défaut de comptabilité

L'article L.123-12 dispose que «'Toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont enregistrés chronologiquement.

Elle doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois, l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise.

Elle doit établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice au vu des enregistrements comptables et de l'inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable.'»

Une comptabilité incomplète ou inexacte s'analyse en une absence de comptabilité.

L'absence de tenue de comptabilité constitue une faute de gestion susceptible d'être sanctionnée par la condamnation d'un dirigeant de droit ou de fait à supporter l'insuffisance d'actif de la personne morale.'

Compte tenu de la production par M. [O] de l'attestation de dépôt des comptes auprès du greffe du tribunal de commerce de Cannes le 30 juillet 2020 dans un délai conforme aux dispositions de l'ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020, il convient d'écarter le grief de défaut de comptabilité pour l'année 2019 élevé par le liquidateur à l'encontre de M. [O].

En tout état de cause, quand bien même le défaut de comptabilité pour l'année 2019 aurait été établi, il ne pourrait être retenu à l'encontre de M. [O] en l'absence de conséquence sur l'état du passif comme déjà démontré.

- Sur la dissimulation/ dissipation d'actif dans l'intérêt du dirigeant et d'une autre société qu'il dirige

La cour relève que':

- le tribunal de grande instance de Digne a condamné la société [19] à payer la somme de 70'000 euros à la société [Adresse 15] le 22 janvier 2009 en réparation du dol commis,

- la société [19] a interjeté appel le 8 octobre 2015,

- la vente du bien immobilier de la société [Adresse 15] à la SCI [24] est intervenue le 1er juin 2018 pour la somme de 1'840'000 euros,

- courant 2018, le compte courant associé de M. [O] a été remboursé à hauteur de la somme de 1'798'945,30 euros,

- la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le 22 janvier 2019 la décision rendue par le tribunal judiciaire de Digne le 13 novembre 2013 et condamné la société [Adresse 11] [Adresse 21] au paiement de la somme de 400.000 euros à la société [19],

- la SCI [24] justifie de nombreux travaux depuis l'acquisition du domaine, l'expert-comptable de la société ayant attesté que la société avait engagé depuis 2018 la somme totale de 5'244'331 euros au titre des travaux de construction et de rénovation.

Il résulte de ce qui précède que lors de la vente du domaine, M. [O] restait en l'état d'une décision favorable du tribunal de grande instance et que le domaine n'a manifestement pas été bradé compte tenu de l'ampleur des travaux réalisés ensuite par la société acquéreuse.

S'il peut être reproché à M. [O] de n'avoir pas provisionné une somme compte tenu de l'instance d'appel en cours avant de rembourser son compte courant d'associé, cette faute relève de la simple négligence en l'absence de démonstration par le liquidateur d'une intention malicieuse de M. [O].

La faute de dissimulation/ dissipation d'actif par M. [O] n'est pas établie par le liquidateur.

Dès lors qu'aucune des fautes reprochées à M. [O] n'est établie à son encontre, il convient d'infirmer dans toutes ses dispositions le jugement querellé et de débouter Me [J] ès qualités de l'ensemble de ses demandes.

Sur les dépens

Les dépens de première instance et les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société [Adresse 15].

En équité, il convient de débouter M. [O] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Le liquidateur ès qualités est infondé en sa demande au titre des frais irrépétibles, motif pour lequel il en sera débouté.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, après débats publics et par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe';

Infirme en toutes ses dispositions le jugement querellé';

Y ajoutant :

Déboute Me [G] [J] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Adresse 15]' de sa demande de comblement de passif à l'égard de Monsieur [N] [O]';

Déboute M. [N] [O] et Me [G] [J] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [17]de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de la procédure collective de la SAS [Adresse 10] [7] [Adresse 21].

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