CA Limoges, ch. civ., 30 octobre 2025, n° 24/00395
LIMOGES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
Maverick Renovation (SASU), CA Consumer Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Balian
Conseillers :
M. Soury, Mme Gasnier
Avocats :
Me Plas, Me Dubois-Maret, Me Maillet
EXPOSE DU LITIGE
Faits et procédure
Suivant bon de commande du 12 mars 2020 signé dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [E] [U] a commandé à la société Maverick Rénovation une pompe à chaleur air/eau monophasé de 16kw avec un chauffe-eau thermodynamique, moyennant un prix de 19 500 euros TTC.
Le même jour, M. [U] a souscrit un prêt auprès de la société C.A. Consumer Finance destiné à financer la commande ainsi passée auprès de la société Maverick Rénovation.
La pompe à chaleur a été installée la semaine du 6 mars 2024, les fonds étant débloqués par l'organisme de crédit.
Ayant vu ses demandes d'aides auprès de EDF et de l'Agence nationale de l'Habitat être rejetées et ayant constaté des dysfonctionnements sur l'installation, M. [U] a mis en demeure la société Maverick Rénovation par lettre recommandée du 28 juillet 2021 de remédier aux difficultés rencontrées.
En l'absence de réponse, M. [U] a par acte du 10 juin 2022 fait assigner la société Maverick Rénovation et la banque C.A. Consumer Finance devant le Tribunal judiciaire de Limoges, aux fins notamment de voir prononcer la nullité et la résolution du contrat conclu avec la société Maverick Rénovation, avec les conséquences subséquentes sur le contrat de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 7 mars 2024, la société Maverick Rénovation n'ayant pas comparu, le Tribunal judiciaire de Limoges a :
- débouté [E] [U] de :
* ses demandes en nullité et en résolution du contrat conclu avec la société Maverick Rénovation;
* sa demande tendant à se voir restituer les échéances de prêt déjà réglées et à se voir dispenser de son obligation de paiement envers la société C.A. Consumer Finance ;
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.
Par déclaration en date du 29 mai 2024, M. [E] [U] a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
La clôture de la procédure devant la Cour a été prononcée par ordonnance du 27 août 2025,
sans que la société Maverick Rénovation n'ait constitué avocat
Il sera statué par arrêt de défaut, en ce que les actes de procédure destinés à la société Maverick Rénovation lui ont été notifiés par acte d'huissier déposé à étude le 9 juillet 2024.
Prétentions des parties
Dans le dernier état de ses conclusions déposées le 5 août 2025, M. [E] [U] demande à la Cour de :
- réformer le jugement déféré;
- annuler le contrat conclu le 12 mars 2020 avec la société Maverick Rénovation;
- annuler le contrat de crédit conclu avec la société C.A. Consumer Finance ;
- ordonner la reprise de l'installation aux frais de la société Maverick Rénovation;
- dispenser M. [U] de son obligation de restituer la somme en capital de 19 500 euros à la société C.A. Consumer Finance en raison de la faute de cet organisme de crédit qui le prive de son droit à remboursement des sommes prêtées;
- condamner la Société C.A. Consumer Finance à verser à M. [U] l'intégralité des échéances versées par lui soit, au jour de la rédaction des présentes conclusions, 9 967,88 euros (58 échéances à 171,86 euros en août 2025), somme ) à parfaire avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
- rejetter la demande de la société C.A. Consumer Finance à voir condamner M. [U] à lui rembourser la somme de 19 500 euros ;
- condamner solidairement la société Maverick Rénovation et la société C.A. Consumer Finance à payer à M. [U] les sommes suivantes au titre de dommages et intérêts :
* 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;
* 5 000 euros au titre du préjudice moral
- condamner la société Maverick Rénovation à verser à M. [U] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens devant la Cour.
Dans le dernier état de ses conclusions en date du 6 août 2025, la société C.A. Consumer Finance demande à la Cour de :
- déclarer irrecevables sur le fondement des articles des articles 504 et 915-2 du Code de procédure civile les demandes tendant à voir condamner solidairement les sociétés C.A. Consumer Finance et Maverick Rénovation à payer à M. [U] les sommes de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance et de 5 000 euros au titre du préjudice moral ;
- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes ;
- confirmer le Jugement entrepris en toutes ses dipsositions ;
A titre infiniment subsidiaire, si la Cour venait à infirmer le jugement entrepris en ce qu'elle déboute M. [U] de ses demandes tendant à obtenir la nullité ou la résolution des contrats :
- ordonner la remise des choses en l'état ;
- condamner M. [U] à restituer à la société C.A. Consumer Finance le montant du financement, soit la somme de 19 500 euros, à charge pour cette dernière de lui verser les mensualités réglées ;
- ordonner compensation entre les sommes réciproquement dues ;
- prononcer la condamnation en derniers ou quittances ;
- débouter M. [U] du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;
En tout état de cause :
- condamner M. [U] à payer à la société C.A. Consumer Finance la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION :
I - Sur la nullité du contrat principal conclu entre M. [U] et la société Maverick Rénovation :
M. [U] poursuit la nullité du contrat principal conclu avec la société Maverick Rénovation, et corrélativement la nullité du contrat de prêt souscrit auprès de la société C.A. Consumer Finance. Il soutient que son consentement aurait été vicié lors de la signature du bon de commande qui ne comprend pas les mentions obligatoires prévues par le code de consommation et qu'il doit donc être déclaré nul.
A cette fin, il fait valoir que ne figurent pas sur le contrat de prestation de service, les délais d'installation, le droit de recourir à un méditateur de la consommation, ni les coordonnées de l'assureur couvrant les désordres de la société venderesse au titre de sa responsabilité civile et décennale (article R. 111-2-9° du Code de la consommation).IL estime que la société Maverick Rénovation a donc manqué à ses obligations (L. 221-8 et suivants et L. 111-1 et suivants du code de la consommation). Il affirme, contrairement à ce que soutient la C.A. Consumer Finance et ce qu'a retenu le premier juge, que la simple référence sur le bon de commande d'un délai de 4 mois pour l'installation ne peut être jugée satisfaisante dans la mesure où il ne s'agit que de la reprise du délai maximum de livraison prévu dans les conditions générales de vente, et qu'il n'est aucunement mentionné les différents délais de prestation.
Il ajoute que conformément aux termes de l'article L. 221-9 le contrat doit comporter un formulaire de rétractation détachable conforme à l'annexe de l'article R. 221-1 du Code de la Consommation, ce qui ne serait pas le cas en l'espèce. Il soutient que l'exemplaire détachable n'est pas conforme, car son utilisation aurait pour effet de faire disparaître sa signature du contrat, et donc de le priver de la preuve de son engagement. Il rappelle que l'emploi du formulaire ne doit pas avoir pour effet de porter atteinte à l'intégralité du contrat que le consommateur doit pouvoir conserver. Il en déduit que la nullité du contrat doit être prononcée conformément aux dispositions de l'article L. 242-1 du Code de la Consommation.
Il ajoute que bien que le non- respect des textes susvisés ne soit sanctionné que par une nullité relative susceptible d'être couverte par les actes accomplis par le client, cela suppose la connaissance par le client desdites dispositions lui permettant de déceler les éventuelles irrégularités affectant le contrat et donc sa volonté non équivoque de confirmer le contratl litigieux. Il conteste avoir été mis en mesure de connaître la non-conformité du bon de commande tenant aux irrégularités susvisées. Il ajoute que si la société C.A. Consumer Finance produit un procès-verbal de réception des travaux, il affirme n'en avoir jamais eu connaissance, et doute que la signature y figurant soit la sienne, alors qu'il ne conteste pas sa signature apparaissant sur l'enquête de satisfaction signée le même jour.
La société C.A. Consumer Finance s'oppose cette analyse et sollicite la confirmation du jugement querellé en toutes ses dispositions. Elle rappelle que les prescriptions des articles L. 111-1 et R. 221-1 du Code de la Consommation ne sont pas sanctionnées par la nullité du contrat, et qu'aucun décret ne vient préciser ce que doivent être les caractéristiques essentielles des équipements au sens de l'article L. 221-5 du Code de la consommation. Elle considère que les caractéristiques essentielles sont celles qui déterminent le consentement de celui qui acquiert les équipements en question. Elle estime que le premier juge a fait une exacte appréciation des faits en jugeant que le bon de commande détaille les caractéristiques essentielles de la pompe à chaleur et du chauffe-eau puisqu'il mentionne leur marque, leur prix (distinction faite de la main d'oeuvre et du matériel) leur puissance, les performances, mais aussi ( et alors que cela n'est pas exigé par la jurisprudence ) les dimensions de la pompe, le poids, la couleur, le type de compresseur et les types de raccordement.
Elle ajoute que l'article L. 221-5 du Code de la consommation n'exige pas que le délai de livraison soit détaillé pour chaque équipement et prestation , et ne requiert pas davantage la mention d'une date précise, rappelant que le premier juge a estimé que la mention d'un délai de livraison de 4 mois est suffisante.
Concernant le bordereau de rétractation, elle estime que la circonstance que M. [U] considère qu'il n'est pas détachable sans altérer le document au seul motif que sa signature sort du cadre réservé à l'emprunteur pour venir déborder sur le bon est indifférente puisque le verso du bordereau de rétractation ne contient aucune clause particulière ou générale du contrat. Elle estime que son utilisation n'altère en rien le document contractuel.
Quant aux indications sur la possibilité de recourir au médiateur ou les coordonnées de l'assureur, elle indique qu'elles se trouvent 'très vraisemblablement' insérées dans les conditions générales que M. [U] a reconnu avoir reçues, mais qu'il s'abstient de verser aux débats.
En tout état de cause, elle soutient, comme l'a retenu le premier juge, que le formalisme du bon de commande est une cause de nullité relative qui suppose, pour être encourue, de rapporter la preuve d'un grief ou d'un vice de consentement. Elle affirme que les mentions invoquées ne sont pas déterminantes du consentement de M. [U], et que sanctionner automatiquement le défaut de mention quant à la faculté de recourir à un médiateur par la nullité du contrat, reviendrait à appliquer une sanction disproportionnée, ce qui serait contraire à l'article 4 de la Directive du 25 octobre 2011 relative à la protection du consommateur.
Aux termes de l'article L. 121-23 du code de la consommation, une vente à domicile doit faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
1° Noms du fournisseur et du démarcheur ;
2° Adresse du fournisseur ;
3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ;
4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés;
5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ;
6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ;
7° Faculté de renonciation prévue à l'article [4] 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.
Sur le bordereau de rétraction
Selon l'article L. 221-9 du code de la consommation, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5. A peine de nullité prévue à l'article L. 242-1 du même code, il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.
De la faculté offerte au consommateur d'exercer son droit de rétractation au moyen d'un formulaire obligatoirement fourni par le professionnel, l'emploi de ce formulaire ne doit pas avoir pour effet de porter atteinte à l'intégrité du contrat que le consommateur doit pouvoir conserver.
En l'espèce, à l'examen du bon de commande et du bordereau de rétraction que celui-ci comprend, il ressort que ledit bordereau peut être utilisé sans porter atteinte à l'intégrité du contrat, contrairement à ce que soutient M. [U] (pièce 1 de l'appelant). Il s'agit en effet de découper le bas de la 2ème page du bon de commande, ce qui n'affecte aucune autre partie du bon de commande. En outre, il n'y a aucun mention au verso.
Ce moyen de nullité sera donc rejeté.
Sur l' obligation de mentionner la possibilité de recourir à une procédure extrajudiciaire de règlement des litiges et les modalités d'accès à celle-ci
Il résulte des articles L. 111-1, 6, L. 221-5, L. 221-9 du code de la consommation, et de l'article L. 242-1 du même code, qu'un contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du code de la consommation.
En l'espèce, le bon de commande versé aux débats par M. [U] ne mentionne pas la possibilité de recourir au médiateur , ni les coordonnées de l'assureur (pièce 1 de l'appelant). La C.A. Consumer Finance soutient que les indications sur la possibilité de recourir au médiateur ou les coordonnées de l'assureur se trouvent 'très vraisemblablement' insérées dans les conditions générales que M. [U] a reconnu avoir reçues, mais qu'il s'abstient de produire. Les conditions générales de vente étant une partie intégrante du contrat signé, et M. [U] ne produisant pas ces conditions générales de vente qu'il confirme pourtant avoir reçues, la Cour n'est pas en mesure de vérifier la présence ou non de la mention contenant l'indication de la possibilité de recourir au médiateur.
Cet autre moyen de nullité sera également rejeté.
Sur le délai de livraison
En l'espèce, M. [U] soutient que la seule mention d'un délai de livraison de 4 mois dans le bon de commande, se contentant de reprendre les mentions des conditions générales de vente, est insuffisant à respecter les prescriptions du code de la consommation. La société C.A. Consumer Finance réplique en soutenant que le code de la consommation n'exige pas que le délai de livraison soit détaillé pour chaque équipement et prestation, et qu'il ne requiert pas davantage la mention d'une date précise, comme l'a retenu le premier juge.
Il résulte des articles L. 242-1, L. 221-9, alinéa 2, L. 221-5, 1°, et L.111-1, 3° du code de la consommation, que les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
Contrairement à ce que soutient la société C.A. Consumer Finance, la mention d'un délai de livraison de quatre mois est insuffisante, dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai des opérations matérielles de livraison des biens, celui de leur installation et celui d'exécution des autres prestations, notamment administratives et de mise en service, auxquelles le vendeur s'est engagé. Un tel délai global ne permet pas à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations. Ainsi, la mention d'un délai de livraison de quatre mois est insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L111-1 3° du code de la consommation (1ère Civ. 20 décembre 2023, n° 22- 13014).
De manière superfétatoire, la Cour considère que le bon de commande est incomplet quant à la description des caractéristiques du chauffe-eau thermodynamique, en ce qu'il ne contient aucune indication sur sa capacité et sur sa marque, sachant que cette carence fait également encourir la nullité du bon de commande.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de nullité du bon de commande, une seule irrégularité étant suffisante pour emporter l'annulation du bon de commande, le contrat de vente doit en conséquence être annulé comme le prévoit l'article L. 242-1 du code de la consommation qui dispose que « les dispositions des articles L. 221-9 et L. 221-10 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement ».
Toutefois, la nullité encourue peut être couverte par la confirmation comme le prévoit l'article 1182 du code civil, ce dont se prévaut la société C.A. Consumer Finance pour qui la nullité du contrat principal n'est que relative. La cour rappelle que la confirmation au sens de l'article 1182 du code civil est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Néanmoins, s'il est admis en vertu de ce texte que l'acquéreur est susceptible de couvrir les causes de nullité du contrat de vente, notamment par l'exécution volontaire du contrat, c'est à la double condition qu'il ait eu connaissance du vice affectant le contrat et l'intention de le réparer.
Sur la confirmation par M. [U] du contrat litigieux
M. [U] affirme que n'est pas rapportée la preuve de ce qu'il aurait confirmé le contrat nul en l'exécutant volontairement. La Société C.A. Consumer Finance verse aux débats un procès-verbal de réception des travaux (pièce 3b de l'intimé), sachant que M. [U] affirmant n'en avoir jamais eu connaissance, et douter que la signature qui apparaît sur ledit procès-verbal soit la sienne, alors qu'il ne conteste pas l'authenticité de sa signature apparaissant sur l'enquête de satisfaction signée le même jour.
En l'espèce, parmi les pièces produites, aucun élément ne permet de considérer que M. [U] connaissait les causes de nullité entachant le bon de commande. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune autre pièce produite aux débats que M. [U] a eu conscience de ceux-ci au moment de la souscription du contrat ou de son exécution.
Le fait d'avoir signé un procès-verbal de réception de travaux comme le soutien la société CA Consumer Finance, alors que M. [U] conteste y avoir apposé sa signature, aux termes duquel '[U] [E], après avoir procédé à l'examen des travaux exécutés par l'entreprise AVANT APRES (Maverick Rénovation) représenté par Monsieur [F] [G] désigné dans le présent procès-verbal déclarons que la réception est prononcée sans réserve, avec effet à la date du 23/03/2020" ne démontre pas que M. [U] a manifesté la volonté expresse et non équivoque de couvrir les irrégularités du bon de commande, irrégularités dont il ne pouvait appréhender les conséquences dans leur totalité, en sa qualité de consommateur non averti. Les actes accomplis par M. [U] postérieurement à la signature du bon de commande, à savoir la réalisation des travaux, l'absence de rétractation et le paiement des mensualités, dans l'ignorance de la sanction de nullité du contrat encourue, n'ont pas pu couvrir les vices affectant le bon de commande.
Il s'ensuit que la confirmation de l'acte entaché de nullité n'est pas caractérisée, de sorte que le contrat litigieux doit être annulé.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité du contrat conclu le 12 mars 2020, entre M. [E] [U] et la société Maverick Rénovation, et de réformer en ce sens le jugement querellé.
II - Sur les conséquences de la nullité du contrat principal :
M. [U] poursuit la nullité du contrat de crédit affecté par lui conclu le 12 mars 2020 avec la société C.A. Consumer Finance, en raison du lien indissociable le rattachant au contrat principal.
En application des articles L. 312-55 et L. 312-56 du Code de la consommation, anciennement L. 311-32 et L. 311-33, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il découle de cette annulation de plein droit du contrat de crédit, consécutive à celle du contrat principal, le même principe de restitution réciproque, entraînant l'obligation pour l'emprunteur de restituer au prêteur le capital, même si ce capital a été versé directement au vendeur, et pour le prêteur l'obligation de restituer les échéances payées par l'emprunteur.
Se fondant sur ce texte, M. [U] demande la remise en état des parties, soit la restitution par ses soins de la pompe à chaleur, à charge par la Société Maverick Rénovation de venir la reprendre à ses frais, et à charge pour la Société C.A. Consumer Finance de lui rembourser les versements effectués selon décompte à parfaire.
En l'espèce, la Cour rappelle être uniquement saisie des demandes des parties et ne pouvoir statuer au -delà de ce qui est demandé, sachant que dans ses écritures, M. [U] réclame la reprise de l'installation aux frais de la société Maverick rénovation, sans formuler aucune demande de restitution du prix de vente.
En conséquence, l'annulation du contrat entraînant l'anéantissement rétroactif du contrat, elle emporte de plein droit obligation à restitution réciproque, de sorte qu'il sera fait droit à la demande de M. [U] aux fins de condamnation de la société Maverick Rénovation à reprendre à ses frais le matériel installé.
M. [U] soutient par ailleurs que la C.A. Consumer Finance a commis des fautes et qu'elle n'est donc pas fondée à solliciter la restitution de la somme prêtée. Il rappelle que selon une jurisprudence constante, le prêteur est privé de sa créance de restitution du capital lorsque les fonds sont versés sans qu'il ait procédé aux vérifications lui permettant de constater que le contrat principal est affecté d'une cause de nullité ou n'a pas été entirèrement exécuté.
Il indique que la société C.A. Consumer Finance a procédé au déblocage des fonds, alors que le bon de commande comportait des irrégularités manifestes, de nature à entraîner la nullité du contrat principal, alors qu'il lui appartenait, avant toute libération des fonds, de procéder à la vérification formelle du contrat produit par le vendeur. Il ajoute que la banque a débloqué les fonds, sans s'assurer que le vendeur avait exécuté l'intégralité de ses obligations, l'installation de la société Maverick Rénovation étant non fonctionnelle. Il affirme que le bénéfice des aides avait été mis en avant et qu'il lui avait été garanti lors du démarchage. Il soutient que la société C.A. Consumer Finance, en tant que prêteur professionnel, n'avait procédé à aucune vérification sur la bonne exécution de l'installation, ni sur le respect des engagements commerciaux.
La C.A. Consumer Finance estime qu'il ne saurait lui être reproché le moindre manquement contractuel, et conteste avoir commis la moindre faute en accordant le prêt à M. [U]. Elle ajoute selon elle que la Cour de cassation, par plusieurs arrêts rendus en mars et novembre 2020 s'est positionnée pour que la faute du prêteur ne le prive pas de sa créance de restitution en cas de résolution du contrat. Il soutient que si la Cour venait à retenir la responsabilité du prêteur, elle le ferait au visa de l'article 1217 du Code Civil ou de l'article 1240 du Code Civil, et appliquerait la sanction prévue par ces dispositions à savoir la condamnation à des dommages et intérêts. Elle ajoute que doit être démontrée au prélable une faute imputable au prêteur ayant causé un préjudice certain et direct, or tel n'est pas le cas selon elle. Elle explique qu'elle a débloqué les fonds au vu d'une facture, d'une demande de financement signée, d'un PV de réception dénué de réserves, d'une attestation de travaux à remettre à ERDF, d'une enquête de satisfaction. Elle estime qu'elle n'avait pas à s'assurer de la conformité de l'installation et de la perception d'une prime. Elle conclut que M. [U] ne démontre aucun préjudice, et qu'il doit être débouté de sa demande tendant à voir juger que la faute du prêteur le prive de son droit à restitution.
Subsidiairement, si la Cour venait à retenir l'existence d'une faute, la société CA Consumer Finance estime que le préjudice susceptible d'en découler correspond, tout au plus, à la perte de chance de contracter ou à la perte de chance de percevoir des aides ou primes de l'Etat, et ne pourrait en conséquence qu'être évaluée à une somme inférieure au montant desdites primes. Elle ajoute que par ailleurs cette perte de chance est selon elle réparée du fait de l'effet rétroactif de la nullité, M. [U] ayant vocation à obtenir de la société Maverick Rénovation la restitution du prix de vente.
Il résulte des articles L. 312-48, L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil que la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.
Cependant, le consommateur peut opposer au prêteur les fautes de ce dernier qui lui occasionnent un préjudice, et le privent de son droit à restitution.
Sur l'existence de fautes commises par la société C.A. Consumer Finance
Il est de jurisprudence constante qu'en cas d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution,fait qu'il peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l'espèce, M. [U] ne peut pas se prévaloir d'un manquement de la banque à son obligation de conseil et de mise en garde concernant la rentabilité économique de l'installation, ni l'obtention de primes ou aides, alors qu'aucun des éléments versés aux débats n'établitque cette condition était entrée dans le champ contractuel.
Par ailleurs, le prêteur, qui n'a pas à assister les emprunteurs lors de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu'il libère les fonds au vu notamment d'un certificat de livraison qui lui permet de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal. Or, en l'espèce, le procès-verbal de réception des travaux signé par M. [U] le 23 mars 2020 est très insuffisant pour rendre compte de l'étendue des obligations du vendeur, notamment quant à la mise en service qui n'est aucunement actée dans le procès-verbal de réception, alors qu'ellee est mentionné dans la facture produite par M. [U] (pièce 2 de l'appelant). Ce seul procès-verbal de réception est donc insuffisant pour permettre au prêteur de s'assurer de l'exécution effective des prestations d'installation et de mise en service, ne démontrant en rien que la totalité des prestations promises a été pleinement effectuée. Par ailleurs, la banque ne démontre aucunement avoir libéré les fonds également à la vue de la facture qu'elle ne produit pas aux débats contrairement à ce que mentionne son bordereau de pièce (elle produit en pièce 2 le bon de commande qui ne vaut pas facture). Enfin, aucune attestation de conformité n'a été produite, ni aucune attestation de mise en service pourtant obligatoire et permettant de s'assurer du bon fonctionnement du matériel (cerfa n°15497).
M. [U] reproche également à la banque de ne pas avoir vérifié la régularité du contrat principal, outre de contester sa signature sur le procès-verbal de réception des travaux fourni par cette dernière.Il est en effet flagrant de constater, par un simple examen visuel et comparatif avec les autres pièces produiotes, et notamment le bon de commande et le contrat de prêt, que ce procès-verbal de réception des travaux établi par la société Maverick Rénovation comporte une signature de M. [U] totalement différente des signatures qu'il a pu apposer sur les autres documents contractuels, y compris sur l'enquête de satisfaction signée le 23 mars 2020 et pour laquelle il reconnaît sa signature.
Il s'évince de ces observations que la banque a libéré les fonds à la seule vue d'un procès-verbal de réception de travaux douteux et aux mentions très insuffisantes, sans procéder à aucune vérification quant la régularité du contrat de vente et à la conformité de l'installation. Or, à la simple lecture du contrat de vente, elle aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, en l'espèce concernant le délai de livraison et l'absence de précision quant aux caractéristiques du chauffe-eau thermodynamique. En sa qualité de professionnel des opérations de crédit affecté, il lui appartenait de relever les anomalies apparentes du bon de commande, et elle se devait de ne libérer les fonds avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de M. [U] qu'il entendait confirmer l'acte irrégulier, notamment sur les caractéristiques du chauffe-eau effectivement installées.
Par ailleurs, les fonds ont été débloqués par la société CA Consumer Finance directement entre les mains de l'entreprise Maverick Rénovation, suite à un simple procès-verbal de réception du 23 mars 2020, soit dans un délai trop court, de moins d'un mois, pour que les démarches administratives et la mise en service aient pu avoir lieu. Aucune attestation de mise en service n'est en effet produite, ce que ne manque d'ailleurs pas de relever EDF pour refuser à M. [U] la prime d'énergie (pièce 5 de l'appelant), aucun document ne mentionnant le fonctionnement du matériel. La société Maverick Rénovation n'a jamais répondu aux demandes de M. [U] et son conseil pour avoir des documents conformes (pièces 7 et 9 de l'appelant), ni au courrier de l'UFC Que Choisir (pièce 8 de l'appelant).
Dès lors, la société C.A. Consumer Finance ne peut soutenir n'avoir commis aucune faute.
Il reste à apprécier s'il existe un préjudice souffert effectivement par l'emprunteur, sachant que pour être réparable, le préjudice doit en effet se rattacher par un lien suffisant au comportement dommageable de son auteur.
Sur l'existence d'un préjudice subi par M. [U]
M. [U] fait valoir que la pompe à chaleur n'est pas fonctionnelle, qu'il y a des désordres d'installation, notamment car elle serait sous-dimensionnée, et qu'il a été contraint d'acheter des chauffages d'appoint pour assurer un confort thermique minimal dans son habitation. Il verse au dossier un constat d'huissier dressé le 11 décembre 2024 mettant en évidence que lorsque la température extérieure est inférieuse à 7°C, la pompe à chaleur est incapable de chauffer correctement le logement, outre que dans certaines pièces, les radiateurs restent totalement froids. Il s'ensuit que la pompe à chaleur tourne en continue à puissance maximale, ce qui génère une consommation d'électricité excessive. Le 4 mars 2025, un rapport d'expertise technique est venu confirmer ces dysfonctionnements, tout en relevant un défaut de sécurité grave en raison d'une configuration non conforme aux normes de sécurité. Il ajoute que ce défaut de sécurité a été matérialisé le 7 mars 2025 par un départ d'incendie survenu au niveau du boîtier électrique de la pompe à chaleur. Il ajoute que la société Maverick Rénovation n'a selon lui jamais contesté les dysfonctionnements et a reçu de nombreux courriers recommandés en ce sens tant de M. [U], que de son conseil et de l'UFC Que Choisir. Il souligne que la société Maverick Rénovation est restée totalement taisante, qu'elle n'a pas constitué avocat en première instance comme devant la cour, et souligne qu'elle est toujours in bonis selon le kbis versé aux débats.
La banque C.A. Consumer Finance fait valoir que l'emprunteur ne démontre pas l'existence d'un préjudice en lien avec la faute alléguée pour que le prêteur puisse être privé de son droit à restitution du capital prêté. Subsidiairement, elle estime que le préjudice éventuel correspond uniquement à une perte de change de contracter ou à la perte de chance de recevoir les aides ou primes de l'état. Elle ajoute que la perte de chance est réparée du fait de l'effet rétractif à la nulité, M. [U] ayant vocation à obtenir de la société Maverick Rénovation, la restitution du prix de vente.
Les premiers juges ont retenu que si M. [U] se prévalait d'un dysfonctionnement, il n'en rapportait pas la preuve. Devant la cour, M. [U] rapporte la preuve des divers dysfonctionnements affectant le matériel installé, et du refus d'EDF du bénéfice de la prime énergie, la cour ajoutant que la sous-dimension de la pompe à chaleur, relevée par l'expert, générant une surconsommation d'électricité et une usure prématurée de la pompe, est un motif de refus de la prime énergie par EDF en raison de la non conformité de l'installation. Si la banque avait fait preuve de sérieux et de diligence dans la vérification du contrat et des documents produits pour déloquer les fonds, M. [U] ne se serait pas retrouvé dans la situation qu'il décrit dans ses écritures, avec un matériel dysfonctionnel, ayant provoqué un début d'incendie, et qui ne remplit pas sa fonction, à rembourser un crédit sur la base d'un contrat et de documents qui ne respectent pas les exigences légales et réglementaires, opération qui a pu se réaliser grâce au concours de la banque.
Il s'évince de l'ensemble de ces observations que la faute commise par la banque C.A. Consumer Finance a causé à l'emprunteur un préjudice équivalent au capital emprunté, et qui sera réparé par la privation du prêteur à sa créance de restitution.
En conséquence, la société C.A. Consumer Finance sera déboutée de sa demande de remboursement du capital emprunté. Compte tenu des développements qui précèdent, et des divers manquements commis par la banque C.A. Consumer Finance, celle-ci devra restituer à M. [U] l'ensemble des sommes versées en exécution du contrat de crédit affecté, soit les échéances payées par ce dernier, en raison de la privation de sa créance de restitution, outres les intérêts conventionnels et frais payés en exécution du prêt souscrit, dont le montant global ne peut toutefois être fixé par le présent arrêt, faute pour M. [U] d'apporter le moindre élément permettant d'établir qu'il a effectivement payé des mensualités incluant frais et intérêts bancaires.
III - Sur les demandes indemnitaires formées par M. [U] :
M. [U] sollicite la réparation des dommages par lui subis, en faisant valoir qu'indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil, dans les conditions de droit commun de la responsabilité extracontractuelle
Il soutient qu'en raison des fautes précédemment démontrées, et jugées imputables à la société Maverick Rénovation et à la Société CA Consumer Finance, il a subi :
- un préjudice de jouissance en raison du non- fonctionnement immédiat et prolongé de l'installation qui l'a privé du confort élémentaire que l'on est en doit d'attendre d'un sytème de chauffage, en particulier durant les périodes hivernales,en soulignant que cette situation dure depuis l'hiver 2020, le contraignant à vivre dans un logement dont la température intérieure n'excède pas 19°C;
- un préjudice moral en raison de la situation qu'il endure depuis l'hiver 2020, marquée par l'absence de chauffage fonctionnel de son logement en raison du non-fonctionnement de la pompe à chaleur, ce qui l'a fortement impacté, notamment au cours d'hivers particulièrement rigoureux. Il ajoute avoir éprouvé un sentiment d'abandon, renforcé par l'absence de réponse de la société Maverick Rénovation, malgré les relances et la gravité des désordres, ce qui a généré chez lui un stress important, accentuant sa vulnérabilité face à une situation qu'il ne pouvait pas gérer seul.
La société CA. Consumer Finance réplique en opposant l'irrecevabilité des demandes indemnitaires formulées par M. [U]. Elle fait d'abord valoir que M. [U] forme pour la première fois dans les conclusions n°2 qu'il a notifiées le 5 août 2025, des demandes aux fins d'indemnisation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral. Elle estime que ces demandes qui sont nouvelles en cause d'appel, ne résultent pas d'un fait nouveau puisque M. [U] indique lui même dans ses conclusions que 'les désordres affectant le fonctionnement de la pompe à chaleur sont apparus dès sa mise en service' et 'cette situation perdure depuis l'hiver 2020".
Elle ajoute au visa de l'article 915-2 du code de procédure civile, que ces demandes indemnitaires n'étant pas formulées dans les conclusions notifiées par son adversaire dans les trois mois de sa déclaration d'appel, elles sont également irrecevables.
Enfin, elle souligne que 'nul n'est responsable que de son propre fait' et que toute action en responsabilité suppose de rapporter la preuve d'un préjudice certain en lien de causalité directe avec les fautes invoquées. Elle explique qu'elle n'est pas technicienne, qu'elle n'est pas intervenue surl'installation de la pompe à chaleur, et qu'elle n'est donc pas responsable de ses dysfonctionnements dont elle n'a par ailleurs jamais été informée avant l'introduction de l'instance. Elle soutient qu'elle n'a pas manqué à son devoir de contrôler la régularité du bon de commande, et qu'en sa qualité de prêteur, elle n'est pas tenue de contrôler la conformité des travaux avant de débloquer les fonds.
Sur la recevabilité des demandes indemnitaires formulées par M. [U] à l'encontre de la société Maverick Rénovation et de la société C.A. Consumer Finance
- Au titre des demandes nouvelles
L'article 564 du Code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. L'article 565 du même code ajoute que les demandes ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, devant le premier juge, M. [U] n'avait formé aucune demande indemnitaire, ses demandes portant uniquement sur l'annulation du contrat principal et du crédit affecté, le remboursement des échéances payés, et la non-restitution du capital emprunté. Pour autant, les demandes indemnitaires pour préjudice de jouissance et préjudice moral formulées par M. [U] devant la cour ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent à la même finalité et doivent s'analyser comme le complément de la réparation du dommage par lui subi au regard des manquements qu'il reproche à la société Maverick Rénovation et à la société C.A. Consumer Finance.
Elles seront en conséquence déclarées recevables à ce titre.
- Au titre de l'absence de mention dans les premières conclusions d'appel
L'article 915-2 du code de procédure civile invoqué par la banque prévoit qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter dès les conclusions mentionnées aux articles 906-2 et 908 à 911, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. Or, cet article est issu du décret n°2023-1391 du 29 décembre 2023, entrée en vigueur au 1er septembre 2024 et donc applicable uniquement aux déclarations d'appel déposées à compter de cette date.
En l'espèce, la déclaration d'appel a été faite le 29 mai 2024. L'article 915-2 précité n'est donc pas applicable. Seule est applicable sa version antérieure codifiée à l'article 910-4 dans sa version en vigueur au présent litige, et qui dispose que 'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.
En l'espèce, les premières conclusions d'appel de M. [U] ont été déposées le 28 août 2024, soit dans le délai de trois mois de la déclaration d'appel requis par les textes précités. Néanmoins, ces premières conclusions d'appel ne comportent aucune prétention relative à la réparation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral. De telles demandes ne sont formulées que pour la première fois dans les dernières conclusions d'appel de M. [U] déposées le 5 aout 2025.
Il s'évince de ces observations, et en application des textes précitées, que les demandes de M. [U] en réparation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral, bien que n'étant pas nouvelles, ne sont pas recevables. Ce qui n'avait jamais été prétendu avant, se heurte à la règle de la concentration des prétentions édictée à l'article 910-4 du code de procédure civile alors applicable, une telle prétention n'étant en rien destinée à répliquer aux conclusions de la banque. Ces prétentions ne font par ailleurs pas partie du jugement déféré à la cour, puisqu'aucune demande en ce sens n'avait été formée devant les premiers juge par M. [U].
Il s'ensuit que seront déclarées irrecevables les demandes de M. [U] en réparation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral.
IV ' Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :
M. [U] sollicite la condamnation de la société Maverick Rénovation à lui payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société CA Consumer Finance réclame la condamnation de M. [U] à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [U] ayant prospéré en son recours, la société Maverick Rénovation sera condamnée à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour des considérations tirées de l'équité, la société CA Consumer Finance sera déboutée de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance comme en cause d'appel.
Il serait par contre inéquitable de laisser M. [U] supporter la totalité des frais irrépétibles qu'il a dû exposer en première instance et en cause d'appel pour assurer la défense de ses intérêts, de sorte que la société Maverick Rénovation sera condamnée à lui verser une indemnité de 2000 euros pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour d'appel, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut et susceptible d'opposition, rendue par mise à disposition au greffe et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 mars 2024 par le tribunal judiciaire de Limoges ;
Statuant à nouveau,
Annule le contrat conclu le 12 mars 2020 entre M. [E] [U] et la société Maverick Rénovation;
Condamne la société Maverick Rénovation à reprendre à ses frais le matériel qu'elle a fourni ;
Annule le contrat de crédit affecté conclu le 12 mars 2020 entre M. [E] [U] et la société C.A. Consumer Finance ;
Déboute la société CA Consumer Finance de sa demande aux fins de condamnation de M. [E] [U] à lui rembourser la somme de 19 500 euros ;
Condamne la société CA Consumer Finance à restituer à M. [E] [U] les échéances du prêt par lui remboursées en exécution du contrat de crédit affecté conclu le 12 mars 2020, ainsi que les frais et intérêts y afférents ;
Y ajoutant,
Déclare irrécevables les demandes indemnitaires formulées par M. [E] [U] aux fins de réparation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice moral ;
Condamne la société Maverick Rénovation à verser à M. [E] [U] la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société Maverick Rénovation à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.