Cass. 1re civ., 18 février 1997, n° 95-10.539
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Lemontey,
Rapporteur :
Delaroche,
Avocat général :
Sainte-Rose
Attendu que, le 20 février 1989, M. Y... s'est porté caution solidaire de la société Occitane 2000 au profit de la Banque européenne du Sud-Ouest (BESO) à raison de toutes sommes qui pourront être dues par le bénéficiaire, pour quelque cause que ce soit, à concurrence de 400 000 francs en principal, plus les intérêts, frais, commissions et accessoires; qu'à la suite de la décision prononçant, le 12 décembre 1989, le redressement judiciaire de la société Occitane 2000, la BESO a produit pour une somme composée du solde débiteur du compte courant et d'effets impayés; qu'elle a assigné M. Y..., en sa qualité de caution, au paiement des sommes dues; que l'arrêt attaqué a condamné celui-ci à payer à la Banque Finindus, venant aux droits de la BESO, la somme de 278 000 francs avec intérêts de droit au taux légal depuis le 12 décembre 1989 jusqu'au règlement;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir ainsi condamné, alors, selon le moyen, que la caution, même solidaire, a la faculté d'opposer au créancier toutes les exceptions appartenant au débiteur principal; que la cour d'appel, qui a refusé de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis de faute dans le fonctionnement du compte courant, a violé l'article 2036 du Code civil;
Mais attendu qu'analysant l'engagement de M. Y... à la date à laquelle il avait été souscrit, la cour d'appel a retenu que le bilan de la société cautionnée dégageait un bénéfice fiscal de 92 281 francs et que, dans les stipulations contractuelles, M. Y... avait déclaré connaître la situation financière de ladite société dont il lui appartiendrait de suivre l'évolution indépendamment des informations que la banque devait lui communiquer conformément à la loi; qu'elle a ajouté que M. Y... ne pouvait invoquer la violation de la convention de compte courant, à laquelle il n'avait pas été partie, prévoyant notamment l'encaissement d'effets de commerce ;
qu'en en déduisant qu'aucune faute contractuelle ne pouvait être imputée à la banque, elle a ainsi procédé à la recherche prétendument omise;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994, ensemble l'article 2013 du Code civil;
Attendu que le premier de ces textes, qui n'opère aucune distinction pour l'arrêt du cours des intérêts légaux et conventionnels, profite à la caution dont l'obligation, aux termes du second, ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur principal;
Attendu que, pour condamner M. Y... au paiement de la somme principale assortie des intérêts de droit au taux légal à compter du 12 décembre 1989, date de la décision prononçant le redressement judiciaire, l'arrêt énonce que l'arrêt du cours des intérêts est une exception personnelle au débiteur dont la caution ne peut se prévaloir, malgré les termes de l'article 2036 du Code civil;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Y... au paiement des intérêts à compter du prononcé du redressement judiciaire, l'arrêt rendu le 26 octobre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.