Livv
Décisions

Cass. com., 8 novembre 2011, n° 10-25.131

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Favre

Cass. com. n° 10-25.131

7 novembre 2011

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte notarié du 31 juillet 1996, M. et Mme X... (les cautions) se sont rendus caution solidaire envers la Banque populaire du Haut-Rhin, aux droits de laquelle vient la Banque populaire d'Alsace (la banque), d'une ouverture de crédit d'un montant de 400 000 francs consenti à la Sarl MSK (la société), avec affectation hypothécaire d'un bien immobilier leur appartenant ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire le 23 mai 2007, la banque a, le 1er février 2008, délivré aux cautions un commandement aux fins de vente forcée de leur bien et, par requête du 19 mars 2008, les a assignées en adjudication forcée de l'immeuble et attribution de la somme de 60 979, 60 euros en exécution de leur engagement ; que le 28 mars 2008, l'adjudication forcée de l'immeuble ayant été ordonnée, les cautions ont formé un pourvoi immédiat de droit local contre l'ordonnance ; que le tribunal a maintenu sa décision et transmis le dossier de l'affaire à la cour d'appel ;

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Et sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que les cautions font grief à l'arrêt d'avoir ordonné l'adjudication forcée des immeubles inscrits sous feuillet 893 du livre foncier de..., au nom de M. et Mme X..., cadastrés sect. 11 n° 178/..., 10a pré, 4a91 ca sol, maison et bâtiment accessoire pour avoir paiement de la somme en principal de 60 979, 60 euros, outre intérêts conventionnels, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des conventions des parties ; qu'en décidant que les cautions s'étaient engagées, chacune pour 200 000 francs (30 489 euros), soit ensemble pour 400 000 francs (60 979 euros), aux termes de l'acte authentique d'ouverture de crédit du 31 juillet 1996, tandis qu'il résultait clairement de cet acte unique que le montant de 200 000 francs constituait la limite de leur engagement commun, dès lors que celles-ci étaient désignées ensemble comme « la caution », « laquelle » s'était engagée « seulement jusqu'à concurrence de la somme de 200 000 francs », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce cautionnement, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

2°/ que l'étendue du cautionnement doit être déterminée au regard de la commune intention des parties sans égard pour l'interprétation qui en a été faite par un tiers ; qu'en l'espèce la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'il résultait de l'acte authentique d'ouverture de crédit du 31 juillet 1996 et de l'acte de réalisation dressé par le notaire le 11 septembre 2007 que les cautions s'étaient chacune engagées solidairement et cumulativement envers l'emprunteur à hauteur de 200 000 francs (30 489 euros) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, en l'absence de stipulation expresse dans cet acte, la circonstance que les cautions s'étaient engagées simultanément dans un même acte et pour le même montant limité à une fraction de la dette garantie, révélait, en l'absence d'autres éléments, que dans la commune intention des parties elles garantissaient la même fraction de la dette au titre d'un engagement unique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil ;

Mais attendu, que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation du sens et de la portée de l'engagement des cautions, que l'ambiguïté de ses termes désignant ensemble les cautions par la dénomination " la caution " rendait nécessaire, que la cour d'appel, après avoir relevé que l'ouverture de crédit du 31 juillet 1996 servant de fondement aux poursuites mentionne que la caution « déclare se porter irrévocablement caution personnelle, solidaire, indivisible et hypothécaire de l'emprunteur vis-à-vis de la banque, mais seulement jusqu'à concurrence de 200 000 francs et qu'en conséquence, chacune s'oblige solidairement envers l'emprunteur au remboursement de la somme principale à hauteur de 200 000 francs, montant de ladite obligation ", a estimé, sans être tenue de procéder à la recherche visée à la deuxième branche qui ne lui était pas demandée, que le montant principal dû par chaque caution était de 30 489 euros, soit ensemble 60 979 euros ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le moyen pris en sa troisième branche :

Vu les articles L. 313-2 du code de la consommation et 1907 du code civil ;

Attendu qu'en cas d'ouverture de crédit en compte courant, la mention du taux effectif global doit être portée à titre indicatif dans la convention d'ouverture de compte ou de crédit ou tout autre document préalable et celle du taux effectif global appliqué doit aussi figurer sur les relevés périodiques du compte ;

Attendu que pour confirmer la décision entreprise et écarter la contestation selon laquelle le taux effectif global n'est pas mentionné dans l'acte, l'arrêt retient que les mentions de l'acte d'ouverture de crédit permettent de déterminer le taux effectif global dès lors qu'elles précisent que les intérêts dus seront fixés au taux usuel pratiqué par la banque pour les débits en compte courant et, que les dispositions de la loi du 28 décembre 1966 sur l'usure ont été rappelées dans l'acte ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que ces mentions ne donnaient aucun taux chiffré, ni aucun des éléments de calcul de ce taux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée ;

Condamne la Banque populaire d'Alsace aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille onze.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site