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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 30 octobre 2025, n° 24/13817

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Syndicat des copropriétaires

Défendeur :

SCI Le Zoute (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pacaud

Conseillers :

Mme Neto, Mme Reparaz

Avocats :

Me Chardon, Me Ermeneux, Me Essner, Me Darras, Me Manent

TJ Localité 32, du 22 oct. 2024, n° 24/0…

22 octobre 2024

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 29 décembre 1925 dressé par Maître [I], notaire à [Localité 24], un cahier des conditions de charges du lotissement dénommé '[Adresse 39]' a été établi, et déposé au rang des minutes avant d'être transcrit au bureau des hypothèques de [Localité 32] le 18 janvier 1926.

Ledit lotissement est composé des propriétés ou copropriétés suivantes :

- la CI [Adresse 58], section CN numéro [Cadastre 7],

- la CI [Adresse 57], section CN numéro [Cadastre 2],

- la CI [Adresse 56], section CN numéro [Cadastre 13],

- la CI [Adresse 59], section CN numéro [Cadastre 14],

- la CI [Adresse 60], section CN numéro [Cadastre 3],

- la propriété [N] [Adresse 54], section CN numéro [Cadastre 10],

- la CI [Localité 30], section CN numéro [Cadastre 6].

Un chemin dénommé « [Adresse 19] » a été créé au sein du

lotissement afin de desservir les propriétés et copropriétés susvisées.

Aux termes de l'article 6 du cahier des charges susmentionné, le lotissement [Adresse 39] devait initialement être constitué sous la forme d'une association syndicale libre (ASL). Celle-ci n'a jamais été crée.

Une 'convention d'utilisation d'une servitude de passage' a été régularisée entre les propriétaires et copropriétaires du lotissement à l'exception de la CI [Adresse 60] et de la CI Fleurs de Lys qui, quoique figurant en en-tête de l'acte, ne l'ont pas signé. Définissant les limites de l'[Adresse 19], elle rappelle en son article premier l'existence d'un cahier des charges du lotissement [Adresse 38] et a pour objet la gestion, l'entretien des biens et aménagements communs à tous les propriétaires du groupe d'habitation dudit parc. Elle est gérée par un administrateur, le cabinet JMD Interservices qui organise des assemblées générales.

Par assemblée générale en date du 4 décembre 2018, les signataires de la convention ont, à la majorité, voté une résolution n° 13 prévoyant l'installation ou rénovation du portail d'entrée au lotissement.

Suite à la réalisation des travaux, le 23 juillet 2021, le Syndicat des copropriétaires (SDC) [Adresse 60] a, le 26 août suivant, fait délivrer aux signataires de la convention sommation de rétablir le libre passage.

La situation n'ayant pas évolué, le SDC Villa Patrizia a, par actes de commissaire de justice en date des 28 février et 5 mars 2024, fait assigner le [Adresse 48], le SDC Villa [Adresse 34] Margeride, la société civile immobilière (SCI) Le Zoute, Mme [U] [N], le [Adresse 47] et la '[Adresse 27]' devant le président du tribunal judiciaire de Grasse aux fins, au principal, de les entendre condamner, sous astreinte, à remettre en l'état d'origine l'accès à leur copropriété par [Adresse 33][Adresse 18] en procédant à la suppression du portail installé d'autorité par les membres de la 'convention [Adresse 21]' et à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire en date du 22 octobre 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Grasse a :

- condamné le Syndicat des copropriétaires Villa [Adresse 31], le 'syndicat des copropriétaires [Adresse 63]', le syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à supprimer le portail installé sur l'[Adresse 18] et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la son ordonnance et ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois ;

- prononcé la nullité de l'assignation à l'égard de la Convention [Adresse 18] ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le Syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Mme [N] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a notamment considéré :

- sur la nullité de l'assignation, que le défaut de capacité à ester en justice constitue une irrégularité de fond, sanctionnée par une nullité et non par une irrecevabillité ;

- l'installation d'un portail sans possibilité d'ouverture pour le bénéficiaire d'un droit de passage s'analysait comme un trouble manifestement illicite.

Selon déclaration reçue au greffe le 15 novembre 2024, le [Adresse 47] a interjeté appel de cette décision, l'appel visant à la critiquer en ce qu'elle a :

- condamné le Syndicat des copropriétaires Villa Fleur [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à supprimer le portail installé sur l'[Adresse 18] et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de son ordonnance et sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 50] [Adresse 29] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration reçue au greffe le 15 novembre 2024, le [Adresse 48], le SDC Villa [Adresse 35], la SCI Le Zoute et Mme [U] [N] ont interjeté appel de cette décision, l'appel visant à la critiquer en ce qu'elle a :

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à supprimer le portail installé sur l'[Adresse 18] et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de son ordonnance et sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Par ordonnance en date du 6 décembre 2024, les procédures enregistrées au répertoire général sous les n° 24/13817 et 24/14348 ont été jointes, l'instruction de l'affaire se poursuivant sous la référence la plus ancienne.

Par dernières conclusions transmises le 6 décembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le [Adresse 47] sollicite de la cour qu'elle réforme l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, déboute le SDC Villa Patrizia de l'intégralité de ses demandes et le condamne à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions transmises le 4 février 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le [Adresse 48], le SDC Villa la Margeride, la SCI Le Zoute et Mme [U] [N] sollicitent de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau qu'elle :

- à titre principal, déclare le tribunal judiciaire de Grasse incompétent pour statuer en référé sur les demandes formulées par le [Adresse 49] et renvoie ce dernier à mieux se pourvoir ;

- à titre subsidiaire, juge irrecevables toutes les demandes formées par le SDC Villa Patrizia ;

- à titre infiniment subsidiaire, déboute le [Adresse 49] de l'ensemble de ses demandes ;

- en tout état de cause, condamne le SDC Villa Patrizia aux dépens et à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions transmises le 7 mars 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le [Adresse 49] sollicite de la cour qu'elle confirme l'ordonnance entreprise et condamne in solidum les membres de la '[Adresse 27]', à savoir le SDC Villa Parc Saint Jean, le [Adresse 47], le SDC Villa la Margeride, la SCI Le Zoute et Mme [U] [N] aux dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 9 septembre 2025.

Par soit-transmis en date du 3 octobre 2025, la cour a informé les avocats de la cause qu'elle envisageait de procéder à la rectification de l'erreur matérielle entanchant l'ordonnance entreprise, le premier juge ayant condamné le « Syndicat des copropriétaires Ville Le Zoute » (non partie à l'audience) aux lieu et place de la SCI Le Zoute, régulièrement assignée. Elle leur a laissé un délai expirant le jeudi 9 octobre 2025, à minuit, pour lui faire parvenir leur éventuelles observations sur ce point par le truchement d'une note en délibéré.

Par note en délibéré transmise le 8 octobre 2025, le conseil du Syndicat des copropriétaires [Adresse 60] a informé la cour qu'il ne voyait pas d'objection à ce que cette erreur matérielle soit corrigée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de préciser, à titre liminaire, que les débats relatifs aux conditions de mise en oeuvre des dispositions relatives aux articles 145, 834 et 835 du code de procédure civile, concernent les pouvoirs du juge des référés et non sa compétence, en sorte que le moyen soulevé de ce chef ne s'analyse pas comme une exception d'incompétence au profit de la juridiction du fond mais comme une contestation, sur le 'fond du référé', du bien fondé des mesures sollicitées.

Il n'y a donc lieu, comme sollicité par la SCI [Adresse 59], le SDC Villa la Margeride, la SCI le Zoute et Mme [U] [N], de déclarer le tribunal judiciaire de Grasse incompétent pour statuer en référé sur les demandes formulées par le [Adresse 49] et de renvoyer ce dernier à mieux se pourvoir.

Sur la rectification de l'erreur matérielle entachant l'ordonnance entreprise

Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement (ou un arrêt), même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.

En l'espèce, il n'est pas contesté que, dans la partie motivation et le dispositif de son ordonnance, le premier juge a cité et condamné le 'Syndicat des copropriétaires Ville Le Zoute' au lieu et place de la SCI Le Zoute, régulièrement assignée.

Cette décision sera dès lors rectifiée dans les termes du dispositif du présent arrêt.

Sur l'ampleur de la dévolution

Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

Par application des dispositions de l'article 562 alinéa 1 du même code, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Aux termes de l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel, qui peut comporter une annexe, est faite par un acte contenant, à peine de nullité ... (7°) les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est, sans préjudice du premier alinéa de l'article 915-2, limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement.

L'article 915-2 du code de procédure civile dispose :

L'appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l'article 906-2 et à l'article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel. La cour est saisie des chefs du dispositif du jugement ainsi déterminés et de ceux qui en dépendent.

A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 906-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'article 914-3, demeurent recevables, dans les limites des chefs du dispositif du jugement critiqués et de ceux qui en dépendent, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Enfin, l'article 954 alinéa 2 dispose que les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif dans lequel l'appelant indique s'il demande l'annulation ou l'infirmation du jugement et énonce, s'il conclut à l'infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués et dans lequel l'ensemble des parties récapitule leurs prétentions. Son alinéa 3 précise que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Par application des dispositions de ces textes, l'appelant, qui poursuit la réformation de l'ordonnance dont appel, doit, dans sa déclaration d'appel, mentionner expressément les chefs critiqués de l'ordonnance entreprise qu'il peut compléter ou retrancher dans le dispositif de ses premières conclusions. Il doit les reprendre dans le dispositif de ses dernières conclusions puis mentionner, d'une part, qu'il en demande l'infirmation ou la réformation et, d'autre part, demander à la cour de 'statuer à nouveau' sur les prétentions qu'il entend voir accueillies ou réévaluées, prétentions qu'il doit expressément énoncer. A défaut, il est réputé les avoir abandonnées et ce, même si, dans sa déclaration d'appel et, la première partie du dispositif de ses conclusions, il a critiqué la décision déférée en ce qu'elle les a rejetées (les siennes) ou y a fait droit (s'agissant de celles de la partie adverse).

Dans leur déclaration d'appel en date du 28 novembre 2024, le [Adresse 48], le SDC Villa la Margeride, la SCI Le Zoute et Mme [U] [N] critiquent l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 63], le Syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à supprimer le portail installé sur l'[Adresse 18] et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de son ordonnance et ce, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 56], le Syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné le Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys, le syndicat des copropriétaires [Adresse 56], le syndicat des copropriétaires [Adresse 57] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ils en font de même dans leurs premières et dernières conclusions du 4 février 2025 et n'ont donc pas dévolu à la cour la disposition de l'ordonnance entreprise par laquelle le premier juge a prononcé la nullité de l'assignation à l'égard de la seule '[Adresse 27]', et, ce faisant, expressément refusé de prononcer, comme ils le lui demandaient, l'irrecevabilité de toutes les demandes formulées par le [Adresse 46] [Adresse 41].

S'agissant du SDC Villa [Localité 30], il ne formule aucune prétention en ce sens et n'a pas davantage critiqué, dans sa déclaration d'appel ou ses premières conclusions, la disposition de l'ordonnance entreprise par laquelle le premier juge a prononcé la nullité de l'assignation à l'égard de la seule '[Adresse 27]'.

Celle-ci n'a donc pas été dévolue à la cour qui n'est donc pas saisie, malgré la prétention formulée de ce chef, de 'l'irrecevabilité' soulevée en première instance par le [Adresse 48], le SDC Villa la Margeride, la SCI Le Zoute et Mme [U] [N] et expressément rejetée.

Elle statuera donc dans les limites de l'appel.

Sur le trouble manifestement illicite

Aux termes de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite visé par ce texte désigne toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. Pour en apprécier la réalité, la cour d'appel, statuant en référé, doit se placer au jour où le premier juge a rendu sa décision et non au jour où elle statue. Enfin, le juge des référés apprécie souverainement le choix de la mesure propre à faire cesser le trouble qu'il constate (Civ 2, 15 novembre 2007, n ° 07-12.304).

Aux termes de l'article 701 du Code civil, le propriétaire du fonds débiteur de la

servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage, ou à le rendre plus incommode. Ainsi, il ne peut changer l'état des lieux, ni transporter l'exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée. De tels comportements seraient constitutifs d'un trouble manifestement illicite au sens de l'article 835 alinéa 1, précité, du code de procédure civile.

Outre la violation d'un règle de droit énoncée, le trouble manifestement illicite peut également résulter d'une voie de fait, entendue comme un comportement s'écartant si ouvertement des règles légales et usages communs, qu'il justifie, de la part de celui qui en est victime, le recours immédiat à une procèdure d'urgence afin de le faire cesser. Il en est ainsi en cas d'entrave subite et non autorisée par décision de justice, à un passage ancien, usité habituellement et paisiblement et ce, même si aucune servitude n'a été établie au profit de celui qui l'emprunte.

L'article 7 de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 dispose :

Les associations syndicales libres se forment par consentement unanime des propriétaires intéressés, constaté par écrit. Les statuts de l'association définissent son nom, son objet, son siège et ses règles de fonctionnement. Ils comportent la liste des immeubles compris dans son périmètre et précisent ses modalités de financement et le mode de recouvrement des cotisations.

En l'espèce, le cahier des charges du lotissement '[Adresse 39]', rédigé le 13 novembre 1925 et retranscrit au bureau des hypothèques de [Localité 32] le 18 janvier 1926 stipule, en son § II intitulé '[Localité 44] et chemins' :

Article 3. - le vendeur exécutera pour donner accès aux lots de terrain, un chemin de six mètres avec zone non aedificant de quatre mètres portant à dix mètres l'accès libre au devant des propriété futures : la partie comprise entre le propriétés de Lady [Y], société civile des Terrains de [Localité 45], et [Z], sera réduite à cinq mètres non aedificandi obligatoire de deux mètres cinquante. Il sera établi sous ces chemins des canalisations d'eau, de gaz et de tout à l'égoût, rejoignant les canalisations existantes de la [Adresse 43].

Article 4 - Ces voies de communications établies aux frais du vendeur, seront la propriété des propriétaires riverains, chacun jusqu'à l'axe de la voie. Tous acquéreurs ainsi que le vendeur et tous ayants droit auront libre droit de passage et de circulation sur ces voies de communication dès leur ouverture à la circulation ...

Article 6 - Pour l'entretien de la voie, de l'égoût et tous travaux d'assainissement, ou autres que l'administration jugera ultérieurement nécessaire, en application des lois et règlements, les propriétaires riverains des voies auront l'obligation de se constituer en association syndicale libre dans les conditions spécifiées par les lois du vingt et un juin mil huit cent soixante cinq vingt, deux décembre mil huit cent quatre vingt huit, vingt deux juillet mil neuf cent vingt deux et le règlement d'administration publique du dix Mars mil huit cent quatre vingt quatorze.

Il est acquis que l'association syndicale libre, visée par le dernier des articles précités, n'a jamais été consituée. Il a néanmoins été décidé, à l'unanimité des votants, lors d'une 'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble Conv. [Adresse 20] (sic !) du 4 décembre 2018, à laquelle participait la '[Adresse 26]' mais pas la CI Villa Patrizia, ni Mme [N], de la création d'une convention d'utilisation du passage de l'[Adresse 22] ... selon la répartition établie par le géomètre Cabinet [F] en date du 26 juin 2018. Ladite convention était signée, à une date indéterminée (puisque non mentionnée dans l'acte), par la Copropriété [Adresse 37], La Copropriété [Adresse 56], la Copropriété [Adresse 62] et la '[Adresse 42] [N]'.

Il résulte d'un mail en date du 31 mai 2017, envoyé par Mme [M] [D] à 'interservicesjmd' qu'à cette date, les copropriétaires de la [Adresse 60] estimaient qu'il disposaient depuis toujours d'un droit de passage gratuit consacré dans le cahier des charges du lotissement de 1925 et qu'ils (n'entendaient) pas (le) voir remis en cause, raison pour laquelle ils ne voulaient pas signer la convention qui (avait) pour effet, en réalité, de créer une sorte d'ASL.

Cette copropriété semble être ensuite revenue sur sa position puisque, dans une lettre datée du 21 mars 2022 adressée au même destinataire, M. [P] [J] écrivait : Je vous confirme, comme je vous l'avais déjà écrit dans mon courrier en date du 3 septembre 2021, que le Conseil syndical de la [Adresse 60] est d'accord, sur le principe, à l'adhésion à la convention d'utilisation d'une servitude de passage [Adresse 19] sous réserve d'un accord ratifié lors de leur assemblée générale annuelle. Il ajoutait deux conditions, l'une tenant au fait que la [Adresse 60] dispose d'un accès piéton secondaire et d'un accès véhicule secondaire, l'autre à une révison du projet de répartition des charges établi par le Cabinet [F] en 2018. De toute évidence, aucun accord n'a été trouvé puisqu'aucune des pièces versées aux débats ne traduit une quelconque suite donnée à cette propostion.

Il résulte, avec l'évidence requise en référé, de l'ensemble de ces documents que la copropriété [Adresse 60], dont nul ne conteste qu'elle se situe dans le lotissement du [Adresse 40], bénéficie d'un droit de passage ancien, en forme de servitude, sur l'[Adresse 23], droit que les signataires de la 'convention d'utilisation' ne sauraient entraver ou réduire, ladite convention ne pouvant suppléer l'absence de constitution d'une ASL.

Dans ces conditions, c'est par des motifs pertinents que le premier juge a considéré qu'en entravant l'entrée de ce passage par la remise en service ou l'installation d'un portail d'accès, sans offrir d'en remettre les clés ou badges en permettant l'ouverture au Syndicat des copropriétaire [Adresse 60], les signataires de la convention précitée avaient commis un trouble manifestement illicite.

S'agissant de la mesure propre à le faire cesser, il convient de relever que, dans un courrier en date du 19 août 2013, le Cabinet [L] écrivait à C.G.C.I : En notre qualité de syndic de la copropriété susvisée ([Adresse 60]) nous vous informons que l'assemblée générale qui s'est tenue le 9 courant a pris la décision de ne pas s'opposer à la fermeture de l'[Adresse 18]. Par contre, elle refuse de participer financièrement à cette installation et à son entretien ; elle accepte le principe de la fermeture sous réserve de conserver l'accès à l'arrière de la copropriété et accepte de prendre à sa charge les moyens d'ouverture de l'installation (clef et/ou Bip dudit accès).

Dès lors, compte tenu de cet accord passé et des impératifs de sécurité, au demeurant non discutés, avancés par les intimés pour justifier de la fermeture du lotissement, il convient de remplacer l'injonction qui leur a été faite de 'supprimer le portail installé' par l'obligation de remettre un jeu de clé et un badge (bip) ou télécommande d'ouverture dudit portail au syndic en exercice de la copropriété [Adresse 60] et de lui communiquer les coordonnées et adresses du magasin auprès duquel il pourra en acquérir d'autres.

L'ordonnance entreprise sera dès lors infirmée de ce chef.

En revanche, la SCI [Localité 30] ne sera pas associée à la condamnation précitée de remise des clés, badge (bip ou télécommande) et informations dans la mesure où, même s'il s'induit du plan Napoléonien joints au cahier des charges du lotissement de 1925 et du plan cadastrel annexé à la 'convention d'utilisation', que sa parcelle n° [Cadastre 6] fait partie du lotissement du [Adresse 40], elle n'est pas signataire de ladite convention et ne peut être considérée comme ayant été associée à la décision de fermer ou installer ce portail.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

- rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par Mme [N], la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] ;

- condamné la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au Syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Du fait de la dissociation du Syndicat des copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys de la condamnation principale, elle sera en revanche infirmée en ce qu'elle l'a associée solidairement à la condamnation aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] et Mme [U] [N], qui succombent au litige, seront déboutés de leur demande formulée sur le fondement de ce texte. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge du Syndicat des copropriétaires [Adresse 60] et du Syndicat des copropriétaire [Adresse 52] les frais non compris dans les dépens, qu'ils ont exposés pour leur défense. Il leur sera donc alloué, à chacun, une somme de 1 500 euros en cause d'appel ;

La SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] et Mme [U] [N] supporteront en outre les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Rectifie l'ordonnance entreprise, rendue le 22 octobre 2024 par le juge des référés de Grasse (décision n° 2024/547), en ce que chaque fois qu'y est mentionné 'Syndicat des copropriétaires Ville [Adresse 36] Zoute' il faudra lire 'SCI Le Zoute' ;

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par Mme [N], la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] ;

- condamné la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens ;

- condamné la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], in solidum, à payer au Syndicat des copropriétaires [Adresse 60] la somme de l 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Condamne in solidum la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], Mme [U] [N] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59], à remettre un jeu de clé et/ou bip (ou badge ou télécommande) d'ouverture dudit portail au Syndicat de la copropriété [Adresse 60], ou à son syndic en excercice, et à lui communiquer les coordonnées et adresses du magasin auprès duquel il pourra en acquérir d'autres et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt, ladite astreinte courant sur une période de 10 mois ;

Dit n'y avoir lieu d'associer le Syndicat des copropriétaires [Adresse 52] aux condamnations in solidum, relatives aux dépens et frais irrépétibles, prononcées en première instance ;

Condamne in solidum la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], Mme [U] [N] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à verser au Syndicat de copropriétaires [Adresse 60] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], Mme [U] [N] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] à verser au Syndicat de copropriétaires [Adresse 51] [Adresse 28] Lys la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SCI Le Zoute, le Syndicat des copropriétaires [Adresse 53], Mme [U] [N] et le Syndicat des copropriétaires [Adresse 59] aux dépens d'appel.

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